L’inefficacité de la CICOS dans le processus d’intégration des Etats

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Des tumultes antérieurs à l’Accord du 06 novembre 1999

Pour comprendre les problèmes qui se sont posés entre les Etats de l’Afrique centrale au sujet d’une politique commune de transport fluvial, après les indépendances, et le retard pris pour la création d’un cadre juridique unique, il est important de remonter l’histoire du bassin en étudiant les difficultés rencontrées par les puissances coloniales pour l’internationalisation des voies navigables. Cet héritage a profondément influencé le processus d’intégration des Etats de l’Afrique centrale notamment en matière de gestion internationale du fleuve Congo. L’avenir de l’héritage colonial se révélera incertain non seulement au regard de l’instabilité du droit fluvial international (A) mais aussi de son rejet implicite par les Etats riverains après les indépendances (B).

L’instabilité du droit fluvial international

Pour comprendre l’instabilité du legs colonial, il est nécessaire de rappeler, d’une part, que les conventions internationales censées apporter des solutions juridiques ont souffert d’une instabilité spectaculaire (1) et, d’autre part, que l’intervention du juge international a été peu satisfaisante (2).

Les conventions internationales instables

Au regard des problèmes qui se posés entre les puissances coloniales, notamment l’impossibilité de l’utilisation isolée et l’absence d’une politique commune de gestion des voies navigables du bassin du fleuve Congo, des réflexions ont été fournies dans les milieux de juristes internationalistes en vue d’encourager les puissances coloniales à établir un régime international dans le bassin du fleuve Congo. A l’instar de Romain YAKEMTCHOUK :
L’élaboration du statut international du fleuve à la fin du XIXe siècle se déroula dans un climat de vive compétition politique et fut dominée par des considérations de l’équilibre des puissances. La contribution des jurisconsultes à la formule adoptée par la conférence de Berlin (1885) fut également appréciable… »213 Le rôle des jurisconsultes avait consisté à encourager les hommes politiques à ériger un cadre institutionnel de gestion de la navigation au profit de toutes les nations. La formule de l’Acte de Berlin devait permettre le développement du trafic fluvial au profit de toutes les puissances coloniales. Parmi les initiateurs de ce projet, l’Institut de Droit International (IDI) avait adopté une Résolution lors de sa 9e session de Munich tenue du 4 au 8 septembre 1883, dans laquelle il « exprime le vœu que le principe de la liberté de navigation pour toutes les nations soit appliqué au fleuve du Congo et ses affluents, et que toutes les puissances s’entendent à prévenir les conflits entre les nations civilisées dans l’Afrique équatoriale.»214
Cette résolution faisait suite à la proposition d’un des membres de l’IDI, feu Gustave MOYNIER, lors de sa session du 4 septembre 1883 à Munich. L’auteur de cette proposition exhorta longuement l’IDI à adopter une résolution relative à l’internationalisation du fleuve Congo et ses affluents. Pour convaincre ses pairs, il présenta l’ensemble des problèmes qui se posaient entre les puissances coloniales d’une part et entre les indigènes d’autre part, avant de conclure sur la nature du régime juridique international du fleuve Congo et de ses affluents, un régime indispensable pour le maintien des relations pacifiques dans le bassin215. Cet exposé, rend bien compte de la situation difficile qui régnait entre les puissances coloniales en matière d’utilisation d’un espace commun qui est le bassin du fleuve Congo216. Chaque puissance coloniale fut animée d’un fort sentiment de s’accaparer l’exercice de la navigation dans le bassin alors que les voies fluviales étaient les seuls moyens de circulation dans la sous-région. L’exhortation de MOYNIER avait une visée préventive afin d’éviter tout risque de conflit armé entre les colonisateurs.
Pour mettre fin à cette crise, l’auteur proposa de faire du Congo ce qui a été fait pour le Danube. Il affirma que « les conventions existantes fourniront de précieuses indications »217 ; allusion étant faite au régime danubien. C’est ainsi qu’il ajouta : « Il serait indispensable encore d’établir, comme pour le Danube, une commission internationale composée de représentants des États intéressés, et qui serait chargée soit de remplir, pour le compte de la communauté, certaines fonctions administratives ou techniques, soit de veiller en permanence l’observation du traité, ce qui contribuerait probablement à prévenir bien des conflits218.» Au regard de la situation inquiétante qui régnait dans le bassin entre les colonisateurs, il fut clair que l’usage et la gestion séparés des voies navigables du bassin fut un danger. Un danger pour les relations entre les parties impliquées et un danger pour le bon développement des activités économiques.
A la suite de la résolution de l’IDI de 1883, fut convoqué le Congrès de Berlin de novembre 1884 –février 1885 dont l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, la France, la Grande-Bretagne, l’Italie, la Norvège, les Pays-Bas, le Portugal, la Russie et la Suède furent les participants et les signataires de l’Acte de Berlin. A l’issue de ce Congrès fut adopté l’Acte de Berlin du 5 février 1885. Cet Acte fut riche par son contenu et les changements qu’il apportait dans le régime du bassin du fleuve Congo. Il délimita le bassin, posa les principes fondamentaux de la navigation et créa une Commission chargée de veiller au respect du droit dans les voies navigables, notamment les principes de liberté de navigation et de commerce de l’article 13 de la Déclaration sur le bassin du Congo219.

Le rejet du legs colonial : la désintégration du bassin

Elle est marquée par les différends entre les Etats riverains après la colonisation (1) et la défaillance des organisations sous régionales existantes d’ériger une politique commune efficace de gestion des voies navigables (2).

Les différends entre les Etats riverains

L’héritage colonial, le régime de Berlin, en matière de gestion des bassins fluviaux en Afrique centrale a été implicitement remis en cause après les indépendances.
En effet, pendant les premières années des indépendances, le choix entre la gestion souverainiste et la gestion coopérative des ressources en eau du bassin était un dilemme, les Etats optaient pour le modèle souverainiste. Un auteur a su le démontrer en ces termes : « Au cours de cette période (…), les Etats de l’Afrique centrale procèdent à la fortification de leurs frontières (…), ils se posent comme les seuls garants et gérants des ressources issues de leur patrimoine national et périphérique.»233 Cela engendrait des querelles puis des rapports difficiles entre les Etats riverains. Les relations entre la RDC et la RC à cette époque n’étaient plus au beau fixe au sujet du fleuve Congo mais aussi pour des raisons politiques234. La RDC considérant le fleuve Congo comme « une voie d’eau intérieure » (parce que celui-ci est en grande partie situé sur son territoire), la RC invoquant quant à elle l’argument selon lequel le fleuve Congo comporterait des « eaux territoriales», notion qui n’existe pas en droit fluvial235.
La République du Congo et la RDC, deux principaux Etats riverains de ce grand fleuve, ne se sont jamais accordés sur le statut international du fleuve Congo236 jusqu’à la création de la CICOS. La gestion commune du bassin est demeurée otage des conceptions nationalistes qui ont eu pour conséquence le blocage des politiques communautaires en matière de transport par voies d’eau. Un Manifeste de conciliation fut signé le 16 juin 1970 grâce à la médiation des Chefs d’Etats du Gabon, de la RCA et du Cameroun pour apaiser la tension galopante entre les deux voisins.
La remise en cause du régime établi par l’Acte de Berlin serait fondée sur une thèse selon laquelle «…le droit conventionnel, du fait qu’il n’a pas été élaboré avec la participation et le consentement des pays devenus indépendants, puisqu’ils n’avaient pas ou ne pouvaient pas exercer le pouvoir de traiter, reflète beaucoup plus les intérêts des puissances coloniales que ceux des Etats africains.237» C’est pour cette raison que certains riverains du fleuve Congo n’avaient pas hésité à dénoncer l’Acte de Berlin, et ce dans une posture nationaliste. La RDC se lança dans une démarche visant à nationaliser le fleuve en affirmant qu’il est un fleuve intérieur. L’ancienne République du Zaïre (RDC) rebaptisa unilatéralement le fleuve Congo : fleuve Zaïre.» Les autorités du Zaïre, expliquaient les raisons de la nationalisation du fleuve Congo en ces termes: Zaïre est la transposition euphonique du vocable nzadi qui signifie fleuve. Sur son parcours de plus de 4000 kilomètres, le Zaïre, qui est l’artère vitale de son pays, ne fait frontière avec un terrain étranger que sur un trajet négligeable de près de 200 kilomètres. C’est juridiquement un fleuve intérieur. Les dispositions archaïques de l’Acte de Berlin de 1885, qui faisait de cette voie d’eau un fleuve international, ont cessé d’avoir effet en 1908, lorsque la Belgique a annexé le fictif Etat du Congo, et le fleuve est entré dans le domaine public de l’Etat. La Convention et le Statut sur le régime des voies navigables d’intérêt international, ainsi que le Protocole additionnel, adoptés à la Conférence de Barcelone de 1921, auxquels n’ont adhéré qu’un petit nombre d’Etats, ont simplement substitué à la notion juridique et géographique de fleuve international celle économique de voie d’eau d’intérêt international. Néanmoins, le Zaïre échappe à cette réglementation ; il conserve son statut de fleuve intérieur, c’est-à-dire national.»238
Dès le début des années 1960, commence l’érection des législations en matière de navigation, symbolisant ainsi une volonté de remplacer le droit colonial par des nouvelles législations nationales. Il faut citer à ce sujet l’Ordonnance-Loi No66-96 du 14 mars 1966 portant Code de la navigation fluviale et lacustre de la RDC. Comme son nom l’indique, ce Code s’applique sur l’ensemble des cours d’eau navigables dans le bief inférieur, moyen et supérieur du bassin du fleuve Congo239. La règlementation nationaliste de la navigation intérieure peut être vue comme une sorte de protectionnisme vis-à-vis des autres Etats riverains.
Les mésententes au sujet du fleuve Congo ont perduré jusqu’aux années1980 et 1990. L’échec du Projet de Convention sur le statut du fleuve Congo/Zaïre de 1987 est une bonne illustration. D’ailleurs, l’appellation « fleuve Congo/Zaïre » dans ce projet de convention montre comment la RC et le Zaïre n’avaient pas pu s’accorder sur le nom et le statut du fleuve Congo. Pour la RC, malgré le sentiment nationaliste de la RDC à l’égard des ressources en eau du bassin, le fleuve s’appelle toujours « Congo » alors que l’autre Etat riverain l’appelait « Zaïre.»

L’Accord du 6 novembre 1999 : une césure avec un passé tumultueux

La signature de l’Accord du 6 novembre 1999 constitue une rupture avec un passé tumultueux de la gestion internationale du bassin du fleuve Congo et de ses affluents. Ses principes fondamentaux sont des piliers de l’intégration des Etats. L’Accord de Brazzaville apporte un changement, un engagement des Etats signataires à constituer une politique communautaire du bassin fluvial. Ce traité contient non seulement des principes fondamentaux mais aussi un organe chargé de mettre en œuvre ses dispositions. Ces principes sont de nature libérale et participent à la promotion de la navigation intérieure dans la zone de compétence de la CICOS. Ils concourent à la construction du marché intérieur entre les Etats membres par la promotion de la liberté de circulation et l’égalité de traitement entre les usagers. Ils sont ainsi des garants d’une saine et loyale concurrence entre les acteurs économiques259. Le Chapitre III de l’Accord est consacré tout entier aux principes fondamentaux de la navigation : liberté de navigation, droits de transport, droits et taxes de navigation, obligation d’entretien et d’amélioration des voies navigables, travaux et ouvrages, facilitation. D’autres dispositions spéciales définissent également les principes touchant la navigation, notamment le Chapitre V. Il serait possible d’étudier à ce stade les normes et l’organe institué mais, nous nous limiterons d’abord à l’étude des principes fondamentaux, l’organe sera étudié plus tard. C’est ainsi qu’il faut d’abord nous intéresser aux principes octroyant des droits (A) avant de voir ceux imposant des obligations (B).

Une intégration par des principes profitant à tous

Pour faciliter l’utilisation optimale des voies navigables, il est nécessaire d’instituer une réglementation internationale. Nous étudions ici deux principes essentiels qui contribuent l’approfondissement de l’intégration : le principe de la liberté de navigation (1) et celui de l’égalité de traitement des usagers (2).

La liberté de navigation pour toutes les nations

Cette règle existe dans la quasi-totalité des traités internationaux portant sur le régime des voies d’eau internationales260. Elle «…constitue par ailleurs une limitation substantielle au principe de la souveraineté territoriale de l’Etat riverain vis-à-vis duquel elle est invoquée.»261 En d’autres termes, l’abandon des parcelles de souveraineté par les Etats riverains cède la place à une souveraineté commune sur le bassin. L’étude du principe de la liberté de navigation nous amène à analyser ses bénéficiaires (a) avant de circonscrire sa portée géographique (b).

Le principe de la liberté de navigation : les bénéficiaires

L’Accord du 06 novembre 1999 adopte une approche extensive262 des bénéficiaires de la liberté de navigation. Le principe est posé par l’article 4, alinéa 1er de l’Accord qui dispose que « La navigation sur les voies navigables visées à l’article 3 est entièrement libre et ouverte aux bateaux de toutes les nations pour le transport de marchandises et de personnes, directement ou avec transbordement à condition de se conformer aux dispositions contenues dans le présent Accord, notamment les règlements communs édictés en vue d’assurer la sécurité de la navigation sur le Bassin Congo-Oubangui-Sangha.»
Cette disposition consacre une conception libérale de l’utilisation des voies d’eau comme moyen de communication. Elle est un apport indéniable du droit des cours d’eau transfrontières dans l’intégration parce que la liberté de circulation est l’une des conditions sine qua non du développement des activités économiques fluviales. Qui dit intégration dit zone géographique unique où les personnes, les marchandises et les biens peuvent circuler librement grâce à l’existence d’un même cadre juridique.
La conception libérale de la navigation sur les voies fluviales ne s’est faite qu’après bien de vicissitudes263. Elle traduit le triomphe de la conception libérale sur l’utilisation des voies de navigation pendant la Révolution française. Le principe de la liberté de navigation est un vieux principe du droit fluvial international264. La consécration de ce principe dans le régime actuel du bassin Congo-Oubangui-Sangha est une exhumation de l’héritage de l’Acte de Berlin de 1885 qui fut lui-même une imitation du Régime juridique du Rhin. C’est ainsi que le régime actuel du bassin du fleuve Congo est pour certains « une exportation du régime rhénan en Afrique265 ».
En droit fluvial international, la liberté de navigation consiste à conférer aux navires de toutes les nations le droit de circuler librement sur les voies navigables.
Rappelons que du point de vue doctrinal, la liberté de navigation au bénéfice de tous fut l’œuvre du droit romain, cultivée ensuite par les juristes théologiens du XVIe siècle puis celle de l’école du droit naturel de Hugo Grotius266. Mais, cette conception ne représente au Moyen âge « qu’une anticipation théorique sans portée effective267 », selon l’expression du Professeur Charles ROUSSEAU.
L’IDI de son côté, lors de sa session de Paris, définit de manière extensive la liberté de navigation à l’article 2 de sa Résolution du 14 octobre 1934 comme « Le droit pour tous les navires, bateaux, trains de bois et autres moyens de transport par l’eau, de circuler librement sur toute l’étendue navigable de la voie, à charge de se conformer aux stipulations du présent règlement, et, le cas échéant, aux prescriptions supplémentaires ou d’exécution qui seront établies par les Etats riverains.»

L’intégration par des principes imposant des obligations à tous

L’intégration des Etats peut réussir si chacun d’entre eux observe strictement les obligations que lui impose le traité auquel il est partie. Au nombre de ces obligations, il faut citer : l’obligation d’entretien et d’amélioration des voies navigables, les travaux et ouvrages, la facilitation de la navigation fluviale, la régulation du débit des eaux, les cas d’urgence, la mise en œuvre des mesures, le respect du statut des voies navigables en période de conflit armé et la non-discrimination. Pour plus de clarté, une distinction doit être faite entre deux catégories d’obligations: les obligations procédurales (2) et les obligations substantielles (1).

Les obligations substantielles

Les obligations substantielles ont pour but le maintien des voies navigables en bon état et la protection des ressources qui dépendent de l’eau. Elles se recoupent en raison de l’interdépendance des activités liées à l’eau.
L’ensemble des principes substantiels concourent bien entendu, à l’avancée de l’intégration dans la mesure où ils permettent d’éviter toute forme d’obstacle susceptible de nuire aux droits de chaque riverain et usager. Attardons-nous un peu sur l’étude de chacune d’entre elles.
L’obligation d’entretien et d’amélioration des voies navigables est prévue à l’article 7 de l’Accord qui stipule : « Les Etats contractants s’engagent à entretenir et améliorer les voies navigables situées dans les limites du bassin Congo-Oubangui-Sangha suivant les conditions fixées par la Commission Internationale.
A cet égard, elle peut notamment se référer aux conventions, accords et protocoles conclus entre deux ou plusieurs Etats contractants pour en tant qu’ils sont en vigueur et ne sont pas abrogés par le présent accord.
La Commission Internationale définit et fixe les conditions générales d’entretien, d’exploitation et de contrôle des travaux des voies navigables.»
L’obligation d’entretien et d’amélioration des voies navigables telle qu’imposée dans l’alinéa premier de cet article vise à maintenir celles-ci en bon état en raison des entraves qui peuvent se produire naturellement ou par le fait des activités humaines. En effet, les voies fluviales drainent des matériaux qui empêchent la circulation aisée des bateaux : bancs de sable, troncs d’arbre… En plus, les travaux et ouvrages peuvent concourir à l’obstruction des voies navigables ou à la diminution de la quantité d’eau nécessaire à la navigabilité. C’est pour cela que l’article 8 (travaux et ouvrages) de l’Accord préconise ce type d’entraves lorsqu’il affirme que « Les Etats contractants veilleront à ce que la navigation ne soit pas entravée par des ouvrages d’art hydrauliques, des établissements flottants, des bacs, des câbles immergés ou aériens.»
Chaque Etat est tenu de prendre soin des portions des voies navigables situées dans les limites de son territoire. Les Etats sont également tenus de ne pas entraver la navigation du fait de leurs activités sur une voie d’eau. Par ailleurs, l’article 8 interdit aux Etats de mener les activités rendant la navigation impossible. Mais, lorsqu’une activité menée sur son territoire est susceptible d’avoir un impact sur la navigation, l’Etat auteur de cette activité est tenu d’informer les autres Etats riverains contractants et le Secrétariat général de la CICOS par les moyens les plus rapides. Le souci de faciliter le trafic fluvial par l’élimination de toute sorte d’obstacles transparait aussi à l’article 9 (facilitation de la navigation fluviale) de l’Accord de Brazzaville de 1999. Selon cet article : « Les Etats s’engagent à éliminer les barrières physiques et non physiques susceptibles d’entraver la fluidité du trafic fluvial.»
La répétition de cette obligation aux articles 7, 8 et 9 se justifie par le fait que les voies navigables sont souvent exposées aux entraves naturelles et non naturelles. En outre, elles jouent un rôle nécessaire au développement économique des Etats riverains. Elles facilitent l’accès à la mer pour les pays enclavés, comme la RCA, la circulation des marchandises, des biens et des personnes et même des cultures300. En Afrique centrale, l’intégration physique est favorisée par les voies navigables parce que : « …bon nombre de ces Etats ont en commun d’être traversés ou séparés entre eux soit par le fleuve Congo, soit par un de ses affluents ou un lac frontalier. (…) l’utilisation du fleuve Congo, de ses affluents et des lacs partagés au titre de la navigation serait à coup sûr une solution idoine au phénomène naturel d’enclavement que connait l’Afrique centrale…»301 Les voies navigables sont un soulagement pour les pays totalement enclavés (Tchad, RCA, Burundi, Rwanda), un avantage de plus pour les pays partiellement enclavés (RDC, RC) et ceux ayant plusieurs accès à la mer comme le Cameroun302.
Il est important d’ajouter, enfin, l’obligation pour les Etats d’assurer la liberté de navigation en période de conflit armé. Les voies navigables et leurs dépendances ne doivent pas être utilisées comme instrument de guerre303. La réflexion peut être élargie en affirmant que les Etats riverains sont tenus de ne pas entraver la navigation par les barrières physiques et non physiques en période de conflit armé dans le but de fragiliser leurs ennemis. Au contraire, les démarches internationales s’imposent aux Etats contractants en vue d’assurer une bonne mise en œuvre des règles sus-évoquées.

Les obligations procédurales

Par obligations procédurales, il faut entendre l’ensemble des formalités, des démarches à accomplir pour une bonne gestion de la navigation fluviale. Les résultats attendus ici sont le maintien en bon état des voies navigables, le maintien de la paix entre les Etats riverains et surtout le développement du trafic fluvial. Il s’agit de l’obligation de coopérer qui est imposée par l’Accord de Brazzaville mais aussi par les conventions internationales universelles régissant la gestion des cours d’eau internationaux, nous y reviendrons.
Dans l’Accord de Brazzaville du 06 novembre 1999, l’article 8 (travaux et ouvrages) impose en même temps une obligation de coopérer entre les Etats en raison de leurs activités sur une voie navigable. L’obligation de coopérer tire ses origines de l’article 8 de la Convention de New York du 21 mai 1997. Ce principe, tel que fixé par l’article 8 de l’Accord de Brazzaville, consiste pour les Etats à échanger les informations et à engager les négociations aux fins de préserver la navigabilité des voies d’eau, à garantir la fluidité du trafic fluvial et à préserver les ressources en eau contre toute atteinte.
L’obligation de coopérer s’étend également en matière de régulation du débit des eaux. Cette dernière est définie comme étant : «…l’utilisation d’ouvrages hydrauliques ou de toute autre mesure employée de façon continue pour modifier, faire varier ou contrôler, d’une manière ou d’une autre, le débit des eaux des voies navigables.»304 L’objectif visé ici est le maintien de l’écoulement d’une quantité d’eau suffisante pour la navigabilité d’un cours d’eau, en l’occurrence les voies navigables de l’article 3 ou le fleuve Congo et ses affluents l’Oubangui et la Sangha. Pour une action internationale efficace, l’article 10 de l’Accord de Brazzaville prévoit à ce sujet que : « Les Etats contractants coopèrent, selon que de besoin, pour répondre à la nécessité ou pour exploiter les possibilités de réguler le débit des eaux des voies navigables communes définies à l’article 3.» L’alinéa 2 de l’article 10 renforce cette action lorsqu’il impose que les Etats contractants participent sur une base équitable à la construction et à l’entretien ou au financement des ouvrages de régulation qu’ils ont convenus d’entreprendre, à moins qu’il soit convenu autrement.
Le principe de coopération consiste également à prévenir des dommages transfrontaliers et protéger les ressources halieutiques. Ici, il faut citer l’article 11 (cas d’urgence) de l’Accord de Brazzaville qui prévoit ce qui suit : « Tout Etat contractant informe sans retard et par les moyens les plus rapides disponibles, les autres Etats qui risquent d’être touchés ainsi que la Commission et toutes organisations internationales concernées de toute situation d’urgence survenant sur les voies navigables définies à l’article 3.
Tout Etat contractant sur le territoire duquel survient une situation d’urgence prend immédiatement, en coopération avec la Commission et les Etats qui risquent d’être touchés ainsi que, le cas échéant, les organisations internationales concernées, toutes les mesures pratiques possibles que dictent les circonstances pour prévenir, atténuer et éliminer les conséquences dommageables de la situation d’urgence.
En cas de nécessité, la Commission élabore, conjointement avec les Etats concernés, des plans d’urgence pour faire face aux situations d’urgence.»

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Table des matières

Introduction générale
Première partie : La contribution de la CICOS à l’intégration des Etats
Titre I: L’institution progressive d’un cadre normatif uniforme
Chapitre I. L’uniformisation du droit de la navigation intérieure
Chapitre II: La mutation des compétences de la CICOS à la GIRE avec l’Additif du 22 février 2007
Titre II: Une CICOS au service de l’intégration des politiques de l’eau
Chapitre I: Le cadre organique de la CICOS
Chapitre II: L’expansion de la CICOS
Deuxième partie: L’inefficacité de la CICOS dans le processus d’intégration des Etats
Titre I : Des faiblesses juridiques internationales
Chapitre I: Des limites institutionnelles de la CICOS
Chapitre II: La coexistence difficile entre la CICOS et les OSR
Titre II: L’appropriation insuffisante du droit de la CICOS au plan national
Chapitre I : L’insuffisante règlementation uniforme de l’eau
Chapitre II : Les objectifs non atteints, un droit ineffectif
Conclusion générale
Liste des documents annexes
I : Carte du Bassin du fleuve Congo
II : Carte des principales voies navigables du bassin du Congo
III : Accord instituant un régime fluvial uniforme et créant la CICOS
IV : Additif à l’Accord instituant un régime fluvial uniforme et créant la CICOS, signé à Kinshasa (RDC), le 22 février 2007.
Bibliographie

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