L’évolution de l’identité professionnelle d’un stagiaire

L’identité professionnelle de l’enseignant

Afin de développer au mieux ce concept, nous nous sommes inspirées de Compétences et identité professionnelles de Jacqueline Beckers (2007). Selon cette auteure, l’identité professionnelle « est constituée de ce qu’un individu est capable de faire et fait mais aussi de ce qu’il sait, de la manière dont il se représente les choses et lui-même, du sens qu’il leur accorde, de ses émotions positives et négatives, de ses besoins et de ses valeurs » (p. 142).
Elle définit cette identité comme un processus, car chacune des composantes qui la caractérisent peut évoluer au travers d’expériences.
Intéressons-nous maintenant plus particulièrement à la construction de l’identité professionnelle d’un enseignant en reprenant les cinq phases de Nault (1999) citées par Beckers (2007, pp. 167-169). On retrouve la première phase avant que le stagiaire ne commence sa formation. Elle est constituée des représentations qui l’ont poussé à s’orienter dans la profession. Broyon et Changkakoti (2007, p. 117) définissent cette phase par le choix du métier, la motivation à devenir enseignant ou encore la conception de la tâche de ce dernier. Pour certains, le choix du métier est une vocation ressentie depuis l’enfance selon l’expérience que l’individu a vécu dans le monde scolaire. On retrouve différents aspects qui forment la vocation, celui qui revient le plus souvent étant l’amour des enfants. Le fait qu’une personne appartienne à une famille d’enseignants peut également jouer un rôle quant à son parcours professionnel. Finalement, la rencontre avec des enseignants qui marquent la scolarité d’un enfant peut donner le goût de l’enseignement à certains. La deuxième phase citée par Beckers est celle qui touche directement notre recherche et se situe durant la formation initiale du stagiaire. L’immersion en stage entraîne de nombreuses expériences constructives qu’elles soient positives ou négatives. Les travaux de Gohier, Anadon, Bouchard, Charbonneau et Chevrier ont montré que l’identité professionnelle se construit principalement lors de périodes de crises ou de remises en question. Ce genre de période a lieu notamment lorsqu’il y a changement de tâche, de niveau scolaire ou lorsque le stagiaire se voit confronté à des élèves comportant des troubles d’apprentissage ou de comportement (Martineau, Portelance, & Presseau, 2010, p. 2). Il est primordial que celui-ci puisse tester, essayer durant sa formation pratique, cela lui donnera l’occasion de réfléchir sur sa pratique ce qui représente un énorme pas dans la construction identitaire professionnelle et dans le développement de ses compétences.

Les deux niveaux de signification : le contenu informatif et la relation en jeu

Watzalwick, dans ce quatrième postulat, suppose que toute communication présente deux niveaux de signification : le contenu informatif et la relation qui lie les interlocuteurs. Le contenu informatif concerne tout ce qui est communiqué, soit des faits, des opinions, des ressentis, des expériences, etc. Il existe différents types de relation pouvant lier deux locuteurs. Lorsque le message dépasse l’informatif, la manière dont le stagiaire ou le prafo communique peut avoir un impact sur la relation qu’ils entretiennent.
Nous développons ci-dessous la façon dont les interlocuteurs définissent leur relation en fonction du type de celle-ci. Tout d’abord, la place que détient chaque partenaire détermine la communication. Dans certaines situations, la place et l’identité de chacun est définie préalablement. C’est le cas, par exemple, dans la relation sociale maître-élève au sein de laquelle les rôles, les statuts et le style de communication sont préétablis. En lien avec notre recherche, si le stagiaire perçoit sa relation avec son prafo de cette manière, il y a peu de chance que sa posture évolue, du fait qu’il n’arrive pas à échapper à cette image d’élève.
Il existe trois grands axes qui définissent le rapport des places dans une relation (Marc, 2008, p.4) mais nous n’en relèverons qu’un seul : celui qui différencie la symétrie de l’asymétrie.
On peut retrouver une certaine égalité entre un prafo et un stagiaire qui sont capables de communiquer de manière circulaire et non linéaire. En revanche, si le rapport est asymétrique, les deux individus conserveront des positions différentes. Il est certain qu’il existe toujours une sorte de hiérarchie entre un étudiant en stage et son formateur, de par le fait que ce dernier est un enseignant diplômé et a comme devoir d’évaluer, certifier les compétences de l’enseignant en formation. Cependant, il est probable qu’apparaissent dans la relation des éléments de communication plus symétriques, de par le fait que quelques points soient négociables, comme la collaboration. Nous nous trouvons là avec plusieurs niveaux : le niveau institutionnel, le niveau des personnes et le niveau de leur relation. Au niveau institutionnel, il n’y a aucune égalité possible : les titres sont différents et ne peuvent être équivalents. Cependant, la nature des personnes ainsi que la relation qu’elles créent consciemment ou non peut tendre à une symétrie. Lors d’une première expérience en stage, il est normal de retrouver un rapport asymétrique entre ces deux locuteurs, mais le but est de développer cette asymétrie de sorte à ce qu’elle se rapproche au plus près de la symétrie, qui représente le duo pédagogique. Nous trouvons ce terme dans l’article de Jean-Marc Badoux (2010 p. 54) où ce dernier explique de quelle manière, de plus en plus, l’étudiant prend en quelque sorte sa place durant un moment pour ensuite ne plus considérer « l’étudiant comme un stagiaire mais comme un collègue ». Le développement de cette relation sera une preuve de l’évolution de la posture professionnelle du stagiaire. Notons que d’innombrables situations et relations toutes différentes les unes des autres peuvent exister.

Modèles de communication symétrique et complémentaire

Selon Marc et Picard dans L’école de Palo Alto (2004, p.50) : « tout échange de communication entre dans l’un des deux modèles : il est symétrique ou complémentaire selon qu’il se fonde sur l’égalité ou la différence ». Nous présentons ci-dessous ces deux modèles en nous basant sur l’œuvre des auteurs cités précédemment (2004, pp. 48-50).
Dans le système complémentaire, Jay Haley différencie deux positions : la position supérieure et la position inférieure. Cela signifie que l’individu possédant la position asymétrique détient la responsabilité de la communication. Cette position est induite par le statut et la fonction du « formateur-certificateur ». La position inférieure, ou basse, correspond à celle de l’individu qui s’adapte à l’autre, soit le stagiaire soumis du même exemple. Un rapport complémentaire tend donc vers un rapport hiérarchique dans lequel les partenaires s’ajustent l’un à l’autre. La reconnaissance et le fait d’accepter la différence représentent ce type de relation.
En reprenant les exemples de L’école de Palo Alto – un nouveau regard sur les relations humaines (2004, pp.50-51), la transaction entre formateur et stagiaire est complémentaire si :
le formateur donne une instruction (position supérieure) et le stagiaire la reçoit (position inférieure). le formateur interroge (position supérieure) et le stagiaire répond (position inférieure). le formateur affirme quelque chose (position supérieure) et le stagiaire s’accorde à ce qui a été dit (position inférieure).
Au contraire, la transaction sera symétrique si :  le formateur fait un énoncé référentiel et le stagiaire en cite un en retour.  l’un des deux s’accorde avec l’autre.  l’un donne des instructions et l’autre répond par des instructions (ce qui peut être le cas, si par exemple, un prafo demande à son stagiaire de surveiller la récréation à sa place pour diverses raisons et que ce stagiaire demande en retour que le prafo fasse ses photocopies pendant la pause en vue de la leçon qu’il doit donner).

L’évolution de la posture professionnelle du stagiaire

Passons maintenant à la partie qui touche plus particulièrement notre recherche : l’évolution du stagiaire, soit la construction identitaire de ce dernier durant les trois années de formation.
Les étudiants de première année ont le sentiment d’avoir évolué dans leur posture face aux élèves, leur manière de s’exprimer, ou la gestion de classe. En effet, chacun a affirmé avoir été très stressé les premiers temps de stage. Ce stress a peu à peu diminué grâce aux retours du prafo pour certains et grâce au fait d’avoir été directement poussés à enseigner et à essayer pour d’autres. Ces trois stagiaires ont également appris dans un premier temps à créer des planifications et parviennent à les établir plus rapidement aujourd’hui, du fait que ce soit devenu une habitude. Une étudiante de première année a mentionné un élément très intéressant auquel nous n’avions pas pensé auparavant : pour elle, être accompagnée d’un prafo auquel elle peut s’identifier lui permet de progresser beaucoup plus rapidement. Elle dit avoir été en stage d’inversion avec un prafo qui n’avait pas la même vision de l’enseignement qu’elle, ce qui l’a en quelque sorte « braquée ». Les trois stagiaires de deuxième année disent se sentir plus en confiance par rapport à la première, car ils ont un meilleur contact avec leur formateur. Ils se sentent également mieux intégrés à la salle des maîtres et au sein de l’établissement en général. Ils se sont référés aux commentaires du bilan certificatif de première année afin de ne plus recevoir les mêmes remarques. Le fait de changer de stage est un élément qu’ils apprécient particulièrement : ils se trouvent dans un nouveau degré d’enseignement et peuvent « repartir de zéro » tous les six mois. Ils disent qu’avoir l’occasion d’enseigner dans plusieurs classes avec des perceptions différentes des prafos les aide dans leur évolution personnelle. Paradoxalement, deux de ces trois étudiants trouvent difficile de changer de stage après six mois, lorsqu’une confiance s’est instaurée avec le formateur et les élèves. Finalement, la stagiaire en stage A interviewée perçoit son évolution selon les mêmes éléments que nous. Elle suppose qu’en dernière année, nous nous présentons différemment, car nous sommes presque du métier, nous connaissons nos responsabilités.

Les documents de suivi de stage négligés à l’exception des bilans certificatifs

Nous avons analysé les trois visages de l’identité d’après Delivré en rapport avec la reconnaissance et il en ressort surtout un : le visage de l’identité professionnelle défini par les compétences propres au métier que nous lions à notre référentiel de compétence. Malgré le fait que très peu d’étudiants (2 sur 10, nous y compris) l’utilisent spontanément, tous y sont confrontés le jour de la certification. Il est apparu dans un entretien de deuxième année que l’étudiant n’utilise pas directement les compétences telles qu’elles sont dans le référentiel mais qu’il les retrouve tout de même dans sa pratique. Il dit : « Je ne regarde jamais vraiment les compétences du référentiel, mais souvent on les retrouve naturellement dans notre enseignement ». Tous les étudiants ont aussi mentionné que les certifications, basées sur ces compétences, étaient très formatrices car elle servent de tremplin au prochain stage et les aide à cibler leur travail. D’ailleurs, une étudiante de deuxième année explique : « Je me suis appuyée sur les commentaires de mon prafo en fin de première année pour mieux commencer mon stage de deuxième année. Je savais plus ou moins précisément ce que je devais améliorer. ». Un futur-enseignant se construit en fonction des compétences qui lui sont demandées et qui se développent au travers de l’apprentissage et l’expérience. Des changements de statut ont pu être notés lorsque les étudiants nous ont dit se sentir collègue face à leur prafo. Le dernier visage de l’identité professionnelle, soit l’identité interne, n’a pas été abordé dans les entretiens, car ce n’était pas explicitement l’objet de notre recherche et nous ne l’avons donc pas pris en compte lors des entretiens.

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Table des matières

1. Introduction 
1.1. Avant-propos
1.2. Présentation de la recherche
1.3. Contexte institutionnel : déroulement des stages
1.3.1. Le prescrit : analyse des documents de suivi de stage
1.3.1.1. Première année de formation pratique
1.3.1.2. Deuxième année de formation pratique
1.3.1.3. Troisième année de formation pratique
1.3.1.3.1. Stage A : co-enseignement
1.3.1.3.2. Stage B : en responsabilité
1.3.1.4. Synthèse des trois années de formation pratique
2. Cadre théorique
2.1. Question de recherche et hypothèses
2.2. Les concepts
2.2.1. L’identité professionnelle de l’enseignant
2.2.2. La communication
2.2.2.1. L’importance du contexte
2.2.2.2. Un processus circulaire
2.2.2.3. Le langage verbal et non-verbal
2.2.2.4. Les deux niveaux de signification : le contenu informatif et la relation en jeu
2.2.2.5. Modèles de communication symétrique et complémentaire
3. Méthodologie 
3.1. Démarche
3.1.1. Profil des personnes interviewées
3.2. Opérationnalisation des concepts
4. Présentation des résultats 
4.1. Pré-analyse
4.2. Relations prafo-stagiaire
4.2.1. Tutoiement/vouvoiement
4.2.2. Périodes d’enseignement à disposition
4.2.3. Feed-back
4.3. L’utilisation des documents de suivi de stage
4.3.1. Le suivi de stage
4.3.2. Le contrat de stage
4.3.3. La certification
4.4. L’évolution de la posture professionnelle du stagiaire
5. Analyse des résultats
5.1. La diversité des situations de formation pratique au service de la construction identitaire professionnelle
5.1.1. Les documents de suivi de stage négligés à l’exception des bilans certificatifs
5.1.2. Une communication basée sur une relation de confiance
5.2. Synthèse des résultats et réponse à la question de recherche
6. Conclusion
6.1. Apports du travail
7. Remerciements
8. Bibliographie et sitographie
8.1. Bibliographie
8.2. Sitographie
9. Annexes
9.1. Contrat de stage
9.2. Bilan certificatif de deuxième année et niveaux de maîtrise attendus
9.3. Guides d’entretien

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