La mutation de société implique l’évolution de la Loi pour satisfaire à des préoccupations tant classiques comme l’harmonie sociale, l’Ordre public, que nouvelles comme la protection des droits et libertés fondamentales des individus et la sécurité juridique. A cet égard, les institutions Etatique modernes ont chacune leurs apports dont, le parlement pour édicter la Loi, le pouvoir exécutif pour l’appliquer et les juridictions chargées de le contrôler et veiller à son application. « Qui dit Loi, dit pouvoir législatif » qui est le pouvoir éminent dans l’État consistant à discuter et voter les lois . Appartenant au parlement, ces attributions ne se limitent pas à la fonction législative, mais également à la fonction représentative et la fonction de contrôle. La première se résume donc à légiférer la loi et d’apporter des modifications par voie d’amendement.
Depuis son indépendance, l’État malgache a rencontré des modifications institutionnelles, notamment la forme du parlement. La première et la troisième République sont marquées par un législatif bicaméral, alors que la seconde République se distingue par un parlement socialiste monocaméral dépourvu du Sénat, avec l’Assemblée Nationale populaire . Il va s’en dire que la quatrième République a perpétré la forme bicamérale à la suite de la troisième. Ces changements institutionnels soulèvent une importance non négligeable qu’il convient d’appréhender amplement.
La fonction législative, un processus évolutif inséparable au Droit
Pour parvenir au concept « législative » se rattachant au travail qui incombe au pouvoir législatif, il faut s’attarder sur la notion de Droit et plus précisément de la loi. De ce qui en découle, l’histoire de la fonction législative ne peut être étudiée qu’avec le concours de l’histoire du Droit qui fait office d’une discipline juridique propre. L’étude à la fois du Droit et de son histoire se rapporte à son contexte sociologique qu’est la Société.
Le Droit dans la société
«Ubi sociétas Ubi jus », selon cet adage « là où il y a la société il y a le Droit », donc il faut se référer à une société donnée pour déterminer une règle juridique. Cette affirmation est une constatation des réalités sociales par la doctrine juridique et les historiens. Force est de constater que dans toute société, il y a une règle impérative à caractère obligatoire et qui demeure une vérité indéniable, quelle que soit l’étape de l’histoire à soulever. À titre d’illustration, la règle qui prohibe le vol remonte à l’apparition de la forme sociétale et tend à la protection de l’Ordre public.
S’il faut remonter au tout début, comme la période avant l’antiquité ou plus, le Droit se manifesta à travers les règles divines telles que les droits juif, musulman, et royal comme le Code d’Hammourabi en Mésopotamie ou égyptien avec les hiéroglyphes anciens. Dans ces cas de figure, ils relèvent des anciens textes codifiés découverts par les historiens du droit. Il s’en suit la production des divers textes de loi à travers le passée s’il ne faut citer que le Code civil promulgué en 1804, modifié plusieurs fois par la suite dont une vague de codification de différentes lois s’en suit. Fortement débattu par la doctrine quant à son origine, de son rapport avec l’histoire, il convient de ne pas s’attarder là-dessus en appréciant le Droit comme l’ensemble des règles de portée générale et coercitive codifiées par le législateur quelles que soient leurs sources. Ainsi, « le droit né de la coutume est tout autant un mythe que le droit conçu de toutes pièces par un législateur herculéen » . La rédaction et la codification des règles juridiques impliquent à cet égard l’existence des travaux législatifs et notamment par les juristes. De ce qui précède, la loi a comme source la société. La vraie question qui se pose est de savoir qui est le titulaire apte à édicter des normes de droit dans une société donnée et à un moment donné ?
Légiférer, un pouvoir social: cas de la démocratie grecque
Comme la loi est d’origine sociale, il apparait que le législateur provient de la Société. Pourquoi parler de la société grecque ? La civilisation grecque était marquée par une forme de démocratie. Étymologiquement «démos » ou peuple et « kratos » ou pouvoir, c’est le gouvernement du peuple. La Grèce antique avec la cité Athénienne est l’une des civilisations anciennes formées d’érudit avancé dans les connaissances sociales, scientifiques, juridiques et bien plus. La spécificité qu’il faut relever de cette société c’est la prise de décision par participation directe des citoyens au vote, soit la démocratie directe. Ainsi, des réunions de l’assemblée délibérative étaient constituées pour l’adoption de grandes décisions, en matière de justice et d’élaboration de la loi. Chaque individu est titulaire du pouvoir de faire la loi, ou de s’opposer à une proposition de loi. L’évolution de cette communauté étant le reflet de l’organisation et du fonctionnement de la société contemporaine avec un aperçu de l’idée de parlement, de représentativité, de la participation directe du peuple dans le processus législatif, et spécialement de l’assemblée délibérante. L’organisation de la cité est alors basée sur la souveraineté populaire. En effet, le pouvoir de faire la loi appartient à chacun dans une communauté aussi évoluée dont les traits caractéristiques de l’assemblée moderne remontent à cette époque. Une proposition de loi par l’assemblée est appréciée comme la genèse de l’initiative populaire en démocratie directe, du procédé de délibération par vote à main levée, du système de remplacement des parlementaires absent par le système de mandat, et de la réunion à l’hémicycle. La civilisation athénienne a mis en place un bon système que le monde imitera plusieurs siècles plus tard. L’histoire a décelé que la pratique des réunions collectives sera une habitude et que c’est l’assemblée qui résume mieux la façon grecque de concevoir la politique . Non seulement dans le domaine politique, mais également judiciaire, la consultation et la souveraineté populaire assurent la portée générale, et concomitamment la représentative des lois grecques comme la manifestation de l’intérêt général. Ainsi la réunion en assemblée aboutissait à une délibération par un vote. En ce sens et comme dans système moderne, c’est la majorité démocratique qui l’emporte. Approuvée en séance publique, une décision s’applique ayant force de loi.
À cet effet, elle devient obligatoire et devrait être « irréversible » comme l’affirme José ANTOINE dans une publication intitulée « Participation directe et démocratie grecque. Une histoire exemplaire ?» Cette forme de démocratie de proximité maximise la participation directe des citoyens dans la vie de la cité. Comme le soutient l’auteur ci-présent, la conséquence immédiate permet d’apprécier les travaux de l’assemblée contrairement à l’époque contemporaine où le débat parlementaire n’a d’importance directe sur les citoyens et aux politiques face au parlement réduit à des chambres d’enregistrement des initiatives législatives des gouvernements . La démocratie directe comportant ses inconvénients majeurs liés à l’abus de majorité et la prise en considération de la minorité a bien évolué à l’époque contemporaine. Ainsi, il faut en déduire de cette situation qu’elle marque un tournant important dans le fonctionnement du pouvoir législatif démocratisé.
Le pouvoir législatif à travers la monarchie
La monarchie est le gouvernement d’un État par une seule personne dont monarque ou du roi. Le pouvoir se transmet par voie héréditaire contrairement à l’idée de République qui interdit ce procédé. Dans la monarchie royale comme le cas de la Grande-Bretagne, rattacher à sa noblesse le pouvoir législatif relève du monopole du Roi ou de la Reine avec des conseillers qui sont les législateurs secondaires n’ayant comme privilège que le rôle de consultant. À ce titre, la Loi ne reflétait nullement la volonté générale, mais dont la force coercitive et obligatoire n’est plus à démontrer. Comment était la fonction législative de l’époque ? Face à cette interrogation, et considérant le caractère individuel de la loi royale en opposition avec les règles de portée générale, le pouvoir s’apparent à un aspect de la fonction législative moderne.
Pour la France dans l’ancien régime vers le XVIème et XVIIème siècle se met en place une monarchie absolue, une concentration de pouvoir est constatée. À la fois législateur juge et exécutant cette partie de l’histoire ne caractérise en effet la fonction législative telle qu’elle devrait l’être. L’arrivée du constitutionnalisme a apporté une consécration plus solennelle du pouvoir législatif dans la monarchie constitutionnelle, avec un rôle symbolique du Roi. En opposition avec la monarchie absolue, la monarchie constitutionnelle est une monarchie règlementée à travers l’ordre constitutionnel. Manifeste par l’existence d’une Constitution qui fixe des limites au pouvoir en place. Pendant les périodes caractériser par une forte concentration de pouvoir a suscité par la suite le renouveau de la fonction législative par l’avènement de la théorie de séparation des pouvoirs.
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Table des matières
INTRODUCTION
Partie I. Le parcours de la fonction législative pour aboutir à Madagascar
Chapitre I. La fonction législative, un processus évolutif inséparable au Droit
Section I. Le Droit dans la société
I. Légiférer, un pouvoir social: cas de la démocratie grecque
II. Le pouvoir législatif à travers la monarchie
Section II. La séparation des pouvoirs et avènement du pouvoir législatif
I. L’origine du parlement à la base de la séparation des pouvoirs
II. La séparation des pouvoirs : entre vertu et aménagement
A. La séparation selon les pères fondateurs : John Locke et Montesquieu
B. Les limites et aménagements de ce principe
Chapitre II. L’évolution de la fonction législative à Madagascar
Section I. L’aspect du bijuridisme du temps de la colonisation
I. Le droit indigène et colonial pendant la colonisation
II. Le législateur avant l’indépendance de 1958
Section II. Le mimétisme après l’indépendance
I. Le système malgache calqué sur le modèle français
II. Le Parlement et les travaux législatifs dans les Républiques malgaches
A. L’évolution de l’institution du parlement à Madagascar
B. La fonction et le travail législatif, et institutionnalisation du bijuridisme
Partie II. L’approche critique vers une fonction législative appropriée au cas malgache
Chapitre I. L’état de la fonction législative contemporaine malgache
Section I. Une Constitution fluctuante, base de l’activité législative
Section II. L’exécutif à statut privilégié en défaveur du parlement
Section III. La domination de l’exécutif sur le parlement
Chapitre II. Les maux rattachés à l’exercice de la fonction législative
Section I. Le problème lié à la personne du parlementaire
I. La primauté des intérêts privés sur l’intérêt public
II. Le défaut ou déficit de projet de société portant apport législatif
III. La sous-utilisation de l’initiative parlementaire : l’incompétence
Section II. Les obstacles inhérents à l’exercice de la fonction elle-même
I. Les limites constitutionnelles dans l’initiative parlementaire
II. Le droit d’amendement parlementaire mal maitrisé
III. La rareté du débat parlementaire
Chapitre III. Les défis et perspectives d’amélioration de ladite fonction
Section I. Les reformes extérieures à l’exercice de la fonction
I. La délimitation des domaines du règlement autonome, un mythe ou une réalité ?
II. Le renforcement des conditions d’accès à la fonction parlementaire ?
Section II. Le réaménagement de l’institution parlementaire
I. Le renforcement des capacités techniques du législateur
A. La formation juridique et sur les règles de jeux
B. L’assimilation des méthodes de travail légistique
C. L’extension de la formation à l’éducation citoyenne
II. L’amélioration du budget parlementaire et la mise en place de nouvelle instance technique dans les assemblées
III. La modernisation de la pratique législative
A. La transparence et la publication des travaux parlementaires
B. L’informatisation effective des données des assemblées
C. La promotion des femmes dans la fonction législative
Section III. La fonction législative telle qu’elle devrait être
I. La revalorisation du droit d’initiative originaire et dérivée
II. Le critère de clarté et d’intelligibilité de la loi
CONCLUSION
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