L’évolution des dâ’iras mourides

Résultats attendus

    Enfin notre recherche vise les résultats suivants : Premièrement, le contexte socioreligieux du Sénégal d’alors et les raisons qui ont poussé Serigne Cheikh Ahmadou MBACKE à initier le système du dâ’ira dans l’organisation générale de la confrérie des mourides seront compris. Puis, la genèse et l’évolution des dâ’iras mourides à l’intérieur du Sénégal de 1967 à 2007 seront bien expliquées avec les moindres détails. Pour finir, une étude critique sur le fonctionnement général des dâ’iras sera menée. A l’issue de cette étude, des recommandations seront livrées afin de restaurer les vraies valeurs des dâ’iras.

Le soufisme musulman

    Le Soufisme encore appelé le Taṣawwuf, selon la définition du professeur Saliou Ndiaye, est « une doctrine musulmane qui théorise l’application d’un ensemble de pratiques plus ou moins systématisées et bâties sur une tendance à l’ascétisme, à la dévotion ». En exploitant cette définition, nous constatons que le soufisme est un dévouement systématisé intense et sincère basé sur des textes authentifiés de l’Islam que l’aspirant observe strictement pour la face d’Allah. Au cours de son évolution, le soufisme a connu trois étapes : du simple ascétisme individuel, en passant par le soufisme collectif, au soufisme populaire ou confrérique» : Le soufisme individuel est connu depuis le temps des compagnons du prophète (PSL), il s’agissait de l’ascétisme individuel qui consiste à abandonner les vanités mondaines et à se consacrer totalement à la dévotion. Ceci est développé en réaction contre les guerres fratricides occasionnées par le profond désaccord des musulmans à propos de la succession du prophète (PSL), surtout après l’assassinat du troisième calife orthodoxe ‘Uthmân b.’affân. Les ascètes, face à cette situation délicate et grave, prenaient le soufisme comme un moyen d’éviter la compromission en s’adonnant à une pure invocation d’Allah comme le recommandait le Prophète (PSL) dans de pareils cas où la grande sédition se serait ouverte dans le camp des musulmans. Le compagnon du Prophète (PSL), Abû Mûsâ al-Ashʽarî aurait entendu l’envoyé d’Allah (PSL) dire : « il arrivera une sédition (fitnâ) durant laquelle il sera plus indiqué de s’assoir que de se lever, de s’arrêter plutôt que de marcher, d’avancer à pieds plutôt que de monter ». Le soufisme individuel devient collectif lorsqu’il est répandu et est pratiqué de concert par des groupes d’individus. C’est à ce moment précis, qu’il est considéré comme la pratique de la troisième dimension de la religion musulmane à savoir l’ihsân après l’islâm et l’îmân. En effet, le Prophète (PSL) avait expliqué cette dimension spirituelle dans la dévotion par : le fait d’adorer ALLAH convaincu d’être en sa présence, parce que même invisible le seigneur n’est jamais absent. Le soufisme individuel puis collectif devient populaire ou confrérique lorsqu’il est conçu comme une école de pensée islamique qui excelle dans le domaine de la pratique de l’Ihsân, le perfectionnement de la pratique cultuelle musulmane. De ce fait, il constitua une école de formation spirituelle. Cette école ou confrérie fut conceptualisée d’abord par des pionniers parmi lesquels l’Imam Muhammad b. Muhammad AlGhazâlῑ et l’imam al-Junaydî. Cette conception fut matérialisée plus tard par le Cheikh ‘Abdul Qadr Al-Jîlânî puis réitérée par beaucoup d’érudits musulmans tels que Ash-shayhu Ahmad attîjanî en Algérie et Ash-shayhu Ahmad Bamba Mbacké au Sénégal.

La doctrine du mouridisme

    Cheikh Ahmadou Bamba a fondé son enseignement sur trois piliers essentiels: le savoir utile, le travail licite et la conduite exemplaire. Ces trois axes centraux de sa doctrine confirment la conviction de son fondateur qui montrait aux autorités coloniales que le mouridisme est plus qu’une confrérie. Il est un mouvement de rénovation de l’Islam. Pour réussir le pari de l’éducation axée sur ces trois domaines : l’enseignement de la théologie, de la jurisprudence islamique et du soufisme, Cheikh Bamba se charge d’écrire des livres doctrinaires sur ces trois dimensions de la religion musulmane. Par exemple : Tazawudu aṣṣiġâr, Tazawudu ash-shubân, Jadhbatu aṣ-ṣiġâr et Jawḣaru an-nafîs… Il écrivit aussi d’autres ouvrages spécifiques comme : Nahjuqadâ il al-hâj et d’autres titres intitulés « al waṣâyâ » sur la conduite exemplaire, Masâlikul Jinân et siklul jawâhiri sur le Tasawuf et la Théologie. Au-delà de l’enseignement livresque, Cheikh Ahmadou Bamba faisait un autre type extramuros et andragogique réservé aux adultes ayant dépassé l’âge de fréquenter le dâra. Pour ces derniers, il schématisait les contenus des cours en utilisant des formules très simples et faciles à retenir. En outre, le Chaykh choisissait le dâra pour dérouler son programme éducatif. Qu’est-ce que le dâra? Le professeur Iba Der THIAM38 nous présente le dâra : « Les Dâras, au Sénégal, constituent, depuis l‘introduction de l‘Islam, le centre d‘éducation par excellence. Celui-ci a formaté des millions de personnes des deux sexes, en les dotant d‘une conscience Islamique ferme et résolue, d‘une vision de Dieu, du monde, de la société, de l‘être humain, de la parenté, des relations interpersonnelles, du commerce humain, des activités économiques et de la sociabilité fondés sur des valeurs fortes et un humanisme élevé, tirant leur substance des prescriptions du Coran et de la Sunna du Prophète Muhammad (…) ». Ce centre de formation que l’historien, Iba Der THIAM nous a décrit est le dâra classique qui s’occupe de l’apprentissage du coran et des sciences islamiques. Il est le type de dâra le plus répandu dans les milieux mourides. Néanmoins, il existe d’autres types de dâras : Le « dâra tarbiyya » encore appelé « dâra taṣfiyya » joue le rôle de formation spirituelle chez les adultes ayant raté le dâra classique ou ayant complètement bouclé l’étape du dâra classique en finissant l’apprentissage du coran et des sciences islamiques. Au-delà de ces deux types de dâras, le mouridisme connait un autre qui privilégie la pratique (travaux manuels) au détriment des connaissances livresques. C’est le « dâra takk der », qui est « un espace de socialisation majeur qui attire davantage des jeunes hommes adultes ayant pris eux-mêmes la décision d’aller au dâra afin de mettre un terme souvent à une vie estimée de débauche ». Ces dâras, depuis la déclaration de Mbacké kadior jusqu’aux années 50, ont assuré la formation scientifique et spirituelle des mourides. Partant du constat de l’accroissement démographique des mourides, de l’aménagement des villages, de l’urbanisation et conscient des limites objectives des dâra traditionnels implantés dans les campagnes et du devoir de sauvegarder l’héritage soufi de Serigne Touba face aux menaces venant de l’extérieur, Serigne Cheikh, Gaïndé Fatma Mbacké, sous l’égide de Serigne Mouhamadou Moustapha Mbacké, par ailleurs le calife général des mourides d’alors, entama des réformes dans les méthodes d’éducation dans le dâra par l’inauguration d’autres procédés dont le dâ’ira.

Les arguments tirés du coran

    Il y a dans le coran plusieurs versés tendant à fédérer les musulmans. Nous allons citer quelques passages qui recommandent l’unité de la communauté musulmane : « Et cramponnez-vous tous au câble d’Allah et ne soyez pas divisés et rappelez-vous le bien fait d’Allah sur vous : lorsque vous étiez ennemis, c’est Lui qui réconcilia vos cœurs. Et alors que vous étiez au bord d’un abime de feu, c’est Lui qui vous a sauvés. Ainsi, ALLAH vous montre ses signes, afin que vous soyez bien guidés » (S. AL-Imran/V.103) Ce verset est descendu dans un cadre de renfermement des liens de fraternité qui existaient entre les deux tribus « AWS » et « HAZRAJ », qui ont cohabité à Yasrib devenu Médine, le lieu de refuge du prophète, Muhammad (PSL). En effet, ce verset met en garde les ANSAR contre les divergences nées de leur passé sombre où ils étaient, pendant plus de 120ans, des ennemis. Avec l’arrivée de l’Islam, Allah propagea de l’affection des cœurs et ils devinrent, par sa grâce, des frères. Donc, par ce verset «Et cramponnez-vous tous au câble d’Allah et ne soyez pas divisés et rappelez-vous le bien fait d’Allah sur vous », il est clair qu’Allah nous a recommandé le rassemblement et nous interdit formellement la dispersion. « Ô les croyants ne profanez ni les rites du pèlerinage (dans les endroits sacrés) d’Allah, ni le mois sacré, ni les animaux de sacrifice, ni les guirlandes ceux qui se dirigent vers la maison sacrée cherchant de leur seigneur grâce et agrément. Une fois désacralisés, vous êtes libre de chasser. Et ne laissez pas la haine pour un peuple qui vous a obstrué la route vers la mosquée sacrée vous inciter à transgresser. Entraidez-vous dans l’accomplissement des bonnes œuvres et de la piété et ne vous entraidez pas dans le péché et la transgression. Et craignez Allah, car Allah est, certes, dur en punition ! »  « Les croyants ne sont que des frères. Etablissez la concorde entre vos frères, et craignez Allah, afin qu’on vous fasse miséricorde». Suivant cette logique, Allah nous met en garde contre la désunion et de ses conséquences : « Et ne soyez pas comme ceux qui se sont divisés et se sont mis à disputer, après que les preuves leur furent venues, et ceux-là auront un énorme châtiment ». Ces versets, entre autres, tirés du Coran, nous exhorte à l’unité, à la cohésion sociale. Notamment, dans le verset 2 de la sourate Ali ‘imrân, Allah nous définit la manière dont on doit réaliser l’entraide entre musulmans. Cela doit se faire strictement dans l’accomplissement du bien et non dans le péché ou la transgression. Cette précision de l’entraide montre l’importance qu’Allah accorde à la solidarité communautaire des musulmans. Dans cette perspective, beaucoup de versets du coran corroborent et l’encouragent : Je cite en guise d’exemple : « Certes, cette communauté qui est la vôtre est une communauté unique, et je suis votre seigneur. Adorez-moi donc ». Allah a qualifié les musulmans de communauté unique. En effet, la communauté définie par le dictionnaire, le Robert comme un « groupe social dont les membres vivent ensemble, ou ont des biens, des intérêts communs ».52 C’est-à-dire : des individus qui partagent le même passé et le même avenir bref les mêmes défis. Sur ce, les membres d’une communauté sont condamnés à vivre en commun bien qu’ils soient dans des contrés différentes et éloignées. Cette qualité de communauté est réaffirmée dans un autre verset, « Vous étiez la meilleure communauté choisie des hommes, car vous recommandez le convenable, vous interdisez le mauvais et vous croyez à Allah » Il ajoute aussi dans un autre passage du livre, que les musulmans forment une communauté équilibrée : « nous avons fait de vous une communauté équilibrée pour que vous soyez des témoins pour les hommes… » La lecture de ces trois versets nous montre qu’Allah qualifie les musulmans de communauté mieux d’une communauté unique, meilleure et équilibrée à condition qu’ils préservent leur cohésion sociale et s’entraident dans le bien. Le rassemblement des musulmans est recommandé par Allah à travers le discours du coran. En effet, dans les discours concernant les actes de dévotion des musulmans ou de prière, Allah privilégie le pronom personnel pluriel au pronom personnel singulier. Par exemple, « Allah aime ceux qui combattent dans son chemin en rang serré pareils à un édifice renforcé ». « C’est Toi (seul) que nous adorons, et c’est Toi (seul) dont nous implorons secours. Guide-nous dans le droit chemin ». Allah ne se limite pas de nous pousser à l’unité, mais il nous avertit contre les conséquences qui peuvent découler du non-respect de ses recommandations. « Et obéissez à Allah et à son messager, et ne vous disputez pas, sinon vous fléchirez et perdez votre force. Et soyez endurants, car Allah est avec les endurants ». Ainsi, le verset nous fait comprendre que la dispute est la porte de tous les échecs. Par conséquent, l’encouragement de toute initiative permettant de raffermir les liens fraternels entre musulmans devient une obligation religieuse. A l’instar du coran, plusieurs hadiths ont aussi encouragé la fraternité musulmane.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : …LE DÂ’IRA UNE FORME D’ORGANISATION SOUFIE
CHAPITRE I : LES FONDEMENTS ET LA GENESE DU DÂ’IRA MOURIDE
A. Le contexte de l’introduction de l’Islam au Sénégal
1. Le soufisme musulman
2. Les confréries soufies au Sénégal
B. Le mouridisme
1- L’historique du Mouridisme
2- La doctrine du mouridisme
3- L’apparition des dâ’iras mourides
CHAPITRE II : LES MOTIVATIONS ISLAMIQUES DU DA’IRA
A- Les arguments tirés du coran et de la sunna
1- Les arguments tirés du coran
2- Les arguments tirés de la sunna
B- Les arguments tirés de la doctrine mouride
1- Les écrits de Cheikh Ahmadou Bamba
2- Les arguments islamiques de Serigne Cheikh Ahmadou Mbacké dit Gaïndé Fatma
DEUXIEME PARTIE :L’EVOLUTION ET LA CRITIQUE DES DÂ’IRAS MOURIDES
CHAPITRE I : EVOLUTION FULGURANTE DES DÂ’IRAS
A- L’évolution du cadre juridique des dâ’iras mourides
1- Du dâ’ira simple à la fédération des dâ’iras mourides
2- L’analyse des textes fondant la première fédération
3- La typologie des dâ’iras mourides
B- L’implantation progressive des dâ’iras suivant les califats
1- L’évolution des dâ’iras durant les cinq premiers califats
2- L’exemple de certains dâ’iras mourides célèbres
CHAPITRE II : L’ANALYSE CRITIQUE SUR LE FONCTIONNEMENT DES DA’IRAS MOURIDES
A- La mission socioéducative
1- Restitution des enquêtes
2- Analyse des données
3- Les solutions préconisées
B- La mission socioéconomique
1- Restauration des données socioéconomiques
2- Analyse des données
3- Les solutions préconisées
CONCLUSION
DOCUMENTS ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE

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