L’importance du fer sur terre et dans l’océan

L’importance du fer sur terre et dans l’océan

Le fer sur terre

Le fer est le 4ème élément le plus abondant de la croûte terrestre (en masse), derrière l’oxygène, le silicium et l’aluminium (ex. Taylor, 1964). Son rôle au sein du système terrestre a toujours été déterminant. Lors de la formation des océans et de l’apparition de la vie sur terre, la photosynthèse exercée par les bactéries marines (cyanophycées) a augmenté considérablement la quantité d’O2 dissous au sein de l’océan qui, auparavant réducteur, est devenu oxydant. Le fer présent dans l’océan a joué un rôle de tampon de l’augmentation d’O2 dissous, en consommant l’O2 pour être oxydé sous forme de goethite, ferrihydrite, magnétite et d’hématite principalement. Ces oxydes ont alors précipité pour donner lieu à des lits de fers rubanés que l’on appelle les BIF (pour «Banded Iron Formation ») déposés sur le plancher océanique entre 2,7 et 1,9 milliards d’années (Konhauser et al., 2002). Toutes les espèces de fer ayant été consommées par l’oxydation, l’océan a alors commencé à dégazer son O2 dans l’atmosphère, favorisant ainsi l’apparition de la vie sur la terre ferme.

Le fer est très répandu dans les systèmes biologiques, il est notamment impliqué dans de nombreux systèmes nécessaires à la vie terrestre. Par exemple, il joue un rôle important dans la constitution de l’hémoglobine (contenue dans les globules rouges du sang), de la myoglobine (dans les muscles), ainsi que dans de nombreux enzymes fondamentaux pour le fonctionnement des organismes .

Le fer dans l’océan

Rôle dans la pompe biologique du carbone

Le dioxyde de carbone (CO2) présent dans l’atmosphère est un gaz à effet de serre important du système climatique terrestre. Dans le contexte actuel, les émissions anthropogéniques de CO2 ont considérablement augmenté la concentration de CO2 au sein de l’atmosphère. Cette augmentation de la pression de CO2 atmosphérique (environ 400ppm en 2014), est corrélée avec l’augmentation globale des températures terrestre. Dans ce contexte de réchauffement climatique, les puits de CO2 atmosphérique sont largement étudiés. A ce titre, l’océan mondial constitue un système de piégeage du CO2 atmosphérique à travers les échanges de gaz entre l’atmosphère et la surface de l’océan. La « pompe biologique » de carbone est effectuée par le phytoplancton de surface qui utilise le CO2 dissous dans l’eau afin de fabriquer sa propre matière organique via la photosynthèse (Figure 1). De nombreuses études se concentrent d’ailleurs sur l’export du carbone depuis l’océan de surface vers les sédiments de fond où il peut être stocké durablement (des millions d’années).

Lors de la photosynthèse, le fer, qui est un micronutriment essentiel au développement du phytoplancton (Morel et Price, 2003), intervient en tant que donneur d’électrons sous sa forme réduite Fe2+, et constitue un cofacteur d’enzyme lors de l’oxydation de l’ammonium, de la fixation de l’azote gazeux (N2), ainsi que lors de la nitrification/dénitrification des nitrates (NO3- , NO2- ). Il est donc également un élément essentiel pour la photosynthèse. Le fer est désormais intégré dans différents modèles biogéochimiques et climatiques comme élément essentiel intervenant dans la production primaire (Aumont et Bopp, 2006; Moore et Braucher, 2008). Un autre processus résultant des échanges gazeux entre l’océan de surface et l’atmosphère peut permettre le piégeage du CO2. En effet, lorsque le CO2 se retrouve sous forme dissoute, il peut être exporté en profondeur dans l’océan via la circulation des masses d’eau. C’est le cas par exemple pour la Labrador Sea Water (LSW), qui en raison de ses caractéristiques physiques (température, salinité) devient plus dense et plonge jusqu’à 2000m de profondeur dans l’océan Atlantique Nord (Dickson et Brown, 1994), et permet alors au CO2 dissous présent à l’origine dans les eaux de surface de se retrouver piégé par la circulation océanique (thermohaline). Le temps de résidence du CO2 dans l’océan profond est estimé à environ 1000 ans. On appelle ce processus la « pompe physique » du CO2.

Limitation de la photosynthèse dans les zones HNLC

Les zones HNLC (pour High Nutrient Low Chlorophyll) représentent environ plus du tiers de l’océan global (Figure 2). Ces zones se situent au niveau de l’océan Antarctique (que l’on appellera océan Austral par la suite), de l’océan équatorial Pacifique Est, et de l’océan Pacifique arctique. Elles montrent de fortes concentrations en nutriments majeurs en surface, tels les nitrates, phosphates et silicates. Or le phytoplancton consomme ces nutriments pour favoriser le développement de son métabolisme et donc effectuer la photosynthèse. Ces fortes concentrations en surface révèlent que le phytoplancton ne consomme pas tous les nutriments dont il dispose (Pitchford et Brindley, 1999).

La limitation de la photosynthèse au sein des zones HNLC serait principalement due à un manque de fer dans ces régions de l’océan, selon l’hypothèse de Martin (1990) qui avait relié la chute des concentrations en CO2 atmosphérique pendant la période du dernier maximum glaciaire avec une augmentation des dépôts atmosphériques à l’océan de poussières riches en fer. Cependant, le fer ne serait responsable que de la moitié des chutes de CO2 observées durant cette période (Kohfeld et al., 2005). De nombreuses expériences ont tenté de démontrer l’hypothèse de Martin (1990) par des expériences de fertilisations artificielles (Philip W. Boyd et al., 2004; Boyd et al., 2000; Coale et al., 1996; de Baar et al., 2005; Mills et al., 2004; Smetacek et al., 2012; Tsuda et al., 2003; Watson et al., 2000), ou naturelles (Blain et al., 2007; Pollard et al., 2009) de l’océan par du fer au sein de zones HNLC. Ces expériences ont pour la plupart montré une croissance conséquente du phytoplancton après l’ajout de fer (bloom), et diminution de la pression partielle de CO2 au-dessus de la colonne d’eau, validant ainsi l’hypothèse de la limitation de production primaire par le fer. Cependant, l’augmentation de l’export de carbone en dessous des couches de surface n’a pu être établie que pour environ la moitié de ces expériences (ex : Blain et al., 2007; Pollard et al., 2009; Smetacek et al., 2012). Le fer n’est pas le principal élément limitant dans toutes les zones de l’océan. En effet, l’azote (N), serait le principal élément limitant dans l’océan Atlantique Nord (Figure 2, à gauche, Moore et al., 2013). D’autres éléments comme le phosphore (P), le silicium (Si), le cobalt (Co), le zinc (Zn), et la vitamine B12 peuvent contribuer à limiter la photosynthèse dans certaines zones de l’océan. Dans le cadre de cette thèse, nous nous focaliserons uniquement sur l’océan Austral , où le fer apparaît être clairement le principal élément limitant la photosynthèse.

Sources et cycle du Fer dans l’océan 

Sources de fer

Nous avons vu que les apports de fer au sein de l’océan et notamment des zones HNLC pouvaient provoquer une croissance du phytoplancton et par conséquent favoriser la photosynthèse et la production primaire. L’hypothèse de Martin (1990) évoquait comme source principale de fer à l’océan les dépôts atmosphériques de poussières. Cependant de nombreuses autres sources de fer à l’océan peuvent être considérées, comme notamment les apports de rivières, l’hydrothermalisme ainsi que les sédiments dont la contribution au contenu en fer de l’océan peut être significative. Dans cette section, nous allons décrire les estimations de flux de fer apporté à l’océan par ces différentes sources, calculés par différents auteurs, ainsi que de leur impact potentiel sur la zone d’étude que nous privilégierons, l’océan Austral.

Apports atmosphériques

La croûte terrestre étant composée d’environ 3,5% de fer (en masse) (Taylor et McLennan, 1995), l’érosion puis le transport de matériel lithogénique dans l’atmosphère constitue une source significative de fer à l’océan. Les apports atmosphériques (ou aérosols) furent longtemps considérés comme la principale source de fer à l’océan (Duce et Tindale, 1991; Jickells et al., 2005). Ces apports peuvent être de 2 types : les apports secs par chute gravitaire des aérosols, et les apports humides par l’action des précipitations qui lessivent la colonne atmosphérique de ses aérosols. Les apports atmosphériques sont issus du transport de particules (poussières >1µm) depuis les régions arides et semi arides. Ces particules sont appelées aérosols et sont suffisamment légères pour être entrainées par les vents à haute altitude, et ont un temps de résidence suffisamment long pour pouvoir être transportés sur de longues distances (des milliers de kilomètres). L’océan mondial recevrait environ 450 Tg par an de dépôts atmosphériques (Figure 3). Les poussières atteignant l’océan Atlantique (essentiellement sahariennes) constituent le flux le plus important de particules atmosphérique vers l’océan. En effet on estime à environ 47% en moyenne la contribution du dépôt atmosphérique sur l’ensemble de l’océan Atlantique par rapport à l’océan mondial (Jickells et al., 2005). L’océan Austral recevrait en moyenne 6% des dépôts atmosphériques à l’océan mondial.

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Table des matières

CHAPITRE I : INTRODUCTION
1. L’importance du fer sur terre et dans l’océan
1.1. Le fer sur terre
1.2. Le fer dans l’océan
1.2.1. Rôle dans la pompe biologique du carbone
1.2.2. Limitation de la photosynthèse dans les zones HNLC
2. Sources et cycle du Fer dans l’océan
2.1. Sources de fer
2.1.1. Apports atmosphériques
2.1.2. Apports des rivières
2.1.3. Apports de l’hydrothermalisme
2.1.4. Apports des sédiments
2.1.5. Autres sources
2.2. Facteurs de contrôles du cycle du fer dans l’océan
2.2.1. Spéciation du fer
2.2.1.1. Spéciation physique
2.2.1.2. Spéciation chimique
2.2.2. Contrôles biotiques et abiotiques
3. Isotopie du fer
3.1. Rappels de géochimie isotopique
3.1.1. Fractionnement isotopique : Généralités
3.1.2. Fractionnement isotopique à l’équilibre
3.1.3. Fractionnement cinétique
3.1.4. Système fermé à l’équilibre et distillation de Rayleigh
3.2. Les isotopes du fer sur terre
3.3. Les isotopes du fer dans l’océan
3.3.1. Sources de fer à l’océan : leur signature isotopique
3.3.1.1. Aérosols
3.3.1.2. Rivières
3.3.1.3. Hydrothermalisme
3.3.1.4. Sédiments
3.3.2. Compositions isotopiques du fer dans l’océan
3.3.3. Processus fractionnant les isotopes du fer dans la colonne d’eau
3.3.4. Synthèse sur les compositions isotopiques du fer dans l’océan
4. Plan et objectifs de la thèse
CHAPITRE II : PROTOCOLES ANALYTIQUES
1. Exigences de propreté pour l’analyse du fer
2. Échantillonnage et filtration de l’eau de mer
3. Préparation des échantillons
3.1. Fraction particulaire
3.2. Fraction dissoute
3.2.1. Préconcentration de la fraction dissoute sur colonne NTA
3.2.2. Circuit d’élution
4. Purification des échantillons
4.1. Protocoles existants
4.2. Développement d’un protocole adapté aux échantillons d’eau de mer
4.2.1. Ajustement du volume de résine
4.2.2. Tests de rendement sur résine AG MP-1
5. Mesures aux ICPMS : Element XR (HR-ICPMS) et Neptune (MC-ICPMS)
5.1. Principe et fonctionnement des ICP-MS
5.2. Mesure des concentrations multiélémentaires à l’HR-ICP-MS
5.2.1. Limites de détection et de quantification
5.2.2. Standards internes et externes
5.2.3. Précision de la mesure
5.3. Mesures des compositions isotopiques du fer au Neptune (HR MC ICP-MS)
5.3.1. Principe et fonctionnement du Neptune
5.3.2. Correction du biais de masse
5.3.3. Validation des données
CHAPITRE III : RÉSULTATS ET DISCUSSION
1. Présentation générale de la zone d’étude
1.1. Contexte hydrodynamique
1.2. Caractéristiques biogéochimiques sur la section
1.3. Comportement du fer dans l’océan austral
2. Résultats sur le fer dissous
3. Résultats sur le fer particulaire
3.1. Observation de filtres au MEB
3.2. Concentration et compositions isotopiques du fer particulaire
4. Sources et cycle du fer dans l’océan Austral, secteur Atlantique
4.1. Sources de fer dans l’océan Austral, secteur Atlantique
4.1.1. Origine du fer particulaire
4.1.2. Source sédimentaire de fer dans le domaine subtropical (S1 et S2)
4.1.3. Sources de fer profond dans les stations S3, S4 et S5
4.1.4. Estimation de la composition isotopique du PFe lithogénique en surface
4.2. Cycle interne du fer dans l’océan austral
4.2.1. Fractionnement isotopique pendant l’assimilation biologique
4.2.2. Iron isotopes evidence different internal iron sources in the intermediate and deep Ocean. (Abadie et al., soumis)
4.2.3. Evolution du δ56Fe dans les eaux profondes
4.2.4. Evolution du δ56Fe dans les eaux intermédiaires
4.3. La signature isotopique du DFe peut-elle être conservée sur de longues distances ?
4.4. Estimation de la contribution de chaque source de fer dans l’océan Austral
CONCLUSIONS

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