Manière dont la question de départ est survenue
En novembre 2013, l’une d’entre nous a participé à la journée donnée dans le cadre des 100 ans de la Société Suisse de Chirurgie, dont les sources du DVD se trouvent dans nos références (annexe 1) qui a eu lieu sur les sites hospitaliers de Neuchâtel et de la Chaux-de-Fonds. A cette occasion, plusieurs conférences ont été données autour du thème de la chirurgie. La présentation du chirurgien Brügger (2013), intitulée « ERAS : un avantage pour le bénéficiaire d’abord », a particulièrement attiré l’attention et éveillé l’intérêt de la concernée. Ce concept novateur lui a en effet paru prometteur. ERAS est l’abréviation de « Enhanced Recovery After Surgery » ; en français, ce terme peut se traduire par « la réhabilitation rapide du patient après une intervention chirurgicale ». Ce concept de « récupération assistée après une intervention chirurgicale » ou de « chirurgie de la voie rapide » a d’abord été décrit par le chirurgien et scientifique danois Henrik Kehlet dans le début des années 1990 (dans Lyon, Payne, & MacKay, 2012). Ce dernier a développé cette approche sur la base de plusieurs mesures standardisées basées sur le meilleur niveau de preuve possible touchant essentiellement aux soins pré-, péri- et postopératoires.
Son but était alors de prévenir les complications et de favoriser une convalescence rapide tout en minimisant un maximum l’exposition de l’organisme au stress. Dans cette dynamique, Foss (2011) priorise la communication, l’information et l’éducation non seulement aux patients mais également aux professionnels de la santé. Selon lui, si les patients, leurs proches ou le personnel soignant ignorent de quoi il s’agit, leur participation au processus de guérison reste limitée. Afin d’offrir des soins de qualité basés sur des données probantes, le fondateur de ce programme a passé en revue chaque élément composant la prise en charge d’un patient dans le but de l’évaluer et de l’améliorer. Cela peut revenir, dans certains cas, à bouleverser complètement les protocoles. L’exemple type est le maintien de la fonction gastro-intestinale préopératoire, approuvé par le programme ERAS. Effectivement, les dernières découvertes scientifiques sur le sujet préconisent l’ingestion des liquides jusqu’à deux heures avant l’opération, et des solides jusqu’à six heures avant car ils contrecarrent une insulinorésistance et un catabolisme postopératoires. Dans ce sens, des solutions d’hydrates de carbone sont administrées la veille de l’intervention chirurgicale. Les liquides peuvent être proposés deux après l’opération, et ce sans restriction (Burch, 2013).
L’alimentation est, elle aussi, reprise plus rapidement, mais cela dépend de l’intervention chirurgicale et des symptômes que manifeste la personne. Dans le même ordre d’idée, les alimentations entérales, la surcharge volumique intraveineuse et l’administration de laxatifs en postopératoire précoce sont à éviter (Brandstrup, Tonnesen, Beier-Holgersen et al., 2003; Lobo, Bostock, Neal, Perkins, Rowlands, & Allison, 2002; dans Lassen, Soop, Nygren, Cox, Hendry, Spies, Von Meyenfeldt, Fearon, Revhaug, Norderval, Ljungqvist, Lobo, & Dejong, 2009) Toujours sur la base de données probante, de nombreuses recherches ont conclu que le lavement intestinal préopératoire est à l’origine d’une augmentation du nombre d’infections de plaies et des insuffisances anastomotiques (Contant, Hop, Sant et al., 2007; Jung, Pählman, Nyström, & Nilsson, 2007; Slim, Vicaut, Panis, & Chipponi, 2004; Wille-Jørgensen, Guenaga, Castro, & Matos, 2003; Platell & Hall, 1998; dans Lassen et al., 2009) Quant aux pertes hydro-électrolytiques préopératoires, les données probantes préconiseraient de remplacer uniquement les pertes individuelles réelles afin de maintenir un poids stable et éviter ainsi une surcharge liquidienne postopératoire, qui s’accompagne d’un risque engageant le pronostic vital (Burch, 2013). Un autre moyen d’épargner l’organisme est de minimiser l’utilisation de drains (Conn, Rotstein, Greco, Tricco, Perrier, Soobiah, & Moloney, 2012) et de favoriser les interventions chirurgicales par laparoscopie, communément appelée la chirurgie des petits trous. Cette dernière permet de diminuer l’agression faite au corps, et ainsi d’abaisser significativement la morbidité (Lyon et al., 2012).
Afin de favoriser une offre en soin de qualité, le contrôle actif de la douleur est primordial, selon Arsalani-Zadeh, ELFadl, Yassin, & MacFie (2011). Cela permet d’obtenir des effets se potentialisant grâce à leurs différentes localisations ou selon leurs modes d’actions, dans le but de diminuer les éventuels effets indésirables.
Pertinence de la question de départ pour les soins infirmiers
Ayant fait ses preuves, ce programme de réhabilitation tend à se développer pour s’étendre à tout le territoire suisse. De ce fait, il est probable que nous, futures professionnelles de la santé, soyons amenées à travailler avec ce programme dans un avenir plus ou moins proche. Concrètement, comme le montre l’article de Foss (2011), l’instauration de ce programme nécessite plusieurs modifications des protocoles chirurgicaux. Les changements organisationnels qui en découlent sont relativement importants. Renoncer aux anciennes routines qui ne sont actuellement plus probantes demande beaucoup d’investissement. L’équipe au centre du projet d’implantation du programme, dans un centre hospitalier doit bénéficier de beaucoup de temps pour la planification et la préparation des bouleversements que cela implique. Ce fait peut être un frein considérable à son application. La priorité consiste donc à laisser à l’équipe pilote une marge de manoeuvre suffisante au niveau temporel et organisationnel, et de lui apporter suffisamment de soutien. Afin d’aborder cette étape d’un regard professionnel, nous nous sommes appuyées sur le référentiel de compétences infirmier (annexe 3).
Le rôle d’expert en soins infirmiers appelle les infirmiers-ères à assurer la responsabilité des soins préventifs, thérapeutiques et de réadaptation, tout en évaluant les besoins des individus. De même, il consiste à assurer la continuité des soins dans l’intérêt du patient et de ses proches, tout en en faisant référence à des données probantes. La pertinence de notre question de départ est soulignée par le fait qu’il relève de la responsabilité du soignant d’évaluer les besoins personnels des patients et de leurs proches, afin d’y adapter une offre thérapeutique la plus individuelle et adaptée possible tout en tenant compte de leurs compétences et de leur savoir. De plus, le programme étant récent, il est continuellement mis à jour par de nouvelles données probantes issues de la recherche.
Le rôle de communicateur, quant à lui, met l’accent sur l’importance d’établir des relations professionnelles de confiance avec les patients et leurs proches. Pour ce faire, il est nécessaire d’adapter la communication à la situation, en favorisant une prise de décision partagée et en mettant en commun les savoirs et les expériences du soigné et de ses proches avec ceux des soignants. De plus, il incombe aux professionnels de la santé d’assurer la traçabilité de la démarche de soins. Dans cette optique, le programme ERAS se base sur une relation de type partenariat entre le patient et le soignant. Tous deux sont considérés comme experts dans leurs domaines. De même, étant donné que le retour à domicile est plus rapide qu’habituellement, il est particulièrement essentiel de travailler non seulement auprès du bénéficiaire de soins mais également auprès de ses proches afin de garantir la sécurité et le bien-être de chacun. A ce niveau-là, il est aisément compréhensible que l’éducation thérapeutique doit être approfondie, complète, compréhensive et accessible afin de rassurer les patients et leurs proches, de répondre à leurs éventuelles questions, d’être à leur écoute et ce, dans le but final d’améliorer la qualité des soins ainsi que leur qualité de vie.
En résumé, le partage du savoir est primordial et englobe la posture relationnelle empreinte d’empathie, de respect, de patience, de tolérance, de compréhension et de congruence que les soignants doivent adopter, tout en se basant sur le profil et le rythme d’apprentissage du malade.
Les compétences du rôle de collaborateur mettent en évidence l’importance de s’engager dans une équipe interdisciplinaire en développant son leadership afin de défendre des soins individualisés. Cette fonction est particulièrement centrale dans la prise en charge du patient ERAS car le professionnel infirmier fait le lien avec les autres intervenants et permet d’assurer un déroulement logique ainsi qu’une continuité dans les soins.
Le professionnel infirmier a donc un rôle pivot dans la coordination des diverses interventions. ERAS est un protocole qui a été construit, avec l’ensemble des professionnels présents, au chevet du patient lors de son séjour en milieu hospitalier : les chirurgiens, les anesthésistes, les spécialistes en soins intensifs, les diététiciens, les physiothérapeutes, et ainsi de suite. Le professionnel infirmier est donc appelé à coordonner le tout afin d’assurer une prise en charge la plus holistique possible.
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Table des matières
Résumé
Remerciements
CHAPITRE 1 : INTRODUCTION
1. Nature du travail réalisé
2. Plan du travail de Bachelor
CHAPITRE 2 : PROBLÉMATIQUE
1. Manière dont la question de départ est survenue
2. Pertinence de la question de départ pour les soins infirmiers
a) Liens entre la question et les concepts du métaparadigme infirmier
I. L’Individu
II. La Santé
III. L’Environnement
IV. Les Soins infirmiers
b) Liens entre la question et les modes de savoirs infirmiers
A. Le savoir empirique
B. Le savoir esthétique
C. Le savoir personnel
D. Le savoir éthique
3. Revue exploratoire de la littérature
4. Les concepts retenus comme pertinents
5. Pertinence de la problématique pour la pratique
CHAPITRE 3 : CONCEPTS ET CHAMPS DISCIPLINAIRES INFIRMIERS
6. Définition des concepts
7. Cadre théorique
CHAPITRE 4 : MÉTHODE
8. Méthode PICOT
9. Question de recherche
10. Critères de sélection de articles
11. Tableau descripteur
12. Stratégie d’articles retenus
13. Analyse des articles
CHAPITRE 5 : SYNTHÈSE DES RESULTATS ET DISCUSSION
14. Synthèse des résultats des articles
15. Développement des résultats en lien avec la question PICOT
16. Perspectives et propositions pour la pratique
CHAPITRE 6 : CONCLUSION
17. Apport du Travail de Bachelor
18. Limites
19. Perspectives pour la recherche
CHAPITRE 7 : RÉFÉRENCES
CHAPITRE 8 : ANNEXES
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