L’hyperpigmentation postinflammatoire au cours de l’acne

L’hyperpigmentation post-inflammatoire (HPI) secondaire à l’acné se définit par des macules cutanées hyper chromiques variant du brun au noir affectant le visage et/ou le corps survenant après et parfois au cours de l’acné. Elle résulte d’une surproduction de mélanine suite à une inflammation cutanée [1]. Elle peut se produire sur toutes les peaux mais elle est généralement plus fréquente, visible et persistante chez les phototypes IV à VI selon la classification de Fitzpatrick [1]. Elle a un retentissement sur la qualité de vie des patients en raison des troubles esthétiques, en outre les coûts de la prise en charge et des traitements qui en découlent sont élevés [2]. La qualité de vie est significativement réduite chez les patients acnéiques présentant une HPI comparativement à ceux qui n’ont pas présenté d’hyperpigmentation. L’acné et l’HPI sont associés à l’évitement de vie sociale, à une mauvaise image corporelle et à une réduction de l’estime de soi [3, 4]. Malgré son impact psychologique et sa grande fréquence, les facteurs favorisants et aggravants l’HPI sont encore méconnus. À ce jour, il y a peu d’études concernant ces facteurs. Récemment, l’Asian Acne Board a fait une évaluation de la fréquence et des caractéristiques de l’HPI dans huit pays asiatiques. Dans cette étude 80.2% des patients, consultant pour acné, présentaient une forme légère à modérée avec prédominance féminine et 58,2% avaient une HPI. Plus de la moitié des sujets ont signalé une HPI dont la durée était d’au moins un an ou plus tandis que 22,3% des patients signalaient une durée de 5 ans ou plus. L’excoriation a été fréquemment rapportée par les patients et elle pourrait représenter un facteur de risque modifiable [5, 6]. Dans une autre étude effectuée au Moyen-Orient, la prévalence de l’HPI liée à l’acné était évaluée à 87.2% [6]. À notre connaissance, il n’y a pas d’études concernant spécifiquement l’HPI chez les populations originaires d’Afrique subsaharienne. Or celle-ci est retrouvée comme étant un facteur d’initiation de la dépigmentation cosmétique volontaire (DCV) chez 16 % des femmes consultant pour une complication de cette pratique [7]. En outre, il existe peu de données dans la littérature médicale concernent les facteurs de risque et de sévérité de l’HPI secondaire à l’acné. Pourtant l’acné constitue un motif fréquent de consultation en Afrique subsaharienne ; c’est ainsi qu’une étude publiée en 2013 au Sénégal portant sur le profil épidémio-clinique des affections cutanées à l’institut d’hygiène sociale (IHS) de Dakar sur une période d’un an avait retrouvé que l’acné constituait le cinquième motif de consultation avec une prévalence hospitalière de 8% [8].

DISCUSSION

Apport de ce travail

Il s’agit à notre connaissance, de la première étude au Sénégal à s’intéresser aux facteurs associés à la survenue d’hyperpigmentation post-inflammatoire secondaire à l’acné dans une population noire de l’Afrique subsaharienne. Initialement dans le cadre d’une étude pilote, pour la première fois également, nous avons pu valider le score PAHPI au sein d’une population noire africaine conformément à une étude effectuée aux États-Unis [9].

Les biais 

Premièrement, notre étude a pu être sujette à un biais de selection lié, d’une part, à la présence, dans la population générale, d’autres lésions qui pouvaient être prises à tort pour une acné comme les folliculites à BGN et la rosacée et pour une HPI liée à l’acné, notamment les lésions d’hyperpigmentation de cause non secondaire à l’acné. Nous avons tenu compte de ce facteur dès le début de l’enquête en formant les enquêteurs à bien faire la part cliniquement et nous avons essayé également de minimiser ce biais par une application des critères définissant les cas d’acné et d’HPI secondaire a l’acné. Deuxièmement, est à signaler, notre enquête a été menée dans sept centres avec 11 enquêteurs, ce qui a pu introduire un biais lié à l’enquêteur.

Les limites de l’enquête 

Le chronogramme initialement prévu n’a pu être respecté en raison de la pandémie de la COVID 19.

Profil épidémio-clinique de l’HPI secondaire à l’acné 

Caracteristiques de l’HPI par rapport à l’âge et le sexe

Dans notre étude, nous avons observé que deux tiers (72,4%) des sujets consultants pour acné associée à une HPI étaient âgés entre 19 et 32 ans. L’âge moyen de notre population était de 25±7 ans avec des extrêmes de 12 et 55 ans. Ceci ne constitue pas l’âge de début mais l’âge de consultation qui témoigne d’une consultation tardive avec une durée d’évolution moyenne de 4 ans. Cet âge tardif de consultation chez notre population d’étude est dû probablement à un moindre accès aux soins ou à une tendance à considérer que l’acné n’est pas une priorité de santé. Dans une étude sud-africaine, l’âge moyen des patients était de 28,5 ans [10]. Chez notre population, l’âge moyen de début de l’acné était à 18 ans avec une fréquence importante (60%) à l’adolescence [12-18 ans]. D’autres études ont montré que l’acné touche principalement les adolescents et les adultes jeunes (65-75%), persistant parfois jusqu’à la trentaine [11] avec une prévalence plus élevée dans le groupe d’âge 16-19 ans [12]. Par ailleurs, au Nigeria Adeolu Oladayo akinboro et al dans une étude faite sur l’impact de l’acné et l’HPI sur la qualité de vie et l’estime de soi chez les étudiants nigérians nouvellement admis, recensant 200 participants acnéiques, trouvait que l’âge moyen était de 24±3,3 ans et qu’il n’y avait pas de lien entre l’âge de début d’acné et la présence ou non d’HPI [4]. En outre dans notre étude il existait un lien entre l’âge d’apparition d’acné et la sévérité d’HPI séquellaire, chez les patients chez qui l’acné a commencé entre 19 à 25 ans. Dans une étude multicentrique menée dans sept pays asiatiques sur la fréquence et les caractéristiques de l’HPI secondaire à l’acné. La fréquence était plus élevée chez les filles que chez les garçons avec 68,3% [5]. Les femmes semblaient principalement touchées, avec un rapport homme/femme d’environ 1/5, D’autres études ont documenté un rapport homme/femme d’environ 1/2 [13]. Ces chiffres sont en corrélation avec ceux trouvés dans notre étude, où les femmes étaient les plus touchées, avec un sex ratio homme/femme d’environ 1/8. Ceci pourrait être lié à un biais de sélection mais également à une plus grande tendance à la manipulation des lésions et enfin à une surestimation liée à la dépigmentation cosmétique volontaire (DCV). En ce qui concerne le genre et la gravité d’HPI secondaire à l’acné aucune corrélation n’a été observée.

Caractéristiques de l’HPI selon le type et la localisation de l’acné 

Chez notre population d’étude, la forme mixte (inflammatoire et comédonienne) était prédominante observée dans 43% des cas suivie de l’acné à prédominance retentionnelle chez 32% et enfin l’acné à prédominance inflammatoire chez 25%. Kane A et al. [14] lors d’une étude prospective de l’acné, à propos de 93 cas, menée à Dakar ont trouvé chez ces patients une acné inflammatoire à 76.3% des cas et rétentionnelle chez 63.4%. L’étude statistique des variables relatives aux types d’acné chez notre population a montré qu’il existe une liaison statistiquement significative entre cette dernière et le score de gravité d’acné (GEA). Par contre, la gravité d’HPI n’avait une corrélation statistiquement significative qu’avec l’acné inflammatoire. La présence de ce type d’acné est un facteur aggravant l’HPI. Dans notre étude, la localisation au niveau des joues représentait 91,5% des patients, suivie du front (76,6%), la région mandibulaire (32%) et le menton dans (28,5%) ce qui concorde avec les résultats d’une étude comparative sur l’acné de la femme adulte en France et en Afrique subsaharienne, qui a montré que l’acné de la femme adulte à peau pigmentée est caractérisée par la présence constante de taches pigmentées et l’atteinte prédominante des joues et du front [15]. Dans une autre étude Abad-Casintahan et al [5] menée en Asie en 2016 portant sur 324 patients acnéiques dont 188 ayant une HPI, les auteurs avaient trouvé chez 81,2% des patients une localisation au niveau des joues, suivie de la région mandibulaire (52,2%), du front (48,0%) et des tempes (26,0%). Leurs résultats divergent avec les nôtres ce qui pourraient être lié à la différence de phototype.

Les facteurs de gravité de l’HPI 

Antécédents familiaux d’acné
Il a été montré que le facteur génétique est important dans la présence d’acné [16], ce que notre étude a confirmé, la notion d’antécédents familiaux étant trouvée jusque chez 48,6% des patients acnéiques avec un lien statiquement significatif avec la gravité d’acné (GEA). L’acné est plus sévère chez les personnes avec une histoire familiale d’acné [17]. Dans une étude multicentrique faite en France et en Afrique subsaharienne, plus que deux tiers des patients acnéiques (73%) avaient des antécédents familiaux [15]. Au Nigeria une étude faite par Adeolu Oladayo akinboro et al [4] a trouvé que les patients atteints d’acné avec une HPI faciale avaient eu des antécédents familiaux d’acné (59,3% vs 31,0%, p <0,001) par rapport à ceux présentant de l’acné sans HPI. Dans notre étude, aucune corrélation significative n’a été trouvée entre les antécédents familiaux d’acné et la gravité d’hyperpigmentation séquellaire jugé par le score PAHPI.

GEA et PAHPI
L’échelle de gravité du GEA [18] n’est pas adaptée aux peaux pigmentées car elle n’intègre pas les taches pigmentées ; elle a été validée sur phototype inférieur à IV. Il est donc difficile de juger de la gravité d’une acné sur phototype foncé, où une échelle spécifique serait nécessaire ; néanmoins l’échelle du GEA permet d’apprécier l’importance des lésions retentionnelles et inflammatoires. Dans notre étude, le GEA 3 était observée dans la moitié des cas (50,5%) suivie de GEA 2 chez 32,2%. Dans une étude faite en par Akinboro A, et al au Nigeria, 84% des cas ont été classés GEA 2, 12% comme GEA 3 [4]. Nous avons étudié la relation entre le score GEA et la sévérité d’HPI ou on a trouvé une relation statiquement significative (p<0,005). Plus l’acné est sévère plus on a une HPI importante.

Alimentation et PAHPI
Dans notre étude, nous n’avons pas trouvé de liaison statistiquement significative entre l’alimentation et la sévérité d’HPI jugé par le PAHPI (p=0,838). Par contre un lien à la limite de la significativité a été trouvé entre le score de gravite d’acné (GEA) et le régime alimentaire de type sucré (p=0,042). À ce jour, les preuves les plus convaincantes concernant l’alimentation et la peau est le lien entre l’acné et les glucides. Dans une étude de cohorte portant sur 50 patients atteints d’acné légère à sévère et 36 contrôles sains, des prélèvements sanguins après un jeun de 12 h ont été pratiqué chez les patients acnéiques avaient montré une moyenne d’index glycémique significativement plus élevé (47,42 vs 44,52, p = 0,022) et une charge glycémique (79,04 vs 63,36, p=0,001) par rapport aux témoins [19]. Même si les recherches récentes ont permis d’identifier certains éléments nutritionnels pouvant avoir un impact sur l’acné, les mythes continuent de dominer le débat. Récemment Wang Z et al dans une étude faite sur les bactéries qui colonisent la peau ont trouvé que l’acné inflammatoire est liée à une perte de diversité des phylotypes de Cutibacterium acnes et que ces derniers jouent potentiellement un rôle dans la pigmentation post-inflammatoire des lésions acnéiques. Cutibacterium acnes et Staphylococcus epidermidis modulent de manière différentielle la survie des mélanocytes [20].

Dépigmentation artificielle et PAHPI
Dans notre étude, 42% des femmes utilisaient des produits dépigmentant. Ce chiffre est moins élevé que celui retrouvé lors de l’étude clinique de l’acné de la femme adulte en France et en Afrique sub-saharienne où la dépigmentation volontaire était pratiquée chez 46,1% à 61,4% des femmes originaires de l’Afrique subsaharienne [15]. Chez notre population d’étude un lien statistiquement significatif a été trouvé entre la pratique de dépigmentation qu’elle soit volontaire ou involontaire et l’aggravation d’hyperpigmentation post inflammatoire. Cette corrélation peut être due au fait que la dépigmentation artificielle augmente le contraste entre les taches hyperpigmentaires et la peau avoisinante ce qui augmente le score PAHPI. Les futures études doivent tenter de clarifier de plus ces interactions.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
I- METHODOLOGIE
I-1-Type et période d’étude
I-2-Cadre d’étude
I-3-Population d’étude
I-4-Définitions
I-5-Critères d’inclusion
I-6-Critères de non inclusion
I-7-Déroulement pratique de l’étude
I-8-Aspects éthiques
I-9-Saisie et analyse des données
I-10-Aspects financiers
I-11-Chronogramme
DEUXIEME PARTIE
II-RESULTATS
II-1-Étude descriptive
II-1-1-Profil épidémiologique des personnes enquêtées
II-1-2-Antécédents et terrain
II-1-3-Habitudes et mode de vie
II-1-4-Aspects cliniques
II-1-4-1-Répartition des patients selon le motif de consultation
II-1-4-2-Historique de l’acné
II-1-4-3-Facteurs favorisant les poussées d’acné
II-1-4-4-Types d’acné
II-1-4-5-Gravite d’acné : Score GEA
II-1-4-6-Topographie d’acné
II-1-4-7-Index de l’hyperpigmentation post-inflammatoire secondaire à l’acné
II-1-4-8-Signes associés
II-1-5-Aspects thérapeutiques
II-1-6-Aspects évolutifs
II-2-Étude analytique
II-2-1- Profil sociodémographique et HPI secondaire à l’acné
II-2-2- Habitudes cosmétiques et mode de vie des personnes enquêtées
II-2-3-Profil clinique de la population d’étude
II-2-4-Facteurs de gravité de l’HPI
II-2-5-Prise en charge thérapeutique
III-DISCUSSION
III-1-Apport de ce travail
III-2-Les biais
III-3-Les limites de l’enquête
III-4-Profil épidémio-clinique de l’HPI secondaire à l’acné
III-4-1-Caracteristiques de l’HPI par rapport à l’âge et le sexe
III-4-2-Caractéristiques de l’HPI selon le type et la localisation de l’acné
III-4-3-Les facteurs de gravité de l’HPI
III-4-4-La prise en charge thérapeutique de l’HPI
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES
ANNEXES

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