L’influence de la ville sur la fanfare

Télécharger le fichier pdf d’un mémoire de fin d’études

D’où vient la fanfare telle qu’on la connaît aujourd’hui ?

Comme le dit Bigotti dans son article, “il n’est plus un seul continent où l’on ne retrouve une fanfare “ethnique“ : Jaipur Kawa brass band (fanfare du Rajasthan), La Banda municipale de Santiago de Cuba (fanfare cubaine), Flying bulgar klezmer band, Mica Petrovic, Boban Markovic, The Carnival Band. La liste s’allonge…”20
Si la fanfare a pu se développer sous différentes formes tout autour du monde, se nourrissant de la culture, et du contexte propre à chacun des pays l’accueillant, dans cette partie, et plus généralement tout au long de ce travail de mémoire, c’est bien de la fanfare telle que nous la retrouvons en France que nous allons parler.
Le modèle de la fanfare en France n’a pas toujours été le même, Elle a, au fil des années, connu différentes formes, différents formats, et est passée par un certain nombre d’évolutions et plusieurs “grandes périodes” pour arriver à ce qu’elle est à l’heure actuelle. Nous allons chercher à savoir d’où vient la fanfare que nous connaissons aujourd’hui.
Avant la Première Guerre mondiale, harmonies de villages et fanfares militaires : Jann Pasler, dans son ouvrage La République, la musique et le citoyen, Nous présente la fanfare comme descendante des harmonies du XIXe siècle21 A cette époque, la musique est considérée “d’utilité publique“22, elle est vue comme l’un des arts qui contribue à la fabrique des citoyens, par l’écoute ou la pratique. C’est en grande partie grâce aux inventions d’Adolphe Sax (inventeur du saxophone entre autres) et l’arrivée massive des cuivres (trompettes, trombones, tubas, euphoniums, etc.), qui vont bouleverser la pratique musicale au sein de nombreux ensembles, que la musique va pouvoir être rendue plus accessible grâce à la création de nombreuses sociétés musicales à partir de 1860-1870. “De deux-mille cinq cents en 1875, elles passèrent à dix mille en 1900.”23 Ainsi, la musique est présente partout et sous diverses formes. Elle est mise en avant, que ce soit, dans les kiosques, dans les parcs tous les dimanches, ou par la mise en place des Orphéons, donnant naissance à de nombreuses harmonies et orchestres de villages, de quartiers, et même d’entreprises, permettant de faciliter et répandre la pratique musicale au sein de la population. Les cours de solfège et d’instrument sont gratuits, dans l’idée de “l’instruction populaire“ par la musique ; Philippe Gumplowicz met en évidence le rôle de ces “petits conservatoires du peuple“ dans le réseau pédagogique mis en place dans la France de la Troisième République.24
L’État cherche donc à “éduquer“ la population, on éduque musicalement le peuple, installe un répertoire chansonnier et musical dans le but de développer un certain esprit national.
Toutes ces harmonies et fanfares adoptent le registre et fonctionnent sur le même modèle que les harmonies et les fanfares militaires.
1918, un nouveau registre venu d’Amérique : C’est en 1917, dans un contexte de fin de première guerre mondiale que les “sammies” (en référence à l’oncle sam), soldats américains, sont débarqués en Europe. Saint-Nazaire était devenue l’un des principaux ports de débarquement des troupes, et dans le même temps, Nantes l’un des principaux port de débarquement de matériel logistique. Les soldats américains sont accueillis comme des “libérateurs”.
C’est ainsi que le 12 février 1918 est organisée une grande fête franco-américaine à Nantes à l’occasion du centenaire de la naissance d’Abraham Lincoln. Pour l’occasion, La Fanfare du “New York Infantery Band”, rattachée au 369e régiment d’infanterie de l’armée des états unis, débarquée à Brest puis transportée à saint Nazaire via Lorient, est invitée. Elle est composée de 42 musiciens noirs dirigés par James Reese Europe (1881-1919), plus connu sous le nom de Jim Europe, surnommé le “roi de la marche“. Ce fut un compositeur majeur de la musique militaire américaine. Il dirigea à partir de 1880 le U. S. Marine Corps Band. Jim Europe organisa la vie musicale à Harlem et permit à des musiciens noirs de jouer au Carnegie Hall et d’accéder à des studios d’enregistrement en 1913. En 1917, il fut affecté au 15e régiment d’infanterie. Il dirigea la musique du 369e régiment à la demande du général Pershing. Il jouera plus tard à Paris au Théâtre des Champs-Élysées, recevra la Croix de guerre et deviendra l’un des grands noms du jazz.
La fanfare devait jouer à l’intérieur du théâtre Graslin dans le cadre de la célébration ; ce qui sera considéré comme le premier concert de jazz en Europe.
Toutefois, avant de rentrer dans le théâtre Graslin et jouer pour les “notables“ nantais, les musiciens de la Fanfare de Jim Europe décidèrent de se positionner devant les escaliers du bâtiment afin d’y jouer “pour tout le monde”, ce moment festif plaira beaucoup. Cette performance influencera également beaucoup les fanfares françaises, encore militaires à l’époque et harmonies, modifiant leur registre pour se rapprocher parfois de celui de ces musiques américaines. mais également la pratique de la fanfare en elle-même, sortant du cadre organisé pour jouer plus directement pour la population.
▲ Photomontage de Jim europe devant le théatre Graslin
▲ La fanfare du 369e régiment dirigé par Jim Europe à Paris pour les blessé
La création des fanfares Beaux-arts après la Seconde Guerre mondiale :
Si la fanfare contemporaine, en France, descend évidemment des fanfares militaires évoquées plus tôt, c’est bien la fanfare des Beaux-Arts de Paris qui pose les bases de ce qui deviendra la pratique fanfariste telle qu’elle peut l’être de nos jours.
La fanfare dite “Beaux-arts” ou “Bôzarts” apparaît juste après la deuxième guerre mondiale au sein de l’école supérieure nationale des Beaux-Arts de Paris, quai Malaquais, dans les ateliers d’architecture, l’architecture étant enseignée Beaux arts jusqu’à 1968.
“A la sortie de la guerre, les jeunes gens ont envie de faire du bruit, de souffler, et éventuellement de faire de la musique.”25
Ces fanfares sont “nées en réponse à la dureté qui régnait alors dans l’école”26. Dureté notamment pour les nouveaux étudiants, les jeunes adolescents qui se retrouvent face à des hommes plus vieux, des hommes ayant la trentaine et reprenant leurs études après avoir fait la guerre, une partie ayant même été fait prisonniers. André Roux, chef de la fanfare de l’atelier Madelain en 1948, l’exprime en racontant “la brutalité dans l’atelier après la guerre c’était terrible.”27 Robert Barincou, lui, membre de la fanfare de l’atelier Expert parle de “dictature des anciens sur les nouveaux”28
Les ateliers d’architecture commencent donc à monter des groupes musicaux dans le but de “souffler”, se défouler, retrouver un climat plus léger et retrouver une certaine ambiance de camaraderie et d’unité emportée par la guerre. La première fanfare Bôzart verra donc le jour en 1947 au sein de l’atelier Madelain.
C’est naturellement que les cuivres s’imposeront pour la création de ce nouveau moyen d’expression, ce sont des instruments qui possèdent un son puissant et sont plutôt solides, ce qui permet les trouver facilement en état de marche dans les brocantes ou au marché aux puces (c’est aussi pour ça que l’on ne retrouve que des cuivres et pas de clarinette ou saxophones dans les fanfares dans un premier temps, ces instruments étant, déjà plus rares, mais surtout plus fragiles), de plus, les harmonies municipales, se retrouvant en déclin après la guerre, un grand nombre de leurs instruments se retrouvaient sur le marché à des prix très avantageux.
C’est également cette situation des harmonies après la guerre qui permit la création de formations similaires en province, comme ce pu être possible par exemple à Nantes avec la Fanfarchi, les étudiants pouvant avoir la chance de tomber sur des harmonies revendant leurs instruments au prix du métal.
Les fanfares Beaux arts reprennent le répertoire populaire des kiosques, le détournent et s’en moquent, elles sont aussi influencées par le jazz, notamment de la Nouvelle Orléans.
Les fanfares Beaux art sont des lieux de détente, sociabilité, d’échappatoire, mais aussi des espaces d’apprentissage et, de manière plus générale, d’entraide et de solidarité.
On sort de l’ordre et la discipline des fanfares militaires, certaines formations revendiquent même de jouer faux et refusent les partitions, comme “les Malaquais” par exemple avec leur credo : “faire du bruit”.
On retrouve souvent un fort esprit de dérision avec des costumes “burlesques” définissant l’identité de chaque fanfare, ainsi qu’une importance particulière accordée au sens de l’humour et à la mise en scène.
Après mai 68, l’école des Beaux arts va connaître une séparation avec les enseignements d’architecture. Les fanfares se retrouvent sans la possibilité de répéter dans les ateliers. Dans un même temps, elles rencontrent le “vivier libertaire et alternatif des années soixante” exposé par Anne Gonon29, et bien que les fanfares étaient déjà présentes dans la rue auparavant, (notamment pendant leur “âge d’or” entre les années 1955 – 1968), c’est réellement en cette période que la pratique de la fanfare dans la rue se démocratise, guidée par la démocratisation des arts de la rue.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
Première Partie : Qu’est-ce que la fanfare ?
a) Définition
b) Des formations musicales
comparables mais bien distinctes
Les Fanfares militaires
Les Batteries-fanfares
Les Bandas
c) D’où vient la fanfare telle qu’on la connait aujourd’hui ?
Avant la Première Guerre mondiale, harmonies de villages et fanfares militaires
1918, un nouveau registre venu d’Amérique
La création des fanfares Beaux-arts après la Seconde Guerre mondiale
Conclusion Partie 1
Deuxième partie : L’influence de la ville sur la fanfare
a) Comment la fanfare prend-elle place dans la ville ?
a-1. Le choix du lieu : la forme de la ville
a-2. Les formations de jeu, l’espace public et le spectateur
b) L’influence de la ville sur la fanfare : Nantes, Rennes, Bordeaux.
b-1. Situations
b-2. Culture, politique et fanfares.
La culture et la ville
Fanfare et politique d’occupation de l’espace public.
c) Comment se construit et vit la fanfare dans la ville ?
Conclusion partie 2
Troisième partie : L’impact de la représentation fanfare sur la ville
a) Une ville dans la ville
Un “public-population”
Une perception nouvelle de l’espace public
b) Les festivals de fanfares
Conclusion partie 3
Conclusion
Entretiens
Bibliographie
Iconographie
Index des Fanfares

Télécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *