Intérêt des systèmes CBTC
La croissance actuelle du trafic ferroviaire en zone dense est difficilement compatible avec les modes d’exploitation classiques. Dans ce contexte, les systèmes de pilotage automatique présentent de nombreux avantages. Ils permettent la transmission d’information en temps réel, la réalisation d’arrêt très précis, la réalisation d’une conduite homogène entre les circulations, la réalisation d’intervalles très faibles entre les trains et donc une amélioration significative des performances, ceci avec une grande adaptabilité aux différents types de matériel roulant et d’infrastructure. Les systèmes de pilotage automatique permettent en outre la réduction des coûts d’exploitation, de maintenance et de dépense d’énergie. Les systèmes dits « CBTC » (Communication Based Train Control) correspondent à la génération d’automatismes la plus récente. Ils sont capables de mettre en œuvre un pilotage automatique grâce à une localisation précise des trains, indépendamment de tout dispositif fixe de détection. Un système CBTC déployé sur une ligne s’interface avec la signalisation ferroviaire préexistante, le matériel roulant, le contrôle-commande de la traction, et le personnel. En plus des fonctions de localisation et de pilotage automatique, un système CBTC peut inclure un module de supervision de la ligne en charge d’adapter la marche des trains en fonction des objectifs d’exploitation et des aléas, améliorant ainsi la robustesse du trafic. Les systèmes CBTC ont été initialement implémentés sur des systèmes de métros, dont le principal objectif d’exploitation est de maintenir un intervalle court et régulier entre les trains, auquel s’ajoute souvent un objectif énergétique pour optimiser la capacité de récupération de la ligne. Plus récemment, des projets d’implémentation de systèmes CBTC sur des lignes ferroviaires suburbaines ont vu le jour dans de grandes villes européennes. Ainsi, en Ile-de-France, SNCF doit mettre en service à partir de 2020 le système CBTC appelé « NExTEO » sur la ligne Eole (prolongement de la ligne E du RER). Le déploiement d’un système CBTC sur une ligne ferroviaire suburbaine nécessite une réelle adaptation de ses fonctions et de ses automatismes. En particulier, les fonctions de supervision et de régulation doivent être adaptées aux modes d’exploitation ferroviaires en zone dense : réseau complexe et ouvert à des circulations externes à la ligne; objectif d’exploitation cherchant à privilégier la ponctualité plutôt que l’intervalle, sachant qu’en zone dense, cet objectif trouve vite ses limites face aux perturbations très fréquentes, et au volume de passagers transporté. Face au problème de régulation, la recherche opérationnelle a produit un certain nombre de méthodes permettant de répondre aux perturbations. Ces méthodes ont été conçues en adéquation avec les objectifs et les contraintes du système réel. Dans le secteur métro, où les systèmes d’exploitation avancés sont déjà très présents, les méthodes de régulation ont été développées selon des niveaux très fins de modélisation et de commande de la marche des véhicules. Dans le secteur ferroviaire, elles sont généralement développées selon des niveaux de modélisation et de décision plutôt macroscopiques. Le déploiement de systèmes CBTC pour l’exploitation optimisée de lignes ferroviaires suburbaines implique un changement significatif des modes d’exploitation. L’adaptation des fonctions de supervision et régulation demeure de ce fait un objectif majeur. En tirant profit de l’état de l’art et des avancées faites dans les deux secteurs, cette adaptation doit concilier les principes d’exploitation ferroviaire et l’exigence de la zone dense. Elle doit également tenir compte de la complexité fonctionnelle du système CBTC et de ses interactions avec son environnement.
Signaux lumineux latéraux
Les signaux lumineux latéraux sont disposés le long de la voie pour transmettre des informations aux agents de conduite. Ils composent la « signalisation latérale ». La signalisation latérale comporte deux principaux types de signaux : les signaux de sécurité appelés « Carré » et les signaux d’espacement. Un signal Carré permet de protéger les appareils de voie ou certaines parties de voie. Il est positionné en amont de la zone à protéger. Lorsque le signal Carré est « ouvert », le train est autorisé à franchir le signal. Lorsque le Carré est « fermé », le train doit s’arrêter en amont du signal. Pour gérer l’espacement des trains de même sens, les sections de lignes sont divisées en cantons et les signaux d’espacement sont utilisés pour gérer l’accès aux cantons. Le block automatique lumineux est un système de signaux d’espacement largement déployé sur le Réseau Ferré National (voir. 1.1.1.2).
Espacement des trains
Les circulations ferroviaires sont caractérisées par des distances d’arrêt élevées (de l’ordre de 700 m pour un train type Transilien roulant à 120 km/h dans les meilleures conditions de freinage). La distance de visibilité d’un conducteur est plus courte que la distance d’arrêt du train. Il serait inacceptable de faire rouler les trains en marche à vue (vitesse inférieure à 30 km/h pour laquelle la distance d’arrêt est inférieure à la distance de visibilité). L’espacement des trains est donc assuré par la signalisation ferroviaire, sur la base de l’information d’occupation des cantons. En signalisation classique, des installations au sol gèrent la distance entre les trains successifs pour éviter tout risque de rattrapage. Des signaux sont présentés au train, ils indiquent au conducteur la conduite à tenir et assurent qu’il y ait toujours une distance telle que le train puisse s’arrêter en toute sécurité si le train précédent est arrêté. L’espacement basé sur la distance consiste en diviser la voie en cantons (ou blocks) dans chacun desquels n’est admis normalement qu’un seul train. Chaque canton comporte un signal d’arrêt lorsque le canton est occupé. Dans certains cas, la pénétration d’une circulation dans un canton occupé est autorisée en obéissant à quelques règles de précautions spécifiques. On parle alors de cantonnement permissif. La gestion de ces blocks est réalisée de façon automatique sur les installations de signalisation modernes. Ces dernières permettent de commander automatiquement les signaux de protection des cantons suite à la détection des trains et de leur intégrité. En France, de nombreuses lignes sont équipées de blocks automatiques lumineux (BAL) permissifs à cantons courts (de l’ordre de 1,5 km, au maximum 3 km). Sur la majorité de ces lignes, le BAL est au minimum à trois indications (voir Figure 3) : le sémaphore (rouge) lorsque le canton est occupé, l’avertissement (jaune) lorsque le canton est libre mais que le suivant affiche un sémaphore, et la voie libre (vert) lorsque le canton est libre et que le canton suivant est à voie libre ou à l’avertissement. Lorsque le sémaphore (rouge) est présenté, le train doit marquer un arrêt avant de pouvoir reprendre sa marche à vitesse réduite, en « marche à vue » (30 km/h). Pour les lignes où la vitesse est supérieure à 160 km/h, un feu clignotant annonçant un avertissement au prochain signal est ajouté aux indications présentées.
Séquence d’établissement d’un itinéraire
Une circulation peut emprunter un itinéraire seulement si celui-ci est établi. La séquence d’établissement d’un itinéraire peut être décrite en cinq étapes :
Commande de l’itinéraire : L’itinéraire est commandé automatiquement lorsque la circulation occupe la zone de déclenchement correspondante.
Préparation de l’itinéraire : Les appareils de voies sont commandés vers la position requise par l’itinéraire commandé. Les aiguilles se positionnent en conséquence. L’itinéraire est alors « préparé ».
Formation de l’itinéraire : Le contrôle des appareils de voies est valide, les enclenchements de l’itinéraire sont activés. L’itinéraire est alors « formé ».
Établissement de l’itinéraire : L’itinéraire peut être ouvert dans le respect des conditions de sécurité. L’ouverture du signal de protection (Carré origine) de l’itinéraire est commandée, le signal devient permissif. L’itinéraire est alors « établi ».
Destruction de l’itinéraire : Un itinéraire peut être commandé en « tracé permanent ». Dans ce cas, il se maintiendra une fois le train passé et ne sera détruit que lorsque le train aura complètement quitté les zones composant l’itinéraire. Un itinéraire peut également être commandé en « destruction automatique ». Dans ce cas, l’itinéraire sera détruit par le passage du train sur une pédale de destruction automatique, généralement située au début de l’itinéraire. Lorsque l’itinéraire est « détruit », il est possible de commander un itinéraire incompatible avec celui-ci. La destruction d’un itinéraire autorise uniquement la commande d’un nouvel itinéraire, les étapes suivantes (préparation, formation, établissement) permettant d’établir le nouvel itinéraire ne seront déclenchées que lorsque les conditions correspondantes sont vérifiées. En d’autres termes, la destruction d’un itinéraire seule ne permet pas de libérer les enclenchements. Ces derniers seront libérés au plus tôt, dans le respect des conditions de sécurité. Une fois l’itinéraire détruit, la libération des CdV de transit permettra de déplacer les aiguilles (selon le principe du transit souple défini dans la suite) ce qui permettra de préparer, former, et établir le nouvel itinéraire. Il est aussi possible de commander la destruction d’itinéraire sans que celui-ci ait été parcouru. On parle alors de destruction manuelle.
Conduite automatique des trains (Automatic Train Operation ou « ATO »)
La conduite automatique (ATO) est un sous-système non sécuritaire opérant le train en pilotage automatique. Les fonctions du module ATO sont réparties entre des équipements au sol et des équipements embarqués. La conduite automatique regroupe l’ensemble des fonctions qui permettent de se substituer totalement ou partiellement à l’agent de conduite : la commande de traction, la commande de freinage, l’asservissement de la conduite, la commande des portes, la commande de la destination, la commande du temps de stationnement. Ces fonctions, non sécuritaires, ne peuvent être mises en œuvre que dans l’enveloppe de sécurité définie par la protection automatique. Par ailleurs, la conduite automatique peut proposer différents modes de conduite en fonction des conditions d’exploitation.
Supervision automatiques des trains (Automatic Train Supervision ou « ATS »)
La supervision automatique (ATS) est un système non-sécuritaire qui orchestre les opérations d’exploitation. Le module ATS peut être absent du système CBTC selon les projets. Lorsque la supervision automatique est présente, ses fonctions sont portées par des équipements au sol uniquement. Grâce à la connaissance globale de la localisation des trains, l’ATS adresse des commandes de régulation pour ajuster les services et les performances du système de transport en temps réel. L’ATS prend donc des décisions en temps réel pour répondre aux objectifs d’exploitation en situation nominale, ou pour résorber une situation perturbée.
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Table des matières
Introduction
Chapitre 1 Système ferroviaire
1.1 Signalisation ferroviaire
1.1.1 Signalisation ferroviaire classique
1.1.2 Système « CBTC »
1.2 Exploitation ferroviaire
1.2.1 Généralités
1.2.2 Exploitation en zone dense
1.2.3 Exploitation d’une ligne ferroviaire équipée d’un automatisme CBTC
1.3 Cas d’étude : le projet NExTEO
1.3.1 Exploitation « en doigts de la main »
1.3.2 Modes de conduite des trains
1.3.3 Supervision et régulation du trafic
1.4 Conclusion
Chapitre 2 Description d’un problème de régulation
2.1 Modélisation du trafic ferroviaire
2.1.1 Représentation de l’infrastructure
2.1.2 Mouvement des circulations
2.1.3 Contrôle, commande, supervision
2.2 Formulation d’un problème de régulation
2.2.1 Données du plan de transport
2.2.2 Modélisation par graphe des alternatives
2.2.3 Modélisation mathématique du problème de régulation
2.3 Résolution d’un programme mathématique
2.3.1 Résolution exacte ou approchée
2.3.2 Méthodes heuristiques pour l’optimisation combinatoire
2.3.3 Optimisation multi-objectif
2.4 Stratégie de régulation sur un réseau ferroviaire
2.4.1 Introduction
2.4.2 Organisation de la décision
2.4.3 Stratégies de régulation
2.5 Conclusion
Chapitre 3 Supervision d’une ligne suburbaine équipée d’un automatisme CBTC
3.1 Architecture de la supervision
3.2 Fonctions de la supervision
3.2.1 Suivi des circulations
3.2.2 Mise en œuvre du plan de transport
3.2.3 Gestion des gares et des garages
3.2.4 Calcul des itinéraires
3.2.5 Régulation des trains automatiques
3.3 Formulation du problème de régulation
3.3.1 Notations
3.3.2 Variables
3.3.3 Données
3.3.4 Contraintes
3.3.5 Indicateurs
3.3.6 Synthèse du problème
3.4 Résolution du problème de régulation
3.4.1 Choix de la méthode
3.4.2 Résolution par algorithme génétique
3.5 Conclusion
Chapitre 4 Simulateur d’exploitation SIMONE
4.1 Architecture du simulateur
4.2 Acteurs du système ferroviaire simulé
4.2.1 Agent de conduite
4.2.2 Voie
4.2.3 Train
4.2.4 Système CBTC
4.2.5 Signalisation classique
4.3 Simulation et validation
4.3.1 Plan de voie
4.3.2 IHM
4.3.3 Scénarios
4.3.4 Injection de perturbation
4.3.5 Exemples
4.4 Conclusion
Chapitre 5 Cas d’étude : évaluation de performance sur le périmètre NExTEO
5.1 Système simulé
5.1.1 Topologie
5.1.2 Plan de transport
5.1.3 Perturbations
5.1.4 Fonctions de régulation
5.1.5 Paramétrage
5.2 Evaluation de la régulation
5.2.1 Performance face à des perturbations ordinaires
5.2.2 Influence de l’horizon de commande
5.2.3 Reproductibilité des résultats
5.2.4 Temps de calcul
5.2.5 Synthèse
Conclusion générale et perspectives
Travaux cité
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