L’expertise : un levier de communication au service de l’image de marque de KPMG France

Soigner la première impression

   Pour espérer être reprise par les journalistes, toute étude doit assurer un premier pré-requis : la crédibilité de ses données et de sa méthodologie. « La mise en circulation des évaluations découle en partie de leurs propriétés formelles et génériques » explique Julie Bouchard. Si KPMG, comme nous l’avons vu, est considéré, de par son cœur de métier et ses infrastructures, comme un acteur en mesure de produire des résultats, encore faut-il que ces derniers se construisent en objet de discours. Pour être entendu, ils doivent inspirer confiance. Pour se faire, elle doit pouvoir témoigner d’un échantillon représentatif et conséquent. La pertinence de sa sélection répond à des critères variables selon l’étude en question mais reste l’élément indispensable à toute volonté de médiatisation. Dans le cadre de l’étude Les entreprises et la transformation sociale, bien qu’un focus ait été réalisé sur les très grandes entreprises (susceptibles d’avoir vécu des situations de fusion/acquisition), ce sont bien 400 dirigeants d’entreprise de 200 salariés et plus qui ont été interrogés, conformément aux recommandations de Romain Bendavid, Responsable des études Corporate pour l’IFOP. Le seul retour des entreprises de 500 salariés et plus, beaucoup moins nombreuses et plus difficiles à contacter, n’aurait pas permis de garantir le seuil symbolique, sur ce type de cible, des 300 sondés préalable à tout relais journalistique. Conformément à cette logique de poids numérique et d’importance des moyens déployés, les études internationales semblent bénéficier d’un « supplément de fiabilité » particulier. C’est en tout cas l’argument avancé par Héléne Cardy, chercheuse, dans son article intitulé Les classements et le fairesavoir médiatique : « Le caractère international [des] classements contribue à leur notoriété et à leur domination en tant que mode de distinction »44. Si toutes les études publiées par KPMG France ne revêtent pas une dimension internationale, elles sont nombreuses, sinon majoritaires, à être produites au niveau du Global – en collaboration avec les différentes entités nationales du réseau. « Proportionnellement, les études de l’international doivent représenter les 2/3 de nos communications »45, précise Hélène Carlander, PR Consultant chez KPMG France. C’est notamment le cas des études annuelles KPMG HR Transformation, Global Transformation Survey, Venture Pulse, CEO Survey, CIO Survey ou encore du Corporate Responsability Reporting. Le bench mark qu’elles proposent répond d’ailleurs à l’un des trois modes de la Presse Quotidienne théorisés par T.Baubias46 : le mode comparatif. Choisies parmi une dizaine d’études internationales publiées chaque mois, traduites, ces dernières sont toutefois ré-anglées avant d’être proposées aux médias français. Si la diversité de l’échantillon de ces études et le fait qu’elles transcendent les frontières est un élément favorable à leur diffusion dans l’espace médiatique, l’impact de leur caractère « international » reste en effet à nuancer. Sans une pointe de lucidité, Romain Bendavid, Responsable des études Corporate pour l’IFOP, éclaircit cet apparent paradoxe « En résumé, ce qui intéresse les médias français, c’est ce qui se passe en France. (…) Quand je me penche sur les études reprises, je n’ai pas l’impression de voir des tonnes de comparaisons avec l’international. De toute façon, on sait qu’en France on pense différemment. Si c’est pour apprendre que les autres ne pensent pas comme nous, ce n’est pas d’un grand intérêt ! »47. Ce constat, bien intégré aux routines des Relations Presse de KPMG, implique un modus operandi d’usage. Un focus France est systématiquement ajouté à la traduction des communiqués de presse, quand ceux-ci ne sont pas repensés complètement. Dans les infographies publiées sur les comptes sociaux de KPMG France, la France occupe une place importante et est, dans la mesure du possible, mise à l’honneur. Ces zooms « France » sont d’ailleurs proportionnellement plus partagés par les internautes. En ce sens, la dernière édition du KPMG CIO Survey intitulée Navigating Uncertainty fait figure de cas d’école. Interrogeant pour la 19ème année consécutive plus de 4000 directeurs et responsables de systèmes d’information (CIO ou DSI) dans 86 pays, soit, le plus large panel de DSI dans le monde, elle a été ré-anglée par le service presse de KPMG France de manière à mettre en avant les spécificités françaises, via, notamment la diffusion de visuels dédiés sur les comptes Twitter et KPMG du cabinet dont un présentant le message suivant : «La France investit dans la Digital Labour – 61% des entreprises françaises prévoient d’investir dans le Digital Lavour en 2017. C’est deux fois plus que dans le reste du monde ! »48. Dans son article consacré à l’étude du fairesavoir médiatique relatif aux classements, Hélène Cardy fait mention de l’intérêt d’un ancrage au territoire pour les journalistes : « La forme mais aussi le contenu des classements seraient d’autant plus favorables à leur dissémination dans la presse, dans le temps mais aussi dans l’espace, qu’ils démultiplieraient les rapports de proximité potentiels, notamment de proximité géographique, avec différents supports. La médiatisation des classements mettrait alors en scène un local qui se situerait à la croisée de sa représentation dans l’espace du classement, d’une part, et dans l’espace sociomédiatique, d’autre part »4. Les bénéfices d’un ancrage spatial semblent également s’appliquer à un ancrage temporel. Pour plaire, l’étude doit adresser les questionnements qui traversent la société à un instant donné. Romain Bendavid, Responsable des études Corporate IFOP confirme cette intuition : « Je pense que le premier prérequis, c’est que l’étude soit bien faite en amont. On parle ici d’une étude ayant un questionnaire pertinent avec à la fois des questions que se pose l’opinion et en même temps des questions originales ». Deux cas de figure se présentent alors. D’une part, l’étude peut être directement rattachée à l’actualité ; conduite dans l’urgence ou déjà produite, elle est utilisée comme accroche dans un contexte clef. C’est particulièrement le cas des études répondant au statut d’information sondage tel que théorisé par Wolton : « L’information-sondage est une photographie, à un instant T, de l’opinion publique. Elle traduit des réactions à un évènement qui a eu lieu, et nécessite une interprétation. Sa force consiste à coller à l’utilité en donnant l’impression d’apporter une réponse à une question que tout le monde se pose »51. L’étude Transformation Sociale a ainsi été pensée en anticipation de l’annonce des Ordonnances de la loi Travail par le gouvernement Macron ; l’une des questions portant sur l’impact perçu de la politique du président et de son gouvernement sur la dialogue social. Pour Marion Giroud, PR Manager chez KPMG France, tout l’enjeu reste de savoir saisir les enjeux de communication au moment où ils se présentent : « Dès que l’on remarque un sujet qui monte, on y va ! Faire de la communication c’est aussi savoir faire preuve d’opportunisme »52. Autre cas de figure, à l’annonce du dernier tour de table de YounitedCredit en septembre dernier (faisant d’elle la fintech française ayant levé le plus de fonds depuis sa création), c’est une étude déjà existante qui a permis à KPMG France de rebondir sur l’actualité. Son édition trimestrielle de l’étude The Pulse of Fintech Q2 2017, panorama du financement des Fintech dans le monde pour le Q2 2017, offrait en effet une excellente base de contextualisation aux articles parus sur le sujet. Julie Bouchard accorde une attention toute particulière à ce levier de communication dans La médiatisation de l’évaluation : « La parution des classements ne constitue pas en elle-même un évènement médiatique (…) ; il s’agit d’une ressource journalistique traitée et à traiter pour faire évènement. Détachées de leur contexte de production les classements sont médiatisés au prisme d’une recontextualisation (…) ». D’autre part, l’étude, sans coller à l’actualité brûlante, peut également être pensée de manière à s’inscrire dans de « grandes tendances » sociétales, sans perdre de vue les questionnements potentiels de l’opinion. A titre d’exemple, le raisonnement adopté par KPMG France préalablement à la création de son étude Femmes Dirigeantes s’inscrit tout à fait dans cette optique. Les femmes chefs d’entreprise ont-elles un mode de management différent de celui de leurs collègues masculins ? Quel est leur profil ? Comment aménagent-elles leur temps de travail ? Comment leur représentation dans la sphère publique évolue-t-elle ? A l’heure des discours sur la parité, cette étude répond aux questions de l’opinion et offre une autre approche. Elle s’est d’ailleurs révélée pérenne puisqu’à la date du 19 septembre dernier, elle enregistrait un total de 125 retombées médias réparties sur la période allant de décembre 2014 à juin 2017. Selon Marion Giroud, il s’agit dès lors pour le cabinet de se connaître lui-même avant de comprendre les sujets qui font son environnement – « Il faut connaître son entreprise pour pouvoir la « pluguer » à l’air du temps ».

L’expertise pour ADN

   KPMG France doit son activité à trois grand piliers : l’audit, le conseil (appelé Advisory) et l’Expertise Comptable. Si les deux premiers piliers sont aujourd’hui les plus largement médiatisés, c’est le troisième qui est à l’origine du cabinet. KPMG est en effet né de la fusion de la société Peat Marwick International avec le cabinet d’expertise comptable William Barclay Peat. Selon le dernier classement du magazine Profession Comptable, c’est KPMG qui, parmi les Big Four, occupe la première place avec ses 961 millions d’euros de chiffre d’affaires ; un chiffre qui a progressé de plus de 3% entre septembre 2015 et septembre 2016. Au delà de son caractère international, le cabinet compte 238 bureaux en France, bénéficiant d’un ancrage, d’un maillage régional très étendu lui-même vecteur d’expertise comme le rappelle Alice Vasseur, Communication Manager : « On a vraiment une expertise locale qui consiste à connaître parfaitement le tissu économique régional et donc d’avoir des liens et des relations avec tous les entrepreneurs de la région, avec toutes les institutions de la région, avec les chambres de commerce, les pôles de compétitivité »64. En soi, la marque KPMG est elle-même un gage d’expertise. Elle fait figure d’éternel hier au sens Weberien du terme. L’expert KPMG tire sa légitimité d’un principe extérieur passé qui lui confère une forme d’autorité, la marque lui servant de référence. Marion Giroud, PR Manager développe cette notion « C’est une force que l’on a chez KPMG d’être un gros cabinet, bien identifié, historiquement identifié, un cabinet qui a fait ses preuves sur le marché (…). On bénéficie d’une crédibilité, en tout cas avec les Big et avec quelques autres cabinets sur le marché français ET international. C’est cette caution morale d’un expert fiable, historiquement identifié, que les journalistes viennent chercher comme une cerise sur le gâteau ». Elle ajoute à cette notion de perception, l’idée d’un « prérequis de l’expertise qui n’est jamais remis en cause par l’espace public. KPMG a une telle légitimité en tant que source d’experts que l’on peut partir du principe que si l’on présente la personne en tant qu’expert, elle est experte. (…) Ce n’est pas quelqu’un qui sort de nulle part. (…) La provenance de la personne vient alimenter, au-delà de ce qu’elle peut dire, un a priori d’expertise »65. Cette forme d’évidence répond à une image de marque, une réputation construite sur la durée qui viennent nourrir l’argumentaire. Tous les experts de KPMG ne sont bien sûr pas médiatisés, seuls les associés le sont et seuls certains d’entre eux ; mais si les employés de KPMG ne sont pas tous experts médiatiques, ils bénéficient tous de cet a priori d’expertise venant d’une part, de la marque KPMG, d’autre part, de leur statut d’expert-technicien. Cette dernière notion, étape précédant la position d’expert-communiquant, a été théorisée par François Bourricaud : « L’expert, c’est celui qui, maîtrisant son domaine de compétence dans sa totalité, peut fournir à la demande une analyse pointue ou une vision d’ensemble, voire les deux tour à tour. L’expert c’est celui qui peut mobiliser à la fois une compétence théorique et un savoir-faire technique »67. KPMG est une marque experte et d’experts. Soit ils travaillent dans le domaine de l’expertise comptable ou de l’audit et sont donc généralement experts diplômés Commissaire au Compte ou Expert Comptable. Soit ils sont consultants et tirent leur expertise d’une expérience de terrain : « Du côté Advisory (…) c’est un métier d’experts plus opérationnels. (…) C’est en menant beaucoup de missions et en accompagnant beaucoup de clients que tu finis par savoir ce qui marche, ce qui marche moins donc tu vends une expertise qui est plus pragmatique (…). C’est également croisé avec l’expertise sectorielle. En général, tu es affilié à un secteur et donc tu accumules des connaissances autour de ce domaine spécifique ». Ce qui apparaît d’autant plus intéressant ici, c’est que les experts-techniciens semblent avoir intériorisé leur statut, facilitant une potentielle médiatisation de leur personne. David Gautron, Manager Communication Interne au sein de KPMG France décrit cette autoperception en ces termes : « C’est-à-dire que oui, les gens arrivent, se pensent et croient être des experts. Ça c’est sûr. Ce n’est pas quelque chose que tu auras forcément dans une boîte d’ingénieurs où c’est beaucoup plus préintégré à l’activité de production. Là on est plus dans une entreprise de brain… ». En interne, au sein du service RH, les nouvelles recrues sont d’ailleurs qualifiées non pas de candidats mais de « talents », renforçant cette notion. Les experts vont d’ailleurs se nourrir entre eux. « Si les experts KPMG sont de bons experts, c’est aussi car ils se nourrissent de l’expertise du cabinet » rappelle Caroline Croce-Spinelli, Directrice de la Communication de KPMG France. Intuition confirmée par Hélène Carlander, PR Consultant en lien permanent avec les experts porte-parole du cabinet « On a aussi une vision du marché en général qui permet aux experts de mettre en perspective leur propre secteur. Ils ont la connaissance de leur secteur mais ils ont aussi la connaissance du marché dans sa globalité et une culture peut-être, plus globale.71 » En somme et de manière intrinsèque, l’expertise fait partie intégrante de l’ADN de KPMG, rendant son terreau propice à l’émergence d’experts dans les medias. Pour Marion Giroud, il s’agit de s’appuyer sur ce socle « ça fait partie de notre ADN, ça permet de valoriser ce sur quoi l’on est déjà reconnu, donc on creuse le sillon ».

Experts & valeur ajoutée : pouvez-vous répéter la réponse ?

   Afin de saisir le phénomène de médiatisation des experts KPMG dans son intégralité, il convient de s’intéresser aux motifs qui incitent les journalistes à faire appel à eux. Plusieurs motivations peuvent être évoquées. Pour Boudon, « L’implicite est une composante essentielle de l’interaction sociale »108. C’est bel et bien un contrat tacite d’interdépendance qui régit l’interaction expert/journalistes. A en croire Yves Chevalier, « L’expert confirme, par sa présence, la complexité du champ qui motive son intervention (…) et légitime le plateau du journal télévisé en tant qu’instance de clarification universelle et de transparence démocratique »109. En d’autres termes, l’expert est pareil à un personnage, à une figure symbolique participante de l’histoire conçue par le journaliste. Son rôle est précis, défini en amont : « Ces experts ne constituent pas une menace identitaire pour les journalistes de télévision. Ces derniers savent les cantonner dans leur créneau précis et en rentabiliser l’image à leur profit. Ils occupent une place précise dans l’économie de l’information dont le médiateur garde un strict contrôle »110. L’article, l’émission, est semblable à une symphonie dont l’expert jouerait une partie de la partition, le rôle de chef d’orchestre revenant au journaliste : « Il s’agira alors d’actes de parole ou d’image, plus fugaces, qui inscrivent leur pouvoir sémantique dans une temporalité plus restreinte, davantage faite de juxtaposition d’instants que de continuité historique : éléments à la fois puissants et fragiles, de constructions symboliques en perpétuel devenir et réajustement ; synchronie et non plus seulement diachronie »111, explique Yves Chevalier. Conformément à une notion développée par Daniel Dayan, le media ne se donne pas uniquement à voir, il se donne à voir « avec », s’inscrit dans un modèle production/reconnaissance moteur de la sémiosis sociale. Si l’expert est légitimé par le journaliste, la vision dudit journaliste, son histoire, sont quant à elles corroborées par l’intervention de l’expert. Hélène Carlander identifie deux modèles situationnels : « Soit les journalistes ont leur papier qui est à peu prêt et ils ont besoin de corroborer tout ce qu’ils ont déjà pu récolter comme information ; (…) dans la plupart des cas, les journalistes ont besoin d’une caution pour leur article, une forme de caution morale si j’ose dire, et ils vont la chercher chez l’expert. » Soit « ce qu’ils viennent chercher en plus de la caution morale, c’est aussi parfois l’angle qu’ils n’avaient pas forcément vu venir. Ils viennent chercher la prise de hauteur sur le sujet qu’ils développent, sur une tendance, sur un secteur, qu’ils n’ont pas forcément et qui va leur permettre de nourrir via un angle complémentaire leur article/émission ». Dans le cas de l’étude Les entreprises et la transformation sociale, Pierre-Laurent Seguin, interviewé par Les Echos a eu le sentiment de vivre la première option : « En réalité, la journaliste n’avait pas besoin de moi, elle avait déjà écrit son article. En revanche, elle voulait avoir des clarifications sur le contenu, sur certains points : est-ce qu’elle avait bien compris ? Est-ce que c’était bien de ça dont il s’agissait ? Je pense qu’elle avait envie que je confirme ce qu’elle voulait écrire, que j’apporte ma caution »115. Ce schéma répond à une logique représentative à la mécanique bien huilée, éprouvée, à des stratégies discursives ayant pour fonction de simuler une demande et de présenter la réponse de l’expert comme l’offre censée y répondre : « C’est le journaliste qui reste maître de l’instrumentalisation et du cadrage des interventions de l’expert. D’ailleurs, ce dernier ne répond qu’aux questions que lui pose le journaliste ». Pour les journalistes en quête de source fiable, KPMG, de par sa structure, peut arborer des airs d’eldorado. « Les journalistes savent que l’on est expert un peu de tout. C’est incroyable le nombre de demandes presse que l’on reçoit sous la forme d’un « J’ai un sujet sur les nouveaux modèles bancaires, est-ce que vous avez quelqu’un ? » (…) On vient rarement nous solliciter en nous demandant une interview de Stéphane Botz ou de Fabrice Odent. (…) Là, par exemple, je peux te montrer un message d’un journaliste BVFM TV Business qui me dit « Bonjour Marion, est-ce que vous avez un spécialiste de la conduite du changement dans le secteur public qui pourrait venir nous en parler ? »»117. Selon Hélène Carlander, l’attrait de KPMG pour les journalistes est d’autant plus fort qu’il s’inscrit dans un univers ultra-concurrentiel. Alors que pour les experts de tout ordre, les médias font désormais office de Cour des Miracles, il faut pouvoir garantir la pertinence de sa source, de son invité : « Je pense que pour eux [les journalistes], la recherche de l’expert vraiment fiable est devenue hyper importante du fait justement de cette multiplicité de potentiels porte-parole, de potentiels experts qui fait qu’ils ont de plus en plus besoin de la caution de l’expert mais de l’expert qu’ils connaissent, qui est reconnu par un marché »118. Dans le cabinet, la personne de Frédéric peut faire figure de référence. Reconnu à la fois par son pair, Pierre-Laurent Seguin – « je pense à Frédéric Thomas qui est expert du secteur de la santé. C’est un vrai expert. Toute sa vie il a travaillé dans ce secteur là. Il a été opérationnel dans le secteur pharmaceutique, c’est un expert en pratique et c’est un expert des problématiques de la santé »119, son potentiel est également largement loué par le service Presse de KPMG France, notamment par Marion Giroud. Invitée à évoquer la marque KPMG France en tant que caution d’expertise conférée aux experts médiatisés du cabinet, elle s’arrête sur le cas particulier de Frédéric Thomas, qui selon elle, continuerait à être identifié en tant qu’expert même s’il était amené à quitter le cabinet : « On le voit sur les personnes qui arrivent dans le cabinet et pour qui on a des demandes presse – c’est aussi là-dessus que l’on constate la notoriété sur un marché. Ça a été le cas pour Frédéric Thomas, dès qu’il est arrivé, parce qu’il est expert de la santé. On immédiatement été sollicités : « J’ai su que Frédéric Thomas était expert chez vous, est-ce que je peux lui parler ? ». Lui est expert indépendamment de la marque KPMG. Il est venu avec son aura d’expert quand d’autres arrivent sans cette aura d’expert médiatique – cela ne veut pas dire qu’ils ne sont pas reconnus sur leur marché – mais leur figure va elle être construite via la marque KPMG »120. Frédéric Thomas comme les autres porteparole du cabinet rassurent par leurs antécédents, leur expérience, leur employeur. Dans cette configuration, l’unique point de vigilance tient peut-être à ce que l’on pourrait qualifier de dosage. Cette question est posée par Marion Giroud : « On revient sur la notion de KPMG en temps que marque experte et d’experts : comment est-ce que tu doses justement, le nombre d’experts que tu lances sur le marché ? A force d’être des experts, est-ce que l’on ne met pas, justement, sur l’espace public, trop d’experts ? ». Le cabinet présente en effet un nombre conséquent d’expertises touchant à des domaines très variés. Certains experts, comme Fabrice Odent, spécialiste de la Banque vont présenter un profil assez généraliste quand d’autres seront cantonnés à des sujets beaucoup plus particuliers comme les normes IFRS par exemple. Une même marque – KPMG France – abrite des références très variées. Alors que certains acteurs comme des cabinets spécialisés dans la transformation RH, des grandes écoles dédiées à l’apprentissage de la politique ou de l’économie ou des entreprises exerçant dans le secteur de l’énergie vont pouvoir être sollicitées sur leur domaine de prédilection, KPMG répond à une dynamique plus large qui, si elle fait sa force, peut aussi faire sa faiblesse ; l’analyse d’un consultant pouvant être jugée moins pertinente quel l’expérience d’un acteur en présence.

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Table des matières

INTRODUCTION
I. La publication d’études par KPMG : un alibi de communication qui séduit les médias 
1) Etudes : le pourquoi du comment 
Etude & Business : l’avantage du terrain
Qualimesures & images du monde : refléter le thought leadership
2) Etudes : secrets de séduction 
Soigner la première impression
Entretenir la relation
II. KPMG : une fabrique d’experts
1) KPMG France : un terrain propice à l’émergence d’experts 
L’expertise pour ADN
Expert et études : un mariage heureux
2) Les experts à l’épreuve des médias : vers une incarnation de l’expertise 
Mise en scène de l’expertise, le retour des unités
Experts & valeur ajoutée : pouvez-vous répéter la réponse ?
III. KPMG : des experts comme les autres ? 
1) L’expert, une figure symbolique 
A la poursuite du légitime
Elite déchue, scientisme & suspicion
2) L’expert KPMG à l’épreuve des symboles 
La fiabilité pour étendard
Les limites d’une incarnation
RESUME
Mots clefs
BIBLIOGRAPHIE

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