L’immanence de dieu dans la pensee stoicienne d’epictete et de marc-aurele

LE STOICISME : aperçu historique

Les derniers grands systèmes de la pensée grecque, le stoïcisme, l’Epicurisme et Le Pyrrhonisme, remplissent la période dite hellénistique, allant de la mort d’Alexandre le Grand (323) jusqu’à la conquête romaine (146). Durant cette période, déchirée par les luttes des démocraties grecques et par une anarchie sans merci, la culture grecque s’étend aux divers pays méditerranéens et y diffuse la connaissance des règles de conduite de l’homme qui cherche son bonheur. On distingue trois périodes du stoïcisme :

a)- Celle du stoïcisme dit primitif, fondé par Zénon de Cittium (Chypre) 336/5-264/3. Il est arrivé à Athènes en 315-313. Et ses successeurs sont : Cléanthe d’Assos (331-233) et Chrysippe de Sole (281-208 av. J.C.) .
b)- Le stoïcisme moyen : de tendance éclectique, il est dominé par deux noms : Panétius de Rhodes (185-110) av. J.C.) et Posidonius d’Apamé (135-51 av. J.C.). Un point caractéristique de leur doctrine : un monisme fondé sur l’unité organique de la nature, avec une morale ouverte au platonisme.
c)- Le dernier stoïcisme, dit stoïcisme impérial : Il est fondé au début de l’Empire romain. Sa doctrine insiste sur les principes pratiques et moraux, liés à une vision religieuse, qui consacre la parenté de l’homme à Dieu : Sénèque – Epictète – Marc– Aurèle, sont les trois principaux sectateurs.

LES DEUX PRINCIPAUX ADEPTES DU STOICISME IMPERIALEPICTETE

Il y a des noms qui ont des significations. L’étymologie du nom Epictète signifie «celui qui a été acheté » (épiktètos). Il est né en Asie mineure et plus exactement en Phrygie (vers 50 après J.C.). Esclave d’un maître cruel et stupide, Epaphrodite, lui-même ancien affranchi de Néron, Epictète eut à subir de mauvais traitements. Qu’un esclave puisse s’engager dans une formation philosophique ne doit pas vous étonner, même s’il a reçu de nombreuses tortures. Il a donc suivi l’enseignement du stoïcien Musonius Rufus. Dans l’antiquité, la dénomination d’esclave a recouvert une très grande variété de conditions, depuis les travaux estimés les plus durs jusqu’à la fonction du conseiller de prince comme celle, par exemple, que remplissait Epaphrodite. D’ailleurs, il faut souligner que l’ouverture relative de l’enseignement à diverses catégories sociales est une tradition dans le stoïcisme, comme dans l’épicurisme. Il est à rappeler que Zénon de Cittium était un ancien élève des platoniens. Il a ouvert son école, sous une portique-stoa, à Athènes aux environs de 300 avant J.C.

Devant cette situation (torture), Epictète avertit calmement son maître : « tu vas me casser la jambe ». Affranchi de la mort par Epaphrodite, Epictète fut expulsé de Rome par l’Empereur Domitien, il a ouvert une école à Nicopolis, en Epire (au Nord-Ouest de la Grèce). Epictète a proposé son enseignement non seulement à la bourgeoisie qui se développe par le commerce, mais aussi à ceux qui, avec l’extension du monde grec due aux conquêtes d’Alexandre, entreprennent d’acquérir cette culture. Cette particularité de l’enseignement stoïcien, liée aux bouleversements sociaux et politiques, permet d’expliquer bien de deux choses : tout d’abord, l’extrême diffusion du stoïcisme dans le monde hellénistique, puis dans l’empire romain. Mais sa nature l’a amené à suivre, accoutumée à une pratique culturelle, une voie philosophique totale, non moins familière à tout homme cultivé de son temps. Il s’ensuit la diversité des conditions sociales des adeptes du Portique, notamment à l’époque impériale. Leur nombre n’a cessé de grossir depuis le courtisan à l’écrivain Sénèque : Musonius Rufus en est le contemporain. Et cette figure illustre et secrète qu’est l’empereur Marc-Aurèle y a retrouvé l’intimité de l’esclave Epictète.

La vie d’Epictète est empruntée de pauvreté. Son enseignement, très réputé, forme des figures dont la carrière politique sera considérable. C’est le cas, vers 108, du futur gouverneur de Cappadoce, Arrien de Nicomédie, qui recomposera ses notes de cours pour en faire les Entretiens d’Epictète et constituera un mémento de cet enseignement sous la forme de Manuel. L’enseignement d’Epictète, qui n’a écrit aucun livre, prend en partie la forme de l’esprit socratique, où le dialogue souscrit l’accent d’une apostrophe. Il est donc clair que les Entretiens d’Epictète traduisent une relation fidèle de l’enseignement du maître, puisqu’ils conservent la familiarité, caractérisée par l’aspect populaire de sa langue. Même s’il n’écrivit pas, son élève Arrien recueillit ses propos.

Les Entretiens mentionnent souvent la pratique de la lecture et de l’explication des textes des fondateurs du Portique (1). Le dialogue n’a aucun aspect de l’enseignement d’Epictète. Le Manuel d’Epictète souscrit une explication plus précise qui doit être cherchée dans l’enseignement d’Epictète : c’est un recueil d’évaluation et de représentation philosophiques correctes, capables de guider l’exercice de l’apprenti-philosophe. Il n’y a pas de doctrine propre à Epictète, pas d’«épictètisme » comme il y a un platonisme ou un péripatétisme. En effet, pour Epictète, ces lignes portent moins sur l’éthique que sur la philosophie générale. Elles mettent l’accent sur le problème de l’origine de la philosophie. L’idée directrice est la suivante : la philosophie naît du constat de la diversité contradictoire des opinions humaines. Cette diversité conduit à poser une norme nécessaire destinée à dépasser le règne de l’opinion.

Ainsi, la philosophie s’inscrit-elle contre l’incertitude : elle tente de chercher une vérité de raison supérieure à l’opinion et permet d’établir l’accord entre les hommes. En somme, la philosophie veut que les hommes reconnaissent une même norme et un même critère de vérité. Tel est son projet fondamental. Dépasser toute attitude contradictoire, tendant à contrarier les normes du vrai, d’une part, et celle de la rectitude de la conduite, de l’autre. Telle est la visée de la philosophie. Ainsi, comme le dit Epictète, les hommes seront-ils délivrés de leur folie.

Marc-Aurèle (121-180)
Fils adoptif de l’empereur Antonin, Marc-Aurèle passa sa jeunesse à étudier la philosophie, il lut Epictète. Il devint empereur à la mort d’Antonin en 161. Les menaces et les catastrophes qui s’abattent sur le monde romain ne le détournent pas de la méditation quotidienne, au milieu des soucis et des deuils. Il écrit, en grec, des pensées dont le titre significatif est « Pour moi-même ». Il meurt au cours d’une campagne sur les bords du Danube, alors que sévit la peste.

Il a composé ses Méditations (Pensées pour moi-même) en douze livres sous forme d’aphorisme. En accord avec Sénèque et Epictète pour donner une connotation religieuse à sa philosophie, il met l’accent sur la Providence divine et sur une sage ordonnance de l’univers. Empereur et philosophe romain, insensible aux séductions de la gloire, de la volonté et des biens extérieurs, il sait néanmoins prêter attentivement l’oreille à son devoir d’homme et de citoyen. Il avait, pour maître de grammaire et de rhétorique, l’illustre Cornélius Fronton à qui il écrit : « Tu m’as donné un sujet à traiter, je n’ai pas eu encore touché et ce n’est pas faute de loisir. Mais l’ouvrage d’Ariston (philosophe stoïcien) m’occupe en ce moment » .

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Table des matières

INTRODUCTION
I.- Première Partie : De la conception orientale de Dieu à l’affirmation stoïcienne de l’Immanentisme
I.1 De la conflagration des mondes à la restitution de leur nature : Mani et Zarathoustra
I.2 Le Brahmanisme et le souffle créateur de l’Atman
I.3 Cakya Mouni et la prédiction de la mort immortelle
I.4 De l’énergie du Feu-Logos d’Héraclite à la Raison cosmique du stoïcisme primitif
II.- Deuxième Partie : Immanence de Dieu et Processus du devenir de l’homme dans l’univers
II.1 Le monde et le lien des parties au Tout : la sympathie universelle
II.2 Le Destin entre la puissance pneumatique et le logos de l’Univers
II.3 La liberté dans la résignation affectueuse au Destin
III.- Troisième Partie : Immanence de Dieu et humanisme cosmopolite
III.1 Théorie centrifuge de Zeus : enracinement dans le jeu universel
III.2 Au cosmopolitisme : le caractère communautaire de l’humanité
III.3 Une philosophie en marche vers une prédication éthique
III.4 La loi de l’harmonie universelle
III.5 La bienveillance active réalise la loi de l’être
III.6 Un éthique de l’acquiescement : Vivre en communion avec l’ordre du Destin
CONCLUSION
IV.- Bibliographie

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