L’INTEGRATION OUEST-AFRICAINE À TRAVERS LES ORGANISATIONS SOUS RÉGIONALES

La situation politique

   Depuis longtemps, l‟Afrique avait manifesté un grand besoin de coopération entre ses États. Les responsables politiques et les intellectuels avaient pris conscience des besoins et des avantages liés à l‟intégration régionale et leurs ambitions avaient donné lieu à une prolifération, sur le continent, d‟accords régionaux qui, malgré les efforts consentis, n‟ont pas encore donné les résultats escomptés. L‟intégration régionale a été envisagée à l‟origine comme une expression internationale de l‟économie de marché, un transfert des mécanismes économiques nationaux sur une échelle élargie. Les premières approches théoriques l‟assimilent à la création d‟une Zone de LibreÉchange (ZLE) ou d‟une Union Douanière (UD) caractérisée par l‟élimination, à l‟échelle régionale, des barrières commerciales et des mesures discriminatoires. On reconnaît aussi à l‟intégration régionale plusieurs dimensions, commerciale, financière, monétaire, économique, et sectorielle. Les différentes appréciations positives du processus d‟intégration en Afrique ont à peine réussi à faire oublier les nombreuses péripéties auxquelles le processus d‟intégration se retrouve en permanence confronté depuis les indépendances. Certains observateurs se demandent ainsi si le coût du processus n‟a pas finalement absorbé ses avantages pour un continent qui comprend la quasi-totalité des pays en développement et qui compte toujours dans ses rangs un nombre assez élevé de pays moins avancés. En effet, le coût du processus reste élevé étant donné les nombreux chevauchements et la multi-appartenance des États africains aux différentes communautés régionales. Pour y remédier, la notion de coordination interrégionale est alors apparue dans les discours et s‟est concrétisée avec le premier sommet tripartite d‟octobre 2008 entre le Marché Commun d‟Afrique de l‟Est et d‟Afrique Australe (COMESA), la Communauté de l‟Afrique de l‟Est (CAE) et la Communauté de Développement de l‟Afrique Australe (SADC) qui ont décidé de créer une zone de libre-échange rassemblant vingt-six pays. Ainsi, entre les tentatives de coordination interrégionale et de rationalisation et le grand bouleversement que connaissait le monde avec le basculement de son centre de gravité vers les pays émergents, la question du développement des pays reste encore fortement associée à la mondialisation et à la régionalisation. L‟émergence des questions sociales et les crises politiques traversées par les États d‟Afrique du Nord renvoyaient également vers une appréciation plus globale d‟un phénomène qui continuait de porter l‟espoir d‟un continent uni autour d‟objectifs de développement plus globaux. L’historique du processus d’intégration régionale remontait au lendemain de l’accession à l’indépendance des anciens territoires colonisés. Ces derniers étaient sortis de la colonisation avec de lourds handicaps comme leur dimension modeste sur le plan démographique, territorial et économique. En raison de ces handicaps, ces nouveaux États ne parvenaient pas assumer pleinement les obligations découlant de leur statut d’États indépendants. Dans le but de relever ces défis, la réalisation de l’unité à travers l’intégration régionale apparaissait comme la réponse la plus adéquate. Ainsi, plusieurs initiatives de regroupement avaient vu le jour sur tout le continent africain. En Afrique de l’Ouest, deux principaux projets d’intégration avaient vu le jour, afin de prendre les devants pour former un regroupement politique avéré dans l‟intérêt de la sousrégion. Le Dahomey, la  Haute Volta, le Sénégal et le Mali étaient les premiers à se lancer dans cette aventure d’une fédération. Cependant, sous la pression des présidents français et ivoirien, le Général De Gaulle et Félix Houphouët Boigny, le Dahomey et la Haute Volta se retirèrent du projet. L’Union était alors réduite à un tête à tête entre le Sénégal et le Mali. Le 4 avril 1960, l’Assemblée fédérale élisait son président en la personne de Léopold Sédar Senghor et un chef de gouvernement, Modibo Keita, futur président du Mali. La Fédération du Mali était née. Mais très vite, des désaccords subsistèrent entre les leaders de la fédération nouvelle constituée. Dans la nuit du 19 au 20 Aout 1960, la fédération allait connaître son éclatement irréversible. D’autres expériences de ce type furent tentées sans grands succès. Il s’agissait de l’Union Ghana-Guinée créée le 1er mai 1959 entre deux pays sans frontière. Le 24 décembre 1960, le Mali rejoignait cette union qui était devenu Ghana-Guinée-Mali. Cette union qui n’avait jamais fonctionné, paraissait plus symbolique que réelle. Tout ce balbutiement aboutissait en 1975 à la création d’une organisation régionale d’une plus grande envergure : la Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Elle visait à « promouvoir la coopération et l’intégration dans la perspective d’une union économique de l’Afrique de l’ouest en vue d’élever le niveau de vie de ses peuples, de maintenir et d’accroître la stabilité économique, de renforcer la stabilité entre les États membres et de contribuer au progrès et au développement du continent africain ». Composée depuis 1976 de quinze États membres, la CEDEAO constitue un vaste espace économique de près de 4,5 millions de km2 avec une population avoisinant les 24 millions d’habitants. Depuis sa création, la CEDEAO à travers son traité constitutif a toujours œuvré dans une logique économique recherchant la construction d’un vaste marché avec une libre circulation des biens et des personnes dans l’espace ouest-africain.

Les avantages, buts et nécessité de l’intégration

   Le processus de l’intégration permet pour les États membres de la zone intégrée, une extension du marché permettant ainsi d’atteindre un taux de croissance élevé à un coût moindre que si l’effet avait été entrepris par chaque État individuellement. Outre cet avantage de l’élargissement du marché, il faut ensuite souligner que l’intégration permet un libre mouvement des biens et des services à l’intérieur de la zone et ce marché commun permet de surcroît l’accroissement de la spécialisation par les avantages comparatifs impliquant une plus grande utilisation des ressources et l’accroissement des volumes des échanges. Un autre avantage de l’intégration réside dans le fait que celui-ci permet de conférer aux États membres un pouvoir de négociation dans la lutte commerciale avec d’autres pays extracommunautaire ainsi qu’aux fluctuations brutales de leurs recettes d’exportation. Enfin, l’autre avantage de l’intégration est certes celui lié à la mobilité des capitaux, des facteurs ainsi qu’à la redistribution du revenu qui pourrait être affecté par le mouvement des biens et des facteurs à l’intérieur du marché commun puisque le libre commerce au sein du bloc permet l’exportation des biens et services qui sont produits à bon compte dans un pays. Le but principal de l’intégration est de constituer un bloc solide capable de résister à toutes tentatives de nuisances. Au plan sous-régional, traditionnellement l’intégration est considérée comme un optimum du second rang mais dans ce contexte de la mondialisation de l’économie ainsi que la discrimination de fait de l’ajustement structurel, l’intégration sous régionale reste utile, car en plus des objectifs traditionnels dont la pertinence n’a jamais été démontrée, l’intégration sous régionale s’avère indispensable pour relever les défis actuels et futurs dont :
– La mondialisation de l’économie ;
– L’ajustement structurel ;
– Les réformes économiques ;
– La prévention, la gestion, la résolution des conflits et l’intégration sous régionale.
Notez cependant que, le but poursuivi par l’intégration est de :
– Développer l’industrialisation ;
– Promouvoir l’investissement du fait de l’existence du marché sous régionale ou régional élargie ;
– Promouvoir l’intégration des marchés et une division extrarégionale du travail ;
– Réaliser une croissance économique rapide ;
– Lutter contre la détérioration de termes d’échanges ;
– Acquérir collectivement un poids plus important dans les négociations internationales.
À cet effet, en vertu de l‟article 2 de la Charte, les objectifs de l‟organisation sont présentés ainsi :
– Renforcer l‟unité et la solidarité des États africains ;
– Coordonner et intensifier leur coopération et leurs efforts pour offrir de meilleures conditions d‟existence au peuple d‟Afrique ;
– Défendre leur souveraineté, leur intégrité territoriale et leur indépendance ;
– Éliminer sous toutes ses formes le colonialisme de l‟Afrique ;
– Favoriser la coopération internationale ; en tenant dûment compte de la Charte des Nations Unies et de la Déclaration Universelle des Droits de l‟Homme.
À ces fins, les États membres coordonneront et harmoniseront leurs politiques générales, en particulier dans les domaines suivants : politique et diplomatie ; économie, transport et communication ; éducation et culture ; santé et nutrition ; science et technique ; défense et sécurité.

Les approches de l’intégration sous régionale

   L’intégration sous régionale a pour but de mettre en place un espace économique supra-étatique. Il s’agit de créer, faire fonctionner, maintenir et approfondir cet espace aux fins de renforcer la solidarité économique et politique entre des Etats. Sur le plan économique, les économies (structures et comportements) doivent être intégrées, les ressources du sol et du sous-sol, les facteurs de production doivent être exploités de manière coordonnée et, pourquoi pas, commune. Au niveau politique, il faut instituer un pouvoir de régulation commun et acquérir un esprit communautaire. « De manière synoptique, quand on parle d’intégration, on vise un processus qui conduit à un plus grand degré de concertation entre les acteurs, d’interconnexions entre les unités et de diversification entre les activités créant un processus de relative irréversibilité et permettant une plus grande maîtrise des problèmes qui se posent à l’échelle régionale. II suppose un transfert de souveraineté et des structures institutionnelles». Ainsi, l’intégration doit faire disparaître progressivement entre deux ou plusieurs pays les discriminations qui existent aux frontières nationales puisque celles-ci constituent « l’origine de discontinuités dans les échanges commerciaux, dans les mouvements des facteurs de production ou dans les politiques économiques générales : on vise des engagements plus poussés ». Selon la théorie de l’intégration, on classe les différentes étapes de l’intégration en fonction du type de barrières supprimées. Au regard de la construction européenne, l’exemple le plus courant, l’on distingue divers degrés dans le processus d’intégration. La première étape est l’institution d’une zone de libre échange qui est l’intégration économique la moins intensive. « Elle vise l’abolition des obstacles tarifaires dans les échanges commerciaux, c’est-à-dire la suppression des restrictions quantitatives et des droits de douane, mais chaque pays membre demeure maître de sa politique douanière avec les pays tiers» . L’étape suivante était l’instauration d’un tarif extérieur commun, unique envers les pays tiers, à travers une union douanière, ce qui stipulait la renonciation de toute souveraineté en matière de politique douanière. Il s‟en suivait la mise en place d’un marché commun qui impliquait les deux premiers critères et s’étendait à la libre circulation des facteurs de productions mobiles (travailleurs, capital, entreprise) en adoptant des politiques économiques communes via des interventions gouvernementales unilatérales. La quatrième étape a été l’union économique qui visait l’élimination de toute discrimination et l’harmonisation de certaines législations nationales, des politiques économiques, monétaires, fiscales, et sociale. Enfin, l‟étape finale serait l‟union politique, une renonciation des pays à une parcelle de leur souveraineté en faveur d‟une instance commune. Dans le cadre de cette étude, l’intégration est donc perçue comme le résultat d’un processus qui tisse des liens sociaux, économiques et politiques dans un espace géographique regroupant plusieurs Etats. À titre d’illustration, l’UE constitue un modèle de construction d’un marché commun. Cette intégration réussie n’est le fruit que d’un processus mené de façon judicieuse.

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Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE
PREMIÈRE PARTIE : MISE EN CONTEXTE
CHAPITRE 1 : LE CONTEXTE HISTORIQUE DE L‟AFRIQUE DE L‟OUEST APRÈS LES INDÉPENDANCES
III- La situation politique
IV- La situation économique des pays de l’Afrique de l’ouest au lendemain des indépendances
CHAPITRE 2 : LES ENJEUX DE L‟INTÉGRATION EN AFRIQUE DE L‟OUEST
IV- Étude des concepts et évolution
1) Définition
2) Les étapes de l’intégration
3) Les avantages, buts et nécessité de l’intégration
V- L’Initiative africaine
VI- Les approches de l’intégration sous régionale
1) L’intégration ouest africaine : enjeux et défis
2) L’approche institutionnelle ou l’intégration par le haut: le schéma classique de l’intégration régionale en Afrique de l’Ouest
3) Vers une approche territoriale ou intégration par le bas: replacer le territoire au cœur du processus d’intégration régionale
DEUXIÈME PARTIE : L’ÉMERGENCE D’ORGANISMES SOUS RÉGIONAUX
CHAPITRE 1: HISTORIQUE DU PROJET D‟INTÉGRATION OUEST AFRICAINE
III- La création de ces organismes
1) La configuration de la CEAO
2) Le processus de la création de l’UMOA
3) l’UMOA principes de base et cadre institutionnel
IV- Les problèmes d’autonomie : structurelle et l’extraversion économique
3) l’identité des structures de production et le non complémentarité des économies de la CEAO
4) les leçons de l’UMOA
CHAPITRE 2 : LES DIFFÉRENTES MUTATIONS DES ORGANISMES
IV- Le processus de la création de la CEDEAO
V- La mise en place de l’UEMOA
VI- Les nouvelles réformes des organismes
1) Les réformes de l’UEMOA
2) Les réformes de sécurité et de défense de la CEDEAO
 La démocratisation du secteur de la sécurité et de la défense
 Les réformes sur la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples
5) Le regard de la CEDEAO sur les modifications constitutionnelles
CHAPITRE 3 : LA DYNAMIQUE DES PAYS AU SEIN DES ORGANISMES
V- Le niveau d’intégration du Burkina
VI- L’état d’évolution du Sénégal dans les organismes ouest-africaines
VII- La dynamique d’intégration en Côte d’Ivoire
1) L’intégration dans un contexte historique
2) La résolution du conflit ivoirien par la CEDEAO
VIII- Un exemple de coopération sud-sud
1) La Coopération Transfrontalière en Afrique de l’Ouest
2) La nécessité d’appliquer les lois existantes
TROISIÈME PARTIE : RÔLES ET LIMITES DANS LES ZONES DE CONFLITS ARMES
CHAPITRE 1 : LA GESTION DES CONFLITS
II- La prévention des conflits
III- La médiation en période de conflits
CHAPITRE 2 : LIMITES OU BILAN MITIGE DES ORGANISMES
IV- Les acquis de l’UEMOA
V- Les acquis de la CEDEAO : les échanges commerciaux
VI- Les principales contraintes à l’intégration régionale
1) Complémentarités économiques sub-optimales entre les pays de la région
2) L’homogénéité et l’avancée de l’UEMOA
3) Les échecs de l’UEMOA
CHAPITRE 3 : LES PERSPECTIVES
III- Les perspectives en vue
1) Le renforcement structurel et la lutte contre la criminalité frontalière
2) Les mesures anti terroristes
3) Une organisation d’intégration unique
IV-Le poids des organismes à l’échelle internationale
CONCLUSION GÉNÉRALE
ANNEXES

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