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MAFLD et carcinome hépatocellulaire
Incidence du carcinome hépatocellulaire sur MAFLD
Comme mentionné ci-dessus, parallèlement à une diminution d’incidence de CHC lié au VHB et au VHC liée à l’utilisation d’antiviraux efficaces, la MAFLD occupe une proportion de plus en plus importante parmi les premières causes d’hépatopathie chronique et de CHC. La prévalence de CHC sur MAFLD varie de 14,1 % à 21,5 % dans plusieurs études de population, avec une augmentation constante constatée dans plusieurs parties du monde (9 % d’augmentation annuelle aux États-Unis, augmentation de dix fois entre 2000 et 2010 en Angleterre ainsi qu’un accroissement de 3,8 % à 12,2 % entre 2001 et 2010 en Corée du Sud) [20]. Elle présente la 2ème cause de transplantation hépatique et 3ème cause de CHC aux États-Unis [1]. En France, une personne sur six souffrait de MAFLD, ce qui constitue un véritable challenge de la santé publique [21].
Caractéristiques histologiques de la MAFLD
À l’échelle histologique, la MAFLD est caractérisée par une accumulation excessive de gras dans le foie et regroupe un large spectre de lésions hépatiques (Figure 4) [22]. En effet, elles peuvent aller d’une simple stéatose réversible (Figure 4a) à une stéatohépatite définie par la présence de stéatose, d’inflammation et de ballonnement hépatocytaire d’intensité variable (Figure 4b). La stéatohépatite peut progresser vers une fibrose hépatique avancée (Figure 4c) voire une cirrhose constituée avec souvent une disparition de lésions actives rendant parfois difficile le diagnostic étiologique (« burn-out NASH » en ancien terme) (Figure 4d). La cirrhose sur MAFLD expose à un risque élevé de CHC avec une incidence annuelle d’environ 2,6 % justifiant d’un dépistage semestriel systématique [23].
Figure 4 : Caractéristiques histologiques de la MAFLD
[Brunt EM, et al. Nature disease primers 2015]
Figure 4 : Caractéristiques histologiques de la MAFLD. a) Stéatose marquée sans inflammation, sans ballonnement hépatocytaire ni fibrose. b) Stéatohépatite avec stéatose marquée (S), ballonnement (B), inflammation lobulaire et portale (I) et fibrose en pont. c) Fibrose avancée dans les espaces périsinusoïdales et fibrose en pont entre deux veines centrolobulaires. d) Cirrhose constituée avec fibrose annulaire sans lésion active.
Impact de la MAFLD et du syndrome métabolique sur les traitements curatifs du CHC
Dans la littérature, le CHC sur MAFLD présente des particularités par rapport à d’autres étiologies : patients plus âgés, sexe féminin prédominant, proportion plus importante du syndrome métabolique et de cardiopathie ischémique, plus lourdes co-morbidités, moins de cirrhose, score de Meld moins élevé, tumeur mieux différenciée [24,25,26,27].
Tous ces facteurs pourraient avoir un impact sur le choix thérapeutique, sur l’efficacité et sur la tolérance des traitements.
À ce jour, il existe peu d’études évaluant l’impact de la MAFLD sur les traitements curatifs de CHC. Les études publiées sont issues surtout de séries chirurgicales rétrospectives avec peu de données sur la radiofréquence. Dans l’étude de Yang et al [26], il n’y avait pas de différence de survie globale et de survie sans récidive après résection chirurgicale de CHC sur MALFD versus sur hépatite virale B. Selon l’étude de Wong et al [25], le CHC sur MAFLD avait une moindre survie globale après transplantation mais une meilleure survie globale après résection chirurgicale par rapport aux autres groupes (VHB, VHC et alcool). Il n’y avait pas dans cette étude de différence de survie globale entre les groupes après radiofréquence percutanée. Dans une étude multicentrique américaine (mais mixant plusieurs types de traitements curatifs), le CHC sur MAFLD avait une meilleure survie globale après traitement curatif par rapport au CHC sur VHC et/ou alcool [28]. Au total, le CHC sur MAFLD semble avoir une survie globale égale voire meilleure que les autres étiologies après un traitement curatif par résection chirurgicale ou radiofréquence percutanée. Les études étaient moins concordantes concernant la survie globale après transplantation du CHC sur MAFLD.
Concernant l’impact du syndrome métabolique et de ses éléments sur le pronostic des traitements curatifs de CHC, plusieurs études ont suggéré une augmentation de morbidité péri-procédure et parfois de mortalité après résection ou transplantation chez les patients avec syndrome métabolique [29,30]. Dans une série rétrospective de 3973 patients ayant une résection hépatique toutes indications confondues [29], le risque de complications péri-opératoires était de 40 % plus élevé chez les patients avec syndrome métabolique (défini dans cette étude comme une présence concomitante d’un IMC > 30 kg/m2, d’un diabète de type 2 et d’une hypertension artérielle). La mortalité à 30 jours était également plus importante (odds ratio à 2,7) chez ces patients en comparaison avec ceux sans syndrome métabolique. De façon intéressante, l’obésité seule n’était pas associée à une mortalité péri-opératoire dans cette étude, soulignant un rôle probablement synergique des éléments du syndrome métabolique dans la mortalité des traitements curatifs de CHC.
Bien que la morbidité et la mortalité péri-procédures sont plus importantes chez les patients avec syndrome métabolique, ces facteurs ne semblent pas associés à la survie globale et la survie sans récidive après un traitement curatif de CHC. L’étude de Cauchy et al. évaluant le résultat oncologique après une résection chirurgicale de CHC uniquement chez les patients avec syndrome métabolique sans autre cause a montré une survive globale et sans récidive à un an et à 3 ans comparables à celles d’autres étiologies rapportées dans la littérature [31]. Dans l’étude de Nair et al, un IMC supérieur à 40 kg/m2 était associé à un risque plus important de non fonction primaire du greffon et à une moindre survie à 30 jours, à un an, à deux ans et à 5 ans chez les patients transplantés toutes indications confondues [32]. Une étude monocentrique seulement est disponible montrant l’absence d’influence de l’IMC sur la survie et récidive après ablation percutanée du CHC mais cette étude est monocentrique, mixant différents types de traitements percutanés (radiofréquence, injection d’éthanol, etc…), n’étudiant pas les complications post ablations et ne prenant pas en compte les autres éléments du syndrome métabolique ainsi que le sous-groupe spécifique des CHC développés sur MAFLD [33].
Rationnel de l’étude :
Comme cité ci-dessus, le CHC sur MAFLD semble survenir plus souvent chez les patients plus âgés avec davantage de comorbidités surtout cardiovasculaires et d’obésité. Or de tels facteurs peuvent limiter l’accès à un traitement curatif de CHC par chirurgie ou transplantation. La radiofréquence percutanée, moins morbide, pourrait être un bon choix dans le traitement curatif de CHC sur MAFLD. Actuellement il n’existe pas d’études spécifiquement dédiées à l’analyse de la survie et récidive tumorale après radiofréquence percutanée chez les patients avec CHC développés sur MAFLD et à l’analyse de l’impact du syndrome métabolique sur les complications post RF chez les patients avec CHC quelque soit l’étiologie de l’hépatopathie. C’est dans ce contexte que nous avons réalisé cette étude dont l’objectif est de comparer l’efficacité et le profil de tolérance de la radiofréquence percutanée multibipolaire dans le traitement du CHC sur MAFLD en comparaison avec d’autres étiologies (alcool, VHB et VHC) et l’influence des éléments du syndrome métabolique chez ces patients.
Patients et méthodes
Patients et type d’étude :
Il s’agit d’une étude rétrospective multicentrique incluant les patients de quatre centres hospitalo-universitaires : CHU d’Angers, CHU de Bordeaux, CHU de Lyon et hôpital Jean Verdier de l’APHP. La période d’inclusion était entre janvier 2008 et décembre 2018.
Les critères d’inclusion étaient les suivants : 1) Patient de plus de 18 ans, 2) CHC prouvé histologiquement ou ayant des critères radiologiques typiques au scanner et/ou à l’IRM selon les critères EASL 2018 [11], 3) CHC répondant aux critères de Milan : nodule unique de moins de 5 cm ou jusqu’à 3 nodules de maximum de 3 cm, 4) Premier traitement par radiofréquence percutanée multibipolaire (soit intratumoral soit en technique No Touch), décidé lors d’une réunion de concertation pluridisciplinaire, 5) Naïf de tout traitement antérieur, 6) Pour lesquels les éléments du syndrome métabolique étaient disponibles.
Critère diagnostique positif de CHC
La méthode de référence pour le diagnostic positif de CHC était une analyse histologique d’un fragment tumoral obtenu par ponction dirigée sous échographie ou scanner, comparé, chaque fois que c’est possible, à un fragment de foie non tumoral.
Quand la biopsie n’était pas réalisable, le diagnostic de CHC était retenu, seulement validé en cas de cirrhose, pour les nodules de plus d’un centimètre de diamètre quand il présente des caractéristiques typiques de CHC au scanner et/ou à l’IRM avec injection de produit de contraste et acquisition en 4 phases (nodule hypervascularisé à la phase artérielle avec wash-out à la phase portale ou tardive) (recommandation EASL 2018) [11].
Données cliniques, biologiques et radiologiques
Les données démographiques classiques, antécédents médicaux, éléments du syndrome métabolique, causes de l’hépatopathie sous-jacente, score de Child Pugh, taux de plaquettes, nombre et taille de tumeur à l’imagerie, taux d’alpha-fœtoprotéine (AFP) sérique et présence d’hypertension portale endoscopique ont été recueillies. Les données étaient recueillies avant le traitement percutané du CHC.
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Table des matières
INTRODUCTION
1. Généralités sur le carcinome hépatocellulaire
2. Généralités sur la radiofréquence percutanée
3. MAFLD et carcinome hépatocellulaire
3.1. Incidence du carcinome hépatocellulaire sur MAFLD
3.2. Caractéristiques histologiques de la MAFLD
3.3. Impact de la MAFLD et du syndrome métabolique sur les traitements curatifs du CHC
4. Rationnel de l’étude
PATIENTS ET MÉTHODES
1. Patients et type d’étude
2. Critères diagnostiques positifs de CHC
3. Données cliniques, biologiques et radiologiques
4. Critères diagnostiques étiologiques
5. Modalité de la radiofréquence percutanée
6. Modalité de suivi des patients et classification des récidives
7. Méthode d’évaluation des effets indésirables
8. Analyses statistiques
RÉSULTATS
1. Description de la série générale
2. Caractéristiques des patients ayant une MAFLD pure
3. Caractéristiques des patients en fonction des étiologies et prévalence du syndrome métabolique
4. Impact du syndrome métabolique sur les complications et le nombre de séance de radiofréquence
5. Impact de la MAFLD et du syndrome métabolique sur la récidive locale, à distance et globale
6. Impact de la MAFLD et du syndrome métabolique sur la survie globale et la survie sans récidive
DISCUSSION
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
BIBLIOGRAPHIE
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