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Les forêts sacrées à Madagascar
Comme dans nombreux pays Africains, il existe ce type de forêt à caractère divin à Madagascar. Ces forêts sont des lieux mythiques et mystérieux où sont gardés de grands secrets d’initiation, des objets sacrés et immémoriaux et des totems. Ces forêts sacrées se répartissent dans tout le territoire. Chaque région a sa façon de définir la forêt sacrée selon les organisations sociales qu’elle possède. Quelques parties dans l’île définissent la forêt sacrée comme le siège des esprits car d’après leurs coutumes, ces régions utilisent la forêt comme lieu d’enterrement des ancêtres. Comme chez les Mahafaly, la forêt sacrée joue un rôle social, culturel et thérapeutique dans la vie des Mahafaly. Cette forêt est « le domaine des esprit qui sont considérés comme les propriétaires de la forêt »2. Ils sont antagonistes aux vivants et capables de nuire à leurs activités en provoquant des maladies et des cataclysmes naturels. Dans la sacralité de la forêt chez les Mahafaly, tous les éléments qui la composent sont sacrés et sont régis par des interdits. Il est fortement interdit de pratiquer des coupes dans cette forêt ou encore chasser des animaux car ils font partie intégrante de la forêt et sont donc sacrés. L’accès à la forêt sacrée est donc règlementé. Chez les Bara, quant à eux, la forêt sacrée d’Analavelona est considérée comme un refuge pour les âmes mortes. Le seul usage de la forêt autorisé par les ancêtres Bara est la coupe du bois pour la fabrication des cercueils et seuls les initiés ont le droit d’y pénétrer.3
La forêt sacrée d’Ambohimanga est le siège des plantes pharmacopées où l’on rencontre de diverses plantes médicinales. Cette sacralité de la forêt a été instauré par le roi ANDRIANAMPOINIMERINA car il a perçu l’abondance et les qualités de ces plantes dans cette zone forestière et a tenu à ce que soit gardée intacte. Ces plantes sont nécessaires à la vie quotidienne de la population pour améliorer leur santé. En plus de cela, la forêt d’Ambohimanga est constituée de différents éléments sacrés qui rendent la forêt plus sacrée et ces éléments sont protégés par des interdictions instaurées par ANDRIANAMPOINIMERINA. Globalement, les interdictions permettent sa conservation, où la gestion de cette forêt est règlementée par des lois.
Les travaux cartographiques
Tous travaux de recherche en matière d’analyse spatiale des faits doivent passer par la phase des travaux cartographiques. Divers outils ont été nécessaires dans la conception des cartes : le logiciel SIG qui nous a permis de spatialiser les informations et données, les différents fonds de carte tels que les photos aériennes obtenues avec Google Earth, et enfin et non le moindre, les différentes bases de données (données cartographiques, tableaux statistiques, …) recueillies sur terrain et auprès des responsables administratifs et techniques de la mairie et de l’OSCAR.
Dépouillement des données et rédaction du mémoire
Dans cette dernière étape, nous avons effectué la compilation des différents types de données obtenues lors des travaux de terrain. Cette étape est dédiée aux analyses des fiches d’enquêtes et questionnaires. Nous avons comparé les dires des personnes enquêtées avec nos propres observations afin de pouvoir élaborer le plan qui suit : dans un premier lieu une approche rétrospective de la recherche avec l’analyse des divers ouvrages traitant le sujet ; dans un second lieu, les réponses directes à la problématique et en fin, dans un troisième temps, les différentes mesures prises et à entreprendre pour la sauvegarde de la forêt sacrée d’Ambohimanga Rova. Après le dépouillement des données nous sommes passés à la rédaction proprement dite.
Les particularités écologiques du site sacré
Ambohimanga est une zone caractérisée par la dominance de paysage collinaire typique des Hautes Terres Centrales en alternance avec des bas-fonds et des plaines. En plus, elle se situe à une altitude variant entre 1 200 m et plus de 1 600 m. Deux principaux types de relief sont rencontrés dans la commune : un paysage collinaire au Nord et un paysage de plaine au Sud. Trois principales collines apparaissent distinctement dans la commune d’Ambohimanga : la colline d’Ambatondradama au Nord, avec une altitude de 1 510 m ; la colline royale d’Ambohimanga au centre, culminant à plus de 1 614 m d’altitude et la colline de Mangabe située à l’Ouest de la colline d’Ambohimanga, ayant une altitude de 1 300 m. Ces collines sont étroitement liées du point de vue historique et spatial. Elles se localisent toutes dans la partie Nord de la commune (cf. Croquis n°3)
Le croquis n°3 montre la topographie dans la commune d’Ambohimanga Rova. La zone la plus basse se situe dans la partie Sud de la commune avec une altitude de 1 250 m. Tandis que la zone la plus élevée se situe à plus de 1 500 m au Nord de la commune, cette zone élevée est la colline sacrée d’Ambohimanga Rova.
Un type de sol ferralitique
L’ensemble de la commune est marquée par la prédominance d’un sol ferralitique mais c’est la texture qui la différencie selon la topographie. Elle possède 2 types de sol ferralitique rajeunis, riche en minéraux primaires et qui change de propriété suivant la topographie. (RAMAHAVALISOA, 2016) :
– Le sol ferralitique rajeunis en minéraux peu altérable, qui se localisent sur les collines et les versants. C’est un sol peu compact, très poreux et bien pénétrés par les racines des végétations. Son horizon superficiel est riche en argile. Il possède entre l’horizon A de surface et l’horizon B pulvérulent un horizon intermédiaire de faible épaisseur polyédrique légèrement compact, entre 10 et 40 cm. (BOURGEAT et AUBERT, 1972).
– Le sol ferralitique rajeunis hydromorphe ou sol de bas-fonds s’observent généralement sur d’anciennes colluvions de bas de pente ou sur des terrasses alluviales anciennes. Ils sont toujours humifères et indiquent la présence d’une nappe phréatique profonde. (BOURGEAT et AUBERT, 1972).
La colline sacrée d’Ambohimanga Rova a donc ce type de sol ferralitique en minéraux peu altérable tandis qu’en bas de pente et aux alentours de la colline le sol est de type ferralitique hydromorphe.
Une forêt dense humide de moyenne altitude
La forêt d’Ambohimanga est l’un des derniers vestiges des forêts primaires de l’Imerina ayant subsisté dans la région et couvre 16 ha de la colline. Selon HUMBERT (1965), la forêt d’Ambohimanga appartient au domaine phytogéographique du centre, à l’étage de moyenne altitude, se situe entre 800 et 1 800 m d’altitude. Cette végétation climacique4 est une forêt dense humide de moyenne altitude, série de Tambourissa et de Weinmania. Cette forêt est riche en plantes endémiques qu’on ne rencontre qu’à Madagascar, ainsi que des échantillons de la plupart des plantes pharmacopées de Madagascar. Plusieurs espèces endémiques comme Tambourissa sp. Phylarthron madagascariensis, Brochylema mamiflorer et notamment des plantes médicinales sont présentes dans cette forêt sacrée. Des espèces d’arbres typiques des villes royales comme Fucus sp. et Draceana sp. y sont également présentes. (RAFOLO et RAVAONANTOANDRO, 2000). Cette forêt est riche en variété floristique composée de 124 espèces réparties en 102 genres et 51 familles. Parmi ces 124 espèces, la colline d’Ambohimanga renferme 32 plantes endémiques de Madagascar.
L’occupation de l’espace et l’accès aux ressources naturelles règlementés par le statut social
Pendant l’époque royale, Ambohimanga possédait une organisation sociale pyramidale qui se marie avec la forme collinaire pour signifier symboliquement les différentes strates constituant l’Etat. La configuration accidentée de la colline était exploitée de manière à permettre une lecture verticale de la répartition des groupes selon leur rôle social. D’après la hiérarchie sociale, il existait un classement sur l’implantation des habitations sur le sommet et autour de la colline. Le sommet est naturellement réservé à la résidence du souverain et de la cour. Trois palais ont été construits au sommet de cette colline : le palais de Bevato sous le règne de ANDRIANTSIMITOVINANDRIANA, ce palais n’existe plus actuellement, le palais de Nanjakana et le palais de Mandrihono sous le règne d’ANDRIANAMPOINIMERINA qui existe encore jusqu’à maintenant.
Les habitations du peuple s’étagent sur le flanc des collines et se prolongent par les champs et les rizières dans la vallée. Les habitations des personnes de même appartenance étaient sur les mêmes terrasses. Les 5 groupes les plus anciens se répartissent autour du palais. Autour d’eux avaient été installés les représentants des autres Merina, ceux de l’Avaradrano, puis ceux des autres groupes. Chaque catégorie sociale constitutive de la société merina est accompagnée respectivement de leurs esclaves, et ils avaient leur emplacement défini.
Pour une meilleure protection de la colline, les rois ont installés des éléments de défense à la périphérie qui ceinturent les collines contre les potentiels ennemis. Ils régulent donc l’accès au site et déterminent l’espace des interdits. La forêt est aussi une ressource bien préservée durant cette époque royale. Seul le souverain avait le droit de toucher aux arbres car la forêt était comme un bien exclusif appartenant au roi. C’était lui seul qui peut donner des autorisations d’accès dans le site ou la forêt selon les besoins de la population. Comme la récolte des eaux dans la source proche du village, c’est seulement les femmes enceintes, les femmes âgées et les enfants qui ont le droit d’y prendre l’eau.
Actuellement, Ambohimanga représente des diversifications populaires mais les plus fortement majoritaires sont les originaires qui sont les descendants en grande partie des Tsimahafotsy. Cette diversification est marquée dans le fokontany Avarakady, Ambohimanga Rova, Vakinampasika, Fiekena, Soavinimerina et Soamonina dont 70% sont des originaires d’Ambohimanga, les 25% sont des originaires des autres communes proches d’Ambohimanga et les 5% restant sont des étrangers. (RAMAHAVALISOA, 2016).
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
Première Partie : CADRE THEORIQUE ET DEMARCHE DE RECHERCHE
Chapitre I : ANALYSE RETROSPECTIVE SUR LA CONSERVATION ET LA SACRALISATION DE LA FORET
1.1- Le concept de conservation des forêts
1.2- Les relations entre la sacralisation et la conservation de la forêt
1.3- Les forêts sacrées à Madagascar
Chapitre II : LA DEMARCHE DE LA RECHERCHE
2.1- La phase de recherche bibliographique
2.2- La problématique et les hypothèses de la recherche
2.3- Conception des outils d’analyse
2.4- Dépouillement des données et rédaction du mémoire
Conclusion de la première partie
Deuxième Partie : LA SACRALISATION DE LA FORET D’AMBOHIMANGA : UNE FORME DE CONSERVATION
Chapitre III : LES CONDITIONS PARTICULIERES DE LA ZONE SACREE
3.1- Les particularités écologiques du site sacré
3.2- Une forêt dense humide de moyenne altitude
3.3- L’occupation de l’espace et l’accès aux ressources naturelles règlementés par le statut social
3.4- Organisation sociale d’Ambohimanga : un système de caste
Chapitre IV : DE LA SACRALISATION A LA CONSERVATION DE LA FORET
4.1- La forêt : un haut lieu cultuel où vivent les mânes des ancêtres
4.2- Les éléments marqueurs du milieu forestier: divinisés et sacralisés
4.3- Les interdictions et les diverses prescriptions coutumières : règlementent la gestion des ressources forestières
Conclusion de la deuxième partie
Troisième Partie : DE LA DESACRALISATION A LA DEGRADATION DE LA FORET
Chapitre V : UNE MUTATION SOCIALE ENTRAINANT LA DESACRALISATION DE LA FORET
5.1- L’émergence du christianisme et la désacralisation
5.2- La démocratisation de l’éducation
5.3- Accroissement de la population
5.4- La désacralisation de la forêt
Chapitre VI: LES ACTEURS DE CONSERVATION DE LA FORET D’AMBOHIMANGA ROVA
6.1. L’OSCAR : un organisme de gestion du site
6.2. Le rôles des acteurs locaux
Conclusion de la troisième partie
CONCLUSION GENERALE
Bibliographie
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