Le mot esclave (servus) se définit selon Fredouille J. C comme étant « une chose du maitre qui a sur lui tout pouvoir, l’esclave n’a aucune personnalité juridique, il ne possède pas de bien, ne contracte pas de mariage légitime, n’a pas accès aux tribunaux» . L’esclave est un instrument parlant, « un instrumentum vocale», le mot de Varron est dur, mais il correspond parfaitement à la réalité. L’esclave ne peut être qu’un bien, un animal domestique. Sans son maitre, il n’existe pas et il ne vit qu’à travers lui. Il est important de souligner que l’esclave n’est rien d’autre qu’un objet et qui dépend totalement de son maitre, il n’a rien, car il est considéré comme une chose au sein de la maison.
Les esclaves sont divisés en plusieurs groupes parmi lesquels nous pouvons citer : les esclaves publics ou servi publuci qui appartiennent à l’Etat romain, les esclaves sans maitre et les esclaves privés ou servi privati appartenant à des particuliers. Ces esclaves privés nous intéressent dans notre travail. Il s’agira dans cette étude d’élucider les rapports qui existent entre les hommes libres et les esclaves privés et de montrer sur quels aspects leurs relations ont été basées. Ces esclaves privés sont divisés en deux groupes : les esclaves ruraux (familia rustica) et les esclaves urbains (familia urbana). La villa rustica est conçue pour l’exploitation d’un domaine. Les esclaves ruraux (familia rustica) vivent en campagne, maltraités et pauvres.
Le nombre de ces esclaves varie, à l’évidence, avec la taille de l’exploitation. Le travail est divisé entre des esclaves plus ou moins spécialisés, enchainés ou non. Sous la houlette du vilicus, on en compte au moins trois groupes : les laboureurs, les vignerons et les ouvriers non qualifiés, bons à tout faire. Mais il faut ajouter éventuellement les hommes chargés de la culture d’oliviers et de la fabrication d’huile, les gardes des bois et des champs, les âniers, les muletiers, les chevriers, et les porchers sans oublier le sommelier, le meunier, le boulanger et, si l’exploitation est importante, les tisserands, les infirmières, le personnel d’entretien et le personnel d’encadrement et de surveillance, plus les femmes, commandées par la vilica; enfin les esclaves réservés au plaisir du maitre, les oiseleurs, les aides à la chasse, etc. .
L’organisation de La société romaine
La société romaine est une société hiérarchisée. Elle laisse apparaitre plusieurs classes qui ne sont pas égales. Son évolution fut marquée par des mutations d’ordres politiques, économiques et sociales. Le droit romain distingue certaines catégories d’individus : d’une part, les individus libres (les citoyens et les pérégrins) d’autre part, les individus non libres (les affranchis et les esclaves). Chacune de ces catégories a des droits et des devoirs, qui sont définis par rapport au critère de citoyenneté romaine. Notons d’abord les patriciens qui sont des citoyens de Rome et membres de familles terriennes. Les patriciens formèrent une caste dénommée noblesse (nobilitas en latin), caste qui leur confère toute sorte de privilèges. D’après Joseph Naudet, cette noblesse « commença par des privilèges héréditaires, tyranniques, insolents. Elle se fondait sur une distinction de caste que sanctionnaient des superstitions. Car l’asservissement d’une caste à l’autre ne se maintient pas sans l’avis des idées religieuses » . C’est dire que durant tous les débuts de Rome, les nobles étaient les maitres incontestables.
Cependant, au cours de la République, période cruciale de l’histoire de la Rome Antique, la caste noble prend uneallure. Ils peuvent être appelés des autochtones car ils sont présents à Rome dès sa création. Y. Verbeek fait remarquer même que « les plus farouchement citadines des élites patriciennes tirent le plus clair de leurs revenus de l’exploitation des terres qu’elles possédaient en province » . Après les patriciens viennent les plébéiens, c’est le groupe le plus nombreux dans la société romaine. Les pérégrins sont des sujets libres mais ne sont pas originaires de Rome. Au bas de l’échelle sociale se trouve la masse d’esclaves, sans droit et exploitée, provenant de différentes sources. Qui sont les hommes libres ? Qui sont également les esclaves privés ? Nous tenterons de répondre à ces interrogations à travers une argumentation soutenue.
Dans la perspective de mieux expliquer les composants de la société romaine, il nous semble nécessaire de scinder notre première partie en deux chapitres. Dans le premier chapitre nous allons étudier les hommes libres à savoir les citoyens et les non citoyens libres et dans le deuxième chapitre nous avons jugé nécessaire d’aborder les esclaves privés. Pour cela nous montrerons d’une part la provenance des esclaves privés et leur statut et d’autre part les différents types d’esclaves privés, leur condition de vie et enfin les révoltes.
Les hommes libres et les esclaves privés
La liberté peut être définie comme une souveraineté inaliénable de l’individu. L’opposition de l’homme libre et l’esclave est alors toujours de nature. Les hommes libres à Rome sous la République sont nombreux et variés. Ces hommes libres occupent le sommet de la pyramide sociale.« Les hommes libres peuvent exercer des professions très diverses : magistrats, prêtres, avocats, commerçants en gros, financiers, commerçants de détail en boutique, ouvriers urbains et agricoles » . Les hommes libres et les esclaves privés tiennent des relations très étroites entre eux.
Les hommes libres
Parmi les hommes libres, il y a les affranchis c’est-à-dire un esclave qui s’est vu rendre sa liberté.Les pérégrins sont aussi des hommes libres qui vivent sur territoire romain et issus des cités qui également vivent sous leurs propres lois mais lié à Rome et enfin des citoyens romain mais ne sont pas des citoyens. Cette dernière catégorie comprend les patriciens, les plébéiens et les chevaliers. Cependant, à Rome, on note une différence parfaite entre hommes libres et citoyens. Tous les citoyens sont des hommes libres alors que tous les hommes libres ne sont pas des citoyens. L’exemple le plus patent est celui des pérégrins qui sont des hommes totalement libres mais ne sont pas considérés comme des citoyens romains.
A Rome, au sein des hommes libres, il existe des classes différentes, dues à l’origine sociale ou à la fortune. Il convient de parler d’ordre plus que de classes sociales. La relation entre servus et liber marque une opposition statuaire. C’est dans cette perspective qu’il est important d’élucider ces termes pour une parfaite compréhension des rapports qui existent entre les hommes libres et les esclaves privés. Liber peut désigner l’homme libre, l’ingénu. On trouve par exemple cette signification de liber dans le dictionnaire de L. Quicherat. D’après lui l’homme libre ou liber est celui « qui n’est pas détenu, qui n’est pas assujetti à un tyran ou à l’étranger, qui a le pouvoir d’agir ou de choisir, fait d’après notre volonté, indépendant (de position), qui n’a pas d’occupation, qui n’est pas gêné dans ses mouvements, qui a de l’aisance, qui est de condition libre » .
Le corps des citoyens
La citoyenneté romaine se compose d’un ensemble de prérogatives dissociables, que l’on peut avoir soit en totalité soit en partie. C’est autour du citoyen que s’organise le droit à Rome. A Rome, nul, s’il ne possède cette condition, ne peut fonder une famille légitime, posséder un patrimoine en toute propriété, léguer ses biens en justice, en un mot, il a seul la capacité d’accomplir les actes du jus civile. À Rome, le citoyen est celui qui peut contracter des obligations ou décider du sort de ses biens après la mort. Il est aussi celui qui, dans l’ordre politique, participe à la vie de la communauté citoyenne. De manière beaucoup plus claire, il est citoyen complet (civisoptimojure) celui qui possède tous ces critères ci-après : d’une part les droits civils que sont le jus conubii (droit de se marier régulièrement) et le jus commercii (droit de faire des actes juridiques), d’autre part, les droits politiques : le jus suffragii (droit de vote). Dans la République romaine, le droit de vote et le jus honorum (droit d’être élu à une magistrature). Tout citoyen qui ne possède pas ces droits est appelé citoyen incomplet, c’est l’exemple des affranchis qui ne possèdent pas le jus honorum, des habitants des municipes Italiens qui n’ont pas le jus suffragii et des habitants des municipes provinciaux.
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Table des matières
Introduction
Première partie : L’organisation de la société romaine
Chapitre premier : Les hommes libres et les esclaves privés
I. Les hommes libres
A. Le corps des citoyens
B. Le corps des non citoyens libres
II. Les esclaves privés
A. Sources des esclaves privés
1. Les esclaves de naissance
2. Le nexum
3. Guerre, piraterie et autres sources
B. Le statut de l’esclave
Chapitre deuxième : Les différents types d’esclaves privés
I. Les esclaves ruraux (la familia rustica)
1. Le vilicus
a. Choix du vilicus
b. Les devoirs du vilicus
2. La vilica
a. Choix de la vilica
b. Les devoirs de la vilica
II. Les esclaves urbains (la familia urbana)
1. L’esclave d’un usage purement domestique
2. Les postes de confiances
Deuxième partie : Les relations entre les hommes libres et les esclaves privés
Chapitre premier : Les rapports d’exploitations et sociaux
I.Les rapports d’exploitations
A. Dans la campagne
B. Dans la ville
II. Les rapports sociaux
A.L’esclave dans la vie économique
B. Les pratiques sexuelles
Chapitre deuxième : Les traitements des esclaves privés
I.Les types de relations
A. La clémence
B. La foi (fides)
II. Les châtiments
III.L’affranchissement, révoltes et fuite
A. L’affranchissement
1. Affranchissement par cens
2. Affranchissement par vindicte
3. Affranchissement par testament
B. LA révolte des esclaves
C. La fuite
Conclusion
Bibliographie