De nos jours, les politiques énergétiques occupent une place importante dans chaque gouvernement. Les impacts sur l’environnement et le récent accident de Fukushima ont réveillé la conscience du monde. Cependant, le besoin en énergie de la population mondiale ne cesse d’augmenter avec une hausse de l’ordre de 6,5% en 2010. Ce niveau de hausse n’a jamais été atteint depuis 1973 (J.-M. Chevalier et al., 2012). Cette croissance de la demande énergétique mondiale est impulsée par la consommation des pays émergents et des pays de l’OCDE qui ont connu une hausse respective de 7,5% et de 3,5%. Néanmoins en 2011, l’incident des centrales nucléaires au Japon a marqué le monde et a démontré qu’un incident tel que Tchernobyl pourrait survenir encore une fois. L’Allemagne a alors voté un plan de sortie du nucléaire même si ce modèle allemand du « sans-nucléaire » reste trop ambitieux pour certains et difficile à tenir (I. René, 2014).
En outre, pendant qu’une partie du monde subit une transition énergétique, l’autre partie essaye d’améliorer les conditions d’accès à l’électricité. Ainsi, dans le rapport d’ « Accès à l’énergie et sécurité énergétique en Afrique de l’Est » de 2014, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) estime que pour assurer un accès au service énergétique à l’ensemble de la population mondiale, il faudrait investir près de 48 milliards de dollars par an de 2010 à 2030. Cependant, cette ambivalence du monde sur la question de l’énergie nous amène à nous recentrer sur notre thème. Dans le cadre de nos travaux de recherche, la question centrale de cette première partie sera donc : Quelle est la politique énergétique de Djibouti ? Quels sont les changements qui ont été opérés dans le secteur énergétique ?
Le secteur énergétique à Djibouti
Les infrastructures de réseaux sont présentes dans notre vie quotidienne à travers différents services (téléphonie, électricité, Internet, etc.). Ces réseaux permettent la distribution de ces services aux clients et améliorent ainsi leur qualité de vie. Le développement de ces infrastructures permet également de situer le développement économique du pays.
Djibouti dispose de ressources naturelles variées capables de répondre aux besoins énergétiques de la population et des activités économiques. Disposer de ces ressources est un véritable atout, encore faudrait-il savoir les exploiter, ce qui n’est pas à proprement parler le cas à Djibouti. En effet, l’Afrique est riche en énergies renouvelables et ces ressources seraient en mesure de répondre en quantité suffisante à la demande électrique estimée du continent. Néanmoins, cela nécessite une étude préalable et une bonne compréhension de la cartographie des ressources disponibles afin que les gouvernements puissent mettre en place des politiques efficaces pour l’exploitation. Toutefois, il ne suffit pas de connaître leurs emplacements, il faudrait également disposer d’études qui puissent les quantifier et réussir à convaincre les bailleurs de fonds (Rapport IRENA, 2013).
Ces énergies permettent d’amoindrir la dépendance aux énergies fossiles. Le gouvernement a mis en place, avec l’appui de la Banque africaine de développement (BAD), une interconnexion pour diminuer le coût de l’électricité à Djibouti qui est l’un des plus chers en Afrique (Figure 11). De ce fait, dans ce chapitre, l’objectif sera de comprendre le poids de ce service sur la consommation d’énergie du secteur tertiaire. Il sera aussi question de cerner les efforts entrepris par le gouvernement pour améliorer la qualité de ce service et de passer en revue les différentes institutions qui interviennent dans la gestion de l’énergie. Un dernier point non négligeable auquel nous tâcherons de répondre dans ce chapitre repose sur l’aspect prix et sa répercussion économique sur les ménages. En effet, dans un rapport établi par la Banque mondiale en 1994, il en est ressorti que « les Africains paient pour les services de base jusqu’à deux fois plus que les habitants d’autres régions du monde et seuls 20 % des ménages ont accès à l’électricité, 12 % à un réseau d’eau et 6 % à des sanitaires reliés à un réseau d’assainissement ».
Or, l’entretien des parcs électriques est un élément fondamental à analyser car il influence l’efficacité du service fourni à la population. Ainsi, un manque d’investissement suffisant dans l’entretien de ce réseau peut diminuer l’optimalité du réseau de production et de distribution. Pour exemple, les délestages très fréquents seraient la conséquence de centrales de productions parfois vétustes et génèrent un gaspillage important. À cela s’ajoutent en Afrique des branchements illégaux et un système de fraude bien développé qui diminuent l’efficacité du réseau électrique (G. Magrin, 2007).
Cependant, pour limiter la dépendance énergétique de ces énergies fossiles et réduire le coût de l’électricité, le gouvernement djiboutien a mis en place un réseau d’interconnexion avec l’Éthiopie. Cette interconnexion constitue également une manière pour l’État d’améliorer l’équilibre entre l’offre et la demande. Ainsi, dans la seconde partie, l’analyse portera sur cette interconnexion. Pour ce faire, il faudra s’attacher à l’aspect financier du projet comme aux différents partenaires qui ont participé à sa mise en place. Tous ces investissements sont effectivement entrepris pour tenter de réduire la facture énergétique du secteur tertiaire. Par conséquent, la deuxième partie de ce chapitre sera consacrée à la gestion du service par ces entreprises et à leurs consommations d’énergie. Enfin, l’intérêt sera porté sur les différentes institutions régulatrices et le prix de ce service.
Les spécificités du service énergétique à Djibouti : analyse et constat empirique
Les services en réseau tels que l’électricité, l’eau, le transport, le téléphone ou Internet sont autant de services devenus indispensables à notre vie quotidienne. En effet, pour nos déplacements journaliers, nous empruntons le réseau de transport en commun et pour recharger nos téléphones, nous utilisons le réseau électrique. Cette omniprésence du réseau dans la gestion de notre vie quotidienne s’illustre par les effets causés lors du black-out qui a touché le nord-est des États-Unis et le sud-est du Canada et qui a provoqué l’arrêt total de toutes les activités du pays. Autrement dit, l’intégralité des activités économiques est gérée par des systèmes informatiques, or ces systèmes fonctionnent grâce à l’électricité et de ce fait, il représente le maillon le plus important de cette chaîne. Le plantage de ce dernier entraîne quantité de répercussions au niveau de l’individu (métro, plaque de cuisson, lumière…) et au niveau mondial (transactions économiques, échanges d’information, etc.).
Principes et définition des services en réseau
Nous étudions ici le service énergétique d’un point de vue des services en réseau, car le service énergétique repose sur un ensemble de structures d’achat et d’approvisionnement en réseau. L’autre point non négligeable est que l’électricité dépend d’un réseau de distribution, ce qui nous pousse donc à nous intéresser aux services en réseau. Ainsi, le réseau est défini de différentes manières selon le point de vue de l’auteur, qu’il soit économiste ou scientifique. Ces visions se complètent néanmoins car le scientifique porte particulièrement son attention sur l’aspect physique du réseau, c’est-à-dire la prise en compte de l’aménagement du réseau et donc le transfert de flux (humain, énergétique ou d’information), alors que nous les économistes, nous nous intéressons plutôt à la finalité, au but de cette installation. Si l’on se réfère à l’environnement économique du réseau, on s’aperçoit également que le réseau sert d’intermédiation entre le fournisseur et le client (Curien, 2005).
D’après un classement fait par Economides (1996), il existe deux types de services en réseaux. Dans le premier cas, il s’agit des réseaux de communication où l’échange se fait d’un point A à un point B. Il se définit comme un réseau à double voix et l’exemple le plus parlant est celui de la téléphonie. Dans le second cas, il s’agit des réseaux où la communication se fait à sens unique, c’est-à-dire d’un point A à un point B sans échange et le réseau électrique où le client ne reçoit que l’électricité en est un exemple concret (Thierry Penard, 2003).
Lorsque l’on se réfère à la structure économique du réseau, on peut y distinguer trois couches différentes. Ces couches représentent un ensemble d’activités qui sont interconnectées grâce à un réseau. Les trois couches se distinguent ainsi :
✽ La couche n°1 : c’est la couche basse qui regroupe l’ensemble des infrastructures, c’est-à-dire les équipements techniques.
✽ La couche n°2 : c’est la couche médiane qui représente les services de commande ou de pilotage des équipements. De ce fait, cette couche permet d’optimiser le fonctionnement de la couche basse. Elle sert également d’intermédiaire entre la couche 1 et la couche 3.
✽ La couche n° 3 : c’est la couche haute, elle fournit le service final. C’est la dernière étape du réseau, c’est-à-dire celle qui est en contact direct avec le maillon final (client). Cette dernière se repose sur les couches précédentes (couches 1 et 2).
Lorsque l’on transpose le réseau d’électricité selon ces différentes couches, on aboutit au schéma ci-dessous. La couche n° 1 représente la base et donc la production de l’électricité, ce qui nous ramène donc aux groupes électrogènes, alors que la seconde couche sert d’intermédiaire entre la couche basse, productrice d’électricité (couche n°1) et la couche haute, en relation directe avec le client final. Elle est représentée par les postes électriques et les lignes aériennes qui permettent d’alimenter directement les consommateurs. Cette décomposition du service énergétique nous aide à mieux distinguer la structure du service énergétique. Ainsi, le réseau d’électricité de Djibouti se caractérise par une couche d’infrastructure comportant les groupes d’électrogènes, sachant que le pays dépend toujours de ses centrales électriques pour la production d’électricité. Il constitue donc une ressource essentielle où théoriquement, le monopole serait la forme de marché la plus efficiente mais pas socialement la plus optimale. Dans certains secteurs tels que l’électricité, le gaz ou l’eau, l’entreprise en ituation de monopole peut fixer un coût faible afin de décourager les concurrents d’entrer sur le marché. Ainsi, cela nous renvoie à la théorie du monopole.
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Table des matières
Introduction générale
Première partie : L’innovation et l’évolution du service énergétique à Djibouti
Introduction de la partie 1
Chapitre 1: Le secteur énergétique à Djibouti
Introduction chapitre 1
1. Les spécificités du service énergétique à Djibouti : analyse et constat empirique
1.1. Principes et définition des services en réseau
1.2. Le réseau de distribution d’électricité à Djibouti
2. Une révolution dans le mode d’approvisionnement en énergie à Djibouti
2.1. Nouvelle forme d’approvisionnement en électricité
2.2. La coopération énergétique entre Djibouti et l’Éthiopie
3. Les impacts économiques de la consommation d’énergie
3.1. La consommation d’énergie des entreprises
3.2. Les effets de la productivité sur la consommation énergétique
4. Le cadre institutionnel et réglementaire de l’énergie
4.1. Le système de tarification
Conclusion chapitre 1
Chapitre 2 : L’impact de la mondialisation sur le secteur de l’énergie
Introduction chapitre 2
1. La situation politique et socio-économique de l’Afrique subsaharienne
1.1. Les effets de la mondialisation dans l’Afrique subsaharienne
1.2. L’évolution de l’économie Djiboutienne
2. Dépendance et sécurité énergétique
2.1. Présentation du contexte énergétique djiboutien
2.2. La sécurité de l’approvisionnement
3. L’évolution de la structure des services et leurs traductions énergétiques
3.1. Les spécificités des activités de services
3.2. Introspection du service énergétique
Conclusion chapitre 2
Chapitre 3 : Innovation et services énergétiques
Introduction chapitre 3
1. L’évolution du tertiaire en matière d’innovation et ses répercussions sur les services énergétiques
1.1. Analyse du processus d’innovation
1.2. Les innovations dans les services énergétiques
2. Innovation et développement énergétique
2.1. La transition énergétique
2.2. Les innovations environnementales et service énergétique
3. Quels modèles d’innovation ?
3.1. Les modèles d’innovation dans les pays développés
3.2. Les déterminants de l’innovations dans les PED
Conclusion chapitre 3
Deuxième partie : Analyse empirique du service énergétique à Djibouti : le cas des ménages et des hôtels
Introduction de la partie 2
Chapitre 4 : La demande d’énergie électrique à Djibouti : analyse empirique
Introduction chapitre 4
1. Présentation de l’enquête sur l’électricité à Djibouti
1.1. L’élaboration du questionnaire
1.2. Méthodologie de traitement des données
1.3. Descriptions de l’échantillon
2. Les sources d’hétérogénéité des consommations d’énergie dans le secteur résidentiel
2.1. Le développement des énergies de substitution
2.2. Analyse du prix de l’électricité chez les ménages
Conclusion chapitre 4
Chapitre 5 : La gestion du service énergétique dans les hôtels
Introduction du chapitre 5
1. Présentation de l’enquête qualitative
1.1. Méthodologie
1.2. Les caractéristiques de l’hôtellerie à Djibouti
2. Analyse des résultats
2.1. La qualité du service énergétique
2.1.1. Les hôtels de haute gamme
2.1.2. Les hôtels de 3 étoiles à non classés
2.2. Discussion des résultats
Conclusion du chapitre 5
Conclusion générale
Annexes
Bibliographie
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