L’oxygénation des océans à travers le temps

L’oxygénation des océans à travers le temps

Depuis l’apparition des processus de photosynthèse anoxygénique puis oxygénique à l’Archéen, l’Histoire biogéochimique de la Terre est caractérisée par une évolution polyphasée ponctuée par de nombreuses périodes de perturbations. En particulier, le début du Paléoprotérozoïque a vu la quantité d’oxygène libre dans l’atmosphère et les océans s’accroître de manière spectaculaire lors du « Great Oxygenation Event (GOE)». Cet évènement correspond au bloom des cyanobactéries oxygéniques dans les océans (Fig. 1.1). Cette évolution correspond à la fois à des modifications de la chimie globale des océans ainsi qu’à une évolution dans les producteurs primaires (Fig. 1.1), les deux étant principalement liés aux conditions d’oxygénation des enveloppes externes de la Terre. Depuis la seconde phase d’oxygénation de la Terre, le Neoproterozoic Oxygenation Event (NOE), la chimie des océans est principalement marquée par des conditions oxiques ayant permis le développement des algues comme producteurs primaires dominants, au dépens des bactéries, ainsi que le développement des organismes eucaryotes au Phanérozoïque  .

Les Evènements Anoxiques Océaniques (OAEs)

Décrits pour la première fois il y a quarante ans (Schlanger et Jenkyns, 1976), les évènements anoxiques océaniques (OAEs) furent caractérisés par la présence de dépôts sédimentaires pélagiques riches en matière organiques d’étendue quasi-globale de manière simultanée, notamment au Crétacé à la limite Albien-Aptien (~113 Ma) et Cénomanien-Turonien (~94 Ma). La raison invoquée initialement pour expliquer ces évènements ponctuels était alors une intensification et une expansion importante de la Zone à Minimum d’Oxygène (OMZ) dans les océans mondiaux. Depuis ces premiers travaux, six OAEs ont été identifiés durant le Crétacé (Arthur et al., 1990) et ont été décrits à l’Aptien inférieur (OAE 1a ou Selli Event, ~120 Ma, Erba et al., 1999), à l’Albien inférieur (OAE 1b ou Paquier Event, ~112 Ma, Herrle et al., 2004), à l’Albien supérieur (OAE 1c ou Toolbuc Event, ~102 Ma, Arthur et at al., 1990 ; OAE 1d ou Breistroffer Event, ~99 Ma, Arthur et al., 1990), à la limite Cénomanien-Turonien (OAE 2 ou Bonarelli Event ou C/T OAE) et à la limite Coniacien-Santonien (OAE 3, ~86Ma, Arthur et al., 1990). A cette liste s’ajoute le seul OAE identifié à ce jour dans le Jurassique : celui du Toarcien (T-OAE ou Posidonienschiefer Event, ~183 Ma, Jenkyns, 1985, 1988).

La notion d’OAE peut toutefois être débattue du fait du caractère plus régional que mondial de certains de ces évènements. Ainsi, seuls le T-OAE, l’OAE 1a et l’OAE 2 sont des évènements majeurs présents de manière quasi globale. L’OAE 1b et 1c ne semblent ainsi n’être enregistrés que dans certains bassins téthysiens dont le caractère restreint favorise la stagnation et la stratification des eaux (Tiraboschi et al., 2009). De même, l’OAE 3 n’est décrit que dans les séries sédimentaires atlantiques tropicales et équatoriales ainsi que dans certains bassins épicontinentaux de la marge ouest-atlantique (Wagreich, 2012). Par ailleurs, d’autres épisodes d’enfouissement de matière organique comme le Faraoni Event (Hauterivien supérieur) (Baudin, 2005 ; Baudin et Riquier, 2014) ou le Weissert Event (Valanginien) (Erba et al., 2004) peuvent également être considérés comme des OAEs, tout comme le PETM à la limite Paléocène-Eocène (Jenkyns, 2010) (Fig. 1.3). Bien que chaque OAE soit initié par une combinaison de mécanismes qui lui est propre, plusieurs définitions peuvent être données, basées sur des critères purement lithologiques ou géochimiques, ou en lien avec les changements biologiques dans les communautés planctoniques associées à ces évènements.

OAEs et perturbations du cycle du carbone

Les OAEs du Mésozoïque sont définis principalement par des enfouissements massifs de matières organiques (MO) dans les sédiments (Schlanger et Jenkyns, 1976; Arthur et al., 1987; Schlanger et al., 1987). D’un point de vue lithologique, les OAEs sont donc représentés par des intervalles de dépôts pélagiques de marnes sombres laminées, appelées black shales, dont les teneurs en carbone organique total (TOC) sont généralement supérieurs à 1% et pouvant atteindre plusieurs dizaines de pourcents. Cet enfouissement massif de MO a pour conséquence de perturber le cycle biogéochimique du carbone, ce qui se reflète dans la composition isotopique des deux puits majeurs de carbone que sont les carbonates – relié au pôle de carbone inorganique dissous dans l’eau (DIC) – et la matière organique. En effet, les OAEs sont marqués par des excursions positives des rapports 13C/12C des carbonates et de la matière organique reflétées par les signaux δ 13Ccarb (augmentation jusqu’à +3‰) et δ 13Corg (augmentation jusqu’à +6‰) (Schlanger et Jenkyns, 1976; Arthur et Schlanger, 1979; Jenkyns, 1980) (Fig. 1.6). Seuls les OAEs du Toarcien (T-OAE) et à la limite Aptien-Albien (OAE 1b) présentent également des anomalies négatives (diminution d’environ -7‰) encadrés par des excursions positives (Jenkyns, 2003). Celles-ci ont été attribuées à la déstabilisation de clathrates de méthane, caractérisées par des rapports isotopiques extrêmement faibles (δ13C~-60‰), au niveau des marges continentales. Par ailleurs, à longue échelle de temps, le cycle biogéochimique du carbone étant à l’équilibre isotopique (Hayes et al., 1999) des variations des rapports δ 13C peuvent être reliés à la fraction de carbone enfoui dans les sédiments sous forme de MO (forg) selon l’équation de bilan de masse isotopique (Des Marais, 2001) :

δ13Centrant = (1 – forg) δ13Ccarb + forg δ13Corg

Ainsi, en considérant le flux de carbone entrant uniquement d’origine volcanique ayant un signal δ13C constant (~-6‰) et d’après cette équation, l’enfouissement de matière organique caractéristique des OAEs explique bien un enrichissement en 13Cdes pôles carbonates et organiques de manière parallèle (Summons et Hayes, 1992) .

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
1. Problématiques de recherche
1.1. L’oxygénation des océans à travers le temps
1.2. Motivations et problématiques de recherche sur l’OAE 2
1.3. Objectifs de la thèse et approches
2. Organisation du mémoire
I. État de l’art
1. Conditions d’oxygénation et processus de dégradation de la matière organique
2. Les Evènements Anoxiques Océaniques (OAEs)
2.1. OAEs et perturbations du cycle du carbone
2.2. Augmentation de la productivité primaire
2.3. Climat et paléogéographie
2.4. Volcanisme
2.5. Productivité ou préservation ?
3. L’OAE 2
3.1. Caractérisations des dépôts de matière organique
3.2. Biostratigraphie et évolution faunistique
3.3. Cycle du carbone et marqueurs organiques
3.4. Marqueurs inorganiques
3.5. Mécanismes à l’origine de l’OAE 2
3.5.1. Volcanisme
3.5.2. Climat
3.5.3. Perturbation du cycle hydrologique et configuration des bassins
II. Zone d’étude : Le Bassin Vocontien
1. Contexte géodynamique et paléogéographique régional
2. Cadre temporel et calages stratigraphiques
2.1. Cadre lithostratigraphique du Niveau Thomel
2.2. Cadre biostratigraphique du Niveau Thomel
2.3. Cadre chimiostratigraphique du Niveau Thomel
III. Matériels et Méthodes
1. Matériels : les coupes de Pont d’Issole et de Lambruisse
1.1. La coupe de Pont d’Issole
1.2. La coupe de Lambruisse
2. Méthodes et protocoles
2.1. Pyrolyse Rock-Eval
2.2. Analyses des compositions isotopiques en carbone et en oxygène des fractions carbonatées
2.2.1. Préparation des échantillons
2.2.2.Analyse par IRMS
2.3.Analyses des compositions isotopiques et des concentrations élémentaires en carbone et en azote de la fraction décarbonatée
2.3.1. Préparation des échantillons
2.3.2. Analyse des compositions isotopiques en carbone et en azote et des concentrations élémentaires en carbone et en azote
2.4. Analyses des compositions isotopiques en soufre des sulfures et quantification de la fraction de pyrite
2.4.1. Extraction des sulfures
2.4.2. Analyse isotopique
2.5. Analyses en éléments majeurs et traces
2.5.1. Préparation et analyse des échantillons
2.5.1.1. Protocole de préparation et d’analyse des échantillons à l’ISTeP
2.5.1.2. Protocole de préparation et d’analyse des échantillons au SARM
2.5.1.3. Intercalibration entre les deux protocoles
2.5.2. Normalisation et calcul des facteurs d’enrichissement
2.6. Spéciation du fer
2.6.1. Principe
2.6.2. Extractions chimiques
2.6.2.1. Extraction du fer contenu dans les carbonates
2.6.2.2. Extraction du fer des oxydes
2.6.2.3. Extraction du fer de la magnétite
2.6.2.4. Extraction du fer peu réactif
2.6.2.5. Extraction du fer total
2.6.3. Spectrophotométrie
2.6.4. Comparaison des concentrations en FeT déterminés par spectrophotométrie et par ICP-OES
2.6.5. Utilisation des mesures de spéciation du fer
Conclusion

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *