L’expérience de mobilité dans le cadre migratoire

La mobilité est une notion aussi polymorphe que polysémique. D’un point de vue général, la « mobilité » des personnes est conçue principalement comme un déplacement physique présent à différentes échelles du temps et de l’espace, depuis les déplacements quotidiens jusqu’aux mouvements plus complexes comme la migration internationale, en passant par les changements résidentiels. Cependant, loin de se réduire aux déplacements dans l’espace, la mobilité comprend également le passage d’un rôle social à un autre. Il s’agit de la «mobilité sociale », qui a pris une place importante dans les études sociologiques. Au-delà de ces deux acceptions classiques – à savoir, spatiale et sociale – de la mobilité, cette notion concentre de nos jours un nombre important de significations qui se traduisent par un élargissement de son champ : on parle ainsi de mobilité virtuelle, représentationnelle ou imaginaire. Prenant en compte cet élargissement, nous adhérons à la pensée de l’École de Chicago, qui considère que la mobilité est un événement marquant dans la vie des personnes, ce qui la distingue d’un « simple » déplacement.

Dans la société actuelle, nous assistons à une extension quantitative et qualitative de la mobilité : elle est valorisée comme un symbole d’ouverture, de liberté, de progrès individuel et collectif et comme une condition nécessaire à l’insertion sociale des individus. Nonobstant, toutes les mobilités ne font pas l’objet de la même valorisation sociale. La mobilité suppose une diversité de compétences personnelles, une volonté de se déplacer, mais également la détention d’un capital économique et social. Ensemble, ces facteurs constituent le capital de mobilité. Mais, comme tout capital, la mobilité n’est pas distribuée de manière égalitaire entre les individus habitant différents espaces géographiques ni entre les individus au sein d’un même espace physique.

LA MOBILITE, UNE NOTION POLYSEMIQUE

Le mot « mobilité » – du latin mobilitas – possède trois acceptions : i) caractère de ce qui peut se mouvoir ou être mû, changer de place, de position ; ii) caractère de ce qui change rapidement d’aspect ou d’expression ; iii) au sens figuré, il est appliqué à la mobilité de sentiments, de l’humeur, de la volonté . Ces acceptions ont en commun la référence à quelque chose qui n’est pas fixe. Bien que la définition semble simple, la mobilité dans le champ scientifique est une notion polysémique, aussi bien par les objets qu’elle désigne que par ses champs d’application.

MOBILITE PHYSIQUE

La « mobilité » est l’une des notions clés de la pensée sociologique. Employée sans qualificatif, elle évoque le déplacement physique des individus d’un point d’origine à un point de destination. Au sens général, la « mobilité » des personnes est donc conçue principalement comme un déplacement physique à différentes échelles du temps et de l’espace.

Le psycho-sociologue Michel Bonnet affirme que « le temps du déplacement a non seulement un sens individuel mais également un sens social et un sens économique par son inscription dans le contexte de vie des acteurs ». Ainsi, il observe que l’approche des déplacements du seul point de vue des ingénieurs de trafic reste limitée pour expliquer le phénomène. En revanche, le terme « mobilité» peut être élargi en « complexifiant les approches « origines/destination » traditionnelles ».

Nonobstant, l’utilisation de la notion de mobilité est souvent restreinte. En effet, comme le suggèrent des auteurs tels que Le Breton et Kaufmann , plusieurs études sur la mobilité se focalisent notamment sur le transport. Or, les nombreuses transformations qui ont lieu dans les villes conduisent à interroger le concept de mobilité au-delà des déplacements des individus, en questionnant la construction des identités territoriales des groupes sociaux . Il s’agit donc de prendre en compte les pratiques de mobilité et les vécus de ces pratiques, mais aussi les mobilités « négatives », c’est-à-dire les non-déplacements.

Michel Bassand et Marie-Claude Brulhardt définissent la « mobilité spatiale » comme « tout déplacement dans l’espace physique (ou géographique) des acteurs (individuels et collectifs) d’une société, quels que soient la durée et la distance du déplacement, les moyens utilisés, les causes et leurs conséquences».

En prenant en compte les dimensions de la temporalité (durée longue ou courte) et de l’espace (interne ou externe au bassin de vie  ), Caroline Gallez et Vincent Kaufmann envisagent quatre types de mobilité: i) la mobilité quotidienne (temporalité courte, interne) ; ii) la mobilité résidentielle (temporalité longue, interne) ; iii) le voyage (temporalité courte, externe) ; iv) la migration (temporalité longue, externe).

La mobilité quotidienne concerne les déplacements ponctuels et normalement de courte durée, c’est-à-dire des déplacements circulaires (aller/retour) dans le cadre d’une mobilité locale , qui s’opèrent dans la vie de tous les jours pour accomplir une tâche routinière. Les mouvements pendulaires (ou navettes) effectués dans la relation habitat/travail sont l’un des principaux facteurs de la mobilité quotidienne. Les recherches menées au cours de ces dernières années se focalisent sur ce type de déplacements, en les considérant comme « une spatialisation des modes de vie ».

Les trajets hebdomadaires sont également associés à la routinisation des mouvements, sans pour autant impliquer un déplacement quotidien. Ce type de mobilité est caractéristique des étudiants qui retournent le weekend au foyer parental. De leur côté, les mouvements saisonniers concernent principalement les travailleurs agricoles et touristiques. En dehors de la relation habitat/travail, c’est à-dire pendant « le temps libre », les individus se déplacent pour une diversité de motifs afin d’effectuer des activités contraintes ou choisies : faire des achats, s’amuser, faire des démarches, visiter ou accompagner quelqu’un, etc.

Étant donné la croissance urbaine, les moyens de transport et les différents rapports au temps et à l’espace qu’ils impliquent selon les manières de se déplacer – à pied, à vélo, en voiture, en métro, en train… –, cette problématique se trouve aussi au cœur des études sur la mobilité quotidienne. Jean-Pierre Orfeuil constate une forte dépendance entre les localisations résidentielles et les niveaux de mobilité. Dans une perspective historique, Jean Ollivro observe, quant à lui, qu’avant la première moitié du XIXe siècle la mobilité en fonction de la vitesse n’était pas un facteur de distinction entre les classes sociales. Cette situation a changé avec la révolution industrielle, qui a entraîné le développement des vitesses mécaniques et des moyens de communication.

La mobilité résidentielle est un déplacement à petite échelle – déménagement de quartier ou de ville – qui répond à un changement de logement suivant l’évolution des besoins ou des contraintes des individus. Dans ce type de mobilité spatiale, il n’y pas une intention de retour à court terme.

Éric Moore distingue quatre types de motivations qui peuvent conduire les individus à déménager :
i) les décisions extérieures (comme la démolition de l’immeuble, par exemple);
ii) les événements particuliers (divorce, changement de revenu familial, par exemple) ;
iii) le changement des besoins ou la détérioration de certains aspects de l’environnement ;
iv) l’offre de logement ailleurs avec plus d’avantages que dans le logement actuel. Ces catégories ne sont évidemment pas exclusives. Les deux premières concernent des déménagements involontaires, et les deux autres, des mobilités résidentielles volontaires .

La mobilité résidentielle est fortement liée à l’âge des individus, à leur statut marital et au nombre d’enfants qu’ils ont. Dans une analyse des données des derniers vingt ans en France, Thierry Debrand et Claude Taffin observent une baisse de mobilité résidentielle de courte distance, ce type de mobilité diminuant avec l’âge. Ils constatent également que, outre l’âge, les revenus et les diplômes sont aussi des facteurs explicatifs de ce type de mobilité .

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Table des matières

Introduction
Première partie. L’expérience de mobilité dans le cadre migratoire
Chapitre I. Des diverses acceptions de la notion mobilité a une définition multidimensionnelle
1.1. La mobilité, une notion polysémique
1.1.1. Mobilité physique
1.1.2. Mobilité sociale
1.1.3. Mobilité physique et sociale : des phénomènes corrélés
1.2. La multidimensionnalité de la notion mobilité
1.3. L’augmentation de la mobilité dans la société de nos jours
Chapitre II. Les multiples mobilités de la migration internationale
2.1. Migration et mobilité à l’ère de la mondialisation
2.2. Formes de mobilité en migration
2.2.1. Mobilité physique
2.2.2. Mobilité sociale
2.2.3. Mobilité relationnelle
2.2.4. Mobilité virtuelle
Chapitre III. Comment étudier l’expérience de mobilité des migrants ?
3.1. Etude de cas : les migrants chiliens en France
3.1.1. Les migrations latino-américaines
3.1.2.La migration chilienne et ses particularités
3.1.2.1. Les caractéristiques de la migration chilienne
3.1.2.2. Les spécificités de la migration chilienne
3.1.3.Les migrants chiliens en France
3.2. Aspects méthodologiques
3.2.1. Biographies de mobilité
3.2.2. Échantillonnage
3.2.3. Du terrain à l’analyse
Conclusion partie I
Deuxième partie. La mobilité physique et sociale des migrants chiliens en France
Chapitre I. L’expérience de mobilité physique
1.1. « Partir »
1.1.1. Expériences préalables de mobilité
1.1.2. Destination : La France
1.2. « Rester »
1.3. « Retourner »
1.4. « S’installer dans la mobilité »
Chapitre II. L’expérience de mobilité sociale
2.1. Les diplômés
2.2. Les migrants non qualifiés
2.3. Les migrants-étudiants
2.4. Les enfants des migrants chiliens
Conclusion partie II
Troisième partie. La mobilité relationnelle des migrants chiliens en France
Chapitre I. Caractéristiques générales des réseaux sociaux
1.1. La cohésion et l’étendue
1.2. L’homophilie
Chapitre II. Les spécificités des réseaux des migrants
2.1. Les amis et la famille au cœur des réseaux sociaux des migrants
2.2.L’intensification des liens dans le contexte migratoire
2.3. La dynamique des réseaux sociaux migratoires
2.4. Liens sur place et liens médiatisés
2.5. L’intégration relationnelle
2.5.1. Les réseaux cosmopolites
2.5.2. Les réseaux à tendance chilienne
2.5.2. Les réseaux à tendance française
Chapitre III. La mobilité socialemente construite
3.1. Réseaux sociaux et mobilité physique
3.2. Réseaux sociaux et mobilité sociale
3.3. Le soutien pratique et affectif chez les migrants
Conclusion partie III
Conclusion

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