Ossification secondaire
C’est le remplacement d’un os existant par un nouveau tissu osseux après destruction par les ostéoclastes. Ce mécanisme est indispensable pour compenser le vieillissement des ostéocytes dans leur lacune.
EPIDEMIOLOGIE
Incidence
L’ostéosarcome est la tumeur osseuse maligne primitive la plus fréquente chez l’enfant. Son incidence annuelle approximative en France est 3,65/million dans la population générale, soit 150 à 200 nouveaux cas par an, 400 aux Etats Unis [16,17]. Les données concernant l’Afrique sont très rares . Le CIRC ( Le Centre international de Recherche sur le Cancer) a publié des taux d’incidence concernant seulement deux centres : Harare en Zimbabwe (4,3/ million), pour la période entre 1980 et 1994, et la Namibie (2,7/million), de 1983 à 1992 [18].
Age
L’ostéosarcome est extrêmement rare avant l’âge de 5ans. Il s uit une distribution biphasique ; avec un premier pic d’incidence dans la période de la fin de l’adolescence et l’âge adulte jeunes , et un second pic chez les patients âgés [16,17].
L’âge médian d’apparition de l’ostéosarcome chez l’enfant est de 12,1 ans.
Répartition géographique
L’incidence est plus élevée en Afrique (Zimbabwe : 4,3 par million), suivie par les USA (3,3 par million), leJapon (2,6 par million), le Royaume Uni (2,2 par million) [19].
Le CIRC (Le Centre international de Recherche sur le Cancer) rapporte qu’en Asie du sud-est, la fréquence de l’ostéosarcome en milieu urbain est augmentée. La fréquence urbaine est de 0,22 pour 100 000 et 0,31 pour 100 000 enChine, contre respectivement 0,09 et 0,18 pour la population rurale [19].
Localisations
Sites primaires
L’ostéosarcome peut toucher tous les os. Mais manifeste une prédilection pour la métaphyse des os longs. Moins de 10 % surviennent au niveau de la diaphyse et les localisations épiphysaires sont encore plus rares.
Les os longs regroupent 80 à 90 % des cas d’ostéosarcomes. Les localisations les plus représentées sont le fémur distal (35 % des cas), le tibia proximal (18 % des cas) et enfin l’extrémité supérieure de l’humérus (10 % des cas). Plus de la moitié des cas se localise autour du genou. Ces Sites correspondent aux segments osseux les plus fertiles de l’organisme (figure 5) .
L’ostéosarcome touche rarement la partie axiale du squelette, ainsi, les localisations aux os plats sont plus rares et concernent en général l’os iliaque, la mandibule et exceptionnellement le crâne ou l’omoplate [21, 22].
Le rachis représente entre 1 et 3 % des localisations, souvent secondaires.
Il prédomine à la partie inférieure du rachis, naissant du corps vertébral et s’étend rapidement vers le canal médullaire.
Pour tous les os du squelette, même pour les sésamoïdes, des cas d’ostéosarcome ont été rapportés.
Maladie de Paget et ostéosarcome
Environ 1 % des maladies de P aget se transforment en ostéosarcome.
Facteurs de risque génétiques
Les aneuploïdies c hromosomiques sont communes au niveau des cellul es de l’ostéosarcome ce qui suggère que les instabilités chromosomiques somatiques ou germinales pourraient prédisposer un individu à développer l’ostéosarcome.
L’ostéosarcome est associé à plusieurs syndromes de prédisposition au cancer, qui sont causés par des mutations germinales très pénétrantes tel que décrit le tableau II. Ces troubles sont extrêmement rares et ne représentent pas une cause commune de l’ostéosarcome. Cependant, ils peuvent fournir des indications importantes sur l’ étiologie, parce q ue les mêmes gènes qui sont associés à ces troubles sont souvent perturbés dans les tissus d’ostéosarcomes.
Signes généraux
L’état général est longtemps conservé, toutefois, des signes généraux sont parfois rencontrés et doivent être systématiquement recherché : amaigrissement, fièvre, asthénie.
Imagerie
Radiologie conventionnelle
La première étape est toujours la radiologie conventionnelle. S’en passer,et aller directement au scanner ou à l’IRM devant des douleurs ou une masse, peut conduire à des erreurs grossières. L’association de paramètres diagnostiques non radiologiques (comme l’âge, la localisation, la taille, la partie de l’os atteinte…), et radiologiques, permet une probabilité diagnostique et guide l’attitude pratique.
L’examen repose sur des clichés orthogonaux de tout l’os douloureux, complétés au besoin par des clichés localisés améliorant la résolution spatiale et donc l’étude des petits détails, des incidences obliques pour détecter des anomalies limitées du cortex ou des calcifications des parties molles.
L’analyse de la radiographie va permettre de préciser:
L’atteintedes parties molles
– rupture corticale et masse tumorale expansive: lésion agressive;
– refoulement des plans musculaires par la tumeur;
Les caractères de l’ostéolyse (classification de Lodwick) sont d’intérêt pronostique: l’ostéolyse géographique (type I) caractérise une tumeur peu agressive, à croissance lente ; l’ostéolyse de type mité (type II) avec lacunes osseuses multiples, confluentes, généralement inférieures à 5 mm de diamètre caractérise les lésions plus agressives a limites floues ; l’ostéolyse de type perméative (type III) caractérise une tumeur très agressive avec des lacunes dans l’os spongieux et dans l’os cortical.
Le type I est en faveur d’une tumeur bénigne, les types II et III en faveur de tumeurs malignes. La combinaison des trois types d’ostéolyse au sein d’une même tumeur évoque une évolution agressive locale, une transformation maligne ou une fracture.
Tomodensitométrie (TDM)
Elle a représenté un progrès important dans l’étude des sarcomes ostéogéniques.
Actuellement, pour étudier le compartiment osseux elle n’est pas plus performante que la radiographie simple bien conduite sauf dans les localisations sur les os plats, os iliaque et omoplate ou sur le rachis.
Elle est en revanche bien supérieure pour étudier l’extension de la tumeur dans les parties molles adjacentes et dans l’os. De plus, elle permet de bien visualiser les pédicules vasculo-nerveux.
Les mêmes éléments qu’en radiologie conventionnelle seront étudiés (Fig ure 7):
– au niveau osseux: réaction périostée : micro-lacune de la corticale
– extension aux parties molles (étude améliorée par l’injection de produit de contraste)
– extension intra-médullaire : elle est appréciée par l’analyse des densités.
Le scanner reste l’examen essentiel pour la recherche des métastases pulmonaires. Les nodules sont le plus souvent de formes sphériques ou ovoïdes.
On peut retrouver en leur sein des calcifications (Figure 8).
Il est recommandé de réaliser la TDM thoracique si possible en acquisition spiralée volumique.
Dans les conditions physiologiques, le secteur médullaire à des valeurs densitométriques négatives du fait de son contenu graisseux, avec des densités habituellement comprises entre -40 et -110UH. Une densité inférieure à -50UH permet d’affirmer la composante graisseuse d’une tumeur (ex : lipome).
Les densités entre -30 et +30UH sont évocatrices de lésions liquidiennes (ex : kyste essentiel).
Entre 30 et 100UH, on évoque des lésions tissulaires fibreuses ou cartilagineuses non calcifiées.
Au dessus de 100UH, on est en présence de matrices ossifiantes ou cartilagineuses.
Scintigraphie
La scintigraphie osseuse aux diphosphonates technétiés (99mTc-MDP) fait partie du bilan standard de l’exploration de l’ostéosarcome ostéogénique.
L’examen doit rechercher les limites de la tumeur, les zones fonctionnelles, les skip métastases et l’extension à distance au niveau osseux ou des tissus mous (surtout poumon, parfois adénopathies, exceptionnellement cerveau).
La fixation osseuse du MDP étant fonction du débit sanguin local et de l’activité ostéoblastique locale, toute réaction osseuse à une agression se traduit par un foyer d’hyperfixation. Cela explique la haute sensibilité de l’examen mais aussi son manque de spécificité. Pour ces raisons, il est recommandé de réaliser tout examen scintigraphique avant la biopsie osseuse.
L’aspect scintigraphique de l’ostéosarcome au diagnostic est celui d’une lésion hypervascularisée, très hyperfixante, souvent hétérogène (nécrose) et débordant sur les tissus mous adjacents (Figure 11).
L’ensemble du membre peut présenter une hyperfixation relative par rapport au membre controlatéral en raison de phénomènes d’origine vasculaire.
Artériographie
Elle a perdu la plupart de ses indications au dépend du scanner et de l’IRM. Elle peut être utile pour définir l’extension tumorale aux parties molles, ainsi que les rapports avec les axes vasculo-nerveux, quoique souvent remplacée par l’angio-IRM (Figure 12).
Biologie
Il n’existe aucun marqueur spécifique de l’ostéosarcome. Le bilan préthérapeutique sera réalisé avant toute chimiothérapie et avant la chirurgie :
NFS – VS – CRP – bilan hépatique – ionogramme – crase sanguine –
Lacticodéshydrogénase- phosphatases alcalines osseuses.
Les enzymes lacticodéshydrogénases (LDH)
Elles sont augmentées dans un nombre important d’ostéosarcomes (30%).
La LDH donne également des informations pronostiques, une élévation extrême est associée à un mauvais résultat.
Les phosphatases alcalines (PAL)
Il existe une augmentation des PAL dans 40 à 5O % des ostéosarcomes.
Cette augmentation est liée à l’activité ostéoblastique des cellules tumorales. On note que les valeurs normales des PAL varient avec l’âge. Ceci est dû à la croissance osseuse physiologique. Des taux normaux des PAL ont été associés à une amélioration de survie sans maladie à 5 ans (67% vs 54%) et un allongement de l’intervalle de récurrence de la maladie (25 mois vs 18 mois).
L’utilité clinique de ces marqueurs reste discutable.
Bilan d’extension
Bilan local d’extension
Il repose sur l’IRM. Elle comportera des plans orthogonaux, adaptés à la région, avec antenne de surface si possible, améliorant la résolution spatiale, des séquences à pondérations variées (T1 pour analyser la moelle osseuse, T2 o u STIR pour les parties molles). L’injection de produit de contraste n’est pas systématique dans le bilan initial.
L’IRM permet de bien délimiter la tumeur:
Dans la moelle osseuse diaphysaire, permettant de choisir le niveau de la résection. Les skip métastases (séparées de la tumeur principale par du tissu normal) sont très rares. Elles atteignent le plus souvent le même os, mais parfois un autre proche.
Vers le cartilage de croissance, qui est très bien vu. Son franchissement est parfaitement analysé. L’analyse de l’extension dans l’os spongieux métaphysaire et éventuellement épiphysaire est facile, alors qu’elle est très peu performante en scanner.
L’atteinte des parties molles est facilement évaluée.
L’analyse des vaisseaux (rarement envahis, et seulement refoulés d’ordinaire) peut être aussi réalisée en IRM. Il est possible de réaliser une artériographie IRM, aussi performante qu’un examen conventionnel, sans ou avec une injection intraveineuse de produit de contraste. L’unique indication de l’artériographie conventionnelle reste l’ injection intra-artérielle dechimiothérapie.
Bilan d’extension à distance
Il repose sur le cliché de thorax et le scanner pour les métastases pulmonaires, la scintigraphie pour les plus rares métastases osseuses. Le scanner pulmonaire fait partie du bilan systématique, même si sa sensibilité et sa spécificité sont médiocres (non détection des petits nodules, très nombreux faux positifs). Le scanner reste l’examen de référence, en attendant une méthode plus performante.
Biopsie osseuse
Biopsie percutanée
La biopsie percutanée sous scanner ou sous échographie (lorsque la lésion est profonde) doit être préconisée en première intention.
Réalisée sous anesthésie locale, en collaboration avec un radiologue et u n anatomopathologiste, cette technique permet de prélever le matériel tumoral à l’aide d’un trocart, évitant ainsi les complications locorégionales rencontrées dans le cadre d’une biopsie chirurgicale.
Cette biopsie doit obéir à des recommandations :
– L’orifice de ponction doit être situé au niveau de la future cicatrice d’exérèse de façon à pouvoir être repris ultérieurement par le chirurgien lors du geste curatif.
– Le point d’entrée doit être tatoué.
– La ponction doit être réalisée avec des aiguilles co-axiales de 14 ou 16 gauges.
– Plusieurs carottes doivent être prélevées afin de s’assurer d’une quantité suffisante de matériel tumoral.
– Ne pas ponctionner dans une zone nécrotique.
Ce type de biopsie ne permet cependant pas toujours de recueillir une quantité suffisante de tissus tumoraux, ni d’évaluer le degré d’agressivité de la tumeur. C’est pourquoi, une seconde biopsie percutanée ou un recours à la biopsie chirurgicale peuvent parfois s’avérer nécessaires.
Biopsie chirurgicale
Elle doit être effectuée après les examens complémentaires radiologiques pour ne pas en perturber l’interprétation.
La règle est de faire pratiquer la biopsie dans un centre spécialisé dans les tumeurs osseuses (sinon là aussi il y a un risque important d’erreur anatomo pathologique), par le chirurgien orthopédiste qui procédera ensuite au traitement chirurgical définitif, le plus rapidement possible après la suspicion du diagnostic (dans les 8 ou 10 jours), à ciel ouvert et ne doit pas gêner l’acte chirurgical de résection.
La voie d’abord est la plus courte possible, parallèle au grand axe du membre, transmusculaire, sans aucune dissection des axes vasculo-nerveux, et surtout en gardant à l’esprit que cette voie d’abord sera réséquée en bloc lors de l’ i ntervention carcinologique.
Il ne faut pas fragiliser l’os. Le prélèvement devra être modéré (1 cm) mais suffisant pour obtenir un diagnostic histologique et apporté directement à l’histologiste pour éviter son altération avant sa fixation. Les conditions d’asepsie doivent être parfaites (un prélèvement bactériologique est réalisé de façon systématique) et l’hémostase soigneuse pour éviter un hématome. Si le drainage est nécessaire, le drain d’aspiration sera placé près de l’incision et dans son axe.
Il est habituel que la réponse anatomo-pathologique demande 8 à 15 jours.
Cette biopsie n’est pas dénuée de complications (jusqu’à 15 %) : hématome postopératoire, fracture pathologique, infection, hémorragies, contamination des tissus sains. Une biopsie réalisée dans de mauvaisesconditions peut aboutir à l’amputation alors que le traitement chirurgical retenuétait le sauvetage du membre.
Anatomie pathologique
La démarche diagnostique du pathologiste est d’abord d’affirmer la malignité de la tumeur, et ensuite de reconnaître l’ostéoformation par les cellules tumorales.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE
1. LE TISSU OSSEUX
1.1. Composition du tissu osseux
1.1.1. Matrice osseuse
1.1.2. Cellules osseuses
1.2. Organisation du tissu osseux
1.2.1. Structure de l’os
1.2.2. Classification
1.2.3. Particularités de l’os de l’enfant
1.2.4. Vascularisation et innervation
1.3. Ostéogenèse
1.3.1. Ossification primaire
1.3.2. Ossification secondaire
2. EPIDEMIOLOGIE
2.1. Incidence
2.2. Age
2.3. Sexe
2.4. Race
2.5. Répartition géographique
2.6. Localisations
2.6.1. Sites primaires
2.6.2. Métastases à distance
3. ETIOPATHOGENIE
3.1. Facteurs étiologiques
3.1.1. Expositions environnementales
3.1.2. Croissance et ostéosarcome
3.1.3. Maladie de Paget et ostéosarcome
3.1.4. Facteurs de risque génétiques
3.2. Croissance tumorale
4. DIAGNOSTIC
4.1. Diagnostic positif
4.1.1. Circonstances de découverte
4.1.2. Signes cliniques
4.1.3. Imagerie
4.1.4. Biologie
4.1.5. Bilan d’extension
4.1.6. Biopsie osseuse
4.1.7. Anatomie pathologique
4.2. Diagnostic différentiel
5. Traitement
5.1. Buts
5.2. Moyens
5.2.1. Chimiothérapie
5.2.2. Chirurgie
5.2.3. Radiothérapie
5.3. Indications
5.4. Surveillance et résultats du traitement
5.4.1. Surveillance
5.4.2. Résultats
5.5. Complications du traitement
5.5.1. Complications de la chimiothérapie
5.5.2. Complications de la chirurgie
5.6. Facteurs pronostiques
5.6.1. Grade métastatique au diagnostic
5.6.2. Réponse à la chimiothérapie et grading de huvos
5.6.3. Marge chirurgicale
5.6.4. Sites primaires
5.6.5. Taille de la tumeur au diagnostic
5.6.6. Race
5.6.7. Âge
5.6.8. Phosphatases alcalines (PAL)
5.6.9. Lacticodéshydrogénase (LDH)
1. MATERIEL ET METHODES
1.1. Cadre de l’etude
1.1.1. Description des lieux
1.1.2. Personnel
1.1.3. Activités du service
1.2. Patients
1.2.1. Critères d’inclusion
1.2.2. Critères de non inclusion
1.2.3. Population d’étude
1.3. Méthodes
1.3.1. Type d’étude
1.3.2. Source des données
1.3.3. Paramètres étudiés
2. RESULTATS
2.1. Aspects épidémiologiques
2.1.1. Incidence
2.1.2. Age et sexe
2.1.3. Répartition géographique
2.1.4. Antécédents
2.1.5. Délai de consultation
2.2. Aspects cliniques
2.2.1. Motif de consultation
2.2.2. Données de l’examen clinique
2.3. Biologie
2.4. Imagerie
2.5. Bilan d’extension et localisations secondaires
2.5.1. Bilan d’extension
2.5.2. Localisations secondaires
2.6. Données anatomo-pathologiques
2.7. Le délai diagnostique
2.8. Traitement
2.8.1. Chimiothérapie néoadjuvante
2.8.2. Chirurgie
2.8.3. Chimiothérapie adjuvante
2.9. Evolution
2.10. Résultats globaux
3. DISCUSSION
3.1. Aspects épidémiologiques
3.2. Aspects cliniques
3.3. Imagerie
3.4. Biologie
3.5. Bilan d’extension et localisations secondaires
3.6. Anatomie pathologique
3.7. Délai diagnostique
3.8. Traitement
3.9. Complications
3.10. Résultats du traitement
3.11. Mortalité
CONCLUSION
REFERENCES
ANNEXES