L’hétérogénéité des surfaces continentales

Les surfaces continentales sont régies par plusieurs processus géophysiques interagissant à diverses échelles spatiales. Ces mécanismes de surface peuvent être de type physique tel que les phénomènes de ruissellement, d’infiltration ou d’évaporation de l’eau mais également biophysique comme la répartition et l’évolution spatiale des populations d’espèces animales et végétales. Différentes variables ou facteurs influent sur ces processus de surface tels que la température de surface, l’humidité du sol, la végétation ou la topographie. Ces variables géophysiques ont un rôle majeur dans plusieurs composantes du système climatique telles que le cycle de l’eau et l’atmosphère, et sont directement reliées à d’autres facteurs quant à eux anthropiques tels que l’occupation du sol. Ainsi, l’étude du fonctionnement et de l’évolution des processus de surface s’avère primordiale dans le contexte actuel de réchauffement climatique. De plus, du fait de l’interaction directe entre l’homme et ces processus, leur connaissance est utile dans de nombreuses applications telles que l’aménagement du territoire, l’urbanisme, la gestion durable des ressources en eau, l’agronomie, ou encore la gestion des catastrophes naturelles.

Ainsi, l’hétérogénéité spatiale des surfaces continentales est due à un ensemble de facteurs naturels et anthtropiques (fig.1.1) présents sur une large gamme d’échelles spatiales : de l’échelle continentale allant jusqu’à plusieurs centaines de kilomètres, à l’échelle plus locale des bassins versants et des parcelles agricoles située en-dessous du kilomètre. De plus, en raison de leur couplage et interactions à différentes échelles spatio-temporelles, les phénomènes géophysiques, incluant le cas des surfaces continentales, présentent des dynamiques fortement non-linéaires (feuille de route du Réseau National des Systèmes Complexes 2017). Par exemple, des processus de surface relativement simples comme le ruissellement ou l’évaporation de l’eau, couplés aux processus atmosphériques tels que les précipitations, peuvent générer sur l’humidité du sol des comportements imprévisibles à long terme et conduisant à une structure spatialisée présentant une variabilité fortement nonlinéaire à de multiples échelles.

Dans ce contexte, plusieurs techniques de mesure ont été développées pour permettre une étude complète sur une large gamme d’échelles spatiales (fig.1.2). D’une part, des campagnes terrain servent au suivi fin et localisé des surfaces grâce à des mesures in-situ. D’autre part, la télédétection spatiale et aéroportée permet d’accéder à la variabilité des processus sur de grandes échelles spatiales. Cependant, ces techniques complémentaires représentent l’hétérogénéité des variables observées sur une gamme d’échelles spécifique. Or, diverses études en écologie du paysage ont montré que les mesures d’hétérogénéité dépendaient de l’échelle spatiale à laquelle elles étaient réalisées (Wiens, 1989). Notamment, certaines caractéristiques des mesures telles que la résolution des données ou la taille de la zone d’étude pouvaient affecter ces mesures d’hétérogénéité (O’Neil et al., 1986). Ces travaux ont alors mené à plusieurs questionnements sur la notion d’échelle et son impact sur les données, et en particulier à s’interroger sur l’échelle de mesure la plus adaptée à telle ou telle étude (Gustafson, 1998).

Etant donné le nombre grandissant d’observations présentes à diverses échelles spatiales, les méthodes basées sur l’analyse multi-échelle peuvent fournir un moyen efficace pour décrire et mieux comprendre l’hétérogénéité des surfaces. En particulier, une possibilité consiste à s’intéresser à l’existence de lois d’échelles statistiques généralisant la notion de fractale géométrique (Mandelbrot, 1975). Cela permettrait de mettre en évidence des comportements d’échelle spécifiques, valables sur des intervalles continus d’échelles (ou « gammes d’échelles »), contribuant ainsi à caractériser les processus de surface selon une approche originale qui est peu souvent prise en compte dans les modèles actuels de surface.

Observations satellitaires et analyse d’images

Compte tenu de la forte hétérogénéité spatio-temporelle des surfaces continentales, la télédétection spatiale s’est avérée être un moyen indispensable pour réaliser un suivi à la fois régulier, local et global des processus physiques et biophysiques qui régissent ces surfaces. Les facteurs dont ils dépendent, tels que l’humidité des sols, la température de surface, la végétation ou la topographie, sont variables sur de larges gammes d’échelles auxquelles seuls les satellites peuvent accéder. Afin de rendre compte au mieux de l’évolution des surfaces et d’en étudier leur fonctionnement, un nombre grandissant de méthodes d’acquisition par satellite (télédétection par capteurs passifs/actifs) et d’analyse de données (algorithmes de traitements d’image) a été observé dans les cinquante dernières années.

Télédétection des surfaces continentales 

Définition et principe de la télédétection 

De manière générale, la télédétection consiste en l’acquisition d’informations sur des objets ou des phénomènes observés à partir de mesures effectuées à distance. Pour acquérir ces informations, la télédétection se base sur l’enregistrement et l’interprétation des rayonnements électromagnétiques émis ou réfléchis par la cible étudiée. Selon la longueur d’onde dans laquelle ces rayonnements sont mesurés, diverses propriétés de la cible peuvent être identifiées comme sa composition, sa structure, son état, etc.

Les ondes électromagnétiques peuvent être définies sur une large gamme de longueurs d’onde correspondant au spectre électromagnétique (figure 2.1). Cette longueur d’onde ? s’exprime en mètres et est associée à la fréquence ? du rayonnement telle que λ = c/f (avec ? la vitesse de la lumière). Le spectre électromagnétique est centré sur le domaine du visible (0.4 < ? < 0.7 μm), et s’étend des très courtes longueurs d’ondes (10−9 μm) correspondant aux rayons cosmiques utilisés en astronomie (observation des rayonnements provenant de l’espace), jusqu’aux ondes radio (1 km) utilisées en télécommunication. Dans le domaine de l’Observation de la Terre, les rayonnements mesurés se situent essentiellement dans la partie centrale du spectre électromagnétique c’est-à-dire l’ultraviolet (UV) proche (0.25 – 0.4 μm), le domaine optique comprenant l’ensemble du visible et de l’infrarouge (0.4 μm– 1 mm) et les micro-ondes ou hyperfréquences (1 mm – 100 mm).

La télédétection pour l’Observation de la Terre

Pour embarquer les capteurs servant à l’acquisition des rayonnements terrestres, deux grandes familles de plateformes sont utilisées. D’une part nous trouvons les plateformes se situant dans l’atmosphère, appelées « aéroportées ». C’est vers la fin du 19ème siècle que les premières applications en télédétection ont été réalisées au moyen de ballons embarquant des capteurs optiques. Notamment, les premières photographies aériennes ont été acquises en 1844 via le ballon Nadar. Cela a été utile en particulier pour le lever de plans topographiques ou hydrographiques. Le premier avion transportant un capteur optique fera son apparition quelques années plus tard : il s’agit de l‘avion WRIGHT, en 1909. L’aviation a permis un développement important de la photographie aérienne, en particulier par son utilisation intensive comme moyen de reconnaissance pendant la 1ère guerre mondiale.

L’avion reste la plateforme aéroportée la plus utilisée à ce jour, bien que d’autres moyens comme l’hélicoptère ou plus récemment le drone permettent de fournir des images avec une précision de plus en plus importante. En effet, de par leur distance relativement faible de la surface (< 5 km), ces plateformes aéroportées permettent de fournir des images à très haute résolution spatiale (de l’ordre du centimètre, fig.2.2) et pour un coût relativement faible (par comparaison aux satellites). Cependant, les produits fournis couvrent des zones restreintes limitant donc à des études plutôt locales des phénomènes terrestres (~ 10 km x 10 km).

Ce n’est que depuis les années 60 que les capteurs sont embarqués sur des satellites artificiels placés en orbite autour de la Terre. Ces plateformes spatiales observent de grandes surfaces (fig.2.2), pouvant atteindre l’échelle continentale (plusieurs milliers de kilomètres), et ont l’avantage de permettre une acquisition systématique et répétitive. Ainsi, la répétitivité (ou résolution) temporelle des données satellites est assurée, pouvant être de l’ordre du journalier pour certaines missions spatiales. Cela est un atout majeur pour l’étude des processus physiques et biophysiques des surfaces continentales qui sont variables sur de larges échelles à la fois spatiales et temporelles. En Observation de la Terre, les satellites sont placés sur des orbites polaires héliosynchrones situées entre environ 500 et 1000 km d’altitude. Ainsi, pour un même point au sol, ce type d’orbite permet un passage du satellite à la même heure solaire. L’orbite géostationnaire est également utilisée en télédétection, mais par des satellites météorologiques pour lesquels la même zone est observée, ne permettant pas de couverture globale de la Terre. Ces orbites ont l’avantage de couvrir de très grandes étendues, avec des données disponibles de manière presque continue. En revanche, la résolution spatiale est plus faible et ne permet pas d’étudier la variabilité fine échelle des surfaces continentales.

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Table des matières

INTRODUCTION
1 Introduction
1.1 Contexte général : l’hétérogénéité des surfaces continentales
1.2 Cadre de l’étude
1.3 But de la thèse
1.4 Plan de la thèse
2 Analyse de la variabilité spatiale des surfaces continentales : état de l’art et théorie multifractale
2.1 Observations satellitaires et analyse d’images
2.1.1 Télédétection des surfaces continentales
2.1.1.1 Définition et principe de la télédétection
2.1.1.2 La télédétection pour l’Observation de la Terre
2.1.1.3 Les différents capteurs spatiaux et leurs applications
2.1.2 Méthodes usuelles d’analyse et de traitement d’images satellites
2.1.2.1 Assimilation de données
2.1.2.2 Algorithmes de classification
2.1.2.3 Méthodes de segmentation
2.1.3 Texture et analyse multi-échelle
2.1.4 Méthodes multifractales : contexte et intérêt
2.1.4.1 L’invariance d’échelle des phénomènes turbulents
2.1.4.2 Application aux surfaces continentales
2.2 Théorie des processus multifractals
2.2.1 Des objets fractals aux processus multifractals
2.2.1.1 Vocabulaire : échelle et résolution
2.2.1.2 Notion de fractale géométrique
2.2.1.3 Invariance d’échelle statistique
2.2.1.4 Processus multifractals
2.2.2 Les cascades multiplicatives
2.2.2.1 Principe de construction
2.2.2.2 Exemples de modèles
2.2.3 Multifractales Universelles
2.3 Simulation et analyse de Multifractales Universelles
2.3.1 Simulateur de champs multifractals
2.3.1.1 Principe général
2.3.1.2 Exemples de simulations multifractales
2.3.2 Description des estimateurs statistiques
2.3.2.1 Spectre de puissance : détection de l’invariance d’échelle
2.3.2.2 Fonctions de structure : mise en évidence du caractère non-conservatif
2.3.2.3 Moments statistiques : propriétés multifractales
2.3.3 Méthodologie générale d’analyse multi-échelle
3 Analyse multi-échelle d’un algorithme de désagrégation déterministe d’humidité du sol : DisPATCh
3.1 Introduction
3.1.1 Variabilité spatiale de l’humidité du sol
3.1.2 Apport de la télédétection pour le suivi de l’humidité du sol
3.1.3 Désagrégation spatiale pour l’étude fine échelle de l’humidité du sol
3.1.3.1 Les différentes méthodes de désagrégation de l’humidité
3.1.3.2 Intérêt et évaluation de la méthode DisPATCh
3.1.4 Etudes statistiques multi-échelles de l’humidité du sol
3.2 Cas d’étude et données
3.2.1 Processeur C4DIS : vers une couverture globale de l’humidité désagrégée
3.2.2 Produits d’entrée du C4DIS
3.2.2.1 Les données globales d’humidité du sol SMOS
3.2.2.2 Les données auxiliaires MODIS
3.2.2.3 Autres données auxiliaires
3.2.3 Produits désagrégés d’humidité du sol
3.2.4 L’algorithme DisPATCh
3.2.5 Zone d’étude
3.2.5.1 L’étude de l’humidité du sol en Australie
3.2.5.2 Le bassin du Murray Darling : une vaste région aux propriétés climatiques variées
3.2.6 Prétraitements réalisés sur les produits satellites
3.3 Résultats
3.3.1 Spectres de puissance : mise en évidence de deux régimes d’échelle pour l’humidité désagrégée
3.3.2 Fonctions de structure : confirment le degré d’intégration de l’humidité désagrégée et des données auxiliaires
3.3.3 Moments statistiques : application du modèle des Multifractales Universelles
3.4 Discussion
3.4.1 Impact des facteurs environnementaux sur les propriétés statistiques multi-échelles de l’humidité
3.4.1.1 Des facteurs agissant à différentes échelle spatiales
3.4.1.2 Une rupture en lien avec les propriétés d’échelle de la pluie
3.4.1.3 Les effets saisonniers sur la variabilité spatiale de l’humidité
3.4.2 Effet de l’algorithme de désagrégation sur les propriétés statistiques multi-échelles de l’humidité
3.4.2.1 Mise en évidence d’un seul régime d’échelle pour les températures de brillance : cas de la mission AACES-2
3.4.2.2 Suivi des propriétés multi-échelles au sein de l’algorithme DisPATCh : implémentation d’une version simplifiée de la méthode
3.5 Conclusion
4 Caractérisation de données multispectrales à haute résolution spatiale par analyse multifractale
4.1 Introduction
4.1.1 Apport des données multispectrales pour l’étude des surfaces continentales
4.1.1.1 Reflectances de surface : principe et intérêt
4.1.1.2 Les capteurs optiques pour l’observation de la Terre
4.1.2 Analyse de l’hétérogénéité spatiale des images optiques
4.1.3 Apport de la correction atmosphérique dans l’étude de la dynamique temporelle des propriétés d’échelle
4.1.3.1 Composition de l’atmosphère et impact sur les réflectances de surface
4.1.3.2 Méthodes de correction atmosphérique
4.2 Cas d’étude et données
4.2.1 Zone d’étude
4.2.1.1 La région Sud-Ouest
4.2.1.2 L’Observatoire Spatial Régional
4.2.1.3 Sélection d’une zone d’étude dans le Gers
4.2.2 Produits Sentinel-2
4.2.2.1 La mission Sentinel-2 : pour un suivi à haute résolution spatiale et temporelle des surfaces continentales
4.2.2.2 Les bandes spectrales de l’imageur MSI
4.2.2.3 La chaine globale de prétraitement des produits optiques
4.2.2.4 Les produits de l’étude : réflectances et indices optiques
4.2.3 La chaine de correction atmosphérique MAJA
4.2.3.1 Description générale et intérêt
4.2.3.2 L’algorithme
4.2.4 Prétraitements réalisés sur les images provenant de THEIA
CONCLUSION

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