L’histoire des analgesiques au xix siecle

Depuis les plus anciennes civilisations, la douleur liée aux dents a toujours suscité beaucoup d’intérêt. Toutefois, pendant de nombreux siècles, celle-ci n’a pu être que très peu atténuée. Il a ainsi fallu attendre l’essor de ces dernières décennies pour voir apparaître au cabinet dentaire tous les éléments nécessaires à la réalisation de soins sans douleur (produits anesthésiques performants, matériel innovant…) Aujourd’hui, notre société se révèle confrontée plus à la peur qu’à la douleur, autrement dit : « la peur du dentiste ». Celle-ci toujours ancrée dans les esprits engendre la plupart du temps des réactions lors de l’anesthésie locale. Les solutions anesthésiques utilisées de nos jours sont efficaces et ont un délai d’action rapide. Les soins apportés au patient peuvent ainsi se dérouler sans douleur. La réussite de l’anesthésie est un acte opérateur-dépendant. Le praticien doit connaître l’anatomie, les différents produits sur le marché, les contraintes liées aux patients, le nouveau matériel…. Il s’agira dans notre travail, de faire une contribution à une meilleure connaissance des produits analgésiques utilisés en soin dentaire. L’historique de l’utilisation des analgésiques durant le XIX et le XX siècle sera abordé dans un premier temps. Ensuite, les indications thérapeutiques ainsi que le choix des molécules et les contraintes liés à leurs utilisations seront passés en revue.

RAPPELS

DEFINITIONS

L’anesthésie :
C’est l’ensemble des techniques qui permettent la réalisation d’interventions douloureuses, facilitant le geste chirurgical, supprimant la douleur et son retentissement neurovégétatif. Le terme d’anesthésie exprime la perte plus ou moins complète des sensations. Elle peut apparaître comme un symptôme à la suite de lésions temporaires ou définitives des voies conduisant la sensibilité de la périphérie vers les centres nerveux. Elle peut être thérapeutique, locale ou régionale, ou générale.

L’anesthésie locale :
Elle peut être locorégionale par injection au contact des troncs nerveux sensitifs desservant la région à insensibiliser. Elle peut être locale proprement dite par contact ou par infiltration. On appelle anesthésique local, toute substance qui, placée au contact des fibres nerveuses (origine, trajet ou terminaison), en suspend le fonctionnement de façon spécifique et transitoire. Cette définition élimine donc les substances qui interférent avec la conduction, mais endommagent les cellules nerveuses ou les cellules avoisinantes de façon définitive (phénol, quinine). Les anesthésiques locaux sont différents :
– des anesthésiques généraux car ils ne modifient pas la conscience ;
– des analgésiques, qui eux, modifient la perception des sensations douloureuses.

Ils constituent des substances qui, placées à la concentration appropriée au contact d’un structure nerveuse, bloquent de façon temporaire et réversible la propagation des potentiels d’action membranaires. Leur action est progressive (disparition de la sensibilité douloureuse, puis thermique, puis tactile). De nombreux agents, amines tertiaires, alcools, toxines…, sont susceptibles de générer un effet anesthésique local. [9] En pratique clinique, les anesthésiques locaux utilisés appartiennent à la catégorie des aminoamides ou à celle des aminoesters.

L’anesthésie de surface :
C’est une anesthésie locale sans infiltration qui peut être obtenue par :
– La réfrigération locale qui diminue l’activité métabolique tissulaire locale ;
– L’utilisation de boulettes de coton imprégnées ;
– L’utilisation de crèmes ou de gels ;
– L’utilisation de sprays ;
– L’utilisation du potentiel électrique.

La douleur et ses aspects psychologiques :
ARISTOTE décrit la douleur comme une passion de l’âme. L’association internationale pour l’étude de la douleur la définit comme : « sensation et émotion désagréables, associées à des lésions des tissus présentes ou potentielles ou présentées comme telles ». Le professeur CAMBIER dit que : « la douleur a un support neurophysiologique mais également une dimension psychique dont le retentissement varie d’un individu à l’autre ».

Elle est donc à la fois :
– sensation : conscience d’un stimulus nocif ;
– Expérience affective : sentiment intense de ;
– Déplaisir donnant lieu à une série de comportements ;

Plusieurs théories rendent compte de la psychologie de la douleur. Pour l’une d’elles, le comportement entraîné par une douleur serait l’unique expression de cette douleur. Dans cette conception, le terme « douleur » recouvre l’expérience purement sensitive produite par une stimulation nociceptive. La douleur peut provoquer à son tour la souffrance qui est l’association de phénomènes physiques, moraux et psychologiques mettant en jeu tous les mécanismes affectifs, intellectuels et instinctifs qui en font la particularité. La souffrance varie d’un individu à l’autre, elle est fonction du contexte ou de la signification de la douleur. Elle se révèle par différents comportements du patient (plaintes, modifications du faciès ou mouvement de protection…) qui reflètent la capacité de nociception. La douleur est donc un symptôme multifactoriel complexe et la réponse à cette douleur propose de grandes variations individuelles. Il est important de comprendre que ce que nous savons de la quantité et de la qualité de la douleur ressentie par autrui, est fondé sur son comportement qui est une résultante de la souffrance elle-même influencée par d’autres facteurs tels qu’une dépression (qui accompagne surtout les cas de douleurs chroniques) ; des expériences algiques antérieures mémorisées, de l’appréhension, de la tolérance à la douleur ou, surtout, de l’anxiété qui peut être très importante par le fait que le seuil douloureux du sujet est fortement abaissé. Il en résulte que la réponse à la douleur en termes de ce comportement, n’est pas forcément le reflet exact du stimulus nociceptif initial.

L’anxiété est un sentiment perturbant, très négatif et fortement associé à une notion d’inconnu. L’individu se sent nerveux et il ne sait pas pourquoi. Quand une situation désagréable ne peut être évitée, l’anxiété apparaît. Lors d’un traitement dentaire, elle peut augmenter la sensation de souffrance liée aux soins dentaires. Dans ce contexte, elle a une double origine : externe, le fauteuil dentaire et son environnement ; et interne : la douleur secondaire au traitement dentaire luimême. Il est donc tout aussi important d’alléger l’anxiété du sujet que de réduire la stimulation nociceptive par l’administration d’un anesthésique de contact. La douleur est l’expérience déclenchée par un stimulus qui détruit ou menace de détruire un tissu (stimulus nociceptif). Il existe différentes qualités de sensations douloureuses : La douleur du type piqûre d’aiguille apparaît et disparaît rapidement. Elle est de faible intensité, de conduction rapide et bien localisée. La douleur de type brûlure apparaît plus tardivement ; elle est mal localisée et dure plus longtemps (sa conduction est lente). Elle entraîne les réactions neurovégétatives associées à la souffrance. La douleur du type douleur viscérale et profonde musculo-tendineuse.

L’HISTOIRE DES ANALGESIQUES AU XIX SIECLE

L’Aspirine

En 1827, le chimiste Leroux s’employa à extraire de l’écorce de saule blanc, un glucoside qu’il nomma « salycine » (du latin salix, le saule). Mais la découverte de Leroux n’eut pas la reconnaissance méritée. [18] Plus tard, on signala que la salycine pouvait être extraite d’autres plantes notamment de la reine des prés. Les herboristes l’appelaient spirée ulmaire et en faisaient des tisanes pour les enfants fébriles. En 1840, Lowig de Zurich en extrait l’acide spiréique, de structure voisine de la salicyne. [25] En 1865, la chimiste allemand Adolf Kolbe, travaillant sur la salicyne, obtenait l’acide salicylique par oxydation de la salicyne. La formule étant assez simple, il en réussit bientôt la synthèse : une poudre blanche cristalline, faite d’aguilles soyeuses, légèrement savonneuses au toucher, poudre à propriété antalgique. On élabora bientôt le salicylate de sodium. Parallèlement Charles Guerardt, un des fondateurs de la chimie organique découvrit l’acide acétylsalicylique qu’il obtint par action du chlorure d’acétyle sur le salicylate de sodium, en 1854. Cette découverte passa presque inaperçue et c’est Hoffman, chimiste chez Bayer, qui lança en 1899, à grand fracas, cette molécule sous le nom d’Aspirine.

Le Paracétamol

L’aniline est un colorant dont le paracétamol est un dérivé. Erhlich est le premier à découvrir son affinité pour les tissus biologiques. En 1878, la synthèse du paracétamol est effectuée. Sa première utilisation thérapeutique date de 1863, en Allemagne. C’est un antalgique dépourvu d’effet anti-inflammatoire.

L’avènement de l’anesthésie Générale

Découvert en 1831, par le français Soubeyran et l’allemand Liebig, lechloroforme n’est utilisé qu’en 1847 pour l’instantanéité et la persistance de ses effets. Mais bientôt la mort subite de patients durant l’anesthésie suscita des polémiques. En 1880, le comité de la British Médical Association, après expérimentation sur l’animal, conclut au danger de l’utilisation du chloroforme, qui s’avère exercer une action dépressive sur les centres respiratoires et peut provoquer des arrêts cardiaques soudains. Après avoir pris l’ascendant sur l’éther, le chloroforme moins désagréable est ensuite délaissé pour les risques qu’il provoque. Les successeurs de Priestley au XIXème siècle poursuivent ses travaux, ses investigations. Ainsi, les étudiants en médecine et pharmacie, organisaient des soirées « spéciales » pendant lesquelles ils inhalaient de l’éther et du protoxyde d’azote. Ayant remarqué l’ivresse et l’euphorieque ces gaz procuraient, un des étudiants, Clarke administra en 1842 de l’éther à une patiente qui put subir une extraction dentaire sans douleur. Pendant la même période, le dentiste Horace Wells (1818-1848), se séparait de son associé W.T.Morton. Par hasard, il rencontra un peu plus tard un charlatan, faisant des démonstrations publiques de gaz hilarant. Sous l’influence de la drogue, le cobaye humain se blessa violemment en gesticulant ; remis, ce dernier raconta n’avoir ressenti aucune douleur. Aussi en ce 10 décembre 1844, Wells songea : « si on respire suffisamment de ce gaz, on doit pouvoir arracher une dent sans douleur ». Le lendemain, il pria son confrère de lui extraire une dent sous protoxyde d’azote. Ce fut un succès : « c’est la plus grande découverte jamais réalisée, cela ne m’a pas fait plus mal qu’une piqûre d’épingle. Une nouvelle ère s’ouvre en chirurgie dentaire », s’exclama-t-il à son réveil. Mais par manque de rigueur scientifique Wells ne nota ni les dosages, ni la durée de la narcose ainsi obtenue. L’expérience ne fut pas reproductible au cours d’une conférence organisée à l’école de Médecine de Harvard sur le thème « Usage du protoxyde pour la prévention de la douleur ». Découragé, il abandonna son métier. Morton, son ancien associé travaillait, lui, avec succès sur l’éther et lui proposa d’exploiter ensemble ce brevet. Mais seul, Morton fut reconnu par la presse. Encore un fois blessé, Wells se suicida. Morton, passionné, suivit des cours de chimie à Harward ; son professeur Jackson mentionna que l’éther appliqué sur la peau pouvait endormir la douleur. Morton s’empressa aussitôt de mettre cela en pratique, il appliqua quelques gouttes d’éther sur la gencive d’une de ses patientes, Miss Parrot. L’essai fut concluant, mais l’effet trop bref. Il essaya de plus grandes quantités d’éther et nota un engourdissement des parties voisines. Le 30 septembre 1846, Morton réalisa la première extraction effectuée sous anesthésie générale : il imbiba un mouchoir d’éther, le donna à respirer au patient et l’extraction fut sans douleur. « On nous communique, qu’hier soir on a arraché une dent à un malade sans que celui-ci n’ait ressenti la moindre douleur. Il avait été endormi grâce à l’inhalation d’un somnifère. Son sommeil dura assez longtemps pour permettre l’extraction de la dent » écrivait-on dans le « Boston Journal » .

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I. DEFINITIONS
II. L’HISTOIRE DES ANALGESIQUES AU XIX SIECLE
II.1. L’Aspirine
II.2. Le Paracétamol
II.3. L’avènement de l’anesthésie Générale
II.4. L’anesthésique par excellence en art dentaire : la cocaïne
II.5. Les plantes aux services de la lutte contre la douleur
II.5.1. La cocaïne
II.5.2. L’Esérine
II.5.3. La reine des prés
II.6. Les Molécules Synthétiques
II.6.1. L’Aspirine
II.6.2. Le chloroforme
II.6.3. L’éther
II.6.4. Le Paracétamol
II.6.5. Le Protoxyde d’Azote
II.7. Introduction de la cocaïne dans la pratique dentaire
II.7.1. L’utilisation de la cocaïne
II.7.2. Le devenir de la cocaïne
DEUXIEME PARTIE : NOTRE TRAVAIL
I. LES ANESTHESIQUES EN ODONTOLOGIE
I.1 Rappels sur la distribution sensitive
I.1.1 Le nerf ophtalmique V1
I.1.2 Le nerf maxillaire V2
I.1.2.1 Branche collatérale du nerf maxillaire
I.1.2.1.1 Le nerf naso-palatin
I.1.2.1.2 Les nerfs palatins
I.1.2.1.3 Le nerf alvéolaire supéro-postérieur
I.1.2.1.4 Le nerf alvéolaire supéro-moyen
I.1.2.1.5 Le nerf alvéolaire supéro-antérieur
I.1.2.2 Branche terminale : le nerf infra orbitaire
I.1.2.3 Le nerf mandibulaire
I.1.2.3.1 Nerf buccal
I.1.2.3.2 Nerf lingual
I.1.2.3.3 Nerf alvéolaire inférieur
I.1.2.3.3.1 Branche externe ou nerf mentonnier
I.1.2.3.3.2 Branche antérieur ou nerf incisif
I.2. Le choix d’une molécule d’analgésie locale
I.2.1 Les molécules d’anesthésie locale
I.2.2 Les cibles des molécules d’anesthésie locale
I.2.2.1 Cible neurophysiologique : la fibre nerveuse
I.2.2.2 Cible cellulaire : la membrane plasmique du neurone
I.2.2.3 Cible moléculaire : le canal sodique voltage-dépendant
I.2.3 Le mode d’action des molécules d’anesthésie locale
I.2.4 Les propriétés physicochimiques importantes des anesthésiques locaux
I.2.4.1 La liposolubilité
I.2.4.2 Le degré d’ionisation et le pKa
I.2.4.3 Le degré de liaison aux protéines
I.2.5 L’élimination des molécules d’anesthésie locale
I.2.5.1 Elimination des amino-esters
I.2.5.2 Elimination des amino-amides
I.2.6 Les autres tissus pouvant être touchés
I.2.7 Limitation de l’action de l’anesthésique local
II. CONTRAINTES ET COMPLICATIONS DES ANESTHESIES
II.1 Contraintes liées à l’âge
II.1.1 Contraintes chez l’enfant
II.1.2 Contraintes chez la personne âgée
II.2 Contraintes liées à la grossesse
II.3 Contraintes liées aux états pathologiques
II.3.1 Pathologies cardio-vasculaires
II.3.1.1 Action de la molécule analgésique sur le système cardiovasculaire
II.3.1.2 Action des vasoconstricteurs sur le système cardiovasculaire
II.3.1.3 Conduite à tenir
II.3.1.3.1 Dans les cardiopathies congénitales
II.3.1.3.2 Dans les troubles du rythme
II.3.1.3.3 Dans les cardiopathies valvulaires
II.3.1.3.4 Dans les cardiopathies ischémiques
II.3.1.3.5 Dans l’hypertension artérielle
II.3.1.3.6 Dans les pathologies artérielles
II.3.2 Pathologies pulmonaires
II.3.3 Porphyries
II.3.4 Pathologies rénales
II.3.5 Pathologies hépatiques
II.3.6 Pathologies endocriniennes
II.3.6.1 Le patient diabétique
II.3.6.2 Les autres pathologies endocriniennes
II.3.6.2.1 Hyperthyroïdie
II.3.6.2.2 Hypothyroïdie
II.3.6.2.3 Hyperparathyroïdie
II.3.6.2.4 Hypoparathyroidie
II.3.6.2.5 Syndrôme de cushing
II.3.6.2.6 Phéochromocytome
II.3.7 Chez les malades immunodéprimés
II.3.8. Chez le patient irradié
II.3.9 Chez le patient allergique
II.3.9.1 Allergie aux amino-esters
II.3.9.2 Allergie aux amino-amides
II.3.9.3 Allergie aux autres composés
II.3.9.4 Les manifestations de l’allergie
II.3.9.5 La thérapeutique
II.3.10 Chez le patient sous bisphosphonates
II.4 Complications dues aux anesthésiques locaux
II.4.1 Toxicité des anesthésiques locaux
II.4.1.1 Les causes
II.4.1.2 Les signaux à détecter
II.4.1.3 Conduite à tenir
II.4.2 Bris d’aiguille
II.4.3 Traumatisme nerveux
II.4.4 Trismus
II.4.5 Hématomes
II.4.6 Paresthésie
II.4.7 Autres incidents
II.4.7.1 Accident infectieux
II.4.7.2 Nécrose muqueuse
II.4.7.3 Lésion des tissus mous anesthésiés
CONCLUSION
REFERENCES

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