L’utilisation du robot comme mediation therapeutique aupres de personnes presentant un TSA

Si l’on peut dater des années 70 les premières expériences d’utilisation du robot dans la prise en charge de l’autisme, avec la tortue LOGO (Emanuel, Weir 1976 ; Goldenberg 1977), la fin des années 90 marque toutefois le véritable point de départ de la recherche dans ce domaine.

On doit à la roboticienne K. Dautenhahn, du département d’informatique de l’université de Herdfordshire (Grande-Bretagne), le lancement en 1998 d’un grand projet nommé AURORA (AUtonomous RObotic Platform as a Remedial tool for children with Autism). Il se donne pour but principal d’étudier les effets thérapeutiques de l’usage des robots auprès des enfants autistes. L’objectif est de savoir si les interactions sociales s’en trouvent améliorées. Autour d’elle, chercheurs et doctorants contribuent aux études et participent à en fixer le cadre. Dès 2001 (27 et 28 septembre 2001), une conférence internationale sur le thème «Robotic and Virtual Interactive Systems in Autism Therapy » est organisée à l’université de Herdfordshire. Des articles sont progressivement publiés, des rencontres sont instituées avec d’autres université et centres de recherche. De nouvelles études apparaissent et se répondent entre elles. Bientôt, au sein de la robotique sociale, une communauté de pratique s’établit.

Le projet AURORA

Objectifs du projet AURORA 

L’objectif que se donne à son lancement en 1998 le projet AURORA est d’étudier les effets des contacts directs entre des robots mobiles autonomes et des enfants autistes. « Ce travail fortement interdisciplinaire, qui se situe au croisement de la robotique, de la psychologie et des sciences de l’éducation, vise résolument un objectif thérapeutique. Contrairement aux nombreux projets qui se focalisent sur les différences entre les enfants autistes et les autres, AURORA s’intéresse à ce que les enfants autistes sont capables de faire. Et à comment ces capacités peuvent être utilisées en termes d’éducation et de thérapie. L’objectif principal de ce travail à long terme est d’aider les enfants autistes à apprécier les interactions sociales pour ensuite nouer des liens avec d’autres enfants et adultes de l’école ou à la maison. L’utilisation des robots-jouets interactifs est la spécificité de notre approche. Par le jeu, ces robots incitent les enfants à exercer des facultés clés dans les relations humaines. Nous explorons ainsi le type d’aptitudes que les enfants peuvent acquérir durant ces séances dans l’espoir qu’ils puissent ensuite les généraliser à d’autres contextes. » (Dautenhahn 2002).

Cette recherche n’a pas pour intention de remplacer les êtres humains par des robots. Le robot reste un outil thérapeutique. De plus, si le robot peut devenir un « ami » ou un « compagnon » dans un contexte ludique, les liens affectifs avec lui ne représentent pas le but visé. Dans le projet AURORA, il s’agit d’abord et avant tout d’aider les enfants à améliorer leurs compétences dans les interactions et la communication, à donner sens à leur monde (Werry, Dautenhahn 1999).

Hypothèses du projet AURORA 

Le projet AURORA cherche à démontrer qu’un robot serait un outil particulièrement intéressant pour des enfants présentant un TSA. K. Dautenhahn s’appuie sur des études réalisées auprès d’enfants autistes qui utilisent un ordinateur. Elles montrent un fort intérêt des enfants pour ce dernier en ce qu’il respecte des règles simples et prévisibles, offrant par-là un cadre rassurant (Dautenhahn 2000). Or, pareilles caractéristiques se retrouvent dans le robot, mais avec un avantage supplémentaire : avec le robot, l’interaction simplifiée se voit aussi incarnée. En effet, le robot peut être touché, manipulé, physiquement. Il donne donc l’occasion d’une interaction beaucoup plus réelle qu’avec un agent virtuel sur un écran d’ordinateur. En somme, l’interaction avec le robot se situerait entre une interaction abstraite avec un agent virtuel et une interaction concrète avec un être humain (Dautenhahn et al. 2003).

Trois hypothèses principales sont posées (Dautenhahn 2000) :
– Un enfant autiste est suffisamment intéressé pour jouer avec un robot autonome interactif.
– Le robot peut engager l’enfant dans des interactions qui montrent des aspects importants de l’interaction sociale entre les êtres humains : le contact visuel, les jeux d’imitation, le fait de prendre son tour dans un cadre social.
– A long terme, d’un point de vue thérapeutique : en augmentant progressivement le répertoire de ses comportements, l’imprévisibilité de ses actions et de ses réactions, le robot peut guider l’enfant vers des formes plus réalistes et complexes des interactions sociales.

A cela, s’ajoute l’idée que le robot doit peu à peu pouvoir se retirer pour laisser place à de véritables échanges ayant lieu sans son entremise.

Le succès du projet dépend de la conception du robot. Les études menées vont en expérimenter plusieurs.

Les robots du projet AURORA

Les premières études sont réalisées avec la plateforme mobile Labo-1, fourni par Applied AI System Inc . Ce robot a la forme d’un buggy, de 30 cm x 40 cm x 21 cm, et pèse 6,5 kg. Ses 8 capteurs infrarouges et son capteur de chaleur positionnel lui permettent d’éviter les obstacles et de suivre une source de chaleur (comme un enfant, par exemple). Ses mouvements (avant/arrière, poursuite/évitement) cherchent à entraîner l’enfant dans une interaction. Ces expériences montrent chez les enfants un vif intérêt pour le robot. Jamais ils ne présentent des signes de peur. Au contraire, ils rient et émettent des vocalises lorsque le robot s’approche ou les évite. Des gestes des jambes et des bras pour attirer le robot à eux sont observés (Werry et al. 1999). D’autres études sont menées à partir de cette plateforme pour en évaluer ou bien les effets lorsqu’elle joue le rôle de médiateur entre deux enfants ou bien l’attraction qu’elle peut exercer en comparaison avec un camion jouet (Werry et al. 2001 ; Dautenhahn, Werry 2002).

Une autre plateforme mobile est également un temps utilisée : Pekee (Wany Robotics) . Plus mobile que Labo-1, muni de davantage de capteurs, ce robot a l’avantage de pouvoir enregistrer les contacts établis avec les personnes (proximité et manipulation physique). Il peut ainsi ouvrir à une compréhension des différences individuelles dans les styles de jeu et les interactions sociales des enfants. Mais les expériences sont essentiellement réalisées auprès d’enfants dits à développement typique (Salter et al. 2004).

En 2002, c’est au tour du robot chien Aïbo ERS-7 , commercialisé par Sony, d’être expérimenté en vue d’étudier l’importance du contexte dans les interactions avec le robot (François et al. 2009) après avoir élaboré une architecture de contrôle capable d’apprendre des réponses qui lui sont apportées (Mirza et al. 2006). Il est proposé auprès de 6 jeunes autistes, âgés de 4 à 11 ans, pendant 10 séances, pour en étudier les interactions. L’étude conforte l’idée des auteurs de la nécessité qu’un robot puisse s’adapter en temps réel à chacun. Mais le projet ne fait pas seulement appel à des robots déjà conçus. A partir de 2000 déjà, différentes expériences sont en effet mises en place en utilisant un robot fabriqué par A. Billard, une ancienne doctorante de K. Dautenhahn. Ce robot a été conçu à partir d’une poupée en plastique pour la tête, les bras et les jambes, et de pièces de LEGO pour la partie centrale du corps. Il est muni de 3 moteurs (pour la mise en mouvement des bras et de la tête), de 5 détecteurs tactiles et d’un détecteur infrarouge, et d’un émetteur sonore pour simuler les cris du bébé : Robota (Cf. tableau.1). Un essai est réalisé auprès de 7 enfants autistes, âgés de 8 à 11 ans, dans le but de juger de l’éventuel intérêt de ce robot auprès de cette population (Billard 2000). Les résultats ne sont pas donnés mais l’expérience est considérée comme concluante. A partir de Robota, on cherche alors à mesurer l’importance de l’apparence du robot. Deux expériences sont menées : dans la première, on compare les interactions des enfants (4 enfants âgés de 5 à 10 ans) avec un comédien mimant un robot avec celles qui ont lieu avec un robot, et on en analyse les regards, les touchers, les approches (Robins et al. 2004) ; dans la seconde, ce sont différentes présentations du robot lui-même (vêtu en poupée ou de façon neutre) qui sont comparées (Robins et al. 2004b). Toutes deux concluent sur la préférence donnée à l’apparence robotique ou « neutre ».

Jusqu’à présent, une question a toutefois été négligée, celle de l’expression faciale. Or, comme de nombreuses études en neurosciences semblent le montrer, c’est là un élément capital pour les interactions sociales. Par les expressions de notre visage, nous communiquons en effet des signes sociaux importants, tels que les émotions. Comment dès lors concevoir un robot qui ouvre à la compréhension des expressions faciales humaines tout en prenant en compte les études précédentes qui concluent sur la préférence des enfants autistes pour les apparences robotiques ? Cette question de l’acceptation ou non de l’apparence du robot avait déjà été soulevée en 1970 par M. Mori (2012) qui avait proposé le terme de « vallée de l’étrange » pour désigner un sentiment d’étrangeté que nous pouvons ressentir à la vue de certains robots humanoïdes. Elle avait été reprise par C. Breazeal dans le cadre du projet KISMET (tête robotique posée sur un socle et conçue en vue d’apprendre la socialité) que K. Dautenhahn connaît bien pour y avoir participé .

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

1. INTRODUCTION GENERALE
1.1. Motivation
1.2. Organisation de la thèse
2. L’UTILISATION DU ROBOT COMME MEDIATION THERAPEUTIQUE AUPRES DE PERSONNES PRESENTANT UN TSA : ETAT DE L’ART
2.1. Introduction
2.2. Le projet AURORA
2.2.1. Objectifs du projet AURORA
2.2.2. Hypothèses du projet AURORA
2.2.3. Les robots du projet AURORA
2.3. Les grandes directions de la recherche
2.3.1. La question du design et des fonctionnalités du robot
2.3.2. La question du travail visé
2.3.3. La question du rôle du robot
2.3.4. Quelques observations
2.4. Critiques des expériences menées
2.5. Conclusion de l’état de l’art
2.6. Positionnement
3. ANALYSE DU PROJET ROB’AUTISME : APPROCHE THEORIQUE ET POSITIONNEMENT EPISTEMOLOGIQUE
3.1. Introduction
3.2. Approche théorique
3.2.1. Le choix de la théorie : l’anthropologie clinique
3.2.2. La question de l’enfant selon l’anthropologie clinique
3.2.3. Les interactions sociales
3.2.4. Les Troubles du Spectre Autistique selon l’anthropologie clinique
3.2.5. Conséquences d’une telle approche pour une prise en charge groupale des enfants et adolescents autistes
3.2.6. L’atelier thérapeutique comme « rencontre sociale »
3.2.7. Le robot comme équipement d’une rencontre
3.3. Les ateliers Rob’Autisme : analyse
3.3.1. Le cadre
3.3.2. Un appui sur du « connu apprécié »
3.3.3. Une organisation structurée
3.3.4. Une progression dans les propositions : du jeu collectif au travail collectif
3.3.5. Les ateliers non robotiques
3.3.6. Les ateliers robotiques
3.3.7. Le robot-extension
3.3.8. Séances robotiques et non robotiques : aller-retour
3.3.9. Le spectacle
3.3.10. Le rôle des encadrants
3.4. Ce qu’il s’agit de retenir
3.5. Questions sur l’évaluation des prises en charge de l’autisme
3.5.1. Les débats autour de l’évaluation
3.5.2. Théorie et pratique clinique
3.5.3. Une conséquence
3.5.4. La clinique comme lieu de vérification dans l’après-coup
3.5.5. Un facteur supplémentaire à prendre en compte : l’entourage
3.6. Ce qu’il faut retenir
3.7. Conclusion
4. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESE
4.1. Construction de la problématique
4.2. Hypothèses
5. MATERIEL ET METHODE
5.1. Introduction
5.2. Modalités éthiques
5.3. Le robot et le logiciel utilisés
5.3.1. Caractéristiques techniques du robot NAO
Matériel
5.3.2. Le robot NAO et son logiciel Choregraphe : une « machine à écrire »
5.4. Participants
5.5. Procédure expérimentale
5.5.1. Dispositif
5.5.2. Mesures quantitatives et qualitatives
5.5.3. Conception de l’étude
5.5.4. Validité interne de l’étude
5.5.5. Validité externe de l’étude
5.5.6. Reproductibilité du processus de recherche
5.6. Conclusion
6. RESULTATS
6.1. Analyses quantitatives
2018-2019
6.2. Analyses qualitatives
6.2.1. Dynamique de groupe
6.2.2. Analyse qualitative individuelle
6.3. Conclusion
7. DISCUSSION
8. CONCLUSION

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *