L’innovation digitale pour la santé publique

L’e-santé ou la santé électronique est l’application des technologies de l’information et de la communication au domaine de la santé et du bien-être (Science & Santé 2016). Le secteur de l’esanté ne cesse de se développer et commence à peser au niveau économique. Le marché mondial de l’e-santé a été estimé à 85.44 milliards de dollars en 2014 et la tendance est à la hausse avec une croissance de 15,8% attendue pour 2022 (« eHealth Market Size & Share | Global Industry Report, 2022 » 2016). En France, Le potentiel du marché de l’e-santé a été estimé quant à lui à 2,7 milliards d’euros pour la même année (Direction Générale des Entreprises 2016). La branche de la télésanté, incluant, entre autres, la télémédecine et la m-santé, est certes en plein essor mais le segment le plus développé de l’e-santé, selon ces études, reste de loin celui des systèmes d’information (SI) de santé. Ces SI, qu’ils soient hospitaliers ou à destination des professionnels de santé libéraux, englobent de multiples outils assurant la gestion des établissements et des rendezvous, la gestion des dossiers médicaux des patients qu’ils soient génériques ou de spécialité, l’aide à la décision pour le diagnostic et le traitement, la gestion des essais cliniques…

Les pouvoirs publics ne cessent d’investir et d’inciter au développement des systèmes d’information de santé et croient en leur potentiel d’action sur diverses problématiques :
– réduire les coûts en améliorant l’efficacité du système de soins ;
– garantir la sécurité des patients en améliorant la qualité des soins (en réduisant les erreurs) et en permettant une médecine personnalisée ;
– faciliter la mise en place de réseaux d’expertise et le partage des données des patients dans le cadre de prise en charge mutualisée ville-hôpital ;
– faciliter le partage des données de soins pour la santé publique (surveillance sanitaire et épidémiologie) et la recherche (recherche translationnelle).

Même si les chercheurs restent partagés quant à la validation de ces apports (Schneider 2015; Murphy et al. 2012; Blaya, Fraser, et Holt 2010; Glasgow 2007; Piette et al. 2012), l’e-santé demeure néanmoins un domaine de recherche en pleine expansion.

La santé publique se digitalise. Les prises de décision, définissant la politique de santé publique, se basent de plus en plus sur des études et des analyses de données numériques. Ces données sont généralement collectées par des systèmes institutionnels, tels que les systèmes de surveillance des maladies infectieuses gérés par l’Institut de Veille Sanitaire en France (InVS) (Santé publique France, InVS 2016).

D’autres systèmes, initialement non destinés à cet usage, commencent aussi à être utilisés pour faire de l’épidémiologie et de la veille sanitaire. La réutilisation des données de soin, issues des SI hospitaliers, pour l’épidémiologie et la recherche est une approche qui a été adoptée au sein de plusieurs projets (Balas, Krishna, et Tessema 2008; Geissbuhler et al. 2013; De Moor et al. 2015). Ces projets s’articulent généralement autour de deux phases. La première phase est la phase d’intégration de données de plusieurs sources telles que deux ou plusieurs établissements hospitaliers. Dans un deuxième temps, des techniques de fouille de données sont appliquées pour extraire des connaissances et répondre à des questions posées par les chercheurs (Prather et al. 1997; Mullins et al. 2006). Ces dernières années, l’utilisation de ces techniques s’est étendue aux données des réseaux sociaux ou des moteurs de recherche pour la détection précoce de phénomènes épidémiologiques (Seifter et al. 2010; Chunara, Andrews, et Brownstein 2012; Salathé et al. 2013, 9; Eysenbach 2009). Etant donné les quantités importantes de ce type de données à traiter dans ce contexte, l’utilisation des technologies Big Data est devenue indispensable. Cependant, des questions restent posées quant à l’utilité de l’utilisation des technologies Big Data sur des données issues des systèmes d’information de santé et quant à la fiabilité des études qui en découleraient (Murdoch TB et Detsky AS 2013; Khoury et Ioannidis 2014).

Une maladie rare est une affection dont la prévalence est faible. Il n’existe pas une seule définition universelle pour les maladies rares mais plusieurs définitions épidémiologiques avec des seuils de prévalence qui dépendent des pays. En Europe par exemple, une maladie est considérée comme rare lorsque sa prévalence ne dépasse pas 1 cas sur 2000 (« Eurordis Position Paper on the WHO Report on Priority Medicines for Europe and the World » 2004). Aux Etats-Unis, le seuil de prévalence fixé est de 1 cas sur 1500 (van Weely et Leufkens 2004).

Du fait de la multiplicité des définitions il est compliqué de dresser une liste universelle et exhaustive des maladies rares (Orphanet 2016b). Ceci est d’autant plus complexe lorsque la prévalence calculée n’est pas une prévalence à l’échelle mondiale mais sont des prévalences restreintes à des territoires donnés. Ceci implique que certaines maladies puissent être considérées comme rares dans certains pays et non rares dans d’autres. Selon la définition européenne, la drépanocytose est une maladie rare en France avec une prévalence de 1 cas sur 30.000. Selon la même définition, elle n’est plus considérée comme étant rare en Afrique Noire mais plutôt fréquente avec une prévalence de 1 cas sur 30 (« La drépanocytose » 2011).

Selon les estimations, il existerait entre 6000 et 8000 maladies rares (« Orphanet » 2012; « Définition et chiffres clés » 2016). Considérées dans leur totalité, l’impact de ces maladies devient plus évident. En France, l’ensemble de ces maladies rares affecterait entre 3 et 4 millions de personnes (« RARE Diseases: Facts and Statistics» 2012). En Europe, ce chiffre augmente pour toucher 30 millions de personnes ce qui représenterait 4% de la population européenne contre 25 millions aux Etats-Unis ce qui représenterait 8% de la population du pays (« About Rare Diseases | www.eurordis.org » 2016; Haffner, Whitley, et Moses 2002). Ces maladies sont très diverses : maladies neuromusculaires, anomalies du développement, maladies métaboliques, maladies autoimmunes, maladies infectieuses, cancers rares,… Quatre-vingt pour cent d’entre elles ont une origine génétique. Deux maladies sur trois sont graves et invalidantes. Chez un patient sur deux survient un déficit moteur, sensoriel ou cognitif. Enfin dans près d’un cas sur deux le pronostic vital est engagé.

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Table des matières

Chapitre I : Introduction générale
1 E-santé et santé publique
1.1 L’e-santé est un fait
1.2 L’innovation digitale pour la santé publique
2 Maladies rares et santé publique
2.1 Qu’est-ce qu’une maladie rare ?
2.2 Enjeux de santé publique
2.3 Les maladies rares en France
2.3.1 Plans nationaux maladies rares (PNMR)
2.3.2 Les structures maladies rares
2.3.3 Epidémiologie et maladies rares
3 La Banque Nationale de Données Maladies Rares
3.1 BNDMR – Le projet
3.1.1 Présentation et objectifs
3.1.2 Structure organisationnelle
3.2 BNDMR – Le système d’information pour les maladies rares
3.2.1 CEMARA – La base de données historique
3.2.2 BaMaRa-BNDMR le nouveau système d’information pour les maladies rares
4 Cadre d’interopérabilité pour les maladies
4.1 Problématique : Une hétérogénéité constatée
4.2 Les trois piliers du cadre d’interopérabilité
4.2.1 Identification des patients
4.2.2 Interopérabilité des données médicales
4.2.3 Gestion des flux de données
4.3 Propositions
Chapitre II : Identification des patients
1 Introduction
1.1 Contexte et objectifs
1.2 Contraintes
1.2.1 Unique
1.2.2 Pérenne
1.2.3 Anonyme
1.2.4 Global
2 Identifiant patient et chainage de données : Etat des lieux
2.1 Un identifiant national de santé en France
2.1.1 Le Numéro d’Inscription au Répertoire (NIR)
2.1.2 L’Identifiant National de Santé – Calculé
2.2 Les numéros patient pour le chainage des données
2.2.1 Chainage SNIIRAM PMSI
2.2.2 Identifiants patients dans les entrepôts de données maladies rares
2.2.3 Systèmes multimodaux
2.3 Tableau récapitulatif
3 L’identifiant patient maladie rare : IdMR
3.1 Choix des technologies et des informations pour la construction de l’IdMR
3.1.1 Comment garantir l’anonymat ?
3.1.2 Quelles données?

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