La Bretagne : De la démocratie-chrétienne à la sociale-démocratie ?
Un petit détour historique nous paraît important pour comprendre la spécificité et la signification de l’évolution électorale de la Bretagne. Cette région est, sans conteste, un des plus importants bastions du catholicisme en France.
Cette très forte présence du catholicisme possède sa traduction politique et est un des éléments explicatifs, sinon l’élément explicatif le plus important, du vote conservateur de la Bretagne jusqu’aux années 1970.
Les travaux de Siegfried ont mis la question religieuse au centre, en effet, selon lui, le haut niveau de pratique catholique dans un territoire donné implique forcément un état d’esprit clérical de même que l’acceptation d’un système politique dominé par les « gens d’Église ». L’Église apportant son soutien sans faille aux conservateurs lors des rendez-vous électoraux, considérant ces derniers comme plus fidèles à ses orientations et surtout désireux de ne pas remettre en cause l’ordre social établi, cela explique la persistance du vote conservateur en Bretagne mais aussi dans des régions très pratiquantes comme l’Alsace . Cette situation se traduit politiquement par le fait que les 4 départements bretons envoient 18 députés du Mouvement Républicain Populaire, parti se réclamant de la démocratie-chrétienne sur 30 possibles à l’assemblée constituante de 1946, en partie grâce au mode de scrutin proportionnel. En 1962, ce même parti, alors en déclin, obtient encore 9 députés sur 25 dans la région, alors que le scrutin majoritaire est rétabli.
Les nombreux sondages post-électoraux publiés depuis les années 1960 ont confirmé l’idée de Siegfried selon laquelle les catholiques pratiquants voteraient très majoritairement à droite. A cet égard, la construction d’un tableau inspiré par celui proposé par Pierre Martin et concernant le vote des 15 départements les plus catholiques en 1965 en comparaison de la moyenne nationale sur une série d’élections opposant la droite et la gauche nous apparaît instructive.
Ce tableau nous indique très clairement que ces 15 départements ont largement évolué vers la gauche à partir de 1974, la situation se stabilisant avec un léger avantage pour la droite à parti de l’élection présidentielle de 1988. Si l’évolution rencontrée jusqu’à l’élection de 2007 pouvait laisser croire à un alignement complet de ces départements sur la moyenne nationale, l’élection de 2012 vient y apporter un léger démenti, l’écart entre la moyenne des votes obtenu par François Hollande dans ces départements avec sa moyenne nationale est plus important que celui observé pour Ségolène Royal en 2007. Ce rétrécissement de l’écart observé depuis une quarantaine d’années ne s’explique pas par un vote plus prononcé à gauche des catholiques pratiquants, mais bien par une baisse numérique significative de ce groupe.
Ainsi, dans le cas de la Bretagne, le corps électoral breton s’est déplacé progressivement vers la gauche au long des années 1980 et 1990 pour se « normaliser » au regard de la moyenne nationale. Ce phénomène a été facilité par le positionnement des dirigeants socialistes de la région, très loin d’être anti-cléricaux et souvent issus du Parti Socialiste Unifié, terreau des chrétiens de gauche et très implanté en Bretagne, ou encore des organisations religieuses de jeunesse, tel Jean-Yves Le Drian, issu de la Jeunesse Ouvrière Chrétienne . Ces faibles écarts constatés semblent indiquer qu’aujourd’hui le poids des catholiques est trop faible pour être significatif dans une élection présidentielle. Il n’en est pas forcément de même dans une élection plus locale.
Néanmoins, et pour revenir dans le cœur du sujet, la tradition démocrate-chrétienne de la région Bretagne n’est pas qu’une légende, ce qui est confirmé, au passage, par l’historien David Bensoussan . Le score obtenu par François Bayrou en 2007 est une traduction de ce phénomène, ce dernier assume pleinement l’héritage humaniste et démocrate-chrétien, deux courants qu’incarne l’Union pour la Démocratie Française (UDF), étiquette sous laquelle il se présente lors de l’élection de 2007. Il réalise alors 22,6% des voix dans la région, meilleur score de toutes les régions françaises. Ce score très important s’explique bien sûr par le fait que la Bretagne a toujours accordé des scores importants aux candidats se réclamant du centre mais également par les thèmes mis en avant par le candidat de la droite traditionnelle, Nicolas Sarkozy. La meilleure preuve de ce rejet réside dans le fait que François Bayrou obtient parmi ses meilleurs résultats dans la région dans des circonscriptions traditionnellement favorables à la droite, il obtient ainsi 26,3% dans la cinquième circonscription de l’Ille et Vilaine, 24,8% dans la cinquième circonscription du Finistère ou encore 23,7% dans la première circonscription du Morbihan, ce qui signifie qu’il mord largement sur l’électorat traditionnel de la droite modérée. De la même manière, la comparaison entre l’élection présidentielle de 1995 et celle de 2007 est édifiante. La gauche obtient 43,2% des voix au premier tour de l’élection présidentielle de 1995 dans la région et 37,4% au premier tour de l’élection de 2007. Malgré cela, Ségolène Royal obtient 52,6% des voix au second tour de l’élection dans la région contre 49,6% pour Lionel Jospin. Même si l’analyse des reports de voix est assez complexe, il est indéniable que de nombreux électeurs bretons de François Bayrou en 2007 aient voté Ségolène Royal au second tour de l’élection.
L’élection présidentielle de 2012 a marqué un recul important pour François Bayrou en Bretagne comme dans tout le pays. Si cette région demeure une place forte pour lui, il y perd environ la moitié de son électorat de 2007 à l’occasion de cette élection. Il apparaît intéressant, à partir de là, de connaître les circonscriptions dans lesquelles François Bayrou connaît son plus fort et son plus faible recul dans la région. Le tableau 12 nous présente ces résultats.
Les élections législatives de 2012 dans la région Bretagne
Nous allons, dans cette seconde partie, analyser les résultats des élections législatives de 2012 dans les quatre départements de la région Bretagne.
Ces élections se sont caractérisées par une large victoire de la gauche en général et du PS en particulier. Sur les vingt-sept sièges mis en jeu dans la région, le PS en remporte dix-huit à lui seul. De plus, trois sièges sont gagnés par des candidats divers gauche issus des socialistes locaux qui s’étaient présentés en dissidence contre un candidat EELV soutenu par le PS national ou contre une candidate socialiste vainqueur contestée de la primaire interne au PS.
Il n’apparaît pas pertinent, dans le cadre de l’analyse de ces élections de reprendre la méthode utilisée lors de la première partie pour l’analyse de l’élection présidentielle. En effet, depuis l’instauration du quinquennat en 2000, l’élection présidentielle et les élections législatives forment une séquence électorale au cours de laquelle le scrutin législatif confirme, d’une manière plus ou moins nette, les résultats de l’élection présidentielle. Ainsi, aussi bien en 2002, qu’en 2007 et en 2012, la possibilité que le président élu en mai n’obtienne pas de majorité à l’assemblée nationale pour appliquer son programme n’a jamais été envisagée sérieusement par les sondeurs et les politistes.
A cet égard, les analyses réalisées au cours de la première partie de cette étude pour l’élection présidentielle restent bien entendu valables pour les élections législatives. Il apparaît plus intéressant, dans ce cadre, de se concentrer sur deux aspects propres aux élections législatives, c’est à dire l’influence du vote partisan et l’influence personnelle des acteurs politiques candidats à ces élections. Ainsi, après une analyse rapide du vote dans la région, nous allons nous intéresser à ce scrutin dans un cadre départemental, cadre qui nous a semblé le plus pertinent pour répondre à notre problématique.
Causes, modalités et enjeux des élections législatives de 2012
Les élections législatives de 2012 sont organisées parce que l’assemblée élue en 2007 arrive au terme de son mandat de cinq ans. Le mode de scrutin utilisé pour ces élections législatives reste le mode de scrutin uninominal majoritaire à deux tours (utilisé de 1958 à 1981 et depuis 1988).
Dans le but d’adapter la taille des circonscriptions aux évolutions démographiques, de représenter les Français de l’étranger et à la demande du conseil constitutionnel, le gouvernement de François Fillon a procédé à un redécoupage des circonscriptions législatives qui a été adopté par le parlement en 2010, c’est le premier de la sorte depuis 1986. Les départements bretons sont inégalement touchés par ce redécoupage, l’Ille et Vilaine gagne un siège, alors que le Morbihan et le Finistère n’ont subi qu’un remodelage partiel touchant deux circonscriptions dans chaque cas. Les cinq circonscriptions des Côtes d’Armor restent inchangées. Ce redécoupage a été fortement critiqué par le PS en 2010, le président élu, François Hollande s’est engagé pendant la campagne présidentielle à instaurer une dose de proportionnelle pour les prochaines élections législatives, prévues en 2017.
Les enjeux de ces élections sont bien entendu différents selon les forces politiques, il s’agit pour le PS d’obtenir une majorité absolue pour ne pas dépendre de ses alliés à l’Assemblée Nationale. L’UMP cherche à éviter la débâcle et à sauver ses têtes d’affiches menacées. Suite au bon score obtenu par Marine Le Pen, le FN, dont les candidats se présentent sous le label « Rassemblement Bleu Marine » cherche à obtenir des députés pour la première fois depuis 1997. Vue générale des élections législatives dans la région.
L’analyse des deux tours du scrutin dans la région Bretagne, laisse apparaître des caractéristiques communes à toutes les circonscriptions. Ces caractéristiques communes sont possibles du fait du mode de scrutin et des règles inhérentes aux élections législatives françaises que nous avons rappelé en introduction.
Le fait est que, malgré les scores importants obtenus au second tour par certains candidats de gauche, ainsi treize obtiennent plus de 60% des suffrages exprimés et six plus de 65% des suffrages exprimés, il n’y a aucun élu au premier tour, ce qui est inédit. De la même manière, la configuration du second tour était la même dans toutes les circonscriptions, les électeurs avaient le choix entre un candidat de gauche soutenu par le PS et un candidat de droite, appartenant à l’UMP dans la grande majorité des cas. Ceci a pu être possible grâce aux désistements de deux candidats de gauche et d’un candidat de droite possédant assez de Aurélien Plaisant suffrages pour se maintenir au second tour face à un autre candidat de la même nuance politique et à un candidat d’une autre nuance politique, et également grâce à la faiblesse du FN dans la région, où il n’est jamais en situation de se maintenir au second tour. Ces faits permettent à la région Bretagne de respecter à la lettre la logique du mode de scrutin majoritaire uninominal à deux tours qui veut que « chaque parti se compte au premier tour et que seuls les deux principaux candidats représentant les grandes tendances de l’opinion se maintiennent au second tour » . le fait que les candidats des partis éliminés se désistent pour le candidat le plus proche parmi ceux arrivés en tête au premier tour n’est pas respecté à la lettre en Bretagne et même dans toute la France, les candidats FN n’appelant jamais, à 2 ou 3 exception près, à voter pour un candidat qualifié pour le second tour. La pré-campagne législative a été marqué par l’accord programmatique PS-EELV signé en novembre 2011 et qui réservait soixante circonscriptions au niveau national pour EELV. Sur ces soixante circonscriptions, quatre sont dans la région Bretagne . Cet accord intervient dans un contexte régional très tendu entre les deux formations politiques en Bretagne. En effet, la Bretagne est la seule région métropolitaine où le PS et EELV n’ont pas fusionné entre les deux tours des élections régionales de 2010 et où EELV siège dans l’opposition à l’exécutif PS au conseil régional.
Ainsi, malgré la signature de cet accord au niveau national, les fédérations départementales du PS dans la région n’ont pas voulu soutenir les candidats EELV soutenus par le PS national et ont présenté une candidature dissidente dans chaque circonscription. Malgré l’exclusion prononcée par le PS à l’encontre de ces candidats, qui se présentent sous l’étiquette Divers Gauche, deux d’entre eux parviennent à être élus , un troisième battu au second tour , seul le candidat régionaliste présenté par EELV dans le Morbihan parvient à être élu, encore faut-il souligner que sa suppléante est encartée au PS.
La comparaison avec l’élection présidentielle est prégnante quand on se réfère aux règles de Converse selon lesquelles toutes choses égales par ailleurs, chaque force politique se renforce dans ses fiefs quand la participation diminue et toutes choses égales par ailleurs, chaque force politique se renforce dans ses fiefs quand la taille des circonscriptions diminue. Ces deux éléments sont concomitants des élections législatives, la France est divisée en 577 circonscriptions et la Bretagne en 27 circonscriptions avec une offre politique différente alors que la circonscription de référence est le territoire français à l’occasion de l’élection présidentielle. De même, si le taux de participation est de 84,7% au premier tour de l’élection présidentielle dans la région, il n’est que de 61,6% au premier tour des élections législatives. Cela explique que le PS, et, dans les circonscriptions où ce parti possédait un député sortant, l’UMP pâtissent moins de la baisse de la participation que d’autres forces politiques moins implantées dans la région, car quand la participation baisse, ce sont les électeurs aux attaches partisanes les plus faibles qui ont encore plus tendance à s’abstenir, ce qui renforce la force politique localement dominante. Ces règles, dites de Converse, apportent donc un élément d’explication évident à la bipolarisation des élections législatives bretonnes.
Il nous paraît nécessaire, pour l’étude de ces élections d’étudier tout d’abord l’offre politique proposée aux électeurs. Ensuite, il s’agira d’étudier la notoriété des candidats et les résultats proprement dits de ces élections.
L’étude de la notoriété des candidats se justifie par le fait que l’occupation d’une place de pouvoir permet d’être relativement connu par les électeurs, cela évite aux militants d’avoir à présenter leur candidat lors de la campagne électorale. De plus, à l’occasion de ces élections de 2012, il est prouvé que l’occupation d’un poste de pouvoir au niveau local offre une prime non négligeable au candidat PS qui est dans cette situation.
Dans ce cadre, nous reprenons le tableau de Jérôme Fourquet et d’Esteban Pratviel.
Les élections législatives de 2012 dans les Côtes d’Armor
Cinquante-deux candidats se sont présentés aux suffrages des électeurs dans les cinq circonscriptions des Côtes d’Armor contre soixante en 2007, soit une moyenne d’un peu plus de dix candidats par circonscription. Sur les cinq députés sortants, trois ne se représentent pas, tous les trois sont membres du Parti Socialiste, il s’agit de Danielle Bousquet, députée sortante de la première circonscription depuis 1997, de Jean Gaubert, député sortant de la deuxième circonscription depuis la même année et de Marie-Renée Oget, députée sortante de la quatrième circonscription depuis 2002. L’offre politique laisse apparaître que seuls Lutte Ouvrière (LO), le Front de Gauche (FG), l’Union pour un Mouvement Populaire (UMP) et le Front National (FN) présentent des candidats dans toutes les circonscriptions. Les candidats du FG sont issus du Parti Communiste pour trois d’entre eux, du Parti de Gauche (PG) pour un autre, alors que le candidat de cette fédération dans la deuxième circonscription n’est encarté à aucun parti mais est élu local depuis 2001. Europe-Écologie-Les Verts (EELV) présente quatre candidats dont l’un, Michel Balbot dans la quatrième circonscription, est également soutenu par le PS. L’absence d’un candidat estampillé EELV à Saint-Brieuc dans la première circonscription a été l’occasion d’un psychodrame entre les écologistes et le PS local, cette circonscription devant être réservée pour les écologistes mais le PS local en ayant décidé autrement , c’est finalement dans la quatrième circonscription que le PS offrira son soutien au candidat d’EELV. Ces hésitations vont finalement contraindre Guy Hascoët, le président du groupe EELV, qui siège dans l’opposition au conseil régional à retirer sa candidature, prétextant un « mauvais climat politique » . Ce dernier, que nous avons contacté, met en avant le manque de maturité des écologistes qui auraient dû lui accorder plus de soutien à ce moment-là pour qu’il maintienne sa candidature. Le fait qu’EELV ne présente pas de candidats dans la première circonscription s’explique par le soutien apporté à un candidat de l’Union Démocratique Bretonne (UDB) en vertu d’un accord local. Le PS présente également quatre candidats dans le département, et soutient le candidat EELV à Guingamp comme nous l’avons déjà signalé.
Néanmoins, le PS départemental soutient la maire de Guingamp, Annie Le Houérou pour protester contre l’accord national PS-EELV réservant cette circonscription à un candidat d’EELV. Cette dissidence est allée à son terme malgré l’exclusion d’Annie Le Houérou du PS. Contrairement aux autres départements bretons, l’offre d’extrême-gauche est assez conséquente, le Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) investit quatre candidats alors que le Parti Ouvrier Indépendant (POI) en présente trois, il y a donc trois candidats d’extrême-gauche dans trois circonscriptions du département. Des candidats régionalistes issus du Parti Breton, de l’UDB ou de Breizhistance sont présents dans quatre circonscriptions (à l’exception de la troisième) sans jamais être en concurrence, l’un d’entre eux étant soutenu par EELV comme nous l’avons déjà signalé. L’offre politique centriste est, à l’image de la situation nationale, assez morcelée, le Modem présente deux candidats estampillés « Le Centre pour la France » dans la troisième et la quatrième circonscription et soutient un candidat issu de l’Alliance Centriste, proche du centre-droit, dans la deuxième circonscription.
Le nouveau centre présente deux candidates dans les deux premières circonscriptions, néanmoins ces candidates ne possèdent aucun ancrage local et sont imposées dans les derniers jours de la campagne par Hervé Morin, le président du parti, à la fédération locale qui n’en voulait pas et qui continue à soutenir les candidats UMP . Les dissidences sont rares à droite, seul un candidat se réclamant du Mouvement pour la France de Philippe De Villiers se présente dans la quatrième circonscription. De la même manière, deux dissidents d’extrême-droite sont présents dans la troisième et la cinquième circonscription du département. Il nous reste à préciser que deux candidats écologistes indépendants se présentent dans la deuxième et la quatrième circonscription du département. Nous avons maintenant une vue d’ensemble de l’offre politique dans le département, cette offre est assez classique avec une forte présence des partis traditionnels, seule la quatrième circonscription avec une dissidence d’importance à gauche semble présenter quelques particularités. De plus, aucune personnalité politique d’envergure nationale, ni aucun ministre en exercice, ni ancien ministre ne se présente dans ce département.
Le taux d’abstention aux élections législatives dans les Côtes d’Armor est le plus faible des quatre départements bretons, il s’élève à 35,6%, cela confirme ce qu’analysent Jérôme Sainte-Marie et Yves Marie-Cann , à savoir que le taux d’abstention est plus faible là où Nicolas Sarkozy a obtenu ses scores les plus faibles au premier tour de l’élection présidentielle en 2012, ce qui signifie que la démobilisation est plus forte chez les électeurs ayant voté Nicolas Sarkozy au second tour du scrutin présidentiel, en effet, ils se trouvent devant une contradiction au moment du vote législatif. Ils ont l’impression que le résultat de l’élection présidentielle a une valeur définitive, se mobiliser pour faire gagner le droite équivaut à prendre le risque de saboter les institutions. Le problème ne se pose pas en 2012 pour les électeurs du PS qui votent aux législatives dans le prolongement de l’élection présidentielle. Pour en revenir aux Côtes d’Armor, sachant que le taux d’abstention moyen des vingt-quatre départements où Nicolas Sarkozy a obtenu ses scores les plus faibles est de 38,7%, le taux d’abstention de 35,6% apparaît comme particulièrement faible, il s’agit là d’un phénomène qu’il faudra expliquer.
Les résultats des partis politiques dans le département à l’occasion de ces élections législatives nécessitent quelques remarques d’ordre général. A l’instar de ce qu’il se passe dans toute la région Bretagne, les cinq circonscriptions connaissent un second tour, opposant un candidat de gauche modérée et un candidat de droite modérée. Malgré un taux de participation élevé, la possibilité d’une triangulaire au second tour du scrutin est écartée assez facilement. Ainsi, dans quatre des cinq circonscriptions , seuls les candidats des deux principaux partis politiques (le PS et l’UMP) obtiennent plus de 10% des suffrages exprimés. La seule exception, la quatrième circonscription, peut s’expliquer par la prégnance d’un vote communiste important et par la division des candidatures à gauche entre le candidat officiel EELV-PS et la dissidente PS, dans cette circonscription, ce sont quatre candidats, dont trois de gauche, qui obtiennent plus de 10% des suffrages exprimés. Les candidats FN obtiennent tous entre 5 et 10% des suffrages exprimés, alors que les candidats du FG sont plus irréguliers, obtenant des scores de 3,9% (dans la troisième circonscription) à 16,6% (dans la quatrième circonscription. Globalement, c’est le FG qui s’impose comme la deuxième force à gauche derrière le PS, EELV atteint péniblement 5% en moyenne sur le département, en tenant compte du fait qu’un de ses candidats ait obtenu l’investiture officielle du PS.
Il est indéniable que les électeurs de la troisième circonscription ont un comportement différent des électeurs des autres circonscriptions. En effet, les quatre autres circonscriptions accordent toutes un bonus au candidat socialiste (ou divers gauche) au second tour de l’élection, non seulement par rapport au score de François Hollande un mois auparavant (de 2,8 à 4,7 points) mais également par rapport au score du candidat socialiste en 2007 (de 3,3 à 8,2 points), cette dernière comparaison est tout à fait frappante quand on sait que les candidats de gauche en 2007 dans la première, la deuxième et la quatrième circonscription étaient des députés sortants, ce qui est le cas seulement dans la cinquième circonscription en 2012.
L’évolution de la troisième circonscription semble inexplicable à première vue, il faut également signaler que le candidat UMP (Marc Le Fur) obtient son meilleur score en 2012 alors qu’il avait été élu en 2002 et en 2007 mais aussi en 1993. Le phénomène est remarquable car dans le même temps, l’évolution de cette circonscription dans les autres élections ne va pas dans le même sens, nous allons tenter d’expliciter ce phénomène.
Intéressons-nous maintenant aux résultats des élections dans les circonscriptions. Il nous semble cohérent de connaître l’indice de notoriété des principaux candidats qui se présentent aux suffrages des électeurs dans les Côtes d’Armor , puis d’étudier les résultats, circonscription par circonscription.
La première circonscription est dominée par Michel Lesage, président de la plus importante structure intercommunale du département : Saint-Brieuc agglomération, il est de plus, maire de Langueux, chef-lieu de canton, depuis 1989, et a été conseiller général du canton de Langueux de 1982 à 2011. Cette double implantation, en territoire urbain et en territoire rural permet à Michel Lesage, bien qu’il ne soit pas député sortant, d’être connu dans toute la circonscription. A côté de cela, la notoriété des autres candidats apparaît moins importante, la candidate UMP Sylvie Grondin est simple conseillère municipale à Saint-Brieuc depuis 2008, son suppléant est conseiller municipal dans la deuxième ville la plus importante de la circonscription, Plérin. Le candidat et la suppléante présentés par le FG sont tous les deux membres du PCF, et sont respectivement conseillers municipaux d’Hillion et de Ploufragan, leur notoriété est donc comparable à celle des candidats présentés par l’UMP. Un autre parti politique est dans le même cas, il s’agit de l’UDB, soutenu par EELV dans cette circonscription, le candidat est adjoint au maire à Pordic et la suppléante à Ploufragan. Nous avons déjà précisé que la candidate présenté par le Nouveau Centre n’avait aucun ancrage local et que la fédération des Côtes d’Armor de ce parti s’opposait à cette candidature. La candidate du Front National est très jeune (28 ans) et se présente comme une « mariniste », elle ne possède pas d’attaches locales et n’est adhérente au FN que depuis 2010. Malgré le fait que le maire de Saint-Brieuc, Bruno Joncour, soit membre du Modem, cette formation politique ne présente pas de candidats dans cette circonscription, le maire de Saint-Brieuc apportant son soutien, à titre personnel, à la candidate UMP, par ailleurs membre de son conseil municipal . A noter l’absence de candidats conseillers généraux dans cette circonscription, ce qui peut sembler étrange dans la mesure où les candidats (mis à part Michel Lesage) ne sont pas très connus dans la circonscription, néanmoins cela peut s’expliquer, et cette explication est valable pour beaucoup d’autres circonscriptions, par une certaine anticipation de la loi qui va fortement restreindre, voire interdire le cumul des mandats.
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Table des matières
Introduction
Présentation du sujet
Cadre théorique
L’enjeu de la séquence électorale de 2012
Les modalités et les résultats de l’élection présidentielle et des élections législatives de 2012
Intérêt du sujet, problématisation du sujet et hypothèses de recherche
Méthodologie
Structure du mémoire
I. L’élection présidentielle de 2012 dans la région Bretagne
La participation
Les résultats dans la région
Les résultats dans les départements
Les caractéristiques sociologiques et leur influence sur le vote
L’enjeu immigration en Bretagne
L’influence d’un député sur le vote des électeurs de sa circonscription à l’élection présidentielle
La résistance de Nicolas Sarkozy dans la région, un moindre impact du bilan ?
La Bretagne : De la démocratie-chrétienne à la sociale-démocratie ?
II. Les élections législatives de 2012 dans la région Bretagne
Causes, modalités et enjeux des élections législatives de 2012
Vue générale des élections législatives dans la région
Les élections législatives de 2012 dans les Côtes d’Armor
Les élections législatives de 2012 dans le Finistère
Les élections législatives de 2012 dans l’Ille et Vilaine
Les élections législatives de 2012 dans le Morbihan
Conclusion
Bibliographie
Annexes
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