L’intérêt du diagnostic des maladies infectieuses

L’intérêt du diagnostic des maladies infectieuses

Impact des maladies infectieuses 

Etat des lieux
Les maladies infectieuses sont depuis toujours une grande menace pour la population, et sont restées pendant longtemps la première cause de mortalité dans le monde. Elles continuent chaque année à tuer près de 7 millions de personnes dans le monde , et sévissent principalement dans les pays en voie de développement, où elles sont encore responsables de près de 35% des décès .

Les maladies infectieuses tuent cependant de moins en moins de personnes dans le monde : la mise en place de mesures d’hygiène efficaces (Semmelweiss en 1847), la découverte du principe de la vaccination (Edwaerd Jenner en 1796) et l’utilisation des antibiotiques (Alexandre Flemming en 1928) ont permis de lutter efficacement contre les maladies infectieuses. La variole a ainsi pu être éradiquée en 1980 suite à un vaste programme mondial de vaccination soutenu par l’Organisation Mondiale de la Santé. C’est cependant l’une des seules maladies infectieuses à avoir disparu. Des maladies comme la peste, le choléra ou la tuberculose, qui ont fait des ravages par le passé, continuent encore aujourd’hui à faire des victimes. Entre 1347 et 1352, les historiens estiment que la peste a condamné entre 30 et 50% de la population en Europe. Aujourd’hui, cette maladie n’est pas encore totalement éradiquée et continue à faire des victimes chaque année [Cabanel et al., 2013]. La tuberculose quant à elle a tué encore plus d’un million de personnes en 2011. Les maladies infectieuses sont donc encore loin de pouvoir être considérées comme une menace du passé, et continuent d’être au cœur des préoccupations des instances de santé.

Agents infectieux

Ces infections sont dues à la pénétration dans l’organisme et au développement incontrôlé d’éléments pathogènes. Ces agents peuvent être des virus, des bactéries, des champignons, des parasites ou encore des prions .

Virus Les virus mesurent en moyenne 200nm. Leur constitution est relativement simple : du matériel génétique (ADN ou ARN) est entouré par une capside protéique, elle-même éventuellement entourée de membrane plasmique empruntée à leurs cellules hôtes. Au cours d’une infection, ils s’introduisent à l’intérieur d’une cellule dont ils détournent la machinerie cellulaire pour se répliquer.

Bactéries Les bactéries  mesurent en général entre 1 et 10µm. Ce sont des organismes unicellulaires et sans noyau (on parle d’organismes procaryotes). Elles sont capables de se répliquer de manière asexuée, par scissiparité. Le temps de division (aussi appelé temps de génération) d’une bactérie est variable selon l’espèce et les conditions de culture .

Leur génome est constitué d’un unique chromosome circulaire. Le cytoplasme peut aussi contenir des plasmides, qui sont des molécules d’ADN circulaires extra chromosomiques que les bactéries peuvent s’échanger rapidement. Ils peuvent coder pour des toxines ou des enzymes ayant un rôle dans certains mécanismes de résistance aux antibiotiques. Les bactéries peuvent être de différentes formes (figure 1.4), mais on trouve principalement des coques et des bacilles. C’est la présence d’une paroi externe rigide autour de l’organisme unicellulaire qui définit sa taille et sa forme. Elle sert aussi de barrière protectrice contre l’environnement extérieur, et permet notamment aux bactéries de résister au choc osmotique. On distingue deux grands groupes de bactéries en fonction de la composition de leur paroi (figure 1.3 B). Les bactéries Gram+ ont une paroi composée de 2 éléments principaux : une paroi épaisse de peptidoglycane et une membrane plasmique. Les Gram- possèdent également une membrane plasmique, mais une couche de peptidoglycane moins épaisse entourée par une membrane externe. Ces différences de morphologie peuvent être mises en évidence en laboratoire par le test de coloration de Gram [Bartholomew and Mittwer, 1952].

On distingue aussi trois catégories de bactéries en fonction de leur besoin en oxygène pour se développer : les bactéries aérobies strictes nécessitent la présence d’oxygène pour se diviser, les bactéries anaérobies strictes ne peuvent se développer qu’en l’absence d’oxygène, et les bactéries aéro-anaérobies facultatives se développent quelle que soit la concentration en oxygène de l’air. Ces propriétés sont particulièrement importantes lorsque l’on souhaite mettre en culture les bactéries en laboratoire, puisqu’il faut adapter le type de culture en fonction de la bactérie.

Champignons Contrairement aux bactéries, les champignons possèdent un noyau qui renferme le matériel génétique (on parle d’organisme eucaryote). Ils peuvent être pluricellulaires (comme les moisissures) ou unicellulaires (comme les levures, qui mesurent en général entre 6 à 10µm). Les levures possèdent aussi une membrane plasmique entourée par une paroi externe.

Parasites Ce sont des êtres vivants intra ou extracellulaires, qui possèdent une ou plusieurs cellules. Un parasite vit aux dépends de l’hôte qui l’héberge, et peut parfois mettre sa vie en danger. Ils sont en général transmis par l’alimentation ou par des vecteurs tels que les moustiques.

Prions Le prion est un agent pathogène qui n’a été découvert que récemment, il y a environ 30 ans. Il ne contient pas de matériel génétique, et est uniquement de nature protéique.

Micro-organismes non-pathogènes Tous les micro-organismes présents dans le corps humain ne sont pas responsables de maladies. Leur très grande majorité est même particulièrement utile pour le bon fonctionnement du corps humain, comme la flore intestinale. On estime que le corps humain renferme 10 fois plus de bactéries que de cellules humaines [Berg, 1996], que l’on trouve en majorité dans le système digestif (figure 1.5), et dont on commence à peine à saisir la complexité et le rôle majeur dans la santé humaine [Larsen et al., 2010] [DiBaise et al., 2008].

Lutte contre les maladies infectieuses : grandeur et décadence des thérapies

Si les maladies infectieuses ont eu un impact majeur sur l’évolution de la population mondiale dans les siècles passés (en décimant parfois des populations entières sur des périodes très courtes comme pour les grandes épidémies de peste), la médecine de la fin du XIXème siècle a fait émerger des stratégies de lutte extrêmement efficaces qui ont réduit cet impact de façon considérable, au point que certaines infections ont quasiment complètement disparu. Cependant, non seulement cette éradication n’est pas totale, mais les moyens de lutte s’épuisent face à une évolution accélérée des agents pathogènes et de leurs modes de propagation.

Nouvelles maladies infectieuses et propagation rapide

L’émergence et la propagation de nouvelles maladies infectieuses, telles que la dengue, le VIH, la famille des coronavirus ou encore la grippe aviaire sont plus que jamais préoccupantes pour l’avenir de la population. De plus en plus de facteurs favorisent l’apparition et la diffusion de ces maladies. La promiscuité entre les habitats des hommes et des animaux, dont les territoires sont modifiés par les déforestations massives et la croissance démographique, favorise la transmission de maladies entre l’animal et l’homme (on parle de zoonose). La grippe aviaire en est un exemple récent. Le tourisme et l’explosion du trafic aérien, ainsi les changements climatiques modifient la dynamique de propagation des infections, et rendent plus difficile le confinement d’un pathogène à un territoire donné. La dengue est un exemple frappant de cette nouvelle dissémination (figure 1.6) : le nombre de cas déclarés a explosé en 50 ans, passant de moins de 20 000 cas dans les années 1960 à près d’un million de personnes contaminées dans les années 2000. Les pays touchés par cette maladie sont pratiquement 10 fois plus nombreux qu’il y a 50 ans.

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Table des matières

Introduction
I Contexte
1 L’intérêt du diagnostic des maladies infectieuses
1.1 Impact des maladies infectieuses
1.1.1 Etat des lieux
1.1.2 Agents infectieux
1.1.3 Lutte contre les maladies infectieuses : grandeur et décadence des thérapies
1.1.3.1 Nouvelles maladies infectieuses et propagation rapide
1.1.3.2 Emergence de pathogènes résistants
1.1.3.3 Découverte de pathogènes oncogènes
1.2 Focus sur les infections du sang
1.2.1 Avant-propos
1.2.2 Conséquences des septicémies
1.3 Objectifs du diagnostic des maladies infectieuses
1.3.1 Intérêt des tests de diagnostic in vitro
1.3.2 Septicémie : cahier des charges des tests de détection
2 Diagnostics des infections du sang
2.1 Méthodes actuelles
2.1.1 Stratégie générale
2.1.2 Amplification et détection de la charge bactérienne
2.1.2.1 Amplification : l’hémoculture
2.1.2.2 Détection : les automates
2.1.3 Coloration de Gram et examen microscopique
2.1.4 Isolement
2.1.5 Identification phénotypique
2.1.6 Antibiogramme
2.1.7 Inconvénients de ce déroulement standard
2.1.8 Bilan
2.2 Nouvelles méthodes d’identification
2.2.1 Identification moléculaire
2.2.1.1 Introduction
2.2.1.2 Les différents tests moléculaires
2.2.1.3 Limitations
2.2.2 Identification chimiométrique
2.2.2.1 Spectrométrie de masse
2.2.2.2 Spectroscopie optique
2.2.2.3 Limitations
2.3 Conclusion : un vrai besoin pour de nouvelles méthodes de préparation d’échantillon
II Microsystèmes pour le tri cellulaire
3 État de l’art sur les méthodes de décomplexification d’échantillons biologiques
3.1 Le domaine du tri et de l’extraction de particules biologiques
3.1.1 Tests d’extraction de cellules particulières dans le sang
3.1.2 Méthodes classiques d’extraction
3.2 Essor de la microfluidique
3.2.1 Intérêt : intégration
3.2.2 Microfluidique pour le diagnostic in vitro
3.3 La mécanique des fluides dans les systèmes miniaturisés
3.3.1 Régime laminaire
3.3.2 Action d’une force extérieure
3.3.3 Profil parabolique
3.3.4 Bilan
3.4 Méthodes passives
3.4.1 Tri en fonction de la présence d’antigènes
3.4.2 Tri en fonction de la taille
3.5 Méthodes actives
3.5.1 Stratégie
3.5.2 Forces optiques
3.5.3 Forces magnétiques
3.5.4 Forces électriques
3.5.5 Forces acoustiques
3.5.6 Bilan
3.6 Conclusion : vers l’utilisation de l’acoustophorèse et de la diélectrophorèse
4 Expériences préliminaires
4.1 DEP avec un mélange de globules rouges et de levures C. albicans
4.1.1 But et mise en place de l’expérience
4.1.2 Description et interprétation de l’expérience
4.2 Stratégie en 2 modules
III Module d’échange de milieu : modification du facteur de Clausius-Mossoti
5 Changer le milieu pour modifier le comportement diélectrophorétique des cellules
5.1 Influence de la conductivité du milieu sur Re[fCM]
5.1.1 Modélisation d’une cellule sanguine : sphère monocouche
5.1.2 Modélisation d’une levure : sphère double-couche
5.1.3 Modélisation d’une bactérie : ellipsoïde double-couche
5.1.4 Bilan
5.2 Influence de l’osmolarité du milieu sur une cellule
5.2.1 Généralités
5.2.2 Observations expérimentales
5.2.2.1 Effet du choc osmotique sur les globules rouges
5.2.2.2 Effet du choc osmotique sur les globules blancs
5.2.2.3 Effet du choc osmotique sur les micro-organismes
5.2.3 Bilan
5.3 Caractérisation des propriétés diélectriques des cellules par électro-rotation
5.3.1 Caractérisation théorique
5.3.1.1 Etat de l’art et démarche scientifique
5.3.1.2 Influence des paramètres de la cellule
5.3.1.3 Conclusion
5.3.2 Caractérisation expérimentale
5.3.2.1 Préparation des échantillons
5.3.2.2 Description du banc expérimental
5.3.2.3 Critère d’acceptabilité
5.3.2.4 Obtention des spectres
5.3.2.5 Détermination des paramètres
5.4 Bilan : propriétés du milieu pour permettre une capture des micro-organismes par DEP+
5.4.1 Détermination des propriétés optimales
5.4.2 Obtention des propriétés optimales
Conclusion

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