L’exposé comme outil pédagogique
Le pré-test
Cette étude se déroule de la manière suivante. Premièrement, un devoir a été demandé aux élèves en guise de pré-test. L’enseignante a « recréé » la situation stressante en annonçant aux élèves de faire un exposé, qui aura lieu 3 semaines plus tard sur le thème de l’école, vocabulaire traité en classe.
L’unique critère donné a été celui de la durée de l’exposé, pour leur donner au minimum un ordre de grandeur du travail à produire. Il a été demandé aux élèves de parler pendant 3 minutes. Cette durée a été choisie par l’enseignante dans le but d’obtenir suffisamment de matière à analyser. Pour ne pas répondre aux questions des élèves et éviter de les mettre sur la piste des critères attendus et ainsi « fausser » le pré-test, la seule réponse donnée par l’enseignante était : je suis en train de tester vos connaissances, je ne peux pas vous aider. Le pré-test a été évalué trois semaines après, le 5 octobre 2018. Pour des questions de temps, une première partie de la classe a présenté ce jour-là. Les 7 derniers élèves sont passés le 23 octobre, soit après les vacances d’automne. L’ordre de passation n’avait pas été communiqué aux élèves pour s’assurer que chacun bénéficie du même temps de préparation. Le pré-test s’est déroulé de la manière suivante : à tour de rôle, les élèves exposaient leur présentation. Placé face à la classe et à la caméra, l’élève prenait la parole et présentait son travail élaboré à la maison. À la suite de sa passation, l’élève recevait un questionnaire auquel il devait répondre attentivement. Le questionnaire (cf. annexe D) ne permet pas uniquement à l’enseignante de soutenirses observations lors du visionnage des vidéos, mais aussi d’adapter la séquence didactique qui suivra, au niveau de la classe. Avec ces observations, des compétences encore non acquis par les élèves ont pu être décelés. Le modelage de la séquence didactique s’est donc fait plutôt simplement.
Si un critère n’était pas totalement compris et mis correctement en pratique par toute la classe, un moment lui était destiné dans la séquence afin d’en discuter avec la classe et laisser le temps à cette dernière de se l’approprier.
La description de la séquence
Durant cinq mois l’outil de l’exposé a pris forme en classe. La manière de travailler avec des grilles progressives, le besoin de travailler l’évaluation par les pairs ainsi que la nécessité de travailler par ateliers formatifs ont été retenus. Pour donner plus de sens à cette séquence sur un long terme, je voulais pouvoir l’intégrer au programme scolaire « ordinaire », en continuant de travailler parallèlement des unités imposées. Il s’agissait de ne pas perdre de vue d’autres objectifs du PER à atteindre durant le semestre, tout en y ajoutant l’objectif du discours continu dans le programme.
Aussi, l’outil de l’exposé n’a pas été omniprésent durant cinq mois de cours, mais il a été traité sous forme de petits apports hebdomadaires lorsque les activités étaient favorables. Ainsi, différents thèmes étaient abordés à travers diverses compétences (écoute, écrit, lecture et oral). À l’utilisation de textes, une quinzaine de minutes de plus étaient accordées à la fin de l’activité pour exercer les critères des grilles mises à disposition. Il leur était donc demandé d’employer le texte et de mettre en pratique les différents critères des grilles afin de se les approprier. Par groupe de 3-4, les élèvent travaillaient sous forme d’ateliers formatifs (chapitre 2.5.2). À l’aide de matériel, tel qu’une grille d’auto-évaluation (chapitre 2.5.1), une grille d’évaluation par les pairs (chapitre 2.5.4), mais aussi des vidéos-exemples (chapitre 2.5.3), les élèves pratiquaient et amélioraient leurs points faibles, en collaborant entre eux. En partageant leurs connaissances, ils ont enrichi leur expérience sur la manière de tenir un discours continu devant un public.
Arrivée à la fin de la séquence, c’est le critère de la langue qui a été particulièrement mis en avant. Les élèves ont dû réfléchir à l’élaboration d’un nouvel exposé et leur intérêt s’est porté sur la nécessité de connaître des expressions « types » pour structurer un discours. Toute une leçon a été consacrée à l’acquisition d’un vocabulaire spécifique au discours. Différentes expressions, telles que « aujourd’hui, je vais vous présenter – Voici – Ensuite – Sur cette image vous voyez – Je termine avec – etc. ». Une ultime leçon leur a été octroyée avant les exposés finaux, le post-test, afin de travailler principalement seuls, tous les ateliers dont ils avaient besoin. Avec leur propre texte, les élèves ont peaufiné leur vocabulaire, revu leur posture, exercé la prononciation, tout en demandant conseil à leurs camarades.
L’utilisation de la grille progressive d’auto-évaluation personnalisée
En reprenant la grille progressive de Dumais (2012), je l’ai modifiée pour mettre en avant les critères que je voulais traiter en classe. Ainsi, la grille comprend cinq domaines avec chacun deux à trois critères spécifiés (cf. annexe C). L’élève l’utilise ensuite lorsqu’il pratique les différents domaines et, à l’aide de sa vidéo et des commentaires de ses camarades, peut s’auto évaluer et avoir un suivi de sa progression.
La première approche avec cette grille s’est faite à la suite du pré-test. Une leçon entière a été consacrée au visionnage de leur vidéo. Par petit groupe, les élèves se sont vu octroyer leur vidéo ainsi que la grille progressive. L’atelier de ce jour était de se familiariser avec les différents critères et de les identifier sur leur vidéo. Le choix de travailler en petit groupe a été nourri par la suite des activités qui se faisait également en ateliers formatifs de 3 à 4 élèves. De plus, analyser sa performance avec d’autres camardes est un exercice en soi qui demande beaucoup d’efforts. C’est pourquoi, les vidéos n’ont jamais été utilisées en plénum, mais toujours par groupe de 3 à 4 élèves. À chaque fois qu’il était utile de travailler en groupe afin d’avoir différents retours sur leur manière de parler, les mêmes groupes étaient formés pour qu’un suivi dans les commentaires se fasse, qu’une complicité et une aisance se créent.
Les réactions des élèves lors de cette leçon ont été très fortes. Se voir tenir un discours face à un public, pour la première fois pour la plupart d’entre eux, et surtout de se montrer à quelques-uns de leurs camarades, a été une expérience intense. En les voyant si impressionnés, j’ai observé qu’ils avaient compris le sens de traiter en classe certains critères de discours continu. Cette grille progressive a été ressortie à maintes reprises durant les mois qui ont suivi.
Les ateliers formatifs
Chaque critère est travaillé dans un atelier précis. Ces ateliers sont donc choisis par ce qui est nécessaire à travailler en classe et par ce que l’enseignante veut évaluer lors de la présentation finale. Sept ateliers sont définis et traités en classe sur une période de cinq mois. La durée de cette séquence est telle, car les ateliers sont inclus dans le programme scolaire et répétés à plusieurs reprises. De plus, comme l’explique Dumais(2012), il est nécessaire de laisser le temps aux élèves afin qu’ils apprivoisent ce nouvel outil. L’apprentissage de la langue par unités suit son cours et les ateliers viennent se juxtaposer à des moments propices. Un exemple de juxtaposition : À la suite d’un texte traité en classe pour atteindre un objectif de l’unité, ce texte est repris dans l’atelier de « voix et diction » pour permettre à l’élève de travailler son intonation. En adaptation aux ateliers formatifs de Dumais, voici les 7 ateliers pour ce travail L’atelier formatif 1 « Voix » va de pair avec l’atelier formatif 2 « Diction ». En classe lorsque des dialogues sont traités, un temps est consacré au travail de la voix, son intonation et son articulation.
Par groupe de 3-4, les dialogues sont joués par deux élèves et écoutés par deux camarades. Des conseils sont donnés par les camarades aux orateurs, puis les rôles s’inversent après plusieurs répétitions. Concernant l’articulation, il est compliqué pour les élèves d’être « expert » sur la bonne prononciation d’un mot. C’est pourquoi cet atelier est d’abord traité en plénum. La classe écoute attentivement un audio du dialogue en ayant le texte sous les yeux puis répète les phrases. Cela leur permet de se concentrer sur l’articulation des mots uniquement. Lorsque la classe a la chance d’être dans la salle d’informatique (une fois par semaine), les élèves s’enregistrent en lisant un petit texte. Ils s’écoutent et se corrigent puis répètent la procédure à plusieurs reprises.
L’atelier formatif 3 « L2 » est particulièrement complexe et implicite. Énormément de petits textes sont produits en classe par les élèves, ce qui amène à une répétition régulière de la structure de la langue. Des modèles de phrases plutôt simples sont utilisés pour les habituer à s’exprimer de manière simple et claire.
L’atelier formatif 4 « Discours » est un atelier basé sur du vocabulaire. Les élèves connaissent une structuration d’un discours simple, grâce à leurs leçons de français. Ce qu’il leur manque est le vocabulaire pour utiliser cette structure d’expression en L2. Diverses activités sont ainsi traitées avec des expressions types de discours, tels que « aujourd’hui je vais vous présenter … » et « Pour conclure … ».
L’atelier formatif 5 « Communication » et l’atelier formatif 6 « Communication non verbale » sont traités sous la forme de contre-exemples. Différentes vidéos sont à la disposition des élèves en salle d’informatique. Elles illustrent toujours un même discours, mais en accentuant différents exemples, bons ou mauvais. Cela permet aux élèves d’imager les critères qu’ils leur sont demandés et s’en inspirer pour leur entraînement. Par deux, les élèves visionnent et commentent les vidéos, puis s’en inspirent (ou non) pour s’améliorer. Ces ateliers sont travaillés au minimum par groupe de deux pour permettre aux élèves de se conseiller et d’avoir des retours sur leurs exercices.
L’atelier formatif 7 « Métacognition » ne peut être traité à n’importe quel moment. L’élève qui aimerait évaluer un camarade a besoin d’une production de ce dernier. De plus, pour évaluer de manière adéquate, l’élève doit non seulement connaître, mais aussi avoir compris les critères qui lui permettront de donner des conseils constructifs. Lorsque de mini-exposés sont travaillés en classe pour s’exercer, par groupe, les élèvent auditeurs peuvent se pencher sur la manière de conseiller leurs camarades. Cet aspect métacognitif est tout de même traité de manière implicite avec d’autres ateliers. À chaque travail de groupe et lorsque des conseils sont attendus de leur part, les élèves sont obligés de faire appel à leurs connaissances et à formuler un conseil constructif ou à expliquer leur manière de procéder pour atteindre l’objectif en question.
Les ateliers n’ont pas toujours été travaillés de la manière dont le veut la philosophie du travail par atelier. À chaque insertion d’un nouveau critère, l’atelier qui permettait de le traiter était enseigné en plénum et « imposé » à la classe comme simple activité. En revanche l’entraînement des critères s’est fait sous forme conventionnelle de travail par atelier. Des moments de leçons étaient consacrés à plusieurs ateliers à la fois. Cela permettait à l’élève d’exercer les critères d’après ses envies et besoins.
Cette manière de procéder permet à l’enseignante de s’assurer en plénum que chaque élève ait compris l’objectif à atteindre et par la suite en atelier, de traiter à son rythme le critère pour améliorer son niveau.
Les vidéos-exemples
Pour imager davantage les critères traités lors des ateliers, des vidéos d’exemples à suivre ou non ont été mis à disposition des élèves. Je me suis approchée d’une artiste, Lorena Stadelmann, afin qu’elle puisse réaliser de courtes prises sur les différents critères. Une vingtaine de scènes ont été filmées pour expliciter des critères à suivre ou non. Une leçon complète a été nécessaire pour la présentation des vidéos et de leurs commentaires. La première fois que les vidéos ont été présentées aux élèves, une grande discussion a eu lieu sur leur ressenti face à ces dernières. En observant la vidéo sur la voix et la diction, avec l’exemple d’une voix monotone, les élèves ont compris à quel point il était nécessaire de travailler la voix. Ils ont pu comprendre pourquoi l’intonation de la voix était importante si on voulait tenir un discours devant un public. En effet, en écoutant le contre-exemple, un discours avec une voix monotone, leur réaction a été telle : « c’est impossible d’écouter quelqu’un jusqu’au bout comme ça Madame ! ». Puis, ils se sont mis à discuter de leur façon de parler avec leur voisin. Leurs réactions lors du visionnage ont montré qu’ils sous-estimaient l’importance des critères et ont fait preuve de réflexions sur leurs pratiques. En s’éloignant de leur propre vidéo et de celle de leurs camarades, les élèves ont pu être beaucoup plus critique. La manière exagérée, mais parlante des vidéos a rendu les critères suffisamment explicites pour résonner dans leur manière de faire. Afin de mieux construire leurs commentaires sur les vidéos, une nouvelle grille a été présentée. La grille d’évaluation par les pairs.
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Table des matières
Remerciements
Résumé
Mots clés
Table des matières
Introduction
1 Problématique et question de recherche
1.1 Langue seconde par l’approche actionnelle
1.1.1 Compétences réceptives et productives
1.1.2 S’exprimer oralement en continu
1.1.3 Moyens d’enseignement
1.1.4 Manque de stratégies d’apprentissages
1.2 L’exposé
1.2.1 L’exposé comme finalité
1.2.2 L’exposé comme outil pédagogique
1.2.3 L’état de la recherche
1.2.4 Les ateliers formatifs
1.2.5 La grille progressive
1.2.6 La grille d’évaluation par les pairs
1.2.7 La transposition d’un outil pédagogique
1.2.8 Les objectifs similaires et capacités transversales
1.2.9 La question de recherche et les hypothèses
2 Méthodologie
2.1 Le lieu
2.2 L’échantillon
2.3 La démarche méthodologique
2.4 Le pré-test
2.5 La description de la séquence
2.5.1 L’utilisation de la grille progressive d’auto-évaluation personnalisée
2.5.2 Les ateliers formatifs
2.5.3 Les vidéos-exemples
2.5.4 La grille d’évaluation par les pairs
2.6 Le post-test
2.7 Les apports
2.8 Les limites
2.9 Les outils de recueil des données
3 Résultats
3.1 Présentation des résultats
3.1.1 Hypothèse A « l’élève a déjà des connaissances suffisantes pour traiter un exposé »
3.1.2 Hypothèse B « l’élève considère favorablement l’outil de l’exposé »
3.1.3 Hypothèse C « l’outil de l’exposé est favorable à une langue seconde »
3.1.4 Hypothèse D « cette séquence est utile et faisable en classe »
3.2 Analyse des résultats
3.2.1 Analyse des résultats de l’hypothèse A
3.2.2 Analyse des résultats de l’hypothèse B
3.2.3 Analyse des résultats de l’hypothèse C
3.2.4 Analyse des résultats de l’hypothèse D
3.3 Présentation des résultats
4 Apports et limites de la recherche
Conclusion
Liste des figures et tableaux
Bibliographie
Articles
Ouvrages
Sitographie
Article repéré en ligne
Page internet
Annexe A
Descripteurs des niveaux de langue
Annexe B
Grille progressive d’auto-évaluation
Annexe C
Grille d’évaluation par les pairs
Annexe D
Questionnaire 1 (pré-test)
Annexe E
Questionnaire 2 (post-test).
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