Selon Miyake et Friedman (2012), l’ inhibition occupe un rôle clé de par sa composante commune et indissociable des deux autres FE, tandis que la mise à jour et la flexibilité mentale sont des fonctions spécifiques et indépendantes. En effet, l’inhibition forme le facteur qui a le plus d’ aspects en commun avec la flexibilité et la mise àjour et qui a la corrélation intra-indice la plus faible (Miyake et al., 2001). Même pour les auteurs qui ont étudié les FE et conçu des modèles théoriques différents de celui de Miyake et Friedman, la capacité d’ inhibition demeure centrale (Carlson, 2005; Diamond & Lee, 20 Il; Zelazo et al. , 1997). L’ inhibition serait donc la fonction qui est la plus utile aux autres FE, mais aussi, pour cette raison, la plus difficile à saisir empiriquement. C’est donc pour son importance, pour sa complexité et parce qu ‘ elle est la fonction qui se développe le plus tôt chez les enfants (Garon et al., 2008) que la présente recherche étudiera spécifiquement l’ inhibition.
Dit simplement, l’inhibition est une fonction cognitive qUI consiste à réagir en faisant fi d’ une réponse automatique ou usuelle (Miyake & Friedman, 2012). Si on la décrit en utilisant les termes propres à la littérature sur les FE, c ‘est la capacité à maintenir les informations non pertinentes hors de la MdT (Harnishfeger, & Bjorklund, 1993). Cette dernière définition illustre bien comment, malgré les différences entre les FE, celles-ci sont inter-reliées et en interaction simultanément au fil de la résolution d’ un problème.
L’ inhibition est à la base du développement cognitif. Selon Harnishfeger (1995), l’inhibition permet également aux enfants d’ avoir un meilleur contrôle moteur, une meilleure attention et une meilleure mémoire. En libérant la MdT des informations non pertinentes, l’ inhibition permet des apprentissages de plus en plus efficaces et de plus en plus complexes.
L’ importance de l’ inhibition a été maintes fois recensée dans des études longitudinales. Entre autres, Brock, Rimm-Kaufman, Nathanson et Grimm (2009) ont constaté un lien significatif entre les FE évaluées en début d’ année de niveau maternelle et la réussite mathématique en fin d’ année scolaire. À plus long terme (Zelazo & Carlson, 2012), il apparait que la capacité d’inhibition est fortement liée à des conséquences développementales importantes. La capacité de différer la gratification (par exemple, résister à manger une friandise quand on sait que si l’ on patiente quelques minutes il sera possible d’ en obtenir deux) est une mesure d’inhibition reconnue chez les enfants en âge préscolaire. De plus, l’ inhibition serait un bon prédicteur du fonctionnement social 20 ans plus tard, lorsque les participants ont atteint l’ âge adulte. Également, peu importe le quotient intellectuel ou le statut socioéconomique, la capacité de différer la gratification permet de prédire les scores à un test normalisé (Scholastic Aptitude Test, le test généralement utilisé aux États Unis pour évaluer la candidature des étudiants qui désirent être admis aux études supérieures) et la non-utilisation de drogues illicites (Ayduk et al., 2000).
L’inhibition des mouvements volontaires et l’inhibition oculomotrice
Au point de vue physiologique l’inhibition des mouvements volontaires sollicite le cortex orbitopréfrontal latéral et l’aire promotrice (Nigg, 2000). Les épreuves neuropsychologiques d’inhibition utilisées dans le cadre de la présente recherche, et qui seront décrites dans la section « Méthode », sont toutes des tâches d’inhibition motrice intentionnelle, car elles exigent de l’ enfant un contrôle volontaire de ses mouvements, en accord avec des indices contextuels changeants inhérents à la tâche. Deux épreuves de ce type ont été utilisées dans la phase d’ expérimentation de la présente recherche . Tout d’ abord, l’ épreuve marchearrête (Manly, Robertson, Anderson, & Nimmo-Smith, 2006) et ensuite la tâche cognerfrapper (Korkman, Kirk, & Kemp, 2003). Ces deux épreuves impliquent l’ inhibition des mouvements volontaires. Dans la tâche marche-arrête, l’ enfant doit inhiber la réponse fréquente et bien apprise (avancer son crayon d’ une case). C’ est là un défi important qui, comme il en sera question dans la section sur le développement de l’ inhibition, demande beaucoup de ressources cognitives aux enfants les plus jeunes.
Dans cogner-frapper l’enfant doit d’ abord inhiber un comportement appris depuis longtemps (l ‘ imitation) pour apprendre une nouvelle règle. Il doit ensuite inhiber un comportement nouvellement appris (la règle apprise dans la première partie de la tâche) pour agir en fonction d’ une nouvell e consigne. Ainsi, dans cette tâche d’inhibition motrice, le contrôle monteur est sollicité dans un contexte où la règle est changeante (Cohen, AstonJones, & Gilzenrat, 2004).
De son côté, l’inhibition oculomotrice sollicite les aires visuelles frontales et le cortex orbito-frontal. Le fait qu’ elle sollicite des aires cérébrales distinctes de l’inhibition motrice est ce qui amène Nigg (2000) à la considérer comme distincte de l’inhibition des mouvements volontaires .
L’inhibition oculomotrice est généralement évaluée grâce à une tâche d’AS qui sera décrite en détail plus loin. Brièvement, cette tâche consiste à inhiber une saccade réflexive vers un stimulus nouvellement apparu en périphérie de regard et à effectuer une saccade vers le côté opposé à la direction où le stimulus est apparu . Selon Nigg (2000), l’ avantage de ces tâches est que les AS ne font pas appel aux fonctions verbales ou motrices. Elles seraient donc une mesure plus précise de la capacité d’ inhibition. Malgré leur indépendance relative des fonctions verbales ou motrices, les AS dépendent, au moins rninimalement, d’ autres FE. En effet, les capacités d’inhiber les saccades oculaires diminuent quand la demande en MdT augmente (Roberts, Hager, & Heron, 1994, cités dans Nigg, 2000).
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Table des matières
Introduction
Les fonctions exécutives
Développement des fonctions exécutives
2 à 6 ans
8 à 13 ans
L’inhibition
Classifications de l’ inhibition
Fonctions liées à l’inhibition
L’inhibition des mouvements volontaires et l’ inhibition oculomotrice
Les mesures et le développement de l’ inhibition
L’électrophysiologie
La neuropsychologie clinique
Évaluation de l’ inhibition en neuropsychologie clinique
Épreuves simples et épreuves complexes
Inhibition chaude et inhibition froide
Développement de l’inhibition selon la neuropsychologie clinique
0 à 3 ans
4 à 5ans
6 à 12 ans
Résumé global du développement de l’inhibition selon la neuropsychologie clinique
Oculométrie
Saccades
Variables mesurées
Antisaccades
Fixation
Développement des saccades et antisaccades
Études chez les bébés
Vitesse
Latence
Précision
Corrélations entre psychométrie et traquage oculaire
Objectifs
Chapitre I. Inhibition Development: Comparison ofNeuropsychological and Eye
Tracking Measures
Abstract
Resumen
1. Introduction
2. Method
2.1. Participants
2.2. Procedure and instruments
2.2.1. Neuropsychological testing
2.2.2. Eye Tracking Test Procedures
2.2.3. Eye Movement Analysis
3. Results
3.1. Preliminary analyses
3.2. Correlation of inhibition measures and age
3.2. 1. Neuropsychological tests
3.2.2. Eye tracking tasks
3.3. Convergence between neuropsychological and ET tests
3.4. Eye tracking tasks difference
4. Discussion
Author notes
References
Discussion générale
Conclusion générale
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