L’influence de l’aide au client sur sa participation en marketing des services

L’affirmation du concept d’expérience de service

   En marketing, le concept d’expérience émerge au début des années 80, période à laquelle les auteurs commencent à considérer que la consommation en elle-même est expérientielle et peut être recherchée par le consommateur pour ses aspects hédonistes, symboliques et esthétiques. Jusqu’aux années ͳͻͺͲ, la consommation était principalement définie comme un comportement fondé sur une démarche rationnelle du consommateur, s’appuyant sur les approches de la micro-économie classique. Chaque décision a ainsi pour objet de maximiser l’utilité du consommateur sous contraintes budgétaires. S’appuyant sur les théories de la rationalité limitée développée par Simon (1964), l’article fondateur de Holbrook et Hirschman (1982) met en avant une deuxième vision du comportement du consommateur, ce dernier se concentrant sur des aspects expérientiels. Les objectifs de l’expérience de consommation ne se limitent plus dès lors à une dimension fonctionnelle mais peuvent être aussi liés au plaisir généré par l’expérience en elle-même. En 2007, Kwortnik et Ross définissent cette expérience de consommation comme « une interaction du consommateur avec le produit qui soit à la fois plaisante, mémorable, et créatrice de sens ». Cette expérience étudiée sur l’acte de consommation a logiquement été étendue à l’expérience de service. Par essence, le service est expérientiel (Mudie et al., 2003). L’expérience de consommation d’un produit repose uniquement sur l’interaction entre le produit et le client au moment où ce dernier le consomme. En services, l’expérience est double pour le client : il s’agit à la fois d’une expérience de consommation et de production du service. Sans cette expérience, le service n’existe pas, contrairement au produit. En effet, la création du service repose sur l’interaction entre trois éléments centraux de la prestation : le personnel en contact, le support physique et le client (Eiglier et Langeard, 1987). Cette production du service est concomitante avec sa consommation. Le client est alors acteur non seulement en tant que bénéficiaire et consommateur du service, comme dans le cas d’une expérience de consommation, mais aussi en tant que coproducteur de la prestation. Ainsi que le dit Epictète dans sa citation, un rôle lui est alors confié par le créateur de la prestation de service, l’entreprise, et de ce rôle dépend la qualité de la production du service (Lengnick-Hall, 1996; Bettencourt, 1997).

Le client comme facteur de production en marketing des services

   Cette présence induit que le client a un rôle à jouer dans la production du service. Eiglier et Langeard (1987) schématisent ce rôle à travers la théorie de la servuction (Figure 3). 18 Pour qu’un service soit produit, le processus de production requiert la présence de trois facteurs : le personnel en contact, le support physique et le client. Dans ce processus de servuction, le prestataire maîtrise pleinement le support physique et le personnel en contact qui font partie de l’entreprise. Bien que le client puisse être considéré comme un membre de l’organisation (Barnard, 1948; Parsons, 1956), sa présence en son sein n’est que temporaire ȋMills et al., 1983). Le client comme ressource productive est alors source d’incertitude (Mills et al., 1983) et il pose un problème de rentabilité, l’entreprise n’étant pas certaine de rentabiliser les coûts investis dans ce facteur de production (Mills et Morris, 1986). Cette difficulté est renforcée par le double statut du client : il est à la fois coproducteur et bénéficiaire de la prestation. Ainsi, au même titre que l’entreprise gère son personnel en contact et entretient son support physique, elle doit apprendre à intégrer le client à son système de production.

Les limites empiriques liées à la réalité de la participation.

   La participation est un ensemble de rôles que le client joue avec une intensité variable. Parmi ces rôles, deux familles sont distinguées dans la littérature: les intra-rôles et les extra-rôles. Les intra-rôles sont les actions que le client doit mettre en place afin que le service soit produit. L’obligation de réaliser les actions pour obtenir un bénéfice s’inscrit pleinement dans ce système motivationnel décrit par Vroom. Par exemple, le client évalue son parcours en magasin afin d’optimiser le temps passé en fonction de l’achat à réaliser. Cependant, le modèle de Vroom ne permet pas de comprendre des changements brutaux de comportement dans l’intra-rôle par exemple. Pourquoi un client qui arrive à la caisse d’un supermarché après une heure passée dans le magasin abandonne brutalement l’intégralité de son chariot si une promotion sur un produit ne fonctionne pas? Rationnellement, il devrait juste reposer l’article concerné et conserver le reste de son caddie pour maximiser le bénéfice du temps passé en magasin. Les extra-rôles, eux, sont des actions non obligatoires pour la production du service et que le client peut réaliser en plus de son rôle basique (intra-rôle). Au sein de ces rôles, quatre actions sont identifiées: aider un autre client, contribuer à améliorer la qualité du service ou bien coopérer avec les employés. La motivation à accomplir ces extra-rôles est parfois difficilement explicable par un mécanisme purement rationnel. Par exemple, un client pressé qui s’arrête pour aider une personne âgée dans un rayon n’est pas cohérent avec une optimisation des achats sous contrainte temporelle. Un mécanisme, différent d’un mécanisme purement rationnel, est donc à l’œuvre pour expliquer la motivation à jouer ce type de rôle. Ainsi, si la théorie des attentes permet d’expliquer une partie de la motivation du client à participer, empiriquement elle ne permet pas d’appréhender certains mécanismes motivationnels liés à la participation.

Définition et caractéristiques des émotions

   Partant du constat que les émotions sont « un domaine négligé par les chercheurs en marketing mais au cœur de la discipline… », Bagozzi et al., (1999) définissent un cadre conceptuel pour les émotions, cadre conceptuel qui sera repris par de nombreux auteurs par la suite (Smith et Bolton, 2002; Bougie et al. 2003; Krampf et al., 2003; Ruth et al., 2004; Schoefer et Ennew, 2005; Mccoll-Kennedy et Smith, 2006; Schoefer et Diamantopoulos, 2009; Tronvoll, 2011). Ce cadre étant désormais largement partagé par les chercheurs en marketing et sera adopté dans cette démarche de recherche. Bagozzi et al. (1999) considèrent les émotions comme « un état mental d’alerte qui naît d’évaluations cognitives des événements ou des propres pensées de l’individu, il a un aspect phénoménologique, est accompagné de processus physiologiques (e.g gestuelles, postures, expressions faciales) et il peut en résulter des actions spécifiques cherchant à ressentir pleinement ou à éviter cette émotion, selon sa nature et son sens pour la personne qui la ressent». Cette définition met en avant que l’émotion naît d’une évaluation cognitive, se traduisant par une expression physiologique et un potentiel d’action de la réponse émotionnelle, ce que Westbrook et Oliver (1991) résument ainsi : « Les émotions ont une relative urgence psychologique, un potentiel de motivation et une spécificité situationnelle ». D’abord, selon Bagozzi et al. (1999), l’émotion naît de la rencontre entre un script cognitif et un stimulus. Selon ces auteurs, les émotions apparaissent « en réponse à l’évaluation cognitive qu’une personne fait d’un événement pouvant modifier son bienêtre ». L’évaluation cognitive relève d’un jugement et d’une interprétation de la situation par l’individu. Par exemple, un client se rend au guichet d’enregistrement de l’aéroport et dialogue avec le personnel en contact. Par son expérience et son profil personnel, il a un script attendu de cette conversation. Si l’employé se montre agressif, le client évalue ce stimulus par rapport au processus attendu, ce qui peut le conduire à une émotion comme la colère. Les émotions étant le fruit d’un jugement et d’une interprétation personnelle, dans une même situation deux individus peuvent interpréter différemment la scène et ressentir des émotions différentes. « )l n’y a donc pas d’événements spécifiques ou de circonstances physiologiques qui produisent des émotions, mais plutôt une seule évaluation cognitive faite par l’individu jugeant les événements et circonstances » (Bagozzi et al., 1999). Chaque individu peut donc, dans une même situation, évaluer la situation de façon différente et ressentir ou non une émotion. Cette émotion peut ensuite « s’exprimer physiquement » ou bien « engendrer des actions » pour faire face à la situation (Bagozzi et al., 1999). Ensuite, l’émotion se traduit par une expression physiologique, un éveil corporel. Selon Bagozzi et al. (1999), « l’éveil est un aspect fondamental du comportement lié aux émotions ». Les émotions se traduisent par une agitation corporelle plus ou moins grande en fonction du type d’émotion. Enfin, les émotions se traduisent par des potentiels d’action. Martin et al. (2008) définissent les émotions négatives comme « des motivations à l’évitement » et les émotions positives comme des « motivations d’attirance ». Les émotions négatives sont vécues comme des écarts non désirables à un état stable et poussent l’individu à atteindre à nouveau cet état de stabilité. Les émotions positives, elles, motivent l’individu à persister dans l’état dans lequel il se trouve. En considérant la valence des émotions (positives vs négatives) et la dimension temporelle (présent/passé vs futur), Bagozzi et al. (1999) classent les réponses émotionnelles et les comportements qu’elles génèrent en quatre grandes familles. Les deux premières familles sont orientées vers l’instant présent ou passé :
 Les réponses émotionnelles liées à des conflits avec le résultat désiré. Elles apparaissent lorsque l’individu échoue dans l’atteinte d’un but ou bien vit une expérience négative. Les émotions ressenties sont alors par exemple : la tristesse, l’insatisfaction, le regret. Ces émotions engendrent alors les comportements suivants : la recherche d’aide, la tentative de retourner la situation ou d’augmenter les efforts.
 Les réponses émotionnelles liées à l’atteinte du résultat désiré. Elles apparaissent quand l’individu atteint le résultat escompté ou bien vit un événement positif. Les émotions ressenties sont alors la satisfaction, la joie, la fierté. Les comportements issus de ces émotions sont la volonté de partager, de poursuivre l’action et de jouir du résultat. Ces émotions poussent l’individu à aider les autres et à être altruiste. Contrairement aux deux catégories précédentes qui ont une orientation temporelle présente ou passée, les deux familles suivantes sont orientées vers le futur :
 Les réponses émotionnelles liées à l’évitement d’une situation future. L’individu anticipe un événement négatif ce qui génère des émotions comme l’anxiété ou la peur. Ces émotions génèrent des stratégies d’évitement de la menace ou bien de réinterprétation de la menace.
 Les réponses émotionnelles liées à la recherche d’une situation future. Contrairement à la catégorie précédente, l’individu anticipe un événement positif et ressent alors de l’espoir. )l tente alors de faciliter l’atteinte de l’objectif ou de maintenir son engagement et sa vigilance. Ces trois caractéristiques (naissance par évaluation cognitive, traduction par une expression physiologique et un potentiel d’actionȌ permettent de différencier l’émotion des autres concepts proches ȋaffect, attitudeȌ et notamment de l’humeur. Une émotion a donc une cause facilement identifiable (le stimulus sur le script cognitif) et une intensité plus forte qui conduit à une expression physiologique, comme une agitation ou un éveil corporel, ainsi qu’à un potentiel d’action (Bagozzi et al. 1999).

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
A) L’affirmation du concept d’expérience de service
B) Expérience ou participation ?
C) Problématique et annonce du plan
PARTIE I : ANALYSE DE LA LITTERATURE ET EMERGENCE DE LA PROBLEMATIQUE
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 : LA PARTICIPATION DU CLIENT EN MARKETING DES SERVICES
1.1) La participation, spécificité du marketing des services
1.2) La participation, définitions et fondements théoriques
1.3) La participation et ses influences en services
1.4) Conclusions
CHAPITRE 2 : LA MOTIVATION RATIONNELLE DU CLIENT A PARTICIPER AU PROCESSUS DE SERVICE
2.1) L’approche rationnelle, un première approche de la motivation à participer en marketing des services
2.2) Les fondements de l’approche rationnelle en psychologie, la théorie des attentes
2.3) Conclusion
CHAPITRE 3 : LES EMOTIONS, MOTIVATIONS A PARTICIPER AU PROCESSUS DE SERVICES 
3.1) Les émotions en marketing
3.2) Les fondements de cette approche en psychologie, la théorie de l’évaluation cognitive
3.3) Les émotions comme antécédent de la participation en services
3.4) Conclusion
CHAPITRE 4 : L’A)DE AU CL)ENT, UN LEVIER POUR MOTIVER LE CLIENT A PARTICIPER ?
4.1) L’importance de l’aide à participer
4.2) Définition du concept d’aide à participer
4.3) Conclusion
CONCLUSION DE LA PARTIE I
A) Conclusion de la partie I
B) Un positionnement épistémologique positiviste
PARTIE II : PHASE EXPLORATOIRE
INTRODUCTION A LA PARTIE II
A) Les objectifs de la phase exploratoire
B) Le choix d’un terrain adapté
C) Le choix des méthodes de collecte
CHAPITRE 5 : L’ETUDE QUAL)TAT)VE PAR VERBAT)MS
5.1) Objectifs et méthode de collecte
5.2) Le processus de préparation des verbatims à l’analyse
5.3) L’analyse de contenu
5.5) Conclusions
CHAPITRE 6 : L’ETUDE QUALITATIVE PAR OBSERVATIONS NON PARTICIPANTES
6.1) Objectifs et méthodologie de collecte
6.2) Les principaux résultats
6.3) Conclusions et limites
CONCLUSION PARTIE II
PARTIE III : PHASE CONFIRMATOIRE
INTRODUCTION A LA PARTIE III
A) De la participation à l’efficacité de la participation
B) D’un modèle unique à deux études de recherche complémentaires
CHAPITRE 7 : ETUDE EN MAGASIN SUR L’INFLUENCE DE L’AIDE A PARTICIPER SUR L’EFFICACITE DE LA PARTICIPATION
7.1) Elaboration du modèle de recherche
7.2) Le cadre de l’étude
7.3) La mise en œuvre de la collecte
7.4) L’analyse des résultats
7.5) Discussion
CHAPITRE 8 : ETUDE SUR L’)NFLUENCE DE L’A)DE SUR LES MOTIVATIONS A PARTICIPER ET SUR LA PARTICIPATION
8.1) Le cadre de l’étude
8.2) Les hypothèses
8.3) La mise en œuvre de la collecte
8.4) L’analyse des résultats
8.5) Discussion
Conclusion
A) Synthèse des apports de la partie confirmatoire
B) Limites et voies de recherche futures
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE00
ANNEXES

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