Lombalgies chroniques

La lombalgie est un problème de santé publique, non seulement au niveau de sa fréquence – plus d’une personne sur deux (âgées de 30 à 64 ans) de la population active en France souffrira de lombalgie et sera en arrêt des suites de cette pathologie au cours de sa vie – mais également au niveau des coûts induits, tant au niveau social qu’économique (Gourmelen et coll., 2007).

L’incidence des lombalgies est de 60 à 90% (Frymoyer et coll., 1991). Il s’agit d’un problème qui peut devenir récidivant : 73% des sujets ayant un antécédent de lombalgie risquent d’avoir au moins un deuxième épisode aigu dans les douze mois suivant la première crise (Pengel et coll., 2003). Seulement 8% des patients continuent de souffrir plus de 3 mois après le début d’une lombalgie aigüe ou subaigüe – on parle alors de lombalgie chronique. Ces types de lombalgies représentent 85% des coûts de santé publique (Poiraudeau et coll., 2004). Elles sont même la troisième cause de handicap chronique pour la classe d’âge allant de 45 à 64 ans (Breinstein et coll., 1991). De plus, il a été montré que plus l’arrêt de travail est long, plus les chances de reprise du travail diminuent (Rossignol et coll., 1988), mettant en avant l’intérêt de traiter cette pathologie au mieux.

Lorsqu’elle devient chronique, elle prend un caractère plurifactoriel, dans lequel on peut distinguer plusieurs facteurs psychologiques, physiques, sociaux, professionnels et adaptatifs (Duquesnoy et coll., 2001). Ce type de pathologie nécessite une prise en charge globale, prenant en compte toutes les composantes en centre de rééducation est le plus souvent pluridisciplinaire et souvent longue (sur plusieurs semaines en fonction des protocoles proposés) et coûteuse.

Plusieurs problèmes se posent alors. En effet, avant de mettre en place un programme de réadaptation fonctionnelle et de réentrainement à l’effort le plus efficace en terme de résultats et de temps de prise en charge, il semble indispensable d’identifier les caractéristiques musculaires globales de l’individu, en incluant notamment celles des membres inférieurs. En effet, si les facteurs de déficit des muscles du tronc et les liens avec la lombalgie sont bien documentés (Poiraudeau et coll., 2004), les études s’intéressant à l’évaluation de la force au niveau des membres inférieures le sont moins.

Ainsi, quelques auteurs ont montré que les douleurs de type lombalgie peuvent venir d’un déséquilibre musculaire des membres inférieurs, déséquilibre qui aurait des répercussions sur le tronc, et pouvant entrainer des douleurs. Ces déséquilibres se retrouvent ainsi au niveau des hanches (Mc Gregor et coll., 2009, Murray et coll., 2009). Cependant, les études restent insuffisantes et ne caractérisent pas les fonctions musculaires des membres inférieurs chez les patients lombalgiques. Il semble donc indispensable de vérifier aussi s’il existe bien un déficit musculaire au niveau des muscles des membres inférieurs chez les lombalgiques chroniques, et de voir s’il existe des liens avec le déficit musculaire observé au niveau du tronc.

Définition

La lombalgie n’est pas définie d’une seule manière. Dionne et coll. (2008) ont mis en évidence les difficultés à déterminer une définition consensuelle de la lombalgie au niveau international en raison des différences culturelles, linguistiques et méthodologiques. La revue de littérature menée par Malliou et coll. (2006) a permis de mettre en évidence que certains auteurs utilisent une définition basée sur les régions anatomiques à partir desquelles les douleurs sont perçues par les sujets, alors que d’autres utilisent une définition basée sur la durée des symptômes.

D’après l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (INSERM, 1995), le terme de rachialgie s’applique à toutes les manifestations douloureuses au niveau du rachis, quelle que soit la cause de ce symptôme. D’après la topographie des douleurs mise en place par Bogduk (1999), en fonction du point d’origine de la douleur, nous pouvons distinguer :
– les douleurs cervicales ou cervicalgies s’étendant de la première vertèbre cervicale (C1) à la charnière cervico-dorsale représentée par la dernière vertèbre cervicale (C7) et la première vertèbre dorsale (D1),
– les douleurs dorsales ou dorsalgies s’étendant de la charnière cervico-dorsale (C7-D1) à la charnière dorso-lombaire représentée par la dernière vertèbre dorsale (D12) et la première vertèbre lombaire (L1),
– les douleurs lombaires ou lombalgies s’étendant de la charnière dorso-lombaire (D12- L1) à la charnière lombo-sacrée représentée par la dernière vertèbre lombaire (L5) et la première vertèbre sacrée (S1).

Afin de standardiser au mieux la terminologie utilisée pour décrire la lombalgie chronique, l’International Association for the Study of Pain (IASP) propose également une définition établie à partir des points douloureux ressentis par les patients. La douleur lombaire est limitée latéralement par les bords externes des muscles spinaux, et transversalement par une ligne imaginaire passant par le processus épineux de la douzième vertèbre dorsale (D12) pour le niveau supérieur, et par celui de la première vertèbre sacrée (S1) pour le niveau inférieur. La douleur  sacrée est située dans une zone entourant le sacrum. Elle est limitée au niveau inférieur par une ligne transversale imaginaire passant par l’articulation sacro coccygienne et latéralement par une ligne verticale passant par le processus épineux de S1. Pour l’IASP (International Association for the Study of Pain, 2010), la lombalgie est une perception douloureuse provenant d’une des deux régions précédentes, voire des deux en même temps.

La lombalgie est également communément définie sur la durée des symptômes dans les études cliniques (Rannou et coll., 1997 ; Dusquenoy, 2001). Nous pouvons alors distinguer trois types de lombalgie. Tout d’abord, la lombalgie aiguë correspond à la présence d’une douleur d’origine lombaire souvent très pénible, mais d’importance variable, qui est calmée avec du repos (Poiraudeau et coll., 2004). Elle correspond le plus souvent à un lumbago. Celui-ci se définit par une douleur lombo-sacrée d’apparition brutale généralement déclenchée par un faux mouvement, un effort traumatisant ou un geste quotidien de la vie courante. Elle est parfois accompagnée de la perception d’un craquement.

Les étiologies possibles sont multiples : distension ligamentaire, discopathies, lésion musculaire ou arthrose des articulations postérieures essentiellement (Poiraudeau et coll., 2004). La guérison est rapide et varie de 2 à 15 jours. On parle cependant de lombalgie aigue lorsque la présence de la douleur d’origine lombaire évolue depuis moins de 6 semaines. La lombalgie subaiguë concerne les douleurs lombaires évoluant sur une durée comprise entre 6 et 12 semaines. Les causes et les facteurs de celle-ci sont les mêmes que ceux de la lombalgie aiguë. Cette catégorie de lombalgie commune a été créée afin de permettre des études spécifiques de cette situation qui offre de forts risques de passage à la chronicité (Poiraudeau et coll., 2004). C’est à ce stade qu’il existe un fort risque de chronicité, mais c’est aussi durant cette phase que les programmes de reconditionnement à l’effort se sont montrés les plus efficaces (Poiraudeau et coll., 2007).

Le traitement de la lombalgie subaiguë représente un outil de prévention de la lombalgie chronique. Enfin, la lombalgie chronique caractérise les douleurs lombaires persistant depuis plus de 3 mois (van Tudler, 2006). Pour le Groupe d’Etude des Lombalgies (1993 ; Dusquenoy et coll., 1994), la lombalgie chronique correspond à « une douleur lombosacrée à hauteur des crêtes iliaques ou plus bas, médiane ou latéralisée, avec possibilité d’irradiation ne dépassant pas le genou, mais avec prédominance de la douleur lombo-sacrée pendant au moins trois mois, quasi quotidienne, sans tendance à l’amélioration ». Cette définition a été reprise par l’Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation à la Santé (ANAES, 2000) et la Société Française de Rhumatologie (2007). L’objet de ce travail de thèse porte sur cette population.

Il semble également important de compléter cette définition de la lombalgie par la définition de la douleur, « expérience sensorielle et émotionnelle désagréable liée à des lésions tissulaires réelles ou potentielles, ou décrite en des termes évoquant de telles lésions » (Merskey et Bogduk, 1994). Cette définition met en avant le caractère subjectif, pluridimensionnel et complexe de la douleur.

Epidémiologie et répercussions socio-économiques

Prévalence des lombalgies 

Les données épidémiologiques présentées dans la littérature sont très dépendantes du système de santé du pays dans lequel elles sont étudiées (Bourgeois, 2001). Cela explique la prévalence élevée mais variable des lombalgies dans les différentes études. Ainsi, une revue des prévalences de lombalgie avec irradiation montre une énorme variation dans les définitions et dans les chiffres rapportés (Rossignol et coll., 2009 ; Konstantinou et Dunn, 2008).  Dans les pays occidentaux, la prévalence des lombalgies, qui correspond au pourcentage de cas survenant habituellement en un an dans une population n’ayant jamais souffert, est de 5% (Rossignol et coll., 2009).

La prévalence de la lombalgie sur la population générale sur la vie entière est estimée entre 49 et 85%. Sur 12 mois, elle varie entre 15 et 45%. Enfin, la prévalence instantanée est de 19% (Andersson, 1979; Cassidy et coll., 1998; Hillman et coll., 1996). La prévalence ponctuelle des lombalgies est estimée à 30% en moyenne (Valat, 1998). Elle varie cependant selon l’âge et la définition donnée aux lombalgies. Elle est minimale dans les tranches d’âge de 20 à 24 ans (4 à 18%) et maximale dans la tranche d’âge de 55 à 64 ans (8 à 32%) (Bressler et coll., 1999 ; Papageorgiou et Rigby, 1991; Deyo et coll., 1986). En France, plus de la moitié de la population dans une groupe d’âge de 30 à 64 ans a souffert de lombalgie dans les douze derniers mois, avec 17% qui ont subi un épisode douloureux plus de 30 jours dans les douze derniers mois (Gourmelen et coll., 2007).

Incidence des lombalgies

La lombalgie est appelée « maladie du siècle » (Poiraudeau et coll., 2004) car son incidence, qui correspond à la proportion de sujets déclarant souffrir ou ayant souffert au moins une fois de la région lombaire au cours d’une période déterminée, varie entre 60 et 90% en fonction des études, avec une incidence annuelle de 5% (Gross et Battié, 2005 ; Hadler, 1995 ; Behrens et coll., 1994; Frymoyer et Cats-Baril., 1991; Spengler et coll., 1986). En France, 70% des adultes déclaraient souffrir ou avoir souffert de lombalgie au cours de leur vie (Centre de Recherche pour l’Etude et l’Observation des Conditions de vie – CREDOC, 1995). La proportion d’adultes déclarant avoir souffert de lombalgie dans le mois précédant l’enquête s’élève à 47% (INSERM, 1995). L’incidence annuelle des lombalgies dans la population adulte varie entre 5 et 10%, le taux de récidive étant de l’ordre de 60 à 85% (Valat, 1998). Selon les estimations, 8 personnes sur 10 souffriront de douleurs rachidiennes au moins une fois au cours de leur vie (Poiraudeau et coll., 2004 ; Hult, 1954).

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PARTIE 1. CADRE THEORIQUE
1 Définition de la lombalgie
1.1Epidémiologie et répercussions socio-économiques
1.1.1 Prévalences des lombalgies
1.1.2 Incidences des lombalgies
1.2 Le passage à la chronicité et les conséquences liées à cette chronicité
1.2Les coûts induits par la lombalgie
2 Rappels anatomiques
2.1 Le tronc
2.1.1 La colonne vertébrale
2.1.2 Le disque intervertébral
2.1.3 Les mouvements de la colonne vertébrale
2.1.4 Les muscles du tronc
2.1.5.1. Les muscles extenseurs du rachis
2.1.5.2. Les muscles fléchisseurs du rachis
2.1.5.2.1. Les muscles de la paroi abdominale
2.1.5.2.2. Les muscles latéro-vertébraux lombaires
2.2 Les hanches
2.2.1 Les muscles fléchisseurs de la hanche
2.2.2 Les muscles extenseurs de la hanche
2.3 Les genoux
2.3.1 Les muscles extenseurs du genou
3 Origine de la lombalgie
4 La prise en charge de la lombalgie
4.1 Le syndrome du déconditionnement à l’effort
4.2 Les différents types de prise en charge dans le cadre de la lombalgie chronique
4.2.1 Les traitements non invasifs
4.2.1.1. Les traitements médicamenteux
4.1.1.1.1. Les antalgiques
4.1.1.1.2. Les Anti Inflammatoires Non Stéroïdiens
4.1.1.1.3. Les myorelaxants
4.1.1.1.4. Les antidépresseurs
4.2.2 Les traitements non médicamenteux
4.2.2.1. Traitements invasifs
4.2.2.1.1. Les actes non chirurgicaux
4.2.2.1.2. Les actes chirurgicaux
4.2.2.2 Les traitements passifs
4.2.2.2.1. Le massage
4.2.2.2.2. La physiothérapie
4.2.2.2.3. Les mobilisations et les manipulations
4.2.2.2.4. Le repos
4.2.2.3. Traitements actifs
4.2.2.3.1. La rééducation en cyphose
4.2.2.3.2. La rééducation en lordose
4.2.2.3.3. La stabilisation lombaire
4.2.2.3.4. La massokinésithérapie
4.2.2.4. Programmes du dos
4.2.2.5. Programmes de restauration fonctionnelle du rachis
5 Evaluation des sujets lombalgiques
5.1 Evaluation de la force musculaire
5.1.1 Evaluation musculaire isométrique
5.1.2 Evaluation musculaire dynamique
5.1.2.1 le PILE
5.1.2.2 Evaluation iso-inertielle
5.1.2.3 Evaluation iso-cinétique
5.1.2.3.1 Introduction générale
5.1.2.3.2 Les muscles du tronc
5.1.2.3.3 Les muscles du genou
5.1.2.3.4 Les muscles de la hanche
5.2 La flexibilité
5.3 Evaluation de l’endurance
5.4 Evaluation de la qualité de vie
5.4.1 FABQ : Fear-Avoidance Beliefs Questionnaire
5.4.2 Québec : l’échelle d’incapacité fonctionnelle de Québec
5.4.3 DPQ : Dallas Pain Questionnaire
5.4.4 Hospital Anxiety Depression (HAD) scale
5.4.5 EVA
6 Les relations force-vitesse, puissance vitesse
6.1 Les relations fondamentales
6.1.1 Le modèle de Hill
6.1.2 La relation tension-longueur
6.1.3 La relation force-vitesse
6.1.4 La relation puissance-vitesse
6.1.5 Interprétation physiologique
6.2 Lors de mouvements mono et pluri articulaires
6.2.1 Les relations force-vitesse et puissance-vitesse
6.2.2 Interprétation physiologique
7 Buts de l’étude
PARTIE 2. CADRE EXPERIMENTAL
I Matériel et méthode communs aux différentes études
1 Recrutement des sujets
1.1 Les sujets lombalgiques
1.2 Les sujets sains
2 Evaluation isocinétiques des muscles du tronc
3 Détermination des relations force-vitesse et puissance-vitesse
II Etudes
ETUDE 1. Evaluation des muscles fléchisseurs et extenseurs de hanche chez des sujets lombalgiques chroniques. Relations avec la faiblesse et les déséquilibres musculaires au niveau du tronc
1 Introduction
2 Matériel et méthode
1.1 Sujets
1.2 Protocole
1.2.1 Mesures au niveau du tronc
1.2.2 Mesures au niveau du genou
1.3 Relations moment-vitesse et puissance-vitesse
1.4 Analyses statistiques
3 Résultats
3.1 Mesures au niveau du tronc
3.2 Mesures au niveau du genou
4 Discussion
5 Conclusion
ETUDE 2. Validation d’un protocole d’évaluation des relations moment-vitesse et puissance vitesse des muscles fléchisseurs et extenseurs de hanche dans des conditions isocinétiques
1 Introduction
2 Matériel et méthode
2.1 Sujets
2.2 Protocole
2.2.1 Mesures
2.2.2 Protocole
2.3 Analyse des données et relations moment- et puissance-vitesse
2.4 Analyse statistique
3 Résultats
3.1 Valeurs mécaniques
3.2 Relations moment-vitesse et puissance-vitesse
4 Discussion
4.1 Valeurs mécaniques
4.2 Relations moment-vitesse et puissance-vitesse
5 Conclusion
ETUDE 3. Evaluation des muscles fléchisseurs et extenseurs de hanche chez des sujets lombalgiques chroniques. Relations avec la faiblesse et les déséquilibres musculaires au niveau du tronc
1 Introduction
2 Matériel et méthode
2.1 Sujets
2.2 Protocole
2.3 Analyse statistique
3 Résultats
3.1 Evaluation des muscles du tronc
3.2 Evaluation des muscles des hanches
4 Discussion
5 Conclusion
CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES
REFERENCES
ANNEXES

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