L’influence de la couleur en marketing: vers une neuropsychologie du consommateur

« Les gens peuvent choisir n’importe quelle couleur pour le modèle T, du moment que c’est du noir » Henry Ford. 

La couleur, comme d’autres interrogations existentielles, est l’un des sujets les plus débattus et les plus anciens du monde, puisque des traces écrites remontent aux Egyptiens, aux premiers philosophes grecs, aux sages chinois ou indiens, il y a plus de 3.000 ans. On peut imaginer, à l’appui des peintures rupestres, que les hommes de la Préhistoire admiraient déjà la couleur dans la Nature et l’associaient à des concepts ou des symboliques abstraits. Les gemmes précieuses d’Egypte traitaient toutes sortes d’affections. A différentes époques de la civilisation, détenir le secret et le savoir-faire des pigments de couleur assurait une prospérité économique durable pour la ville ou le peuple détenteur . L’Allemagne du 19e siècle, par exemple, a bâti en partie sa puissance industrielle sur l’invention et l’exploitation de brevets ayant trait aux colorants synthétiques. Comme le résumaient Divard & Urien dans une revue de littérature récente, « le consommateur vit dans un monde de couleurs ». La couleur est au cœur de chaque produit, de chaque publicité, au sein de chaque point de vente. En effet, si le consommateur contemporain de Henry Ford n’avait pas son mot à dire en matière de déclinaisons de couleurs, son descendant exige aujourd’hui un choix plus large pour toutes sortes d’offres, tant pour des biens périssables que durables, tant pour des biens d’équipement de la personne que pour ceux du foyer. La couleur est souvent – parfois avec la forme – le premier élément qui permette d’identifier et de reconnaître un logo ou un nouveau produit recherché. La couverture médiatique d’un produit grand public qui a réussi son lancement, aborde souvent ses apparences colorées. On pensera au lancement des ordinateurs personnels Apple® iMac portant des teintes acidulées cerise ou mandarine, celui des yaourts BA qui cassaient le code traditionnellement immaculé du secteur pour revêtir un bleu outremer ou encore plus récemment ceux du parfum « J’adore » de Dior ou du lecteur digital MP3 iPod.

Pour la plupart d’entre nous, dotés d’un système visuel opérationnel, l’environnement nous apparaît intrinsèquement coloré. Les couleurs – qui seraient « les sourires de la Nature » selon le poète Leigh Hunt – représentent des caractéristiques visuelles indispensables à une reconnaissance optimale des objets. Drugeon-Lichtlé soulignait l’omniprésence, l’ubiquité de la couleur tant dans la vie en général que dans les contextes commerciaux en particulier, sur lesquels les hommes de marketing peuvent avoir prise, en employant des éléments et des indices visuels, compatibles et cohérents avec le positionnement de l’entreprise et en mobilisant les instruments de contrôle adéquats. La couleur, en tant que caractéristique visuelle, appartient pleinement aux outils que recense le marketing sensoriel et elle influence donc considérablement l’élaboration et la constitution des offres ou des communications mercatiques. Ainsi, à l’instar des objets familiers que l’on ignore tout en les côtoyant, la couleur du produit ou la couleur de l’affiche sont souvent transparentes au regard du consommateur ou du chercheur. Transparent ne veut pas dire absent comme nous le verrons plus loin : la couleur, immanente et pénétrante, nous influence subtilement, tant par ses effets matériels directs que ses effets cognitifs indirects induits, tout comme la musique et les odeurs. Pourtant, le sujet, s’il est vaste et prégnant en marketing, n’a pas fait l’objet de nombreuses recherches systématiques ou globales, tant en France qu’à l’étranger.

FONDEMENTS THEORIQUES DES EFFETS DE LA COULEUR SUR LE CONSOMMATEUR 

Les couleurs existent-elles ? 

Dans le sujet que nous proposons au lecteur, se pose d’emblée le problème du réalisme des couleurs (Byrne & Hilbert, 2000). Comme Thompson (1995a) le pose simplement dans son ouvrage, le débat du réalisme se résume souvent au fait de savoir si les couleurs existent « au dehors » ou bien uniquement « dans la tête » (p 133). Autrement dit si la couleur est naturelle ou culturelle. Byrne & Hilbert (2000) illustrent cette alternative en s’interrogeant sur l’existence de propriétés distinctives des objets et sur leur nature éventuelle : les citrons, bananes et ananas partagent ils la même propriété distinctive qu’ils semblent posséder (existe-t-il des objets jaunes) ? Dans l’affirmative, quelle est cette propriété ? Une propriété physique particulière ou bien une sorte de propriété, spécifiée en partie psychologiquement ? Dans le premier tome – d’inclination philosophique – d’un ouvrage de référence intitulé « Readings on Color », les coordinateurs Byrne & Hilbert (1997) indiquent dans leur introduction générale qu’il existe quatre grandes postures en matière de réalisme des couleurs qu’il serait de facto possible de résumer en deux grands courants de pensée : l’objectivisme et le subjectivisme. Selon le subjectivisme, les couleurs que nous attribuons à des objets dans des expériences visuelles de couleur sont des couleurs mentales, qui sont des propriétés qualitatives psychologiques des états visuels eux-mêmes. Le subjectivisme, qui remonte à la Grèce antique, prétend donc que les objets physiques sont incolores. Du fait de cette négation, le subjectivisme est également appelé éliminativisme . L’objectivisme pur correspondrait par contre au primitivisme, qui pose que les couleurs sont des qualités premières (au sens de Locke), au même titre que les formes. Pour Johnston (1997) par exemple, « la nature intrinsèque du jaune canari est pleinement révélée par l’expérience visuelle standard d’une chose jaune-canari» (p 138). Entre ces deux extrêmes, figurent le physicalisme et le dispositionnalisme. Le physicalisme, c’est « la vue selon laquelle les couleurs sont des propriétés physiques que nous percevons parfois de manière véridique, et que possèdent les objets » (Byrne & Hilbert, 1997 ; p xxii). Enfin, le dispositionnisme – par nature relationnel, c’est à dire impliquant un objet et un organisme d’un type donné – stipule que la couleur est une propriété (une disposition) qui a le pouvoir de produire des sensations en nous. La version contemporaine de cette thèse qui remonte à Locke et à Descartes, est de la forme : « la propriété d’être bleu, c’est la disposition de causer chez des observateurs O dans des situations S, des expériences visuelles de type T » (Byrne & Hilbert, 1997 ; p xxi). La plupart du temps, les auteurs considèrent des observateurs « normaux » et des situations « normales ». Maund (2002) exprime en partie notre position en matière de réalisme des couleurs : « la plupart des objectivistes considèrent les couleurs comme étant essentiellement des propriétés dispositionnelles, de celles définies en termes de profils de réflectance. La courbe de réflectance d’un objet représente une propriété dispositionnelle : une capacité d’absorber ou de réfléchir de manière différentielle de la lumière solaire de plein jour (ou un illuminant standardisé équivalent) ».

Comment nous positionnons-nous parmi ces courants ? Nous ne pensons pas qu’un objet (matériel) possède de couleur en soi, contrairement à l’attribut « forme» ou « masse ». Un objet matériel est composé d’atomes comprenant des électrons (et des quarks), dont les changements d’orbitales sont précurseurs ou consécutifs à l’absorption ou à l’émission de photons. Ces photons, d’une énergie discrète, seront détectables par un être humain (« normal ») s’ils vibrent entre certaines bornes de fréquences (couleur et physiologie). Ainsi, un objet exposé au soleil, en fonction de ses caractéristiques physiques propres (i.e. atomiques et moléculaires) émettra (et absorbera) – et ce, qu’un être vivant soit présent ou non – un nombre considérable de rayonnements sur un large spectre, qui seront perçus ou non selon les espèces observatrices. Dans une certaine mesure, la « couleur » pourrait exister indépendamment de l’observateur, si l’on définissait que toute radiation électromagnétique comprise entre telle et telle fréquence est une couleur. Ainsi, bien que nous ne voyions pas – et n’avons pas de sensation associée pour – l’ultraviolet d’une marguerite, cette « couleur » est néanmoins perçue, représentée et « intentionnalisée » (s’y diriger pour recueillir du pollen) par les abeilles, par exemple. De même, si l’on identifie comme propriété d’une boite aux lettres, la faculté d’avoir une surface qui réfléchit majoritairement sous un illuminant solaire des longueurs d’onde comprises entre 570 et 585 nanomètres et qu’un être humain trichromate soit présent à proximité, cette boite aux lettres aura toujours la disposition de susciter un percept « jaune » chez l’individu en question ou chez tout autre doté des mêmes circuits visuels. Cette disposition de la boite postale perdurera même en l’absence de l’observateur car elle continuera à réfléchir de la même manière la lumière incidente, sans qu’il soit toutefois possible de parler alors d’apparence « jaune », en l’absence d’un système visuel adéquat pour représenter cette disposition. Tous ces discussions ayant trait au réalisme des couleurs n’exonèrent pas la question centrale de la conscience (des couleurs ou d’autres propriétés) et de ses qualités phénoménologiques. Il y a des nuances entre « percevoir une couleur », « opérer la représentation de l’objet de cette couleur » et « ressentir cette couleur ».

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
Préambule épistémologique
Première Partie : Ecologie de la Couleur
Chapitre 1 : Couleur et physiologie
Section 1. Prolégomènes à la vision colorée
1.1. Ondes électromagnétiques et écologie de la vision
1.2. Approche évolutionniste de la vision des couleurs
1.3. Théories scientifiques de la vision des couleurs
1.4. Colorimétrie et normalisation de la couleur
Section 2. La vision trichromatique humaine
2.1. Physiologie de la vision colorée
2.2. Unicité de percept et pathologies
2.3. Modalités trans-sensorielles, synesthésies et métaphores
Section 3. Les effets biologiques non visuels de la couleur
3.1. Rappel historique
3.2. Effets physiologiques de la couleur
3.3. Effets physiologiques de l’éclairement
3.4. Effets putatifs de la couleur
3.5. Couleur et capture attentionnelle
3.6. Caractère activant des grandes longueurs d’onde
Section 4. Conclusion du chapitre 1
Chapitre 2 : Couleur et psychologie
Section 1. Couleurs et cognitions de premier ordre
1.1. Couleur et réponse affective
1.2. Couleur et phénoménologie
1.3. Couleur et jugement perceptif
1.4. Couleur et jugement électif
1.4.1. Esthétique des couleurs
1.4.2. Fondement de la préférence
1.4.3. Préférences de couleurs
Section 2. Couleurs et cognitions de second ordre
2.1. Associations et symboles de couleur
2.2. Associations sémantiques et connotations
2.3. Couleur et mémoire
2.4. Langage et couleur
2.5. Aide à la résolution de problèmes
Section 3. Conclusion du chapitre 2
Chapitre 3 : Couleur et comportements
Section 1. Psychologie de l’environnement
Section 2. Couleurs environnementales et comportements sociaux
Section 3. Couleurs environnementales et productivité
Section 4. Couleurs environnementales et activités motrices
Section 5. Couleurs environnementales et agression
Section 6. Conclusion du chapitre 3
Chapitre 4 : Conclusions de la première partie Ecologie de la Couleur
Deuxième Partie : La couleur en Gestion
Chapitre 5 : La couleur et la gestion des hommes
Section 1. Couleur et gestion des ressources humaines (recrutement)
Section 2. Management et conditions de travail (hygiène et sécurité)
Section 3. Couleurs et ambiance de travail (productivité)
Section 4. Introduction aux couleurs dans le marketing
Chapitre 6 : Couleurs et communication publicitaire
Section 1. La couleur dans le médium presse
1.1 La couleur dans les annonces publicitaires
1.2. Comparaisons noir et blanc versus couleur
Section 2. Couleur et édition (pages jaunes)
Section 3. Couleur et communication non marchande
3.1. Communications audiovisuelles
3.2. Didactique et science de l’éducation
Section 4. Couleur et marketing direct (mailings et questionnaires)
Section 5. Couleur et publicité extérieure
5.1 Multiplicité des supports d’affichage
5.2. Impact de l’affichage
Section 6. Couleur et communication multimédia
Chapitre 7 : Couleur et politique de l’offre
Section 1. Couleurs, logotypes et marques
Section 2. Couleur du produit physique
Section 3. Couleur du packaging ou du conditionnement
3.1. Packaging et libre-service de détail
3.2. Packaging, marque et entreprise
3.3. Packaging, sémiotique et communication
3.4. Les réponses du consommateur au packaging
3.5. Les recherches sur la couleur du packaging
3.6. Implications des résultats antérieurs
Chapitre 8 : Couleur et points de vente
Section 1. Points de vente physiques
1.1. Les couleurs dans le point de vente
1.2. Les études relatives à la couleur dans le point de vente
1.2.1. Les couleurs ambiantes
1.2.2. Les publicités sur le lieu de vente (PLV)
1.2.3. Vitrines et devantures
1.2.4. Les points de vente automatisés
Section 2. Points de vente virtuels (Internet et e-commerce)
2.1. Approches de définition d’une atmosphère virtuelle
2.2. Habillage d’un site marchand
Chapitre 9 : Conclusion du Titre I et cadre conceptuel des expérimentations
Section 1. Synthèse des travaux antérieurs sur la couleur
Section 2. Notre hypothèse quant aux effets de la couleur
CAHIER CENTRAL DES PLANCHES ANATOMIQUES
Planche I : Principales structures cérébrales humaines
Planche II : Aires V4 / V4 alpha du lobe occipito-temporal (couleurs)
Planche III : Aire occipitale dite extra striée (aires visuelles associées)
Planche IV : Gyrus cingulaire (intention et décision)
Planche V : Cortex orbito-frontal (OFC)
Planche VI : Thalamus et complexe thalamique (pulvinar et CGL)
Planche VII : Aires cérébrales de Brodmann
Planche VIII : Noyaux géniculés (ou corps genouillés) latéraux (CGL)
Planche IX : Noyaux amygdaliens
Planche X : Hypothalamus
Planche XI : Hypophyse (glande pituitaire)
Planche XII : Epiphyse ou glande pinéale
Planche XIII : Collicules supérieurs (tubercules quadrijumeaux antérieurs)
CONCLUSION GENERALE

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