L’hypertension artérielle (HTA) représente la première cause de morbidité et de mortalité périnatales. Tandis que l’HTA gravidique apparaît au 3ème trimestre. C’est l’insuffisance placentaire qui est responsable de l’HTA. Une HTA est constatée dans 10 à 15 % des grossesses. L’HTA essentielle bien contrôlée est une affection bénigne (1). L’apparition d’une pré-éclampsie est constatée chez 15 à 20 % des femmes enceintes hypertendues, et met en jeu le pronostic maternel et fœtal. La survenue au cours de la grossesse de l’éclampsie, complication majeure de la pré-éclampsie encore appelée toxémie gravidique, est une situation obstétricale grave et responsable d’une mortalité et morbidité materno-fœtale importante de l’ordre de 6 à 10 % dans les pays en voie de développement au cours des grossesses mal ou peu suivies (2). Certaines femmes pré-éclamptiques sont plus à risque que d’autres de faire une crise d’éclampsie.
REVUE DE LA LITTERATURE
Définition et classification
L’hypertension artérielle de la grossesse
L’HTA durant la grossesse est définie par une pression artérielle systolique (PAS) ≥ 140 mm Hg et/ou une pression artérielle diastolique (PAD) ≥ 90 mm Hg sur 2 mesures espacées de 6 heures.
Hypertension artérielle gravidique (HTAG)
Toute HTA apparue après 20 SA chez une femme jusque là normotendue. On en distingue 2 types :
– Pré-éclampsie
– HTA transitoire ou gestationnelle: HTA apparue après 20 SA sans protéinurie.
HTA chronique
HTA antérieure à la grossesse, mais parfois méconnue. La TA qui diminue en début de grossesse masque parfois une HTA chronique jusqu’alors méconnue.
Une pré-éclampsie peut parfois se surajouter à une HTA chronique lorsqu’une protéinurie survient après 20 SA chez une HTA chronique.
La pré-éclampsie
La pré-éclampsie est caractérisée par une hypertension artérielle gravidique associée à une protéinurie supérieure à 300mg/24H apparue après 20 SA et une rétention hydrique responsable d’œdèmes .
L’éclampsie
L’éclampsie est une complication sérieuse de la grossesse, caractérisée par la survenue d’accès convulsifs associés à des signes de pré-éclampsie (albuminurie, hypertension et œdèmes). En général, elle se produit au terme de la pré-éclampsie.
Historique
La pré-éclampsie passe pour être la maladie des théories (5). Cette assertion souligne l’absence de progrès déterminant dans la compréhension de l’origine de cette affection, bien caractéristique de son histoire. Les observations de convulsions survenant pendant la grossesse et se résolvant avec la délivrance faites par Celsus un siècle avant Jésus-Christ, constituent probablement la première description du syndrome (6). Le terme éclampsie est ainsi désigné par référence au mot grec qui désigne la foudre et reflète l’émergence apparemment soudaine de l’affection. Pendant presque 2000 ans, l’éclampsie était considérée comme des convulsions propres à la grossesse. Ce n’est qu’au milieu du XIXème siècle que l’analogie entre la jeune femme éclamptique bouffie d’œdèmes et l’hydropique souffrant du mal de Bright (glomérulonéphrite aiguë) a poussé les cliniciens à rechercher la présence d’une protéinurie chez les femmes éclamptiques, à l’instar de la maladie de Bright. L’albuminurie étant présente chez la plupart des femmes qui avaient convulsé, on a reconnu finalement que la protéinurie précédait les convulsions. La mesure de la pression artérielle passant dans la routine au début du XXème siècle, la précession de l’HTA sur les convulsions fut également identifiée chez les femmes éclamptiques. La coexistence de ces symptômes et des œdèmes fut dénommée pré-éclampsie. Il devint vite évident qu’une HTAG ou une protéinurie constituaient des marqueurs du risque de mort fœtale et d’une situation maternelle de morbidité sévère et de décès même en l’absence de convulsions. C’est ainsi qu’HTA et protéinurie sont devenus des outils irremplaçables pour identifier mères et enfants à risque. Cette primauté a persisté bien que les soignants aient reconnu que la pré-éclampsie soit une affection systémique où une dysfonction de presque tous les organes est possible. Il est évident aujourd’hui que la pré-éclampsie est bien plus qu’une HTA induite par la grossesse .
Epidémiologie
Fréquence
La pré-éclampsie/éclampsie est une cause majeure de mortalité maternelle dans les pays en voie de développement. Dans ces pays, la mortalité maternelle par prééclampsie et/ou éclampsie est de l’ordre de 15 à 80 femmes mortes pour 100 naissances .
Facteurs de risques
Facteurs de risques obstétricaux
La pré-éclampsie est essentiellement une maladie de la première grossesse. Les femmes enceintes pour la première fois courent un risque de développer une prééclampsie presque trois fois supérieur aux femmes dont les grossesses antérieures se sont terminées au-delà du 5e mois .
Le risque est moindre pour les femmes qui ont eu une vie sexuelle la plus durable avec le père de l’enfant .
Les facteurs obstétricaux impliquent des grossesses multiples, la môle hydatiforme et les placentas d’anasarque. Les risques obstétricaux ont en commun l’augmentation de la masse placentaire .
Facteurs de risques médicaux
Les facteurs de risque médicaux incluent l’HTA, le diabète, les collagénoses et les thrombophilies .
Autres facteurs de risques
Les autres facteurs de risque de pré-éclampsie sont métaboliques, comportementaux et ethniques .
Ces facteurs de risque sont indiscutables puisqu’ils ont été démontrés dans des études prospectives. Des études cas-contrôle chez les femmes ayant un antécédent de pré-éclampsie ont tenté d’identifier d’autres facteurs de risque. Avec cette approche, il a été démontré que les femmes ayant un antécédent de pré éclampsie ont plus souvent des anomalies lipidiques (12), une résistance accrue à l’insuline (13), une fonction endothéliale anormale (14), une hyperhomocystéinémie (15) ou une élévation de la testostérone (16) par comparaison aux femmes dont les grossesses antérieures ont été normales. La présence de ces anomalies bien des années après l’accouchement a été extrapolée pour identifier des différences antérieures à la grossesse. Les autres données épidémiologiques pointent un risque accru chez les femmes noires, celles qui sont plus âgées ou obèses (17). Ces facteurs de risque ont des caractéristiques communes. La propension à réduire le flux sanguin placentaire absolu ou relatif est l’une de celle qui a très vite attiré l’attention. Ces faits, combinés aux preuves morphologiques détaillées plus loin d’une diminution du flux sanguin dans le placenta pré-éclamptique, ont suggéré l’hypothèse que la réduction de la perfusion placentaire est le facteur gravidique aboutissant à la prééclampsie .
En conclusion, l’éclampsie hors primiparité est un marqueur de maladie cardiovasculaire sous-jacente. Le travail de Fisher et de ses collaborateurs a étendu cette conclusion à des femmes dont la biopsie rénale avait conclu à une pré-éclampsie .
Physiopathologie
Il faut d’emblée distinguer deux formes cliniques dont la physiopathologie est différente :
– L’HTA est préexistante à la grossesse, mais peut avoir été méconnue. Elle se révèle dès les premiers mois de la grossesse et nécessite un bilan simple et un traitement précoce. Le bilan étiologique sera complété après l’accouchement.
– L’HTA est liée spécifiquement à la grossesse et apparaît au 3ème trimestre. On parle d’HTAG s’il n’y a pas de protéinurie. Si la protéinurie est significative, il s’agit de pré-éclampsie. Le risque de complications, notamment fœtales, est alors nettement plus important. Les facteurs prédictifs d’une pré-éclampsie sont la primiparité, une prééclampsie antérieure, un surpoids, des antécédents familiaux d’HTA.
A partir des données expérimentales, il est possible de conclure que c’est l’insuffisance placentaire qui entraîne l’HTA, et non l’inverse. Il est dû à une ischémie placentaire, dont l’étiologie est multifactorielle (héréditaire, immunologique). La prééclampsie est un syndrome pouvant présenter de nombreuses facettes cliniques .
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE
1. Définition et classification
1.1. L’hypertension artérielle de la grossesse
1.2. L’hypertension artérielle gravidique
1.3. L’hypertension artérielle chronique
1.4. La pré-éclampsie
1.5. L’éclampsie
2. Historique
3. Epidémiologie
3.1. Fréquence
3.2. Facteurs de risques
3.2.1. Facteurs de risques obstétricaux
3.2.2. Facteurs de risques médicaux
3.2.3. Autres facteurs de risques
4. Physiopathologie
5. Manifestations cliniques
5.1. Signes cliniques d’une pré-éclampsie
5.2. Signes cliniques d’une éclampsie
6. Examens complémentaires
6.1 Bilan maternel
6.2. Bilan fœtal
6.2.1. Echographie
i. Biométrie
ii. Score de Manning
iii. Examens doppler
6.2.2. Enregistrement du RCF
7. Complications
7.1. Complications maternelles
7.1.1. Complications maternelles cliniques
i. L’hématome rétro-placentaire
ii. Une insuffisance rénale aigüe gravidique
iii. Une hémorragie cérébrale
7.1.2. Complications maternelles biologiques
i. Une coagulation intra vasculaire disséminée
ii. HELLP syndrome
7.1.3. Autres complications
i. L’œdème aigu du poumon
ii. L’infarctus du myocarde
iii. La rupture sous-capsulaire du foie
7.2 Complications fœtales
7.2.1. Hypotrophie et RCIU
7.2.2. La mort fœtale in utero
7.2.3. La prématurité
8. Prise en charge
8.1. Mesures préventives hygiéno-diététiques
8.1.1. Rôle du tabac
8.1.2. Supplémentation nutritive
8.2. La prévention de la pré-éclampsie
8.3. Traitements antihypertenseurs
8.4. Sulfate de magnésium
8.4.1. Traitement curatif
8.4.2. Traitement préventif
8.5. Traitement préventif par l’aspirine
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE PROPREMENT DITE SUR L’ANALYSE DES FACTEURS DETERMINANTS DANS L’EVOLUTION DE LA PRE-ECLAMPSIE VERS L’ECLAMPSIE
1. Méthodologie
1.1. Cadre de l’étude
1.2. Les ressources humaines
1.3. Les ressources matérielles et logistiques
1.3.1. Les locaux
1.3.2. Matériels et équipements
1.4. Type de l’étude
1.5. Période d’étude
1.6. Populations d’étude
1.7. Critères d’inclusion
1.8. La technique d’échantillonnage
1.8.1. Mode d’échantillonnage
1.8.2. Taille de l’échantillon
1.8.3. Outils de collecte
1.9. Paramètres de l’étude
1.10. Analyse statistique
1.11. Considérations éthiques
2. Résultats
2.1. Etude de l’évolution de la pré-éclampsie vers l’éclampsie selon l’âge
2.2. Etude de l’évolution de la pré-éclampsie vers l’éclampsie selon les antécédents
2.3. Etude de l’évolution de la pré-éclampsie vers l’éclampsie selon la situation matrimoniale
2.4. Etude de l’évolution de la pré-éclampsie vers l’éclampsie selon la parité
2.5. Etude de l’évolution de la pré-éclampsie vers l’éclampsie selon la CPN
TROISIEME PARTIE : DISCUSSION, COMMENTAIRES ET SUGGESTIONS
1. Discussion et commentaires
1.1. L’évolution selon l’âge
1.2. L’évolution selon les antécédents
1.3. L’évolution selon la situation matrimoniale
1.4. L’évolution selon la parité
1.5. L’évolution selon la CPN
2. Suggestions
2.1. La promotion de la santé de la reproduction des adolescents et des jeunes
2.1.1. L’âge de la femme
2.1.2. Le mariage
2.1.3. Communication et environnement
2.2. La promotion de la CPN
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE