L’induction neurale puis la neurulation sont a l’origine de la formation du tube neural

L’induction neurale puis la neurulation sont à l’origine de la formation du tube neural 

Les Vertébrés sont des organismes triploblastiques, ce qui signifie que l’ensemble des organes sont issus de trois feuillets embryonnaires : l’endoderme en profondeur, le mésoderme en intermédiaire et l’ectoderme en surface. Le système nerveux provient d’une partie de l’ectoderme qui se différencie par défaut en neurectoderme sous l’influence de signaux provenant du mésoderme. Le mésoderme axial exprime les gènes noggin, chordin, follistatin et cerberus selon un gradient. Ils induisent les régions de type prosencéphale dans la partie la plus antérieure. Un second signal est transmis depuis la lèvre blastoporale (ou ligne primitive chez les oiseaux et mammifères) pour induire les régions plus postérieures via le FGF (fibroblast growth factor) et l’acide rétinoïque. Ces signaux inducteurs neuraux agissent en inhibant BMP4 (bone morphogenetic protein 4), protéine inductrice de l’épiderme et inhibitrice de la différenciation neurale (Foucrier and Le Moigne).

Le neurectoderme, ou plaque neurale, va ensuite subir des transformations morphogénétiques. Les bords latéraux de la plaque neurale s’épaississent pour former les bourrelets neuraux, qui vont se soulever, entrainant une courbure de la plaque neurale puis la formation d’une gouttière neurale. Les bourrelets neuraux finissent par fusionner pour alors donner naissance au tube neural, structure à l’origine du système nerveux central (Figure 2). Le tube neural se ferme progressivement de la partie antérieure vers la partie postérieure de l’embryon. Ainsi à un âge donné de l’embryon, les différentes régions le long de l’axe antéropostérieur ne sont pas au même stade développemental (Foucrier and Le Moigne).

En région antérieure et de par l’induction du mésoderme axial, le tube neural va former trois vésicules – le prosencéphale, le mésencéphale et le rhombencéphale – qui donneront respectivement chez l’adulte le cerveau, le tronc cérébral et le cervelet. La région plus postérieure du tube neural deviendra la moelle épinière, ellemême régionalisée en tronçons cervicaux, brachiaux, thoraciques et lombaires (Foucrier and Le Moigne).

Formation de la moelle épinière 

Dans cette partie, je vais développer la fonction de la moelle épinière adulte et décrire sa formation chez les Vertébrés, en mettant l’accent chez les Mammifères. Le terme tube neural fait ici référence à sa partie postérieure, c’est-à-dire à la moelle épinière embryonnaire.

Structure et fonction de la moelle épinière adulte 

La moelle épinière se compose d’une corne ventrale, contenant les neurones moteurs, et d’une corne dorsale, contenant les interneurones sensoriels (Figure 3). Les neurones moteurs cholinergiques sont essentiels pour le mouvement des membres et du tronc. Ils sont regroupés en différentes classes, leur fonction étant définie par leur position dans la corne ventrale. Ils envoient des projections axonales en dehors de la corne ventrale pour innerver la musculature du tronc et des membres (Butler and Bronner, 2015). Les interneurones dorsaux sont impliqués dans le relai des informations sensorielles. Ils forment trois populations dans la corne dorsale. Les neurones de la proprioception sont l’ensemble des récepteurs, voies et centres nerveux impliqués dans la somesthésie, qui est la perception du soi. Les neurones nocicepteurs traitent les informations associées au toucher, à la douleur et à la chaleur. Enfin les neurones mécanorécepteurs modulent les sorties des motoneurones et contrôlent les réflexes (Müller et al., 2002). Il y a deux vagues de genèse des neurones dorsaux. La vague précoce produit les neurones relais et sensoriels qui vont migrer dans les régions profondes de la moelle épinière. La vague tardive produits les neurones d’association qui migrent dans les régions superficielles (Mizuguchi et al., 2006a). La moelle épinière communique directement avec le ganglion spinal, un renflement qui contient les corps cellulaires des interneurones sensoriels (produits par les cellules des crêtes neurales, ils appartiennent au système nerveux périphérique). Ces interneurones peuvent être excitateurs ou inhibiteurs et réalisent des connexions afférentes qui se projettent sur les différentes couches de neurones de la moelle épinière. Ils relaient ainsi les informations sensorielles au système nerveux central (Ding et al., 2004).

Mise en place des domaines de progéniteurs et neurones spinaux

Le tube neural est un tissu épithélial pseudostratifié. La zone ventriculaire, qui borde la lumière du tube, contient des progéniteurs neuraux qui structurent le tissu par leur morphologie de glie radiaire. Les progéniteurs suivent tous le même parcours générique au cours de la neurogenèse. Ils prolifèrent dans la zone ventriculaire. Lorsqu’ils s’engagent vers un destin neuronal, ils répriment le destin de glie radiaire, arrêtent de proliférer et passent par une étape intermédiaire de précurseurs neuraux. Puis ils se différencient en neurones en migrant vers la zone du manteau. (Figure 4). Ces différentes étapes sont contrôlées par les gènes proneuraux, facteurs de transcription contenant un domaine bHLH (basic Helix Loop Helix) nécessaires et suffisants pour induire la différenciation neuronale. Chez les Vertébrés, plusieurs sous-familles de proneuraux ont été mises en évidence : les achaete-scute (Mash1/Ascl1), les atonal (Atoh1/7, Math 1/5) et les Neurogénines (Ngn1/2/3) (Bertrand et al., 2002). En parallèle, selon leur position le long des axes antéro postérieur et dorso-ventral, les progéniteurs acquièrent une identité spécifique, à l’origine d’identité et de fonctions neuronales spécialisées. L’acquisition des différentes identités neuronales le long de l’axe antéro-postérieur est contrôlée par les gènes homéotiques HOX qui sont régulés par les voies de l’acide rétinoique, du FGF et de la voie WNT (Philippidou and Dasen, 2013). Dans l’axe dorso-ventral, la zone ventriculaire est subdivisée en onze domaines de progéniteurs (Figure 5). Chacun de ces groupes de progéniteurs exprime des combinaisons de facteurs de transcription spécifiques en fonction de leur position le long de l’axe dorso-ventral.

Dans la partie ventrale, l’expression régionalisée de ces facteurs de transcription est dépendante du morphogène Shh (Sonic Hedgehog), produit par la plaque du plancher et la notochorde. La signalisation Shh/Gli régule spatialement l’expression de facteurs de transcription de type homéodomaine (HD) et à domaine bHLH, responsables de la mise en place des cinq domaines de progéniteurs p0-p3 et pMN, d’où émergent les cinq types de neurones ventraux : les motoneurones MNs et les interneurones ventraux V3 à V0. Les neurones ventraux sont les premiers neurones spinaux qui se différencient au cours de la neurogenèse spinale (chez la souris ils sont produits entre E9 et E11) (Ribes and Briscoe, 2009).

Dans la partie dorsale, les domaines de progéniteurs acquièrent leur identité sous l’influence de signaux produits par la plaque du toit. On retrouve les membres de la famille des TGFβ (Transforming Growth Factor β) tel que les BMP (bmp4, bmp5, bmp7), gdf7 (Growth Differenciation Factor), ou de la voie Wnt (wnt1, wnt3a) (Helms and Johnson, 2003a)(Caspary and Anderson, 2003b). Ces signaux spécifient les progéniteurs dorsaux dp1 à dp6 qui vont produire huit types d’interneurones sensoriels, mais seules les trois populations les plus dorsales dI1 à dI3 (Classe A) sont sous l’influence des morphogènes. Les populations plus ventrales, dI4 à dI6 et dILA/B (Classe B), se mettent en place indépendamment de ces signaux. En effet, l’ablation de la plaque du toit par expression sélective de la toxine diphtérique résulte en une perte des neurones dI1-3 et de leurs progéniteurs dorsaux (Helms and Johnson, 2003b; Müller et al., 2002). Il se pourrait que ces domaines soient mis en place par des signaux venant d’autres sources comme le mésoderme paraxial, ou via d’un mécanisme cellulaire autonome en l’absence de signaux venant de la plaque du toit et du plancher (Zhuang and Sockanathan, 2006). Les interneurones dorsaux sont produits durant deux vagues de neurogenèse. Chez la souris, les dI1 à dI6 sont produits entre E10-E12,5 et les dILA et dILB entre E11-E13 (Helms and Johnson, 2003b).

Spécification par les facteurs de transcription

La spécification des populations neuronales se fait par la combinatoire des facteurs de transcription à domaine bHLH (tels que Olig2, Math1, Ngn1, Ascl1) et à homéodomaine (comme Pax6/7, Lbx1, Tlx3, Drg11) (Helms and Johnson, 2003a). L’émergence d’un type cellulaire particulier est due à la répression de destin cellulaire alternatif. Par exemple dans la région ventrale, les progéniteurs des motoneurones expriment plusieurs facteurs qui agissent comme répresseur : Pax6 et Nkx6 préviennent l’expression de gènes capables de réprimer Olig2, qui agit lui même comme répresseur de régulateur négatif des protéines Mnx (Mnr2, Hb9) et LIM (Isl1/2, Lim3), spécifiques des motoneurones. En parallèle, l’acide rétinoïque joue un rôle d’activateur transcriptionnel en activant Pax6 puis Olig2 et enfin Mnr2, Hb9 et Isl1 (Wilson and Maden, 2005).

Dans les progéniteurs ventraux, les facteurs de transcription peuvent être subdivisés en deux catégories basées sur leur mode de régulation par Shh : les gènes de classe I sont réprimés par Shh (Pax6, Pax7, Irx3 et Dbx1/2) alors que les gènes de classes II sont activés par Shh (Nkx2.2, Nkx6.1, Nkx2.9, Olig2) (Briscoe and Ericson, 2001). Les domaines d’expression de ces facteurs de transcription sont ensuite affinés par le biais de régulations croisées. En effet, les facteurs de classe I et de classe II se répriment mutuellement. Par exemple, si Pax6 (gène de classe I) est exprimé ectopiquement dans des régions ventrales du tube neural de poulet (Gallus gallus), Nkx2.2 (gène de classe II) est réprimé. A l’inverse si Nkx2.2 est exprimé dorsalement, Pax6 est réprimé (Briscoe et al., 2000; Ericson et al., 1997). Différentes combinaisons de facteurs de transcription définissent ainsi les cinq domaines de progéniteurs [p0 (Dbx1, Dbx2, Irx3 et Pax6), p1 (Dbx2, Irx3 et Pax6), p2 (Nkx6.1, Irx3 et Pax6), pMN (Nkx6.1, Pax6 et Olig2), et p3 (Nkx6.1 et Nkx2.2)] qui produiront les motoneurones MNs et les interneurones ventraux V3 à V0.

Les progéniteurs dorsaux sont caractérisés par l’expression de Pax3 et Pax7. L’ablation de la plaque du toit réduit la taille du domaine de progéniteurs Pax7, au dépend du domaine plus ventral Pax6 qui s’étend, et entraine la perte des neurones issus des domaines Math1+ et Ngn+ (Helms and Johnson, 2003b). Comme expliqué plus haut, selon leur dépendance aux signaux morphogènes de la plaque du toit, les neurones dorsaux appartiennent à la Classe Adépendant (dI1-3), ou à la Classe B indépendant (dI4-6). Le facteur de transcription Lbx1 est exprimé spécifiquement dans les neurones de la classe B dans lesquels il inhibe le destin classe A, puisque la perte de fonction de Lbx1 entraine une perte de l’identité des neurones de la Classe B, qui à la place adoptent les caractéristiques moléculaires et cellulaires des neurones de la classe A (Müller et al., 2002). De plus, les interneurones dorsaux sont catégorisés en deux groupes, les interneurones excitateurs glutamatergiques et les inhibiteurs GABAergiques, selon l’expression respective de Tlx3 et Pax2. Ainsi, les neurones inhibiteurs dI4, dI6 et dILA expriment Pax2, alors que les neurones excitateurs dI3, dI5 et dILB expriment Tlx3. Aucun neurone ne co-exprime ces deux facteurs de transcription. Les neurones dILA et dILB sont issus du même domaine de progéniteur dpIL, et peuvent être issus d’un même progéniteur par division symétrique terminale (1 progéniteur donne 2 neurones) ou asymétrique proliférative (1 progéniteur donne 1 neurone et 1 progéniteur). De façon intéressante, les neurones dILA sont toujours obtenus par division asymétrique (1 dILB + 1 dILA ou 1 progéniteur + 1 dILA ) (Wildner et al., 2006a). Le domaine dpIL est caractérisé par l’expression « poivre et sel » d’Ascl1. Au cours de la deuxième vague de neurogenèse, Ascl1 va activer transitoirement Ptf1a dans les progéniteurs qui réprimeront l’expression de facteurs spécifiques du destin glutamatergiques, et deviendront par défaut GABAergiques dILA (Glasgow et al., 2005). En parallèle, Ascl1 active l’expression de Delta, ce qui active la signalisation Notch dans les progéniteurs voisins et promeut le destin glutamatergique dans ces neurones (dILB ). La perte de fonction de Ascl1 induit l’arrêt de production de neurone dILA , les cellules restant bloquées au stade progéniteur et entrent en apoptose. Ascl1 n’est cependant pas suffisant pour induire le destin dILA . (Wildner et al., 2006b). La dualité du rôle de Ascl1 permet ainsi de produire, au cours de la neurogenèse tardive, des neurones excitateurs et inhibiteurs à partir d’une même population de progéniteurs. (Mizuguchi et al., 2006b).

En plus de l’expression génique spatio-dépendante des domaines de progéniteurs et de neurones, il existe une composante temporelle. En effet, les neurones expriment une combinatoire de facteurs de transcription qui dépend du moment auquel ils sont nés. Les neurones vont être produits par vagues et former des strates. Quelle que soit leur position dorso-ventrale, les neurones nés à E9,5 expriment OneCut2, ceux nés à E11,5 expriment Pou2f2 et Zfh2-4, et les neurones nés entre E12,5 et E13,5 expriment Nfib et Neurod2 (Delile et al., 2019). De la même façon, les progéniteurs expriment une combinatoire de facteurs de transcription (différents des neurones) qui évolue au cours des stades embryonnaires. Il en résulte qu’au sein d’un domaine de neurones (par exemple les V3), il existe plusieurs soustype neuronaux définis par l’expression de gènes spatio-dépendants (selon la position des neurones dans l’axe D/V) et temporo-dépendants (selon le stade de production) (Delile et al., 2019; Paridaen and Huttner, 2014a).

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Table des matières

INTRODUCTION
AVANT PROPOS
CHAPITRE 1 : LA FORMATION DU SYSTEME NERVEUX CENTRAL
A. L’INDUCTION NEURALE PUIS LA NEURULATION SONT A L’ORIGINE DE LA FORMATION DU TUBE NEURAL
B. FORMATION DE LA MOELLE EPINIERE
B.1 Structure et fonction de la moelle épinière adulte
B.2 Mise en place des domaines de progéniteurs et neurones spinaux
B.3 Spécification par les facteurs de transcription
C. FORMATION DU CORTEX CEREBRAL
C.1 Généralités
C.2 La formation des couches neuronales dans le cortex
C.3 Les progéniteurs corticaux
C.3.1 Les progéniteurs apicaux
C.3.2 Les progéniteurs basaux
C.3.3 Les progéniteurs subapicaux (SAP)
C.4 Mise en place du cortex : de la spécification des progéniteurs à la production des neurones
C.4.1 Régionalisation du cortex
C.4.1 Transition entre les types de progéniteurs et modes de division
C.4.2 Spécification transcriptionnelle dans les progéniteurs et neurones corticaux
C.4.3 Temporalité de la corticogenèse
D. MECANISMES DE REGULATION DE LA NEUROGENESE
D.1 Structure subcellulaire des progéniteurs
D.1.1 Le rôle du fuseau mitotique
D.1.2 L’asymétrie des composants subcellulaires
D.1.3 Régulation de la production des bRGs
D.1.4 Importance du mouvement nucléaire intercinétique
D.2 Régulation par les voies de signalisation
D.2.1 Rôle de la voie Sonic hedgehog
D.2.2 Implication de la voie Notch
D.2.3 Régulation par les BMPs
D.2.4 Régulation par la voie Wnt
D.2.5 Rôle des FGFs
D.1 Rôle de l’environnement des progéniteurs
D.1 Régulation post-transcriptionnelle et modifications épigénétiques
CHAPITRE 2 : ROLE DU CYCLE CELLULAIRE DANS LA REGULATION DE LA NEUROGENESE
A. LE CYCLE CELLULAIRE ET SA REGULATION
B. REGULATIONS CROISEES ENTRE LE CYCLE CELLULAIRE ET LES GENES PRONEURAUX
C. PHASES DU CYCLE ET DESTIN CELLULAIRE
C.1 Régulation directe de la neurogenèse par les composants de la machinerie du cycle cellulaire
C.1.1 Cyclines
C.1.2 Inhibiteurs des CDKs
C.1.3 La protéine du Rétinoblastome Rb
C.1.4 Géminine
C.2 Rôle de la cinétique du cycle dans le destin cellulaire
C.2.1 Phase M
C.2.2 Phase G1
C.2.3 Phase S
C.2.4 Phase G2
CHAPITRE 3 : LA PHOSPHATASE CDC25B EST UN REGULATEUR DE LA TRANSITION G2/M ET DE LA NEUROGENESE
A. LA FAMILLE DES PHOSPHATASES CDC25S
A.1 Régulation et fonction des CDC25s au cœur de la cellule
A.2 CDC25s et cancers
A.3 Rôle des phosphatases CDC25s au cours de l’embryogenèse et chez l’adulte
A.3.1 Patron d’expression tissulaire des CDC25s
A.3.2 Les modèles murins mutants pour les CDC25s
B. ROLE DE CDC25B DANS LE DEVELOPPEMENT DU SYSTEME NERVEUX
B.1 La phosphatase CDC25B
B.2 La phosphatase CDC25 régule la neurogenèse spinale dans l’embryon de poulet
B.3 CDC25B pourrait être un régulateur de la neurogenèse chez les mammifères
CONCLUSION

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