L’organisation spatiale de la végétation des marais salés de la Baie du Mont-SaintMichel

L’organisation spatiale de la végétation des marais salés de la Baie du MontSaint-Michel 

Présentation générale des marais salés

L’estran, aussi appelé zone intertidale, est l’espace défini entre les plus hautes et les plus basses marées. C’est un écotone, c’est-à-dire une zone de transition entre deux écosystèmes plus ou moins homogènes, à savoir l’écosystème marin et l’écosystème terrestre. Couvert et découvert chaque jour par la marée, c’est un milieu extrême subissant de fortes variations de condition physico-chimique, et abritant un écosystème spécifique. La partie haute de l’estran couverte de végétaux supérieurs s’appelle un marais salé. Les marais salés se forment sur le haut estran des zones littorales où les mouvements de l’eau sont assez modérés pour permettre l’accumulation des sédiments et la croissance de la végétation. Ils constituent l’un des écosystèmes les plus productifs au monde, avec une production pouvant atteindre 30 tonnes de matière sèche par an par hectare (Lefeuvre et al., 2003). La biodiversité floristique y est pauvre mais constituée de plantes spécifiques à ce milieu. Les marais salés rendent de nombreux services à l’humanité (Costanza et al., 1997), tels que la protection des côtes contre l’érosion, le filtrage des sédiments et des nutriments de la colonne d’eau, et l’alimentation des poissons, les marais salés constituants des nourriceries pour de nombreuses espèces (Bertness et al., 2001).

La végétation des marais salés de la Baie du Mont-Saint-Michel apparaît au premier abord comme peu remarquable : elle constitue un tapis plus ou moins continu et dense, d’une couleur assez terne allant du vert au brun, composé en majorité de plantes souvent charnues ou poilues, portant des fleurs peu développées, et n’atteignant généralement que 20 à 30 cm de hauteur .

Au fil des saisons, les couleurs de la baie se dévoilent : le blanc violacé des fleurs d’Aster (Aster tripolium) au printemps, le rouge de la Salicorne (Salicornia sp.) à la fin de l’été, le vert tendre de l’Arroche couchée (Atriplex prostata) contrastant avec le vert argenté de l’Obione (Halimione portulacoides) en automne …

Il suffit de prendre le temps de la parcourir pour voir que la Baie, dont la végétation semblait d’abord homogène, présente des paysages tout à fait différents. A l’Ouest, on trouve des marais salés peu étendus, souvent bordés de cordons coquilliers où fleurit le Pavot cornu (Glaucium flavum) (Figure 12). Le centre de la Baie présente de grandes étendues monospécifiques à Chiendent du littoral (Elytrigia atherica) et Obione (Halimione portulacoides) (Figure 13). Enfin, dans la partie Est de la Baie, au bord des estuaires de la Sée, de la Sélune, et du Couesnon, où se concentre la majorité des troupeaux, les prés salés se présentent sous la forme d’un gazon de Puccinellie (Puccinellia maritima) .

Par ailleurs, lorsque l’on traverse un marais salé depuis la côte vers le large, on peut voir la végétation changer d’aspect : de dense et haute, elle devient clairsemée et sa taille se réduit progressivement. On remarque facilement que différentes espèces végétales se succèdent au fur et à mesure que l’on s’éloigne de la côte. Une organisation de la végétation apparaît plus ou moins clairement selon les secteurs de la Baie. En effet, les marais salés sont communément divisés en deux sous-ensembles, le schorre et la slikke, définis par rapport aux niveaux marégraphiques (Figure 15), le schorre étant recouvert par la mer seulement quelques fois par mois, lors des marées de vives-eaux, tandis que la slikke l’est quotidiennement à marée haute. Sur le terrain, le schorre se reconnaît par la couverture continue de sa végétation, tandis que haute slikke est caractérisée par une végétation pionnière se développant en touffes éparses .

Le schorre se présente comme une zone continûment végétalisée traversée de chenaux. On y rencontre principalement ((Bouchard et al., 1995)(Bonnot-Courtois & Levasseur, 2000) ; Lefeuvre, 2003) : le Chiendent du littoral (Elytrigia atherica), la Fétuque (Festuca rubra), l’Obione (Halimione portulacoides), la Puccinellie (Puccinellia maritima), l’Aster (Aster tripolium) et la Soude (Suaeda maritima). On définit communément, en allant de la côte vers le large, le haut schorre, le moyen schorre et le bas schorre. La hauteur de la végétation est variable et décroît lorsqu’on s’éloigne de la côte : de environ 1 m pour les graminées du haut schorre, à quelques centimètres pour la Puccinellie du bas schorre. Le long de la Baie du Mont Saint-Michel, le schorre peut être plus ou moins large, sa largeur pouvant atteindre plus de 2 km autour du Mont-Saint-Michel. La slikke est une surface de sable nu où pousse une végétation pionnière composée essentiellement de Spartine (Spartina sp.) en touffe de 10 ou 20 cm de haut, ou de Salicorne (Salicornia sp.) d’environ 10 cm de haut. La transition entre le schorre et la slikke (Figure 16) peut être progressive, lorsque l’on a une pente douce, ou au contraire brusque, dans le cas d’une micro-falaise ((Bonnot-Courtois et al., 1999)). Dans certaines zones, le front est délimité par des cordons coquilliers qui recouvrent la végétation en avançant progressivement vers la côte, poussés lors de fortes tempêtes ((Bonnot-Courtois et al., 2004)). Le type de limite slikke-schorre nous renseigne sur la dynamique du marais salés : on sera ainsi dans une situation d’érosion en cas de microfalaise, ou d’accrétion (avancée du schorre) lorsque que la limite slikke-schorre est en pente douce (Kaveh & Deffontaines, 2008). D’Est en Ouest et de la côte vers le large, les marais salés de la Baie du Mont-SaintMichel sont donc composés d’une grande diversité de paysages. On peut se demander si ces paysages ont une réalité écologique : sont-ils le reflet de différences en termes de conditions de milieux, d’utilisation par l’homme? En écologie du paysage, un paysage se définit comme un ensemble d’écosystèmes, c’est-à-dire d’unités fonctionnelles homogènes et autonomes (Van Dyne, 1969) ; (Tansley, 1935). Pour comprendre la dynamique de la végétation de la Baie du Mont-Saint-Michel, nous allons chercher à identifier les différents paysages de la Baie. Godron (Godron, 1984) propose une méthode simple d’indentification des paysages : « il suffit de suivre l’ordre logique des déterminants écologiques des paysages, et de prendre en compte successivement le climat, la géomorphologie et l’influence de l’Homme ». En s’inspirant de cette méthode d’identification des paysages, nous pouvons donc faire la liste des facteurs influençant la présence des espèces végétales des marais salés de la Baie du Mont-Saint-Michel, à petite, moyenne et grande échelle d’espace et de temps.

Les facteurs écologiques influençant la présence des espèces végétales des marais salés de la Baie du Mont-Saint-Michel

Les facteurs écologiques

Un facteur écologique est un élément de l’environnement susceptible d’agir sur le développement d’un être vivant. On distingue les facteurs abiotiques, qui sont liés aux conditions physico-chimiques du milieu, et les facteurs biotiques, liés aux interactions entre les êtres vivants d’espèces différentes (interaction interspécifique) ou d’une même espèce (interaction intraspécifique). La séparation entre biotique etabiotique n’est pas si évidente, puisque la présence d’organisme peut influencer les paramètres physico-chimiques de l’environnement. Par ailleurs, on peut isoler le cas des facteurs anthropiques, qui sont les facteurs associés aux actions de l’homme.

Chaque espèce présente, vis-à-vis d’un facteur, des limites de tolérance entre lesquelles se situe son optimum écologique, c’est-à-dire un intervalle au sein duquel les valeurs du facteur permettent de façon optimale le développement de cette espèce . La valence est la capacité de cette espèce à vivre sur un intervalle plus ou moins large de valeur de ce facteur.

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Table des matières

1. Introduction
2. Contexte général
2.1. Histoire et paysages de la Baie du Mont-Saint-Michel
2.2. L’organisation spatiale de la végétation des marais salés de la Baie du Mont-SaintMichel
2.2.1. Présentation générale des marais salés
2.2.2. Les facteurs écologiques influençant la présence des espèces végétales des marais salés de la Baie du Mont-Saint-Michel
2.2.2.1. Les facteurs écologiques
2.2.2.2. Le climat
2.2.2.3. Les marées
2.2.2.4. Le contexte sédimentaire et géomorphologique
2.2.2.5. Les cours d’eau
2.2.2.6. Les facteurs biotiques
2.2.2.7. Les facteurs anthropiques
2.2.2.8. Synthèse
2.3. La télédétection et ses applications à l’étude des marais salés
2.3.1. Bases de la télédétection
2.3.2. Le LiDAR
2.3.2.1. Le Lidar, les LiDAR
2.3.2.2. Le principe du LiDAR
2.3.2.3. L’instrument LiDAR
2.3.2.4. Les données LiDAR
2.3.2.5. Les échos multiples et les différents types de LiDAR
2.3.2.6. L’acquisition de données LiDAR
2.3.3. Applications de la télédétection à l’étude des marais salés
3. Présentation des données et des méthodes
3.1. Les données brutes
3.1.1. Les données de végétation
3.1.1.1. Les transects
3.1.1.2. La carte de la végétation
3.1.2. Les données de télédétection
3.1.2.1. Les données optiques : l’orthophotographie
3.1.2.2. Les données altimétriques par LIDAR
3.1.3. Les autres données : topographie, sédiment et pâturage
3.1.3.1. Les données topographiques
3.1.3.2. Sédiments
3.1.3.3. Pâturage
3.2. Préparation des données et données dérivées
3.2.1. Contrôle qualité et correction de données LIDAR
3.2.1.1. Principes du biais des données LIDAR dû à la présence de végétation
3.2.1.2. Structure de la végétation sur la zone du contrôle qualité du LiDAR
3.2.1.3. Méthodes du contrôle qualité des données LIDAR
3.2.1.4. Résultats du contrôle qualité des données LiDAR
3.2.1.5. Discussion
3.2.2. Les données de géomorphologie
3.2.3. Le tableau des transects de végétation
3.3. Présentation des méthodes utilisées
3.3.1. Méthode générale
3.3.2. L’Analyse Factorielle des Correspondances (AFC)
3.3.3. L’analyse fréquentielle
4. Traitements et résultats
4.1. Etude de trois secteurs représentatifs de différents contextes
4.1.1. Le Vivier-sur-Mer : un marais salés « simple »
4.1.1.1. Présentation du secteur
4.1.1.2. Analyse descriptive de l’organisation spatiale de la végétation
4.1.1.3. Résultats de l’Analyse Factorielle des Correspondances (AFC)
4.1.1.4. Résultats de l’analyse fréquentielle
4.1.1.5. Synthèse sur l’analyse des transects de l’Ouest du Vivier-sur-Mer
4.1.2. Chemin Dolais : un marais salé sous l’influence de cordon coquillier
4.1.2.1. Présentation du secteur
4.1.2.2. Analyse descriptive de l’organisation spatiale de la végétation
4.1.2.3. Résultats de l’Analyse Factorielle des Correspondances (AFC)
4.1.2.4. Résultats de l’analyse fréquentielle
4.1.2.5. Synthèse du transect de Chemin Dolais
4.1.3. Vains : effet du pâturage et des sédiments
4.1.3.1. Présentation du secteur et des données
4.1.3.2. Analyse descriptive de l’organisation spatiale de la végétation
4.1.3.3. Résultats de l’Analyse Factorielle des Correspondances (AFC)
4.1.3.4. Résultats de l’analyse fréquentielle
4.1.3.5. Synthèse des transects de Vains
4.1.4. Comparaison des trois situations : Vivier, Chemin Dolais, et Vains
4.2. Organisation de la végétation à l’échelle de la Baie du Mont-Saint-Michel
4.2.1. Observation de l’organisation de la végétation des marais salés
4.2.2. Influence de l’altitude sur l’organisation de la végétation
4.2.2.1. Résultats de l’analyse fréquentielle
4.2.2.2. Etude de la relation entre l’altitude et la coordonnée géographique X
4.2.3. Influence de la pente du terrain et de la géomorphologie
4.2.4. Influence du contexte sédimentaire
4.2.5. Influence de l’utilisation agricole
4.2.6. Etude de la réflectance dans le Rouge, le Vert, et le Bleu
4.2.7. Identification des associations végétales de la Baie du Mont-Saint-Michel
5. Discussion
6. Conclusion

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