L’identification des sources de salinité et à l’évaluation du régime d’écoulement de la nappe du Saloum

Dans beaucoup de régions arides et semi-arides, la présence d’eaux salées dans les nappes côtières et continentales est un phénomène commun qui peut souvent endommager de façon irréversible le devenir de ces ressources. Elle devient un facteur contraignant dans la gestion et l’utilisation des ressources en eau dans les centres urbains, mais également pour l’agriculture. Le problème est particulièrement aigu au niveau des régions côtières à forte densité de population, où aux effets sur la détérioration de la qualité des eaux par surexploitation et intrusion marine s’ajoute le plus souvent une pollution anthropique.

Les régions côtières du Sénégal à l’image de beaucoup de pays côtiers sont des zones d’une importance économique et environnementale capitale ; elles abritent en effet de grands centres urbains et des écosystèmes divers suivant ces 700 Km de littoral. Ces régions côtières à l’heure actuelle représentent plus de 60 % de la population, 80 % de l’activité industrielle et une part très importante de l’activité économique tels que la pêche, le tourisme, l’agriculture etc.. Inhérente au développement de l’activité économique dans ces zones, la demande en eau douce est de plus en plus forte. Comme conséquences, les différentes nappes côtières ont montré les signes d’une surexploitation et/ou les effets d’une pollution anthropique (urbaine, industrielle et agricole). C’est le cas des nappes qui alimentent la région de Dakar depuis la tête de la presqu’île (Nappe infra basaltique, Nappe de Thiaroye, Nappe du système du Horst de Ndiass) jusqu’au Nord (Nappe du Littoral Nord). Ces systèmes présentent aussi bien les effets induits par surexploitation et/ou par déficit de recharge (rupture d’équilibre se traduisant par une baisse continue du niveau des nappes et/ou une intrusion saline) (Faye et al., 1997, 1998 et 2001) mais également les effets anthropiques par l’occupation des sols (pollution urbaine et agricole) (Cissé Faye et al., 2000, 2001 et 2004).

La salinisation des eaux est particulièrement aigue dans les nappes au niveau des zones estuariennes et deltaïques du Saloum au centre du pays, de la Casamance au sud et de l’embouchure du fleuve Sénégal au nord. Ces zones qui sont communément désignées sous le terme d’unités à eaux salées dans les différentes cartes hydrogéologiques du Sénégal, présentent une salinisation plus complexe de par son ampleur. En effet, les remontées d’eau marine dans ces systèmes fluviaux peuvent atteindre des dizaines de kilomètres à l’intérieur des terres contaminant ainsi les nappes superficielles en plus de l’intrusion saline qui se manifeste sur la frange côtière de ces systèmes.

CADRE CONCEPTUEL – ORIENTATION – MATERIELS ET METHODES 

Cadre conceptuel et physique 

Une nappe côtière soumise à un régime permanent généralement se décharge vers l’océan repoussant ainsi l’intrusion saline vers l’océan. La position de l’interface eau douce/eau salée dépend surtout de la différence de densité et de charge hydraulique des deux systèmes (Custodio et Llamas, 1983).

Z = (ρd/ρs-ρd) x h Badon Ghyben (1898) – Herzberg (1901) .

z : profondeur de l’interface eau douce/eau salée
h: charge hydraulique au niveau de l’aquifère
ρd : densité de l’eau douce de la nappe = 1g/cm3
ρs : densité de l’eau de mer = 1.025 g/cm3

Cette relation simplifiée donne z = 40 x h
En démontrant cette équation, les auteurs ont assumé que :
• Les conditions hydrostatiques existent;
• Le gradient hydraulique vertical est nul ;
• L’interface est considérée comme une limite étanche i.e. pas de zone de transition.

En effet, cette dernière assomption ne reflète pas la réalité puisque une zone de transition ou de mélange se matérialise entre les deux masses d’eau et où les phénomènes de diffusion moléculaire et de dispersion sont prépondérants.

Il est bien établi que cet équilibre est très fragile et que les prélèvements par exploitation d’une nappe libre côtière modifient les conditions de décharge de la nappe et par conséquent perturbent l’équilibre dynamique entre l’eau douce et l’eau salée. Il en résulte ainsi un écoulement inverse de la nappe et la possibilité d’un mouvement latérale de l’eau salée vers la nappe. De plus, dans les conditions naturelles au niveau des régions à relief très bas comme les estuaires, les charges hydrauliques dans les nappes sont généralement proches de zéro ou même négatives, créant ainsi une inversion de l’écoulement naturel. L’eau salée de la mer par différence de densité s’écoule ainsi vers la nappe avec une zone de transition beaucoup plus importante. Ces phénomènes sont particulièrement prépondérants dans le système du Saloum qui est une nappe libre côtière en contact aussi bien avec l’océan et les eaux hyper salées du fleuve Saloum.

Le système estuarien du Saloum (Figure 2) est constitué de trois bras principaux : le Saloum au nord, le Bandiala au sud et le Diomboss au centre. La partie aval de ce système en forme de delta se caractérise par la présence d’un réseau dense de chenaux de marée « bolons » qui interconnectent les différents bras et délimitent des îles. Cette zone comporte également :
• Les vasières à mangroves sur les rives des bras du fleuve et « bolons » colonisées par les palétuviers (mangrove haute et mangrove basse) correspondant respectivement au Rhizophora racemosa/R. harissonic, et R. mangle et Avicennia africana ;
• Les tannes qui se composent de tannes nus à sols sulfatés acides et à efflorescences salines et de tannes herbus recouverts de graminées et de cypéracées ;
• Les cordons dunaires suivant des alignements NNO-SSE conformes à la direction de la dérive littorale qui les a édifié .

Cette configuration en réseau complexe sur une superficie de 2250 Km2 soumise à un régime de marais montre l’ampleur et la complexité de l’impact que ces zones salées peuvent avoir sur la nappe du Saloum. Par conséquent au delà des zones de contact eau douce/eau salée sur la frange littorale, les sources de salinisation à partir des zones de « bolons », fleuve, vasières et tannes peuvent résulter de deux types de contact :
• direct au niveau des « bolons » et fleuve où l’eau de surface salée est en contact hydraulique avec la nappe ;
• indirect au niveau du fleuve, « bolons », vasières et tannes où l’eau de surface salée percole à travers une zone non saturée pour atteindre la nappe.

Les outils utilisés 

Dans les processus d’intrusion saline au niveau des nappes côtières, la détection et le suivi de la salinité sont deux aspects très importants qui sont essentiels pour une gestion durable des ressources en eau. Ils peuvent s’opérer par simple mesure de la conductivité électrique (CE) des eaux ; paramètre qui exprime à la fois la minéralisation et la salinité des eaux. Par minéralisation, j’entends ici les processus géochimiques naturels eau/encaissant qui permettent aux eaux des nappes d’acquérir des ions suite aux réactions d’altération, d’hydrolyse, de dissolution, d’oxydo-réduction, de précipitation, d’échange de bases, etc.. Donc on voit bien ici que ce paramètre physico-chimique bien que nécessaire n’est pas suffisant pour l’investigation de l’intrusion saline dans les nappes; il peut fournir des informations sur la distribution spatiale et les variations temporelles de la salinité des eaux, mais par contre, ne peut permettre une identification des sources de salinité ni des processus géochimiques qui accompagnent l’intrusion.

Les premières études des processus d’intrusion saline se sont focalisées sur la chimie des ions majeurs, et plus spécifiquement sur les ions chlorure (Cl) et sodium (Na). L’utilisation de ces deux éléments se justifie bien puisqu’ils représentent les constituants majeurs de l’eau de mer et par conséquent ont longtemps été considérés comme de bons marqueurs de l’intrusion saline dans les nappes côtières (Back, 1966 ; Howard et Lloyd, 1983 ; Mercado, 1985 ; Tellam et Lloyd, 1986). Cependant, l’allure de dilution ou la droite de mélange idéal ou parfait entre les deux masses d’eau qui sont les pôles « eau douce » et « eau salée » est souvent modifiée par l’apport ou le déficit de solutés résultant des nombreuses réactions géochimiques qui accompagnent ou qui se déroulent après que l’intrusion ait lieu. Par exemple, il a été observé dans les nappes à réservoir carbonaté que le mélange eau douce/eau salée conduisait à une dissolution significative de carbonates (Smart et al., 1988).

De même, dans les nappes à réservoir détritique, de nombreuses réactions géochimiques telles que les réactions de dissolution/précipitation et les réactions d’échange de bases (Appelo, 1996) ont été identifiées. C’est la raison pour laquelle, leur « valeur » en tant qu’outil géochimique est limitée par référence à certaines investigations, mais toutefois ces ions demeurent toujours très utiles du fait qu’ils peuvent s’obtenir facilement à partir de simples analyses de routine. Les éléments mineurs tels que le brome (Br), le strontium (Sr) et le bore (B) sont de très bons marqueurs des processus de mélange eau douce/eau salée. Lorsqu’ils sont utilisés en association avec le chlore et le sodium, ils peuvent permettre non seulement d’identifier la signature de l’intrusion saline, mais également d’évaluer les différentes sources de salinité, le degré de mélange et les processus géochimiques associés.

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Table des matières

Introduction
Organisation du document
Chapitre 1: CADRE CONCEPTUEL – ORIENTATION – MATERIELS ET METHODES
1. Cadre conceptuel et physique
2. Orientation de l’étude
3. Les outils utilisés
3.1. Hydrochimie des ions majeurs
3.1.1. L’ion chlorure
3.1.2. Les ions majeurs : Sodium(Na), Potassium(K), Calcium(Ca), Magnésium(Mg)
3.2. Hydrochimie des ions mineurs
3.2.1. L’ion Bromure (Br)
3.2.2. Le Strontium (Sr)
3.2.3. Le Bore (B)
3.3. Les isotopes
4. Matériels et Méthodes
4.1. Campagnes et Réseaux de mesures
4.2. Analyses chimiques
4.3. Analyses des isotopes
Chapitre 2 : CADRE PHYSIQUE : GEOGRAPHIE PHYSIQUE – GEOLOGIE – HYDROGEOLOGIE
1. Situation géographique et conditions climatiques
1.1.Situation géographique et démographique
1.2.Facteurs climatiques
1.2.1. Précipitations
1.2.2. Température- Humidité relative- Insolation
1.2.3. Vents
1.2.4. Evapotranspiration
2. Géomorphologie – hydrologie –Végétation
2.1.Géomorphologie et Morphopédologie
2.2.Hydrologie
2.3.Végétation et cultures
3. Géologie
3.1.Le CT, sa position dans la géologie du bassin sédimentaire sénégalais
3.2. Stratigraphie des formations du CT dans la zone d’étude
3.3. Minéralogie des sédiments du CT
4. Hydrogéologie
4.1. Contexte hydrogéologique à l’échelle du bassin
4.2. Géométrie de l’aquifère CT
4.2.1. Nature et morphologie du substratum
4.2.2. Puissance de la nappe du CT
4.3. Profondeur de la nappe
4.4. Piézomètrie de la nappe
4.5. Les ouvrages de captage
4.6. Recharge
4.6.1. Méthode du bilan hydrique
4.6.2. Méthode géochimique
4.6.3. Méthode de fluctuation de la nappe
5. Fonctionnement hydrodynamique du système par étude de modèle
5.1.Introduction
5.2.Modèle conceptuel, conditions aux limites, maillage et données d’entrée
5.3.Calibration et validation du modèle
5.4.Interprétation en terme de bilan d’échange et de flux d’écoulement
Chapitre 3 : HYDROGEOCHIMIE DES IONS MAJEURS
1. Paramètres physico- chimiques
1.1.pH
1.2. Température
1.3. Conductivité électrique
2. Hydrogéochimie des ions majeurs
2.1. Statistique des éléments majeurs
2.2. Classification des eaux de la nappe
2.3. Processus géochimiques identifiés
2.4. Cas particulier des eaux salées
Chapitre 4 : HYDROGEOCHIMIE DES IONS MINEURS
1. Bromure
2. Strontium
3. Bore
4. Modèles binaires de mélange
4.1.Principe du modèle
4.2.Application de la méthode aux eaux de la nappe du Saloum
4.2.1. Modèle Na vs. Cl et Ca vs. Cl
4.2.2. Modèle B vs. Cl
Conclusion

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