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L’Interruption Vo lontaire de Grossesse (IVG) en France
Evolution du taux d’IVG chez les femmes de 15 à 49 ans
En 1975, la loi Veil autorisait l’IVG en France aux femmes dont « la grossesse les plaçait en situation de détresse ». Après révision de cette loi en 2001, le recours à l’IVG est désormais possible pour toute femme, sans condition de situation. Depuis sa législation jusqu’en 2006, le taux d’IVG a augmenté ; puis s’est ensuite stabilisé jusqu’à nos jours.
Selon une étude de la Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques (DREES) en 2013, la France comptabilisait 229 000 IVG, soit un recours de 15.6 IVG pour 1000 femmes. Ce taux montre une augmentation par rapport aux deux années précédentes, ainsi qu’en témoignent les 222 000 IVG en 2011 et 219 000 IVG en 2012 [6].
L’IVG en fonction de l’âge
L’étude des chiffres de 2013 expose clairement que ce sont les femmes de 20 à 24 ans qui ont le plus recours à l’IVG avec 28.8 IVG pour 1000 femmes, taux qui ne cesse de croître dans cette tranche d’âge ces dernières années. A contrario, chez les femmes de moins de 20 ans, les taux continuent de baisser, avec 9.5 IVG pour 1000 femmes de 15 à 17 ans, et 21.8 IVG pour 1000 femmes de 18 à 19 ans [6].
L’IVG en fonction de la parité
Les chiffres de 2013 de la DREES ne renseignent pas sur la parité des femmes au moment où elles ont recours à une IVG. Pour cela, il faut prendre les dernières statistiques de l’INED réalisées en 2012.
Ces dernières révèlent que ce sont les nullipares les plus concernées par les IVG en 2012, avec un taux de près de 41 % [8].
L’IVG en fonction de l’âge et de la parité
Les chiffres de l’INED de 2012 révèlent que les nullipares sont très touchées par le recours à l’IVG, et plus particulièrement la tranche d’âge des 20-24 ans avec 23 965 IVG en 2012, soit 64 % des IVG chez les femmes de 20-24 ans toute parité confondue ; et plus de 38 % des IVG chez les nullipares tout âge confondu [9].
Un constat sans appel un p aradoxe en France
Depuis la loi Neuwirth votée en Décembre 1967, les moyens contraceptifs n’ont cessé de se multiplier, si bien que les Françaises bénéficient d’une des plus importantes couvertures contraceptives au monde.
En parallèle, le nombre d’IVG reste élevé. Qui plus est, ce taux a tendance à augmenter en 2013 dans certaines tranches d’âge, dont les 20-24 ans et les 25-29 ans [6].
Causes des grossesses non désirées
De l’indice de Pearl à la réalité
L’indice de Pearl donne l’efficacité théorique d’une contraception, soit le nombre de grossesses pour 100 femmes après un an d’utilisation optimale. Un moyen contraceptif est considéré très efficace si l’indice de Pearl est inférieur à un [10].
Cependant, en pratique courante, ce chiffre a tendance à augmenter. En prenant l’exemple de la pilule, l’indice de Pearl est en théorie de 0.3 mais dans de 8 en pratique courante. Il en est de même pour les méthodes dépendant directement de l’observance. En revanche, pour les contraceptions dites de « longue durée d’action » comme l’implant ou le DIU, l’indice de Pearl reste très satisfaisant aussi en utilisation optimale que courante (Annexe 1).
Mode de vie des femmes du XXIème siècle
Le changement de statut des femmes peut expliquer ce recours toujours important à l’IVG 40 ans après sa législation. En 1975, 41 % des grossesses non désirées aboutissaient à une IVG, contre 62 % en 2000. Dorénavant, la maternité est choisie.
Les femmes font davantage de longues études et privilégient leur carrière professionnelle. De plus, les couples attendent d’être dans une situation affective et socio-économique stable avant d’envisager d’avoir un enfant. Pour preuve, en 1975, le premier enfant survenait en moyenne 5.5 ans après les premiers rapports sexuels, contre 9.5 ans en 2000 [11].
La prise quotidienne d’une contraception peut être une contrainte pour nombre de femmes. En 2000, 20.9 % des grossesses non désirées survenaient chez des femmes ayant oublié leur pilule [12].
Le recours à la contraception d’urgence survient suite à un défaut d’utilisation de la contraception. Chez les femmes de 20-24 ans, les plus touchées par les IVG, son recours était de 42.3 % en 2005 [4].
A partir de ces constats, il semble donc important que le choix de la contraception soit en parfaite adéquation avec le mode de vie de la femme, cela pour une meilleure observance et donc qu’un risque de grossesses non désirées moindre [13].
Le professionnel de santé prescripteur de la contraception est donc le premier interlocuteur et le premier concerné par ce problème de santé publique. Le modèle BERCER de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) permet au praticien d’avoir un fil conducteur lors de leur consultation de prescription de la contraception [14].
Un désir inconscient
Il arrive que dans certains cas, la grossesse non prévue soit désirée inconsciemment. En effet, il y a une différence entre désirer avoir un enfant, dans toute la réalité que cela implique, et désirer être enceinte. Le fait de concevoir un enfant permet pour ces femmes de se sentir pleinement Femme, et de s’assurer être capable à l’instar de leur mère, de donner la vie. Cette ambivalence face à leur désir de grossesse aboutit à une demande d’IVG car elles ne désirent pas cet enfant à venir, mais voulaient s’assurer de leur condition de femme [15].
Le manque d’information
Il existe un réel manque d’information chez les femmes en ce qui concerne la contraception en général et leur contraception personnelle. En effet, les femmes ne sont pas assez informées de la diversité des moyens contraceptifs.
De plus, il est observé un défaut d’information quant à l’utilisation de leur propre contraception, de la conduite à tenir en cas d’échec et les modalités pour recourir à la contraception d’urgence.
Enfin, la persistance des idées reçues dans les discours de l’entourage ou parfois d’un professionnel de santé continue de véhiculer des inquiétudes sur certains moyens de contraception, comme le DIU par exemple [13].
Quelques pistes pour une amélioration de la situation
Face à ce constat, il semble important d’essayer de trouver des solutions en terme de contraception pour les jeunes femmes en âge de procréer, comme le recours aux contraceptions réversibles et de longue durée d’action, comme l’implant et le DIU entre autre. Ces moyens contraceptifs étant indépendants de l’observance de la femme et conservant un indice de Pearl quasiment identique en utilisation optimale et courante, offrent une couverture contraceptive très efficace aux jeunes femmes [16].
Dans le rapport de 2004 de l’HAS sur la contraception des femmes en âge de procréer, la promotion de la personnalisation et du choix éclairé de la femme quant au choix de la méthode contraceptive est mise en avant. De plus, il est précisé que « Les DIU peuvent être proposés aux femmes, quelles que soient la parité et la gestité (femmes multipares ou nullipares / nulligestes) », permettant ainsi une diversification des choix possibles à leur portée [5].
Cas du DIU
De nombreuses études ont montré que les adolescentes et les nullipares n’étaient pas plus susceptibles de ne pas poursuivre leur contraception par DIU que les femmes majeures et multipares. La pose du DIU était par ailleurs bien vécue pour la grande majorité des patientes [17-19].
D’autres études ont comparé les méthodes réversibles et de longue durée d’action entre elles, en opposant le DIU au lévonorgestrel (LNG) à l’implant et au DIU au cuivre. Celles-ci ont montré que le taux de continuation du DIU au LNG était supérieur à ceux du DIU au cuivre et à l’implant [20,21]. D’autres enquêtes ont observé que le DIU au LNG avait le même taux de satisfaction et un taux plus élevé de continuation que la pilule OP [22,23].
En somme, il semble que les adolescentes et plus particulièrement les nullipares sont des populations de choix pour ce moyen de contraception.
Freins à ces améliorations concernant le DIU
Du côté des professionnels de santé
En 2013, l’HAS a publié un document de synthèse répertoriant les freins d’accès à la contraception, après les recommandations de 2004.
Les principaux freins sont la méconnaissance des risques et des contre-indications, qui perpétuent les idées reçues à propos du DIU chez les nullipares. Chez ces dernières, la survenue de plus de complications concernant l’insertion et l’utilisation du DIU est une croyance encore présente chez les professionnels. La pose fait partie des freins à la prescription d’un DIU, du fait d’une formation insuffisante à la technique de pose, entrainant une réticence des professionnels à le prescrire et à le poser [24].
Plusieurs études viennent étayer ces freins. L’enquête Fécond de 2010 montre que 69 % des gynécologues et 84 % des médecins généralistes estiment que le DIU n’est pas indiqué chez la nullipare [2]. Dans une enquête réalisée aux Etats-Unis en 2010, près de 60 % des professionnels de santé ne prescrivent quasiment pas de DIU aux nullipares et 30 % d’entre eux ont une mauvaise image du DIU en terme de sécurité [25]. Au Canada, dans une étude réalisée en 2008, 60 % des médecins généralistes pensent que le DIU présente un risque majeur d’infection pelvienne et de grossesses extra-utérines (GEU). En outre, il est observé que les jeunes médecins sont plus enclins à prescrire un DIU hormonal à une nullipare que leurs ainés [26].
Ces études montrent qu’il existe encore nombre d’idées reçues vis-à-vis du DIU comme moyen de contraception efficace et sans danger chez la nullipare, allant à l’encontre des recommandations des instances de santé, et donc de sa diffusion auprès des femmes.
Du côté des femmes
Dans l’enquête Fécond de 2010, 54 % des femmes déclarent que le DIU n’est pas indiqué chez la nullipare [2].
Les études réalisées à ce sujet démontrent que l’un des freins les plus importants est le manque d’information des femmes sur le DIU. Aux Etats-Unis en 2006, 60 % des adolescentes interrogées n’avaient jamais entendu parler du DIU, et plus de la moitié d’entre elles, après information, seraient favorables à cette méthode. Ce résultat prouve qu’il est nécessaire que les professionnels de santé informent les femmes afin qu’elles puissent accéder à ce type de contraception. En 2010, une étude réalisée dans la région de Saint-Louis visait à promouvoir les méthodes contraceptives réversibles de longue durée d’action, comprenant l’implant et le DIU. Après une information éclairée des femmes, elles devaient donner la contraception de leur choix. Parmi ces femmes, 67 % ont choisi une contraception de longue durée, dont 56 % en faveur d’un DIU [27, 28].
Le deuxième frein des femmes réside dans les idées reçues qu’elles ont vis-à-vis du DIU. L’étude américaine de Fleming en 2010 a pour but de connaître leur opinion et leurs réticences à propos du DIU. La population nullipare de l’enquête était de 84 %, et 27 % d’entre elles avaient entendu parler du DIU. Pour 46 % des femmes, le fait d’avoir un corps étranger est un frein, ainsi que la peur de la pose chez 25 % des femmes. Enfin, le fait que ce soit un professionnel de santé qui le pose freine 19 % des femmes à se faire poser un DIU [29].
Des réticences similaires sont retrouvées en France dans le travail du docteur Denant, via une étude qualitative reposant sur 21 entretiens semi-directifs, visant à connaître les freins et les réticences des nullipares sur le DIU [30].
Ces freins cités sont les suivants :
– La peur de l’infertilité
– La sensation de corps étranger vécue comme une agression
– Le doute sur l’efficacité
– La gêne ressentie au quotidien et dans la sexualité
– La peur des effets secondaires incluant les infections, les GEU…
– Le refus du professionnel de santé
– Le manque d’information conduisant à des idées reçues sur la pose, sur la contre-indication aux nullipares, sur la taille du DIU…
– Facteurs socio-culturels : convictions religieuses, mécanisme d’action essentiellement abortif, notion d’engagement…
Le DIULe DIU chez la nulliparechez la nullipare
Le DIU est la deuxième méthode de contraception après la stérilisation féminine la plus utilisée dans le monde en 2013 avec 23 % d’utilisatrices [31].
Il existe actuellement 2 types de DIU sur le marché en France.
Le DIU au cuivre
Il s’agit d’une armature en polyéthylène à bras latéraux flexibles, radio opaque, autour duquel s’enroule un fil de cuivre. Des fils de nylon sont attachés au support, permettant le contrôle et le retrait du dispositif.
Les modèles disponibles pour la nullipare contiennent 380 mm² de cuivre [32].
Le DIU au cuivre agit selon 2 mécanismes :
– Effet cytotoxique du cuivre sur les spermatozoïdes, en altérant leur mobilité.
– Réaction inflammatoire locale de l’endomètre dû à la présence du dispositif, empêchant ainsi la nidation s’il y a eu fécondation [10].
Le DIU au cuivre peut également être utilisé en contraception d’urgence s’il est posé dans les 5 jours suivant un rapport sexuel non ou mal protégé.
L’indice de Pearl est de 0.6 en utilisation optimal et de 0.8 en utilisation courante, soit très efficace selon l’OMS.
Ce dispositif n’est pas indiqué si la jeune femme présente des dysménorrhées et des ménorragies, le DIU au cuivre pouvant majorer ces effets [33].
Le DIU au cuivre n’étant pas le sujet de ce mémoire, nous ne l’abordons que très brièvement.
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Table des matières
Introduction
1. La contraception en France
1.1. Chez les femmes de 15 à 49 ans
1.2. Chez les femmes de moins de 30 ans
1.3. Chez les nullipares
1.4. Le modèle contraceptif français : en voie de changement ?
2. L’Interruption Volontaire de Grossesse (IVG) en France
2.1. Evolution du taux d’IVG chez les femmes de 15 à 49 ans
2.1.1. L’IVG en fonction de l’âge
2.1.2. L’IVG en fonction de la parité
2.1.3. L’IVG en fonction de l’âge et de la parité
3. Un constat sans appel : un paradoxe en France
3.1. Causes des grossesses non désirées
3.1.1. De l’indice de Pearl à la réalité
3.1.2. Mode de vie des femmes du XXIème siècle
3.1.3. Un désir inconscient
3.1.4. Le manque d’information
3.2. Quelques pistes pour une amélioration de la situation
3.2.1. Cas du DIU
3.3. Freins à ces améliorations concernant le DIU
3.3.1. Du côté des professionnels de santé
3.3.2. Du côté des femmes
4. Le DIU chez la nullipare
4.1. Le DIU au cuivre
4.2. Le DIU hormonal
4.2.1. Types de DIU hormonaux
4.2.2. Différence entre Jaydess® et Mirena®
4.2.3. Mécanisme d’action
4.2.4. Recommandations et contre-indications selon l’OMS
4.2.5. Effets indésirables et complications
4.2.5.1. Douleurs liées à l’insertion
4.2.5.2. Echec de pose
4.2.5.3. Perforation
4.2.5.4. Expulsion du DIU
4.2.5.5. Grossesses
4.2.5.6. Infections et infertilité
4.2.5.7. Effets secondaires liés au LNG
4.2.6. Effets sur le cycle menstruel
5. Problématique et objectif de l’étude
Matériel et méthode
1. Type d’étude
2. Lieu et durée de l’étude
3. Critères d’inclusion
4. Critères d’exclusion
5. Recueil de données
6. Analyses statistiques
Résultats et analyses statistiques
1. Taux de participation
2. Profil, motivations et appréhensions des patientes
2.1. Age
2.2. Niveau d’études et profession
2.3. Gestité
2.4. Contraception des femmes
2.4.1. Contraceptions antérieures
2.4.2. Contraception avant la pose du DIU
2.4.3. Type de pilule
2.5. Motivations du choix du DIU
2.5.1. Choix du DIU en général
2.5.2. Choix du DIU au LNG plutôt qu’au cuivre
2.6. Appréhensions des femmes
2.7. Connaissance du DIU
2.8. Refus de pose
3. La pose du DIU
3.1. Prélèvement vaginal (PV) et endocervical
3.2. Hystérométrie pré-pose
3.3. Prémédication
3.4. Utilisation pince de Pozzi
3.5. Pose post-IVG
3.6. Conditions de pose
3.7. Evaluation de la douleur
4. Satisfaction et tolérance des patientes
4.1. Temps de port du DIU
4.2. Satisfaction des patientes
4.3. Vécu de la pose
4.3.1. Au niveau de la douleur
4.3.2. Au niveau du geste
4.4. Inconfort après la pose
4.4.1. Dans les deux semaines suivant la pose
4.4.2. Après les deux semaines suivant la pose
4.5. Consultations depuis la pose
4.6. Gêne lors des rapports sexuels
4.7. Effets
4.7.1. Effets sur le cycle menstruel
4.7.2. Effets secondaires
4.8. Conseil à une amie
4.9. Complications
4.10. Retrait prématuré du DIU
Discussion
1. Limites de l’étude
1.1. Points faibles
1.2. Points forts
2. Confrontation des résultats aux données de la littérature
2.1. Profil des patientes
2.1.1 Age
2.1.2. Niveau d’études et profession
2.2.3 Antécédents obstétricaux
2.2.4. Contraceptions antérieures
2.2.5. Motivations
2.2.6. Appréhensions
2.2.7 Connaissance du DIU
2.2.8. Refus
2.2.9. Résultat du PV
2.2. Pose du DIU
2.2.1 Vécu des femmes
2.2.2. Faisabilité de la pose
2.2.3. Facteurs influençant la douleur lors de la pose
2.3. Tolérance du DIU : Effets secondaires et complications
2.3.1. Modification du profil des règles
2.3.2. Effets indésirables
2.3.3. Complications
2.3.4. Inconfort après la pose
2.3.5. Gêne lors de rapports sexuels
2.3.6. Retrait prématuré du dispositif
2.4 Satisfaction des patientes
2.4.1 Satisfaction
2.4.2. Facteurs influençant la satisfaction
2.4.3. Recommandation à une amie
3. Réponses aux hypothèses de départ
Conclusion
Bibliographie
Annexes
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