Le Programme d’Accompagnement au Retour à Domicile (PRADO) maternité est un programme national, qui a été mis en place à partir de 2012 dans les maternités du Finistère. C’est un programme couvert à 100% par l’assurance maladie. Son but est d’assurer un suivi à domicile du couple mère-enfant par une sage-femme libérale après la sortie de la maternité (1) (2). En effet, la sage-femme est habilitée à effectuer le suivi du nouveau-né dans les premières semaines de vie (3) (4). Ce programme est proposé aux femmes sous certaines conditions (annexe I) et est organisé par un conseiller de la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) (5). Il a été mis en place dans un contexte de diminution constante, depuis quelques années, de la durée moyenne de séjour en maternité (6). Par ailleurs, dès 2006, une enquête menée par la Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques (DREES) révélait l’insatisfaction des patientes quant à l’accompagnement à la sortie de la maternité et lors de leur retour à domicile, renforçant ainsi le bien-fondé de cette mesure (7) (8).
Avant la mise en place de ce service plus systématique, il existait néanmoins des possibilités de suivi pour ce couple mère-enfant. Les sages-femmes libérales pouvaient proposer un suivi de la croissance staturopondérale des nouveau-nés ainsi qu’un examen clinique. Par ailleurs, depuis 1945 le service de protection maternelle et infantile (PMI), propose, entre autres, la prise en charge des nouveau-nés et des enfants jusqu’au sixième anniversaire (9) (10). La PMI est un service départemental, placé sous l’autorité du président du conseil départemental. Elle est chargée d’assurer la protection sanitaire de la mère et de l’enfant (11).
La généralisation du PRADO et les conditions d’éligibilité qui se sont élargies permettent à un nombre croissant de femmes et nouveau-nés, de bénéficier de ce système. Il est donc important que les missions des professionnels qui interviennent en post-natal soient clairement établies. En effet sur le terrain, il semblerait que parfois les interventions de ces professionnels se télescopent au détriment, quelques fois, de la prise en charge. La qualité de l’accompagnement en post natal passe donc par une coordination et un partenariat bien pensé afin d’apporter une prise en charge optimale des nouveau-nés et de leurs parents.
La prise en charge d’un nouveau-né sortant de maternité et la mise en place du PRADO
Les missions des puéricultrices de PMI envers les nouveau-nés
Vues par les puéricultrices de PMI
Les puéricultrices de PMI mettent en avant l’importance de l’accompagnement à la parentalité lors de la prise en charge d’un nouveau-né, notamment l’adaptation de la mère vis-à-vis du nouveau-né. Cependant, elles ne se limitent pas à cela et s’étendent au couple et à la fratrie. Soutien de l’alimentation, quel qu’en soit le mode, surveillance de la courbe de poids, réponse aux questions ou inquiétudes, conseils de puériculture, modes de garde… sont autant de notions qu’abordent les puéricultrices. Elles précisent qu’elles accompagnent également les nouveau-nés avec pathologie, complication ou vulnérabilité. Concernant la prise en charge de la maman, les puéricultrices de PMI mentionnent qu’elles ne font pas d’examen auprès de la maman mais s’intéressent à son moral, sa relation avec le nouveau-né, l’adaptation à celui-ci : « on va s’inquiéter de comment va la maman aussi bien moralement que physiquement », a dit Madame G.
Il est important de noter qu’elles mentionnent que leurs services ne sont pas obligatoires et qu’ils doivent être demandés ou acceptés par la famille : « nous de toute façon ce n’est qu’à l’amiable, les parents ne sont pas obligés de nous recevoir» (K), « on est toujours, quelque soit le motif d’entrée, sur une démarche individuelle de la personne » (H).
L’ensemble des puéricultrices interrogées a évoqué des consultations plus tardives ; avant l’instauration de ce programme, les nouveau-nés étaient vus à partir de 8-10 jours de vie. Maintenant, la première visite, quand elle a lieu, est généralement effectuée à partir de trois semaines de vie. Par ailleurs, une moindre proportion des nouveau-nés est vue par la PMI. Selon les puéricultrices, la mise en place de la consultation à 15 jours avec un médecin et le taux de natalité décroissant font également partie des raisons qui expliquent la baisse de fréquentation des PMI. « L’enfant est vu différemment aujourd’hui » (H). Par ailleurs, plusieurs puéricultrices ont remarqué que selon la sage-femme présente dans le secteur, il y avait une influence sur le nombre de nouveau-nés vus par la PMI.
Une puéricultrice ne note pas forcément de changement dans sa manière de travailler : « je trouve que ça ne change pas énormément de choses » (K). Trois puéricultrices évoquent une nouvelle manière d’accompagner les couples dans leur parentalité : « On essaye de trouver une autre manière de travailler […]. C’est aussi une manière d’accompagner les parents différemment, dans leur parentalité, dans les échanges qu’ils peuvent avoir avec les enfants » (G) ; « j’essaie de développer d’autres activités qui me permettent de pouvoir avoir des contacts avec les mères, autrement que dans les suites de maternité » (I). Elles disent avoir développé d’autres activités tels que les massages bébé ou des ateliers lecture. L’autre puéricultrice n’a pas pu faire de constat puisque quand elle a débuté, le PRADO était déjà mis en place dans son secteur.
Vues par les sages-femmes libérales
Concernant le suivi pondéral, l’accompagnement de l’alimentation, l’éducation à la parentalité, le nursing, les sages-femmes estiment avoir le même rôle et les mêmes compétences que les puéricultrices de PMI : « je pense qu’on a les mêmes compétences, en tout cas vis-à-vis du nouveau-né » (A). Pour quatre sages-femmes, la différence de prise en charge est l’examen médical que les sages-femmes réalisent auprès du nouveau-né. Certaines sages-femmes estiment que les puéricultrices sont plus à même que les sages-femmes de donner certains conseils qui concernent le nouveau-né. Quatre sages-femmes notent qu’à la différence du PRADO, la prise en charge des puéricultrices ne s’intéresse qu’au versant nouveau né dans la mesure où aucun examen n’est pratiqué auprès de la femme. Le rôle des puéricultrices de PMI, selon les sages-femmes interrogées est également de prendre en charge les nouveau-nés qui nécessitent une surveillance plus intensive, tels que ceux ayant un retard de croissance intra-utérin, les prématurés…, mais aussi les familles en situation de vulnérabilité sociale ou psychologique.
Les missions des sages-femmes libérales envers les nouveau-nés
Vues par les puéricultrices de PMI
Les puéricultrices sont globalement d’accord pour dire que le PRADO s’adresse aux nouveau-nés en bonne santé, à terme. Elles estiment que les nouveau-nés prématurés, avec un retard de croissance, une pathologie, une grande vulnérabilité sociale ou psychologique, une naissance multiple, une difficulté particulière dans l’alimentation ou autre devraient être suivis par une puéricultrice de PMI, voire en binôme avec une sage-femme libérale selon certaines puéricultrices. Cependant, l’une d’entre elles mentionne que dans le cas où une famille vulnérable refuse un suivi PMI, ou que l’organisation ne permet pas de voir le nouveau-né assez rapidement, il vaut mieux qu’il y ait l’intervention d’une sage-femme plutôt que personne. Une puéricultrice met en avant le fait que le PRADO ne devrait pas être proposé à toutes les primipares car il faut du temps pour les accompagner et que les sages-femmes ont un temps limité pour le réaliser : « les primipares je suis un peu mitigée. Chez certaines oui, chez d’autres non » (I). Trois puéricultrices notent tout de même qu’elles ont l’impression que ce programme est proposé à toutes les femmes et nouveau-nés qui sortent de maternité : « j’ai l’impression que c’est pour tout le monde », « je ne sais même pas s’ils en font des non éligibles », « le PRADO est partout, pas plus pour un enfant que pour un autre » ont dit respectivement Madame G, Madame H et Madame J.
Les puéricultrices estiment que le rôle des sages-femmes qui accompagnent les nouveau-nés à la sortie de la maternité est le même que le leur, avec en plus un regard plus médical des sages-femmes, mis en avant par deux des puéricultrices. Une puéricultrice pense qu’elles ont un regard plus global que les sages-femmes, envers le nouveau-né. Quatre d’entre elles soulignent que le PRADO s’adresse également à la maman.
Vues par les sages-femmes libérales
Toutes les sages-femmes avec qui je me suis entretenue ont mentionné l’aspect global que propose le PRADO puisqu’il s’intéresse à la fois à la maman et au nouveau-né. Concernant le nouveau-né, les sages-femmes ont toutes exprimé que leurs missions étaient de réaliser un examen médical complet du nourrisson, ainsi que de surveiller la courbe pondérale et l’alimentation. Elles s’intéressent également au lien mère-enfant, à l’organisation, aux soins de nursing et répondent aux questions des parents. Deux des sages-femmes ne réalisent pas de consultation pour le nouveau-né après les visites PRADO, sauf à la demande des parents, et orientent vers la PMI après la fin du PRADO : « moi j’estime qu’on n’a pas vocation à assurer le suivi du bébé le 1er mois, même si on a le droit » (B). Deux autres proposent aux mamans de peser le nouveau-né à 3 semaines de vie (entre les deux visites avec le médecin). Mais, passé le premier mois, ces deux sages-femmes ne réalisent plus de consultations médicales. Cinq sages-femmes ont déclaré avoir déjà pris en charge très rarement des nouveau-nés qui selon elles, n’auraient pas dû être éligibles au PRADO mais qui étaient vus dans le cadre de ce programme. Cela a été réalisé par exemple pour des enfants qui avaient une mauvaise reprise de poids ou un ictère. La dernière a déjà pris en charge des nouveau-nés avec ictère, retard de croissance intra-utérin mais ne savait plus si c’était dans le cadre du PRADO ou pas. Globalement cela n’arrive pas souvent. Quatre sages-femmes ont déjà suivi des nouveau-nés non éligibles au PRADO et hors de ce cadre. Deux d’entre elles le font sur ordonnance médicale.
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Table des matières
I. Introduction
II. Matériel et méthode
A. Type d’étude
B. Population
C. Méthode
D. Matériel
E. Analyse des données
III. Analyse et interprétation des résultats
A. La prise en charge d’un nouveau-né sortant de maternité et la mise en place du PRADO
1. Les missions des puéricultrices de PMI envers les nouveau-nés
a. Vues par les puéricultrices de PMI
b. Vues par les sages-femmes libérales
2. Les missions des sages-femmes libérales envers les nouveau-nés
a. Vues par les puéricultrices de PMI
b. Vues par les sages-femmes libérales
3. La connaissance des services
a. La protection maternelle et infantile
b. Le programme d’accompagnement au retour à domicile
c. La connaissance des missions de l’autre
4. La mise en place du PRADO
B. Les relations entre les sages-femmes libérales et les puéricultrices de PMI
1. Liens entre les sages-femmes libérales et puéricultrices de PMI
a. Rencontres entre professionnels
b. Contacts entre professionnels
2. Le travail en collaboration
3. La transmission d’informations
4. Difficultés évoquées
C. Pour une meilleure prise en charge
1. Les points forts du PRADO
a. Regard des puéricultrices de PMI
b. Regard des sages-femmes libérales
2. Les atouts de la protection maternelle et infantile selon les sages-femmes
3. Les souhaits
a. Des sages-femmes libérales
b. Des puéricultrices de PMI
4. Pour quels bénéfices ?
IV. Discussion
A. Forces et limites de l’étude
B. Discussion des résultats
C. Pistes d’amélioration pour la prise en charge autour de la périnatalité
V. Conclusion
VI. Références bibliographiques
VII. Annexes
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