Littératie par rapport à l’anxiété
Quelques études ont évalué la LSM par rapport aux troubles anxieux et montrent que la capacité à les reconnaître est plutôt faible dans la population générale. Par exemple, on peut voir de faibles taux de reconnaissance dans l’étude de Furnham et Lousley (2013) qui a été réalisée avec un échantillon de 317 adultes, dont 103 étudiants de premier cycle en psychologie et 214 venant de la population générale, tous âgés de 18 à 80 ans. La LSM a été évaluée à l’aide de huit vignettes décrivant divers troubles anxieux. Les vignettes du TAG, du TOC, du TP et du TAS étaient celles utilisées par Coles et Coleman (2010), tandis que la vignette du TSPT a été tirée de l’étude de Munro, Freeman et Law (2004). Les vignettes portant sur la PS, l’agoraphobie et le trouble d’anxiété de séparation ont été adaptées à partir de divers livres. Les taux de reconnaissance des troubles anxieux étaient plutôt faibles, soit 1,26% pour le TP, 2,84% pour le TAG, 10,73% pour le TAS et 34,07% pour la PS.
Enfin, pour le TP, il semble que les participants demanderaient davantage une aide aux médecins généralistes qu’aux psychologues, ce qui suggère que ce trouble est davantage perçu comme un problème médical (20,5%) et comme des attaques de panique (27,8%). De plus, il semble que les répondants qui ont correctement identifié ce trouble considéraient davantage l’aide de psychologues. Ces différentes croyances pour les traitements pourraient en partie résulter du manque de connaissance par rapport aux troubles et à leur gravité.
Littératie sur les troubles anxieux chez les personnes âgées
Divers travaux (Wetherell et al., 2009; Coles, Schubert, Heimberg, & Weiss, 2014; Furnham & Lousley, 2013; Reavley et al., 2014; Hadjimina & Furnham, 2017; Beaunoyer, Landreville, & Carmichael, 2017a), ont mis en lumière que les aînés présentent un niveau de LSM inférieur aux personnes plus jeunes, notamment par rapport à certains troubles anxieux. Les prochains paragraphes présentent une brève synthèse de ces travaux. Wetherell et al. (2009) ont étudié les différences selon l’âge quant à l’identification des symptômes anxieux et dépressifs auprès de 374 adultes âgés de 18 à 93 ans. Les participants devaient classer des symptômes comme étant typiques de l’anxiété (agitation, palpitations, tension musculaire, etc.), de la dépression (sentiment de vide, perte d’intérêt/plaisir dans les activités, pensées de mort/suicide, etc.), de ces deux troubles (difficulté à se concentrer, insomnie, etc.) ou ne faisant pas partie de ces deux troubles (hallucinations et délires).
Les résultats ont indiqué que le prédicteur principal de la classification appropriée des symptômes était l’âge, les participants âgés de 65 ans et plus classant moins de symptômes correctement que les participants plus jeunes. L’agitation et les palpitations étaient les seuls symptômes classés adéquatement comme étant des symptômes d’anxiété par la majorité des adultes âgés. Les adultes âgés et les jeunes adultes étaient toutefois comparables dans leur capacité de classifier de façon plus précise les symptômes dépressifs que les symptômes anxieux.
Enfin, dans l’ensemble, les résultats des adultes âgés sont plus faibles que les jeunes adultes, autant pour la dépression que pour l’anxiété. Cela suggère que la population âgée pourrait avoir plus de difficulté à identifier et à rechercher les traitements appropriés pour les symptômes courants de ces troubles. Il est possible de voir des résultats similaires dans l’étude de Coles et al. (2014) qui portait sur 577 adultes âgés de 18 ans ou plus issus de la population générale. La LSM a été évaluée à l’aide de l’Anxiety Knowledge Survey (AKS), une mesure standardisée qui contient des vignettes portant sur le TAS, le TAG, le TP, le TOC, la dépression, ainsi qu’une vignette sur le stress de la vie. Les résultats montrent que moins de 20% des participants ont correctement identifié les troubles anxieux. Les pourcentages de reconnaissance pour certains des troubles spécifiques étaient de 16,6% pour le TP, de 15,9% pour le TAG et de 8,8% pour le TAS. La vignette du TAS était celle la plus souvent classée en tant que dépression (6,9%), suivie de la vignette de la PS (2,1%) et celle du TP (1,9%).
Contrairement aux faibles taux de reconnaissance des troubles anxieux, 53,4% des répondants ont correctement identifié la dépression. Qui plus est, les répondants ont moins considéré le TP (52,4%), le TAG (52,1%) et le TAS (37,7%) comme étant un trouble de santé mentale que la dépression (62,2%). Un âge plus jeune était associé à une meilleure reconnaissance des troubles anxieux, notamment du TAS et du TAG. En outre, le fait d’avoir déjà suivi un traitement en santé mentale était associé à une meilleure reconnaissance du TP et un niveau d’éducation élevé était associé à une meilleure reconnaissance du TAS et du TP
Mesures de la littératie sur les troubles anxieux
La plupart des études mentionnées dans la section précédente ont utilisé une méthode basée sur la reconnaissance des troubles anxieux à partir d’une vignette. De fait, la méthode la plus couramment utilisée pour évaluer la LSM dans la population générale consiste en une entrevue basée sur une vignette d’une personne souffrant d’un trouble mental. Les participants reçoivent ainsi une vignette décrivant une personne vivant un problème mental suivie d’une série de questions relatives à la compréhension de ce que vit cette personne (Jorm et al., 1997).
Dans la majorité des études (Coles et al., 2016; Jorm et al., 1997; Morgan, Reavley, & Jorm, 2014; Reavley & Jorm, 2011), les vignettes ont été écrites de façon à satisfaire les critères diagnostiques du quatrième Manuel Diagnostique et Statistique des troubles mentaux (DSM-IVTR; American Psychiatric Association, 2004) et ceux de la Classification Internationale des Maladies, 10e révision (CIM-10; Organisation mondiale de la Santé, 1993). Également, les vignettes contrôlent typiquement pour le genre (Jorm et al., 1997; Jorm, Mackinnon, Christensen, & Griffiths, 2005; Paulus et al., 2015) et sont validées par une enquête auprès de psychiatres et de psychologues (Wright & Jorm, 2009).
Cependant, Wei et al. (2015) ont noté que les qualités psychométriques des mesures des connaissances en santé mentale, qui comptent plusieurs instruments basés sur la méthode des vignettes, ne sont disponibles que pour une minorité d’entre elles. De plus, alors que leurs résultats indiquent que l’approche des vignettes est largement utilisée comme mesure des connaissances en santé mentale, ils notent que la poursuite des études pour établir la validité de cette approche est nécessaire. Par ailleurs, il peut être plus facile de reconnaître différents troubles anxieux lorsque présents chez une autre personne que lorsqu’ils sont vécus par soi-même (Coles & Coleman, 2010). La méthode des vignettes ne permet donc pas d’évaluer avec certitude la reconnaissance du trouble par une personne qui manifeste les symptômes présentés dans la vignette. Dans les lignes qui suivent, on décrit les principales mesures de la littératie sur les troubles anxieux.
Objectifs et retombées attendues
Le QCTA est un instrument de mesure prometteur, puisque Beaunoyer et al. (2017b) ont déjà démontré que les aînés obtiennent un résultat plus faible que les jeunes adultes à la fois sur l’échelle complète et la plupart des dimensions. Il serait donc intéressant de poursuivre la recherche avec cet instrument de mesure, mais, ses qualités psychométriques sont peu documentées. L’objectif de l’étude présentée dans le chapitre 2 de ce mémoire est donc d’examiner les qualités psychométriques du QCTA auprès d’adultes francophones.
Les objectifs spécifiques sont de vérifier (a) sa validité, par l’analyse de la structure factorielle, de la validité convergente, ainsi que de la validité liée à un critère et (b) sa fidélité, par l’examen de la cohérence interne et de la stabilité test-retest. Il est attendu que les spécialistes en santé mentale obtiennent un résultat global plus fort au QCTA que les participants ne possédant pas cette expertise et que les personnes âgées obtiennent un résultat global plus faible au QCTA que les autres groupes à l’étude, soit des adultes plus jeunes et des spécialistes en santé mentale. S’il s’avère que le QCTA est valide et fiable, il serait intéressant de continuer de l’utiliser en recherche. Il pourrait aussi trouver des applications en clinique, notamment pour évaluer les connaissances des patients par rapport aux troubles anxieux et leurs besoins d’éducation à ce niveau.
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Table des matières
Chapitre 1 : Introduction
Troubles anxieux
Littératie en santé mentale
Mesures de la littératie sur les troubles anxieux
Validité et fidélité d’un test
Objectifs et retombées attendues
Chapitre 2 : Qualités psychométriques du Questionnaire des Connaissances des Troubles
Anxieux
Résumé
1.Introduction
2.Méthode
2.1. Participants
2.2. Matériel
2.3. Procédure
2.4. Analyse des données
3.Résultats
3.1. Analyses descriptives
3.2. Validité
3.3. Fidélité
4.Discussion
Déclaration de conflit d’intérêt
Financement
Remerciements
Références
Chapitre 3 : Conclusion générale
Rappel du contexte, des objectifs, de la méthode et des principaux résultats de l’étude
Limites de l’étude
Implications pour la recherche et la clinique
Bibliographie
Annexe A
Annexe B
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