Lévitation d’une nanoparticule de diamant dans le vide

Récapitulatif des forces optiques liées au piégeage optique

             De ces forces optiques, nous ne conservons que la force de gradient et la force de diffusion. On a montré que la force de diffusion est proportionnelle au volume de la particule et est responsable du confinement de la particule. Pour pouvoir piéger une particule, on en déduit qu’il faut une taille minimum pour que cette force devienne non négligeable et puisse contre balancer les autres forces qui s’appliquent sur cette particule. En revanche, la force de diffusion va tendre à pousser la particule hors du piège dans la direction de propagation du faisceau en suivant une loi d’échelle en volume de la particule au carré. De ce fait, si la particule devient trop grande, cette force devient non négligeable et va éjecter la particule hors du piège. Physiquement, on observe un encadrement de la taille de la particule que l’on peut piéger. On se propose dans la suite de quantifier ces forces optiques et de leur donner un ordre de grandeur pour estimer un encadrement des tailles des particules susceptibles d’être piégées.

Le système à vide

                 Nous avons décidé d’adapter une chambre à vide permettant de contrôler la pression afin d’isoler la particule piégée de l’environnement. En effet, lorsqu’on réduit la pression, on limite les interactions avec l’environnement permettant d’atteindre des régimes où notre système se comporte comme un oscillateur de très grand facteur de qualité [88]. Notre système expérimental est constitué d’une chambre à vide permettant de réduire la pression jusqu’à 10−5 mbar. Pour diminuer davantage la pression dans l’enceinte, il faudrait optimiser la chambre à vide, ce qui est envisageable. Néanmoins, nous verrons dans la partie suivante qu’il n’est actuellement pas nécessaire, dans notre cas, d’atteindre à un vide poussé. La chambre à vide comporte plusieurs fenêtres traitées pour laisser passer les faisceaux lasers et permettent d’adapter une caméra pour visualiser la diffusion de la particule sur une caméra. Pour mesurer la pression dans l’enceinte, nous utilisons une jauge à membrane pour réaliser des mesures précises entre 10 mbar et 1 bar (précision de 0,2%) combinée à une jauge Pirani adaptée à la mesure de pression de 10−9 mbar à 10 mbar (précision de 30%).

Piégeage de particules

                  Pour piéger des nanoparticules, nous pulvérisons des gouttelettes d’une solution d’éthanol pure contenant des nanoparticules de diamant à proximité du piège optique à l’aide d’un nébuliseur [77]. Cette méthode n’est pas sélective, c’est-à-dire que l’on ne sait pas quelle particule nous allons piéger. Lorsqu’une nanoparticule de diamant est piégée, un point lumineux caractéristique de la diffusion de la particule apparaît qui est visible à l’œil nu (pour une lumière diffusée dans le domaine du visible), comme nous pouvons le voir sur la photo en insert de la figure 1.7. La solution utilisée permet d’avoir en moyenne moins d’un nanodiamant par gouttelette pulvérisée, ce qui évite de piéger un agrégat de nanodiamants. L’équipe envisage dans le futur de réaliser un dispositif qui permettrait de contrôler le piégeage, c’est-à-dire créer un piège capable de sélectionner une particule pour l’étudier.

Centres colorés du diamant et propriétés optiques du centre NV

                Le diamant est un cristal covalent constitué d’un assemblage d’atomes de carbone reliés à chacun de leurs 4 voisins par une simple liaison covalente. La structure cristalline est de type Cubiques Faces Centrées (CFC) comme indiquée sur la figure 2.1(c). Néanmoins, il existe des défauts dans la maille cristalline qui peuvent être présents naturellement, être directement introduits durant la croissance du diamant, ou ajouter postérieurement par implantation et/ou irradiation. Le diamant est notamment connu pour ses propriétés de semi conducteur à grand gap (∼ 5,5 eV).  Les propriétés thermiques dépendent de la taille de la particule et de la température. Ce sont donc des ordres de grandeur que nous utiliserons dans la suite. Leur dépendance est brièvement traitée dans l’article [90] à 3 eV) et dans le proche infrarouge. Cependant, la présence des défauts introduit des niveaux discrets à l’intérieur du gap qui rend le diamant optiquement actif. En fonction de l’importance du dopage (degré de pureté du diamant), on observe des diamants colorés à l’œil nu. Cette coloration dépend du type de défaut comme le montre la figure 2.1(a). Si de nombreux défauts ont été répertoriés [94], un défaut nous intéressera plus particulièrement à savoir le centre NV (nitrogen-vacancy ou azote-lacune en français). Ce défaut correspond à la substitution de deux atomes de carbone adjacents de la maille cristalline par respectivement un atome d’azote (N) et une lacune (V) (cf. figure 2.1(c) ). Suivant l’environnement local de la lacune, il existe principalement deux états de charge du centre NV [95] : un état neutre NV0 et un état chargé négativement NV−. La forme intéressante pour les expériences décrites dans ce manuscrit est l’état chargé négativement comportant deux électrons non appariés [96]. Dans la suite, sauf mention contraire, la dénomination centre NV renvoie à l’état de charge NV− ∗. Les niveaux énergétiques créés par le défaut sont séparés par une énergie de 1,945 eV correspondant à une longueur d’onde de 637 nm et sont schématisés sur la figure 2.1(d) ∗. Une étude sera menée plus tard dans le chapitre sur leur proportion respective en fonction de la puissance de laser infra rouge. La transition se faisant dans le domaine optique, on peut exciter le défaut avec un laser et collecter sa photoluminescence. Un schéma de la structure électronique simplifiée du centre NV est représenté sur la figure 2.2(a). Suite à l’excitation par un laser vert, le défaut excité relaxe vers son état fondamental en émettant un signal de fluorescence dans le rouge. On observe un fort élargissement des raies d’absorption et d’émission (∼ 100 nm) sur la figure 2.2(b) dû au couplage avec les phonons du cristal. L’absorption est ainsi centrée vers 570 nm et l’émission vers 680 nm. La raie zéro phonon (Zero Phonon Line, ZPL) se situe à 637 nm et correspond à l’écart énergétique entre le niveau fondamental et le premier niveau excité. Dans notre expérience, l’excitation des centres NV se fait par un laser à la longueur d’onde λexc = 532 nm. La photoluminescence est collecté en utilisant un filtre passe haut de longueur d’onde de coupure λc =635 nm. Il existe d’autres propriétés optiques remarquables du centre NV qui justifie le choix d’étudier ce type de défaut. En premier lieu, contrairement à d’autres émetteurs uniques tels que les boites quantiques ou les molécules de colorant, le centre NV possède une excellente photo-stabilité qui permet de s’affranchir des problèmes de clignotement (disparition ponctuelle de photoluminescence) et de blanchiment (disparition définitive de la photoluminescence) [97, 98]. D’autre part, ces propriétés optiques sont couplées à des propriétés de spin qui font du centre NV un système unique. En particulier, en 2004, F. Jelezko et al. ont démontré la possibilité de manipuler de manière cohérente le spin électronique du centre NV et de le lire optiquement à température ambiante [99].

Fabrication de nanodiamants riches en centres NV

                  Les diamants utilisés aujourd’hui dans les activités de recherche sont toujours d’origine artificielle. Ils peuvent être préparés principalement selon trois voies de synthèse :
— Les diamants dits « HPHT » (haute pression, haute température). Dans ce cas, un précurseur de carbone est amené sous des conditions de pression (typiquement >5 GPa) et de température (T∼2000 °C) assez importante [112] pour favoriser la création du diamant. Si cette approche est connue depuis les années 50, le contrôle des impuretés dans le diamant n’est pas aisé, et souvent les diamants produits sont riches en azote, typiquement de l’ordre de 200 ppm.
— Les diamants dits CVD (Chemical Vapour Deposition). Un réacteur permet de faire un dépôt couche à couche de diamant sur un substrat. Il est alors possible de contrôler finement les impuretés présentes dans le diamant ce qui en fait la méthode de références pour créer de tels diamants. Ces impuretés peuvent être de différentes formes : azote, silicium, carbone 13…
— Les diamants dits de détonation. Ils sont obtenus par réaction explosive à partie d’un précurseur de carbone. Cette approche permet de fournir des diamants de très petites tailles, typiquement <10 nm, souvent fortement graphitisés. Pour les applications visées dans le cadre de cette thèse, les nanodiamants produits par cette approche sont à la fois trop petits et trop absorbants pour pouvoir être piégés optiquement.
Pour obtenir des nanodiamants, la stratégie est donc en général de partir d’un diamant massif, qui est ensuite broyé et trié par taille. Dans le cas de diamants HPHT riches en azote, une irradiation par des électrons ou des particules alpha, suivi d’un recuit permettra de créer des centres NV stables dans les nanodiamants. La dose d’irradiation impose alors le nombre de centres NV par nanodiamant. Celui-ci est limité par la taille du nanodiamant. Pour des nanodimants de taille 100 nm, il est possible d’obtenir entre un et quelques milliers de centres NV. Pour des nanodiamants CVD très pures, la quantité d’azote n’est pas suffisante pour utiliser ce même procédé. Il faut alors implanter l’azote, qui lors d’un recuit sera converti en centres NV, avec un rendement de quelques pourcents. Dans la suite de cette thèse, nous utiliserons des nanodiamants commercialisés par l’équipe du Dr. H.-C. Chang FNDbiotech [113]. Leur taille moyenne spécifiée est de 100 nm (cf figure 2.6(b)) et contiennent ≈ 1000 centres NV [114]. Ces diamants sont dits ultradopés car ils contiennent de nombreux défauts.

Thermométrie d’un nanodiamant dans le vide

               Comme nous l’avons évoqué les nanodiamants en lévitation subissent un chauffage lié à la forte puissance laser incidente. Ce chauffage impose un certain nombre de limites pour leur utilisation dans des expériences d’optomécanique de spin. Les premières limites sont techniques, avec une dégradation des propriétés photophysiques des centres NV [124], et le risque de dégradation du diamant [57] (par exemple graphitisation) qui peuvent mener à sa perte du piège. D’autres limites sont fondamentales, avec la réduction par la température de la cohérence quantique du mouvement du diamant en lévitation [125]. Il est donc crucial de bien comprendre et potentiellement contrôler le chauffage du nanodiamant. Précédemment, nous avons discuté de la dépendance de la résonance de l’ODMR en fonction de la température. Dans ce paragraphe nous proposons d’utiliser cette propriété pour mesurer la température interne de la particule de diamant en lévitation, en particulier en fonction de la pression dans la chambre à vide et de la puissance du laser infrarouge de piégeage. L’objectif étant de comprendre les processus à l’œuvre de ce chauffage, nous commencerons par décrire théoriquement les processus responsables des échanges thermiques dans notre système en lévitation. Puis, nous comparerons ces modèles à nos résultats expérimentaux sur la mesure de la température interne de nanodiamants en lévitation.

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Table des matières

Introduction
1 Lévitation optique d’une particule dans le vide 
1.1 Introduction
1.2 Forces optiques appliquées à une nanoparticule
1.2.1 Approximation dipolaire
1.2.2 Mise en évidence des forces optiques dans les pinces optiques
1.2.3 Évaluation des forces optiques dans l’approximation d’un faisceau gaussien
1.2.4 Stabilité d’une particule dans le piège optique
1.3 Dynamique d’une particule en lévitation 
1.3.1 Équation du mouvement de la particule
1.3.2 Densité Spectrale de Puissance
1.4 Montage expérimental 
1.4.1 Le piège optique
1.4.2 Le système à vide
1.4.3 Piégeage de particules
1.5 Mesure de la position de la particule 
1.5.1 Introduction
1.5.2 Champ diffusé par la particule
1.5.3 Détection de la particule
1.6 Mesures expérimentales de la dynamique
1.6.1 Trace temporelle et DSP
1.6.2 Raideur du piège
1.6.3 Coefficient d’amortissement
1.6.4 Détermination du rayon hydrodynamique de la particule
1.6.5 Étalonnage de la détection
1.7 Conclusion 
2 Thermométrie de centres NV du diamant en lévitation 
2.1 Introduction 
2.2 Centre NV du diamant
2.2.1 Centres colorés du diamant et propriétés optiques du centre NV
2.2.2 Résonance magnétique détectée optiquement
2.2.3 Hamiltonien du système centre NV dans un nanodiamant
2.2.4 Fabrication de nanodiamants riches en centres NV
2.3 Dispositif expérimental de piégeage d’un nanodiamant dans le vide
2.4 Effet du laser de piégeage infrarouge sur la photophysique du centre NV 
2.5 Thermométrie d’un nanodiamant dans le vide
2.5.1 Modèle théorique
2.5.2 Échanges thermiques d’une particule en lévitation
2.5.3 Équilibre thermodynamique
2.5.4 Étalonnage de la mesure de température interne d’un nanodiamant
2.5.5 Mesures expérimentales de la température interne d’un nanodiamant en lévitation
2.5.6 Statistique sur le processus d’absorption
2.6 Conclusion 
3 Dynamique d’une nanoparticule de diamant chaud 
3.1 Introduction 
3.2 Position du problème et modèle à deux bains
3.2.1 Température effective du centre de masse
3.2.2 Modèle à deux bains
3.3 Dynamique du diamant chaud 
3.3.1 Détermination de la température de centre de masse
3.3.2 Détermination de la température interne
3.3.3 Détermination du coefficient d’accommodation
3.3.4 Impact de la forme de la particule sur la dynamique du diamant chaud
3.4 Sur-échauffement de la température de centre de masse 
3.5 Conclusion
4 Couplage spin-mécanique pour un nanodiamant en lévitation 
4.1 Introduction
4.2 Mouvement librationnel de la particule dans le piège 
4.2.1 Mouvement librationel : état de l’art
4.2.2 Potentiel énergétique du mouvement librationnel
4.2.3 Équation du mouvement du mouvement librationnel
4.2.4 Observation du mouvement librationnel
4.3 Couplage spin-optomécanique
4.3.1 Hamiltonien d’un centre NV unique sous champ magnétique
4.3.2 Effet d’un ensemble de centres NV sous champ magnétique
4.3.3 Piégeage de centre NV unique sous champ magnétique
4.4 Conclusion et perspectives
Conclusion et perspectives

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