L’influence des albums dans la construction identitaire des jeunes lecteurs

Les enjeux de l’égalité femmes-hommes et filles-garçons dans l’éducation

Les études sur le genre montrent que les représentations stéréotypées des femmes et des hommes sont une des causes des inégalités femmes-hommes. Elles s’immiscent dans notre façon de penser et de percevoir la société, influencent nos conduites et nos décisions, et amènent aux situations d’inégalités précitées.
Dès l’enfance, nos comportements sont influencés par notre environnement. Selon Frédérique Chanal (2015), la théorie cognitive élaborée par Laurence Kohlberg en 1966 décrit plusieurs phases de développement de l’identité sexuée chez l’enfant :
1) l’identité de genre entre 2 et 3 ans où l’enfant sait qu’il-elle est garçon ou fille et catégorise les adultes dans ces deux catégories en fonction de ses caractéristiques physiques ;
2) la stabilité de genre entre 3 et 5 ans où l’enfant sait qu’être garçon ou fille restera stable dans le temps ;
3) la constance de genre à 5 ans où l’enfant fait le lien entre le biologique et l’identité de genre : c’est à ce moment-là qu’il-elle veut se conformer aux stéréotypes de genre (choix des vêtements, des jeux) ;
4) la phase de rigidité après 5 ans où il-elle renforcera son appartenance au groupe de pairs.
Les enfants construisent donc leur identité de genre en observant leur environnement, et en intégrant les stéréotypes, s’il y en a.
Nos élèves, qui ont entre 7 et 8 ans, sont dans cette phase de rigidité. Par exemple, Gwendoline a observé dans sa classe qu’un garçon refusait de travailler dans son groupe car il était avec 3 filles. Manuela, elle, a essuyé un refus de la part de plusieurs garçons lorsqu’elle leur a donné comme consigne en écriture de raconter une aventure à un personnage fille. Le-la professeur-e doit être en mesure de relier ces réactions au stade de développement de l’enfant et non à des attitudes sexistes.
Dans le domaine de l’éducation, on peut citer deux comportements qui amènent les personnes à renforcer leurs stéréotypes.
Le premier comportement est le principe d’auto-confirmation. Frédérique Chanal (2015) cite deux études pour expliquer ce phénomène. La peur de renforcer un stéréotype par son comportementdiminue les performances en situation d’évaluation. Claude Steele et Joshua Aronson (1995), l’ont prouvé sur des étudiant-e-s afro-américain-e-s aux Etats-Unis. Elle cite également Pascal Huguet (2013), qui reprend les analyses de Claude Steele et Joshua Aronson et les transpose aux stéréotypes de genre. Ainsi, pour réussir dans les disciplines mathématiques, les filles doivent affronter un stéréotype négatif « les filles sont moins bonnes que les garçons en mathématiques », que les garçons ne doivent pas affronter.
Le deuxième comportement est l’effet pygmalion. Frédérique Chanal (2015) restitue ce que Robert Rosenthal et Lenore Jacobson (1968) avaient mis en évidence. En pédagogie, l’effet pygmalion consiste à émettre des hypothèses sur le devenir d’un-une élève et les voir se réaliser. Elle restitue également la conclusion des études menées par J.Z.Rubin, F.Provenzano et Z.Luria (1977), qui avaient montré que les parents n’agissent pas de façon similaire (durée d’allaitement, jeux, langage) et attribuent des caractéristiques différentes (grand, solide pour les garçons, belle, gentille pour les filles) selon le sexe de leur enfant. Elle transpose ces conclusions aux enseignant-e-s, qui auraient des comportements différents selon le sexe de leurs élèves (comme par exemple, approuver inconsciemment l’agitation chez les garçons et la tranquillité chez les filles). On retrouve ces comportements par exemple dans la réaction qu’a eu la collègue titulaire de Manuela en début d’année, en l’alertant de l’agitation prévisible de leur classe car elle est composée d’une majorité de garçons (19 contre 7 filles).
Les supports pédagogiques eux montrent peu d’images féminines (manuels d’histoire, littérature jeunesse). Celles-ci sont souvent passives, avec un rôle secondaire. Les énoncés des exercices présentent régulièrement des rôles sociaux stéréotypés, comme le montre Simone Rignault et Philippe Richert (1997) (notion développée plus loin, cf 1.3).
Il existe ainsi une construction stéréotypée des rôles des femmes et des hommes dès le plus jeune âge, qui se base sur les modèles qui nous entoure, et qui peut amener les élèves à reproduire les inégalités qui les entourent. D’où l’importance en tant que professeur-e des écoles d’intégrer au sein de sa posture et de son enseignement des moyens pour déconstruire ces stéréotypes le plustôt possible.

L’éducation nationale porteuse de l’égalité filles-garçons

Le-la professeur-e des écoles, en tant que fonctionnaire de l’Education Nationale, est porteur- porteuse des valeurs qu’elle défend et des actions qu’elle souhaite mettre en œuvre. Il est donc nécessaire de rappeler ici tout ce que l’Education Nationale a fait et fait pour intégrer l’égalité femmes-hommes et filles-garçons (2.2.1), car c’est le cadre qui donne la légitimité au-à la professeur-e pour aborder et travailler cette question avec ses élèves (2.2.2).

L’éducation nationale intègre l’égalité dans ses priorités

L’historique de la prise en compte de l’égalité à l’école primaire

En ce qui concerne l’égal accès à l’école primaire, Marianne Leulliez (2000) retrace l’historique de l’enseignement des filles en France jusqu’à la première guerre mondiale. Il a fallu attendre les grandes lois de 1882 et 1883 pour que l’ensemble des filles fréquente effectivement l’école primaire. En effet, après la révolution, la loi reste muette sur les écoles de filles jusqu’en 1836, où la loi Guizot de 1833, qui rendait obligatoire pour les communes la création et l’entretien d’écoles primaires de garçons, est étendue pour les écoles de filles. Ce sont ensuite les lois Falloux
en 1850 et Duruy en 1867 qui développent la scolarité des filles notamment en permettant l’augmentation du nombre d’écoles pour filles. En 1879 la loi Paul Bert permet de créer une école normale d’institutrices dans chaque département. Ce n’est qu’en 1882 et 1883 que la scolarisation, qui devient obligatoire et laïque, permet à toutes les filles d’intégrer enfin l’école primaire. Ces deux dates peuvent être choisies pour les transmettre aux élèves car elles sont primordiales dans l’histoire de l’éducation entre filles et garçons.
En ce qui concerne la mixité scolaire, elle est officiellement proscrite jusqu’en 1848. Ce n’est qu’en 1975 que la loi l’impose.
Ce n’est qu’au début du XXième siècle qu’on proposera les mêmes programmes aux filles, considérées pendant longtemps comme des futures mères au foyer et devant être éduquées commetelles.
Ces dates, si récentes, nous ont interpellées : ce n’est que depuis la fin du XXème siècle que les filles et les garçons reçoivent la même éducation. Cela explique les mentalités et attitudes encore très stéréotypées dans notre société. Il nous semble alors absolument nécessaire que lesprofesseure-s les aient en tête. Se rappeler de telles dates leur permettrait de prendre conscience de la nécessité de veiller à la défense de l’égalité au sein de l’école.

Les lois et actions mises en œuvre aujourd’hui

La Convention interministérielle pour l’égalité entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes dans le système éducatif fixe des objectifs sur la période de 2013 à 2018, et engage les parties signataires à renforcer leur action en faveur de la promotion de l’égalité entre les sexes.
Le Plan d’action pour l’égalité entre les filles et les garçons à l’école12 est la généralisation des ABCD de l’égalité (en test en 2013-2014). Mis en place par les ministres de l’Education et des Droits des Femmes de l’époque, Vincent Peillon et Najat Vallaud-Belkacem, il est adressé à l’école primaire et doit permettre aux enseignant-e-s d’avoir des outils pour traiter ce sujet. Un de ses objectifs est d’intervenir dès l’école primaire pour lutter contre les formations de ces inégalités dès le plus jeune âge, en agissant sur les représentations des élèves et les pratiques des acteurs actrices de l’éducation. Des ressources sont accessibles sur le site https://www.reseau canope.fr/outils-egalitefilles-garçons.html où il est notamment mis à disposition des pistes pédagogiques pour les professeur-e-s de la maternelle au lycée.

Les débats suscités sur « la théorie du genre »

Les professeur-e-s des écoles doivent être conscients des débats que suscitent l’égalité filles garçons au sein de l’école, et doivent être à même de comprendre, d’expliquer ce qui est en jeu. Par exemple, l’égalité filles garçons à l’école a suscité ces dernières années un vif débat sur « la théorie du genre ». Certains citoyens et citoyennes ont dénoncé cette théorie, qui ne reconnaîtrait pas de différences biologiques entre les humains et ne distinguerait pas les différences entre fille/garçon, homme/femme. Ils-elles se sont opposé-e-s à l’Education Nationale, car ils-elles pensaient qu’elle voulait imposer une telle vision à l’école et dans les programmes scolaires. Il n’existe pas en réalité de « théorie du genre ». Il existe des études sur le genre qui étudient les différences entre les femmes et les hommes, mais ne nient pas les différences de sexes. Le mouvement contre « la théorie du genre » conteste principalement deux approches : les études qui montrent que nous construisons des rôles sociaux, attribués en fonction du sexe d’un individu d’une part, et le postulat de certains chercheurs et chercheuses, qui, plutôt que de définir 2 sexes, préfère parler de « deux pôles, entre lesquels se déploie un large spectre d’individus […] En réalité, nous serions tous à hauteur de 10, 20, 30 ou 40% constitué par des marqueurs biologiques de l’autre sexe » (interview d’Eric Macé, parAgnès Viard (2013)).

La littérature jeunesse : un vivier de stéréotypes

La littérature de jeunesse a une place très importante dans l’enseignement puisque les enseignant-e-s prennent souvent appui sur un livre pour aborder des notions de vocabulaire, grammaire, mais aussi en EMC, comme nous l’avons fait lors de notre expérimentation, ou encore simplement en lecture. Les élèves sont donc, à l’école, quotidiennement confrontés à cette littérature et ce depuis la première année de maternelle. De plus, le Ministère de l’Education nationale donne aux enseignant-e-s des listes de références dans lesquels choisir les ouvrages présentés en classe. Ces listes sont divisées par cycle (une liste par cycle) et permettent aux élèves de se forger une culture littéraire commune. On peut donc se demander si les stéréotypes présents dans les livres pour enfants n’ont pas un impact sur les représentations qu’ils-elles se font de l’égalité filles-garçons.

L’éducation des stéréotypes

Dans les siècles précédents et jusque dans les années 1960, les petites filles et les petits garçons recevaient une éducation différente dès leur plus jeune âge. Nous pouvons donc penser que depuis que la mixité à l’école est devenue la norme, les enfants reçoivent la même éducation et que celle-ci se doit d’être exempte de tout stéréotype sexisme. Mais ce n’est pas ce qu’il se passe en réalité. En effet, souvent les professeur-e-s ont des attentes différentes face à des élèves de sexes différents. Ils-Elles trouveront normal que les filles soient sages et disciplinées tandis que les garçons pourront être agités et perturber la classe puisque cela est dans leur « nature », comme nous l’avons vu dans notre introduction et nos exemples. Nous retrouvons donc dans le milieu scolaire les mêmes stéréotypes que l’on peut trouver au sein de la famille et dans la société en générale.
L’éducation des enfants en termes de stéréotypes sexistes ne se fait pas seulement en milieu scolaire. Au contraire, le premier lieu d’apprentissage du sexisme reste le cercle familial. En effet, c’est en regardant les agissements et les comportements de ses parents et de sa famille proche que l’enfant intériorisera les comportements et apprendra à se comporter lui-même. Donc si ses parents véhiculent des stéréotypes sexistes, par habitude ou par tradition, l’enfant pensera que c’est la norme et reproduira ce schéma dans ses rapports aux autres. Dans la préface de l’ouvrage d’Elena Gianini Belotti (1973, p.9) une citation de Brodrerick est reprise : « (…) Malgré les facteurs hormonaux et génétiques c’est l’éducation qui est l’élément déterminant de l’identification sexuelle et qui fait que l’on se considère comme filles ou garçon. ». Ceci montre bien qu’en terme d’égalité filles-garçons l’éducation tant familiale que scolaire est primordiale. Mais les enfants ne se forgent pas ces représentations sexuées seulement en observant leur environnement familial. C’est aussi parle biais de différents médias tels que les jeux, la télévision ou les livres qu’ils-elles se construisent aussi une image du monde qui les entoure et des rapports sociaux.

Des héros presque toujours masculins ?

Les albums sont les premiers livres que l’on propose aux enfants avant même qu’ils-elles ne sachent lire. Dans cette littérature, les personnages prennent une place prépondérante puisque c’est sur eux que se focalisent l’histoire et les illustrations. De plus, les personnages des albums ont un rôle important en ce qui concerne l’identification des enfants et leur vision du monde qui les entoure puisqu’ils sont les supports de valeurs et de traditions que les adultes souhaitent transmettre aux enfants. Nous pouvons donc penser que pour que chaque enfant puisse se construire et se détacher des stéréotypes sexistes qui sont légion dans notre société, l’édition pour la jeunesse devrait présenter une parité exemplaire en ce qui concerne les héros et les héroïnes des albums.

L’influence des albums jeunesse dans la construction identitaire des jeunes lecteurs 

Les livres que nous lisons ou que l’on nous lit ont-ils un impact sur notre construction identitaire ? Les personnages et les rôles qui sont attribués à ces personnages changent-ils notre façon de voir les autres et la société ? Hélène Montardre (1999, p.277) rapporte une citation de Marie-José Chombart de Lauwe : « La représentation de l’enfant dans la littérature d’enfance et de jeunesse apparaît comme la projection des attentes de la société à l’égard des comportements et des rôles réels des enfants, ou comme la projection d’un imaginaire qui prend l’enfant comme support.
Les différents types de récits et genres mettent en scène des enfants qui peuvent être perçus et choisis par les jeunes lecteurs comme des modèles de conduites ou comme des modèles idéaux. Les enfants s’identifient alors au personnage, par des mécanismes de projection ou d’introjection. ».
Cette citation permet d’avoir un début de réponse à la question posées: les livres et les personnages des ouvrages lus au cours de l’enfance ont une influence sur la construction d’une identité. En effet, c’est à partir de l’observation des adultes mais aussi des représentations que les albums jeunesse offrent des hommes et des femmes que les enfants peuvent acquérir des connaissances sexuées sur le monde et la société qui les entoure. Le fait que les albums pour la jeunesse perpétuent et transmettent des valeurs et des stéréotypes sexistes ne permet pas aux enfants de se construire de façon indépendante ni de créer une nouvelle société débarrassée de tout sexisme. Les normes de genre sont donc intériorisées et reproduites par les jeunes enfants comme Carole Brugeilles,Isabelle Cromer, Sylvie Cromer (2002 p.289) semblent le penser : « Basée sur la suprématie du masculin et le poids de la génération adulte, induisant hiérarchisation des sexes et différenciations subtiles de rôles, les albums illustrés véhiculent des rapports sociaux de sexe inégalitaires. La littérature de jeunesse n’est pas anodine, comme le laissent croire le chatoiement de graphismes recherchés et la variété du peuple des personnages. Elle contribue à la reproduction et à l’intériorisation de normes de genre. ». On peut donc dire que les albums jeunesse jouent un rôle de médiateur entre les adultes et les enfants pour ce qui est de l’intériorisation, l’enseignement des valeurs stéréotypées de nos sociétés. Mais est-ce que les albums jeunesse offrent les mêmes possibilités de développement identitaire aux garçons et aux filles ?
Etant donné que les héros des albums jeunesse sont pour la majorité des personnages masculins, nous pouvons penser que les petites filles ont moins de possibilité d’identification que les petits garçons. Le fait que les personnages féminins sont le plus souvent relégués au second plan, rappelle aux petites filles qu’elles occupent une place moins importante que les petits garçons.
L’identification des petites filles à des personnages masculins vivant de grandes aventures et ayant des caractéristiques morales plus valorisées que celles des personnages féminins, leur permet de se bâtir une identification et une identité plus riche que ce que leur apporterai les seuls personnages féminins. Selon Elena Gianni Belloti (1973, p.112 à 114), la revue L’École des parentsa publié dans les années 1970 une enquête réalisée par Marie-José Chombart de Lauwe intitulée « L’Enfant et son image » dont les extraits résument assez bien notre propos : « Idéalisés, ces personnages incarnent les conceptions des adultes, les valeurs propres à la culture à laquelle les enfants s’initient.
Imaginaires, ils leur offrent l’occasion de s’évader avec eux, de compenser les contraintes dues à leur entourage et à leur propre personnalité. Appartenant aux mêmes catégories d’âges, ils permettent facilement aux enfants de se comparer, voire de s’identifier à eux. Ces personnages sont créés par des adultes en fonction de leurs propres représentations et de leurs conceptions de l’enfance, en fonction de leurs fantasmes à l’égard de l’enfant (…) C’est le malaise de la société à l’égard de la femme qui se traduit dans ces récits. Les petites filles se trouvent confrontées à une représentation du monde dont les femmes sont presque exclues. (…) Cet ensemble de faits traduit le flottement des images de la femme dans notre société et peut expliquer, au moins en partie, la difficulté des filles à s’identifier ou à accepter leur sexe. En effet, diverses études sur ce sujet ont montré que bien des filles auraient mieux aimé être un garçon alors que l’inverse est exceptionnel. ». On peut donc voir que les adultes continuent de transmettre les stéréotypes à travers leurs comportements mais aussi à travers la lecture d’albums stéréotypés qui entravent l’épanouissement complet et égalitaire des petits garçons et des petites filles. Garçons et filles sont donc contraints, en dépit d’eux-elles-mêmes et sans même s’en apercevoir, de se conformer à ce que la société attend d’eux-elles. Les albums jeunesse qui sont proposés aux jeunes enfants ont donc une influence sur leur construction identitaire car, comme le dit Albert Beguin (1973) : « ce que nous sommes aujourd’hui est composé sans doute de rencontres humaines, d’accidents de toute sorte, de nos misères, et de nos réussites, mais aussi pour une part inappréciable, pour une part immense, des livres que nous avons lus, des livres qui sont devenus notre propre substance. »

Problématique (partie rédigée à deux)

Face au constat d’une société égalitaire dans les droits, mais inégalitaires dans les faits, nous nous sommes demandées si nos élèves étaient impactés par ce phénomène. Quelles sont les représentations de nos élèves sur les rôles des femmes, des hommes, des filles et des garçons ?
Comment se positionnent-ils-elles (en ont-ils-elles conscience, savent-ils-elles pourquoi, savent ils elles l’expliquer) ? Quels outils pouvons-nous leur apporter pour y réfléchir. Nous avons donc élaboré une problématique en deux temps :
 Les représentations de nos élèves sur la répartition des rôles entre filles et garçons, hommes et femmes sont-elles le reflet de ce que nous constatons dans notre société ?Le constat de l’égalité et des inégalités dans notre société a été décrit ci-dessus. Mais qu’en est il dans nos classes ? Avant de pouvoir travailler avec nos élèves sur l’égalité, nous avons besoin de connaître leurs propres représentations des rôles des hommes et des femmes. Nous avons donc besoin dans un premier temps de faire un état des lieux des représentations de nos élèves : que pensent-ils-elles de l’égalité filles-garçons, femmes-hommes ?
 Faire réfléchir nos élèves sur leurs propres représentations en les confrontant à celles des autres permet-il de faire évoluer ou modifier leurs points de vue ?Une fois leurs représentations explicitées, nos élèves seront-ils en mesure de comprendre pourquoi ils-elles pensent d’une certaine manière, et pourquoi les autres pensent pareil ou différemment ?
Quelles attitudes adopteront-ils-elles face à ce constat : compréhension, incompréhension, rejet, acceptation ? Leurs idées pourront-elles évoluer ?
C’est par l’expérimentation que nous proposons ci-dessous que nous avons essayé de répondre à cette problématique.

Méthode (partie rédigée seule)

J’ai souhaité mettre en œuvre une expérimentation en quatre temps. Chaque temps a son propre objectif et se matérialise par une ou plusieurs activités proposées aux élèves. Cette expérimentation sera présentée sous forme de tableau récapitulatif (4.1). Après avoir présenté les participant-e-s (4.2), la méthode et les procédures de mise en œuvre et d’analyse seront dévelopées (4.3).

Tableau récapitulatif de l’expérimentation Ce tableau figure en annexe n°1 page 41

Participant-e-s

J’ai mis en place cette expérimentation dans ma classe de CE1 dont voici les caractéristiques principales :
Nombre de filles : 7
Nombre de garçons : 19
Niveau socio-professionnel des familles : classe moyenne, 5 élèves provenant de familles modestes.
Niveau des élèves : Il s’agit d’élèves pour la plupart intéressé-e-s par les apprentissages. Beaucoup ont des besoins très différents et très spécifiques (une enfant de foyer difficile à cadrer, deux élèves avec Auxiliaire de Vie Scolaire en retard dans les apprentissages, un élève avec de grandes difficultés d’attention et de concentration, un élève à haut potentiel, 10 élèves en difficultés d’apprentissage, un élève avec 1 an de retard sur les apprentissages).
Climat de classe : Ces élèves se connaissent depuis la maternelle. Ils-elles s’agitent et se dispersent très fréquemment, rendant les situations d’apprentissages difficiles à mettre en œuvre. L’ambiance de classe est souvent tendue, les élèves agressifs-agressives entre eux. Gwendoline Villacanas a également mis en place cette expérimentation dans sa classe de CE1-CE2 comprenant 26 élèves.

Matériel et Procédures

Pour mettre en œuvre cette expérimentation, Gwendoline et moi avons utilisé des supports divers. Pour chacun d’entre eux, voici le matériel utilisé et les procédures mises en œuvre pour mener à bien l’expérimentation et pour effectuer l’analyse des résultats. Nous sommes parties toutes les deux des mêmes supports, mais chacune les a présentées dans un ordre et selon des modalités et des objectifs différents. La méthode d’exploitation des résultats est également la même.

Les ours

La Ligue de l’Enseignement de Paris a mené en 2013 une enquête sur les stéréotypes de genre dans les activités quotidiennes, auprès de milliers d’élèves en Ile-de-France. Elle a soumis aux élèves un livret dans lequel se trouve un questionnaire sur des ours-es. Il montre des images d’ours-es non genrées (aucun détail ne permet de savoir s’il s’agit d’un mâle ou d’une femelle).
Chaque ours-e fait une activité : taper à l’ordinateur, repasser, lire un livre, cuisiner, peindre des murs, donner un biberon à un bébé, faire du vélo et parler en tant que représentant politique. Les élèves doivent dire s’il s’agit d’un monsieur d’une madame ou les deux. Gwendoline et moi avons souhaité faire de ce questionnaire notre activité de départ afin de recueillir les représentations initiales de nos élèves. Nous avons également souhaité l’utiliser en dernière activité afin de pouvoir observer si les élèves avaient modifié leurs réponses après la réflexion menée avec les élèves. Ne pouvant pas nous procurer le livret, nous avons récupéré les images des ours-es et créé notre propre fiche (cf Annexe n°2 Les Ours (1)).
En tant qu’activité de départ, je ne souhaitais pas que les élèves comprennent, avant même de remplir le questionnaire ce que j’attendais d’eux-elles. Selon Mireille Baurens, il est parfois intéressant de ne pas présenter l’objectif aux élèves afin que leurs réponses soient les plus réelles possibles. Il est aussi intéressant de ne pas leur proposer des choix prédéfinis car cela peut les inhiber dans leurs réponses. C’est pourquoi je leur ai d’abord annoncé que nous allions remplir un petit questionnaire. Après l’avoir observé collectivement, je leur ai proposé de mettre des prénomsplutôt que Monsieur/Madame/Les deux. De ces prénoms j’en conclurais le sexe qu’ils-elles attribuent à chaque ours.
Afin que les élèves puissent tout de même comprendre l’intérêt de l’activité, j’ai ensuite présenté la séquence que nous allions mener et son objectif. Nous avons donc eu un échange sur les réponses des élèves, qui ont argumenté leurs réponses (cf Annexe n°7 Retranscription des échanges sur les ours (1)).
En tant que dernière activité, mes élèves savaient de quoi nous parlions et à quoi servait ce questionnaire. J’ai donc proposé d’inscrire Monsieur, Madame, ou les deux.Pour analyser ce questionnaire, j’ai recueilli les réponses sous formes de deux tableaux : un tableau pour les réponses des garçons, et un autre pour les réponses des filles. Les graphiques seront présentés dans la partie « 4 Résultats Analyse des données ».

Tableau « Qui peut faire quoi ? »

Dans le manuel Enseignement Moral et Civique des éditions Nathan, une séquence est proposée pour traiter du thème de l’égalité filles-garçons. Dans la fiche d’activité n°24, Gwendoline et moi avons trouvé un tableau intéressant permettant de compléter l’état des lieux des représentations initiales des élèves (cf Annexe n°3 Tableau « Qui peut faire quoi ? »). Il s’agit d’un tableau à double entrée où l’on doit cocher si certaines activités sont faisables par les femmes, les hommes, ou les deux. Ce tableau est intéressant car il utilise une formulation avec le verbe pouvoir, qui permet aux élèves de comprendre que la réponse n’est pas basée sur ce que l’on observe (« Qui fait quoi ? ») mais basée sur ce que chacun peut faire (« Qui peut faire quoi ? »).
En guise d’introduction à ce tableau, j’ai rappelé la séance des ours, puis commenté les deux photos proposées par la fiche d’activité. Elles montrent un homme sage-femme et une femme grutière. Cela permet de réactiver les réflexions et d’introduire ce qui est demandé dans le tableau. Pour analyser les réponses de mes élèves j’ai repris le même tableau avec le nombre de réponse pour chaque activité. J’ai créé deux tableaux, un pour les réponses des filles, un pour les réponses des garçons. Les graphiques présentant les résultats seront présentés dans la partie « 4 Résultats Analyse des données ».

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Table des matières
1 Introduction
2 Une valeur reconnue nécessaire pour une société et une école égalitaire pour tous et toutes : l’état de l’art de l’égalité femmes-hommes (partie rédigée à 2)
2.1 La société française garante de l’égalité femmes-hommes
2.1.1 L’égalité de droit face à l’égalité de fait
2.1.2 Les inégalités des chances dues aux comportements sociaux
2.2 L’éducation nationale porteuse de l’égalité filles-garçons
2.2.1 L’éducation nationale intègre l’égalité dans ses priorités
2.2.2 Les professeur-e-s des écoles doivent intégrer l’égalité dans leur enseignement
2.3 La littérature jeunesse : un vivier de stéréotypes
2.3.1 L’éducation des stéréotypes
2.3.2 Des héros presque toujours masculins ?
2.3.3 Des personnages stéréotypés ?
2.3.4 L’influence des albums dans la construction identitaire des jeunes lecteurs
3 Problématique (partie rédigée à deux) 
4 Méthode (partie rédigée seule) 
4.1 Tableau récapitulatif de l’expérimentation
4.2 Participant-e-s
4.3 Matériel et Procédures
4.3.1 Les ours
4.3.2 Tableau « Qui peut faire quoi ? »
4.3.3 Le questionnaire personnel
4.3.4 Analyser des couvertures de livres de jeunesse
4.3.5 Discussion à Visée Philosophie (DVP)
5 Résultats : Analyse des données (partie rédigée seule) 
5.1 Les ours (1) : une première conception étonnamment masculine des activités quotidiennes
5.2 Tableau « Qui peut faire quoi ? » : une deuxième conception étonnamment mixte des activités quotidiennes
5.3 Le questionnaire personnel : des répartitions et représentations plus stéréotypées des activités apparaissent
5.4 Analyse des couvertures des livres : la vision stéréotypée des garçons contre une vision mixte des filles
5.5 Discussion à Visée Philosophique : comprendre ma façon de penser et celle des autres
5.6 Les ours (2) : une vision plus réaliste des représentations des élèves
6 Discussion (partie rédigée seule)
6.1 Recontextualisation
6.2 Ce qui a marché : comprendre d’où viennent nos représentations
6.3 Mise en lien avec les recherches antérieures
6.4 Limites : quels choix donnés aux élèves pour limiter l’influence de la pensée du professeur sur celle des élèves ?
6.5 Ce qui est différent dans chaque classe
6.6 Avons-nous atteint nos objectifs ?
6.7 Propositions pour la suite
7 Conclusion 
8 Bibliographie
9 Annexes

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