RAPPELS ANATOMIQUES
Le globe oculaire
Le globe oculaire a une forme sensiblement sphérique avec un diamètre moyen d’environ 23mm. Schématiquement, on distingue le « contenant » composée de la cornée en avant et de la sclère en arrière et le « contenu » qui se compose d’avant en arrière de : l’humeur aqueuse, le cristallin, l’iris , l’uvée, le corps vitré et la rétine.
La cornée
A l’avant du bulbe est située la cornée, d’un diamètre de 12mm, composée de 5 couches de cellules : l’épithélium cornéen, la membrane de Bowman, le stroma, la membrane de Descemet et l’endothélium. Le pouvoir de réfraction de la cornée est d’environ 42 dioptries. C’est la lentille principale du système optique oculaire. Son épaisseur centrale est d’environ 500 µm, le rayon de courbure de la face antérieure (face en contact avec l’air) est égal à 7,8mm en moyenne.
La frontière entre cornée et sclérotique appelée limbe, est une zone semitransparente qui a la particularité d’adhérer à la conjonctive, fine membrane qui couvre la face interne des paupières et la portion antérieure de la sclérotique. Tandis que la cornée est avasculaire, le limbe est richement innervé et vascularisé.
La Sclère ou sclérotique
La sclère ou sclérotique de couleur blanche chez l’adulte fait suite à la cornée à l’arrière. Elle forme ce que l’on appelle couramment « le blanc de l’œil ». Sa structure en lamelles de fibres de collagène constitue l’élément de résistance du globe oculaire et l’élément de fixation des muscles oculomoteurs. Elle assure une certaine rigidité au globe, un rôle de protection contre les chocs et les rayons lumineux, un rôle de soutien contre la pression atmosphérique et les contractions musculaires.
L’humeur aqueuse
Elle est sécrétée par les procès ciliaires. Elle chemine en arrière de l’iris puis rempli la chambre antérieure par l’orifice pupillaire. Sa résorption se fait au niveau de l’angle irido-cornéen. Avec le corps vitré, elle assure le maintien de la pression intra oculaire. S’il y a trop de pression oculaire, il y a une mauvaise irrigation sanguine de la tête du nerf optique. Cette pression joue un grand rôle dans le glaucome.
Les muscles oculomoteurs
Les muscles oculomoteurs (4 droits et 2 obliques) sont situés dans le tissu adipeux de l’orbite et règlent les mouvements du globe oculaire. Les muscles droit supérieur, droit inférieur, médial (anciennement droit interne) et latéral (anciennement droit externe), partent d’un anneau tendineux (zonule de Zinn) qui constitue le sommet de la pyramide derrière l’équateur du globe. A l’exception du droit latéral ou droit externe innervé par le nerf abducteur ou moteur oculaire externe (VI), ils sont innervés par le nerf moteur oculaire commun (III), comme l’est également le muscle petit oblique. Le muscle petit oblique est issu de la paroi interne de l’orbite, le muscle grand oblique est d’abord issu de l’anneau tendineux et se dirige vers la partie interne de la paroi orbitaire où il est dévié par la trochlée. Son innervation est assurée par le nerf pathétique (IV). L’action du droit supérieur permet le déplacement du globe en haut et en dehors, celle du droit inférieur en bas et en dehors, le droit interne assure l’adduction du globe oculaire, le droit externe l’abduction, le petit oblique permet le déplacement en haut et en dedans et le grand oblique en bas et en dedans.
Les paupières
La fente palpébrale est limitée par la paupière supérieure et la paupière inférieure dont l’élément de base est constitué par le tarse. Les paupières sont recouvertes sur leur face externe d’un épithélium corné pluristratifié qui se transforme en conjonctive palpébrale en bordure des paupières. Le long de cette bordure se trouvent 2 ou 3 rangées de cils. Les glandes holocrines de Zeis et les glandes apocrines de Moll débouchent au niveau de cette rangée de cils. Les orifices de sortie des glandes de Meibomius, plus importantes se terminent libres au niveau de la bordure de la paupière. Les clignements et l’occlusion des paupières sont principalement assurés par les muscles orbiculaires. (Nerf facial VII). L’ouverture des paupières est assurée par l’action du releveur de la paupière supérieur (III). L’innervation sensitive est assurée par les branches du nerf trijumeau (V).
L’appareil lacrymal
La glande lacrymale est située au dessus du canthus externe. L’innervation sécrétoire parasympathique emprunte le nerf facial, l’innervation sympathique passe par le nerf sympathique du cou. Le liquide lacrymal, lors d’un clignement parvient au canthus interne et est ensuite recueilli par les méats lacrymaux pour se déverser dans les canaux lacrymaux (canalicule inférieur et supérieur, canal d’union). Ceux-ci débouchent dans le sac lacrymal et de là, les larmes se déversent dans les fosses nasales par le canal lacrymo-nasal.
La vascularisation du globe oculaire
Le réseau artériel
L’artère ophtalmique, branche de la carotide interne, passe dans l’orbite avec le nerf optique et part ensuite vers l’avant avec le muscle oblique supérieur où elle se termine par l’artère dorsale du nez et l’artère supra-trochéaire. Auparavant elle se ramifie pour donner l’artère centrale de la rétine qui atteint la rétine dans le nerf optique, les artères ciliaires postérieures courtes et longues qui aboutissent à la choroïde et au corps ciliaire, l’artère lacrymale qui irrigue les glandes lacrymales, l’artère supra orbitaire qui va jusqu’au front et les artères ethmoïdales antérieures et postérieurs qui vont jusqu’aux cellules ethmoïdales. Les artères ciliaires antérieures qui vont jusqu’à l’iris et au corps ciliaire à travers la sclère naissent des artères musculaires irriguant les muscles oculomoteurs.
Réseau veineux
La veine ophtalmique supérieure collecte le sang issu du globe, de l’orbite supérieure, des paupières et des cellules de l’ethmoïde et débouche dans le sinus caverneux. La veine ophtalmique inférieure naît sur le plancher de l’orbite et s’écoule soit dans la veine ophtalmique soit dans le plexus ptérygoïde.
RAPPEL HISTORIQUE
Dès 1583, BARTISCH (4) réalise « l’extraction » du contenu d’une orbite à l’aide d’une « cueillere coupante » et ce dans des conditions d’anesthésie et d’hygiène rudimentaires voire inexistantes. Ce n’est qu’en 1851 que le terme «d’énucléation» a été introduit par CRITCHETT. BEER, en 1817 (5) pratique une éviscération par voie antérieure avec excision de la cornée après une hémorragie expulsive survenue au cours d’une iridectomie. Il rapporte de bons résultats esthétiques post-opératoires. En 1870 NOYE (6) recommande l’éviscération par voie antérieure (éviscération non conservatrice) comme technique chirurgicale de « routine ». L’idée d’utiliser un implant intra scléral à type de « bille de verre » après une éviscération ou une énucléation pour restaurer le volume orbitaire, est venue respectivement de MULES (7) en 1884 et de FROST en 1887 .
Différentes «variantes » d’éviscération classique ont été proposées ensuite (1, 9, 10, 11). Leur but est de permettre la pose d’implant de gros diamètre. Le développement des différentes techniques chirurgicales et des modèles d’implant orbitaire a été accéléré par la nécessité de reconstruire les mutilations causées par la deuxième guerre mondiale. RUEDMANN en 1941, introduit la notion d’implant orbitaire semi intégré. Mais de nombreuses complications avaient émaillé ce type d’implant (12). Depuis 1945, les implants, entièrement intégrés à l’orbite et recouverts de conjonctive, ont permis d’obtenir des résultats cosmétiques satisfaisants avec un taux de complication acceptable (12), mais leur mobilité est inférieure à celle des implants semi intégrés. De nombreux modèles d’implants ont été crées avec des matériaux différents afin d’obtenir un implant orbitaire idéal (13, 14). Dans les années 1980, la mise au point de hydroxyapatite a permis d’obtenir un nouveau matériau hautement biocompatible, non résorbé, entraînant peu de réaction inflammatoire et résistant à une force de compression modérée (15, 16). PERRY à été le premier à avoir eu l’idée d’utiliser l’hydroxyapatite poreux comme implant intra orbitaire en 1989 (17, 18). Par la suite les implants orbitaires en hydroxyapatite synthétique ont été mis au point pour obtenir des pores de diamètre régulier (300mm à 500mm), un forage plus facile et une colonisation fibrovasculaire identique à celle des implants en hydroxyapatite provenant du corail (19, 20, 21). Ces billes en hydroxyapatite synthétique offrent également l’avantage d’un coût moindre .
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE
1. RAPPELS ANATOMIQUES
1.1. Le globe oculaire
1.1.1. La cornée
1.1.2. La Sclère ou sclérotique
1.1.3. L’humeur aqueuse
1.1.4. L’iris
1.1.5. Le cristallin
1.1.6.Le corps vitré
1.1.7. La choroïde
1.1.8. La rétine
1.2. Les muscles oculomoteurs
1.3. L’orbite
1.4. Les paupières
1.5. L’appareil lacrymal
1.6. La vascularisation du globe oculaire
2. RAPPEL HISTORIQUE
3. DIFFERENTES TECHNIQUES CHIRURGICALES
3.1. L’éviscération sans conservation de la cornée selon la technique de BARRACO – MORAX
3.2. L’éviscération sur table
3.3. L’éviscération avec conservation de la cornée
3.4. Technique dite de la « poupée russe »
3.5. Technique du Parachute
3.6. Technique des « quatre carrés »
3.7. L’Enucléation
3.7.1. Description de la technique chirurgicale
3.7.2. Reconstruction des cavités d’anophtalme
3.7.2.1 La simple bille
3.7.2.2. Les implants tunnels
3.7.2.3Les billes sphériques habillées d’un tissu inerte
3.7.2.4. La greffe dermo-graisseuse
4. LES INDICATIONS
4.1. Les Indications de l’éviscération
4.2. Les Indications de l’Enucléation
5. LES COMPLICATIONS
5.1. Les Complications des Eviscérations
5.1.1. Les complications peropératoires des Eviscérations
5.1.2. Les complications postopératoires des Eviscérations
5.2. Les Complications de l’Enucléation
5.2.1. Les complications peropératoires de l’Enucléation
5.2.2. Les complications postopératoires précoces de l’Enucléation
5.2.3. Les complications postopératoires tardives de l’Enucléation
5.2.3.1. Les complications liées à l’implant
5.2.3.2. Les malpositions palpébrales
5.2.3.3. Autres complications tardives de l’énucléation
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
I. MATERIELS ET METHODES
I.2. Critères de sélection
I.2.1. Critères d’inclusion
I.2.2. Critères d’exclusion
I. 2.3. Paramètres d’étude
I.2.3.1. Critères cliniques et épidémiologiques recherchés
I.2.3.2. Devenir des patients
I.3 Cadre d’étude
I.3.1. Les locaux
I.3.2. Le personnel
I.3.3. Les équipements
I 4. Protocole opératoire
I .4.1.Protocole opératoire des éviscérations
I.4.2. Protocole opératoire des énucléations et examen anatomo-pathologique
I.5. Suivi post-opératoire
I.6. Mode de recueil et de traitement des données
II –RESULTATS
II 1.Caractéristiques de la population d’étude
II 2. Fréquence
II.3 Répartition en fonction du genre
II.4. Répartition selon l’âge
II 5 Répartition selon la profession
II.6. Les causes d’énucléation
II.6.1. Répartition générale des causes d’énucléation
II.6.2. Pourcentage de la « kératite des moissonneurs » dans les causes générales
II.6.3. Répartition des causes selon les tranches d’âge
II.6.4. Répartition des causes en fonction du genre
II.6.5. Répartition des causes d’énucléation en fonction de la profession
II 7. Délai de décision de l’énucléation en fonction de la cause
II 8. Types d’interventions pratiquées
II.9. Le traitement postopératoire
II.10. Evolution et suivi post-opératoire
II.10.1 Durée d’hospitalisation
II.10.2. Evolution et suivi post opératoire
TROISIEME PARTIE : COMMENTAIRES ET DISCUSSION
I Les données épidémiologiques
I.1. Prévalence des énucléations
I.2. L’âge
I.3. Le genre
I.4. La profession
I.5. Les causes
I.5.1. Les énucléations après traumatisme
I.5.1.1. Fréquence
I.5.1.2. Fréquence en fonction de l’âge
I.5.1.3. Fréquence en fonction du genre
I.5.2. Les causes infectieuses des énucléations
I.5.2.1. La « kératite des moissonneurs »
I.5.2.2. Les Infections post-opératoires
I.5.3. Les causes tumorales des énucléations
I.5.4. Les causes dégénératives des énucléations
I.5.5. Comparaison avec notre étude
I.6. Délai de décision d’énucléer en fonction de la cause initiale
I.7. Type d’intervention
I.8. Evolution et suivi post-opératoire
I.8.I. La durée d’hospitalisation
I.8.2. Les complications
I.8.3. Le devenir des patients énucléés
QUATRIEME PARTIE : SUGGESTIONS
I. 1. Les actes de prévention primaire : action sur les causes d’énucléation
I. 2. Les actes de prévention secondaire
I.2.1. Actions au niveau de la population
I.2.2 Actions auprès des pouvoirs publics
I.2.3. Actions auprès des Professionnels de santé
I.3. Action de prévention tertiaire : devenir des patients énucléés
CONCLUSION
ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE