L’évaluation par compétences au lycée

Des évaluations nationales diagnostiques

    En début d’année scolaire, les acquis des élèves de cours préparatoire (CP) sont évalués dans le cadre d’une évaluation diagnostique nationale. Ce sont les compétences dans le domaine de la langue et dans celui des mathématiques qui sont évaluées dans le cadre de ces épreuves externes. Elle doit permettre à chaque enseignant d’« affiner sa connaissance des acquis de chacun de ses élèves, les prendre en compte pour orienter son enseignement et accompagner au mieux les apprentissages de tous, dès le début de l’année de CP. ». Les résultats sont communiqués et transmis à l’inspecteur de la circonscription « à des fins de pilotage de l’action pédagogique, de la formation et de l’accompagnement des enseignants de la circonscription. » (MEN, 2017). A l’entrée en sixième, une évaluation standardisée des acquis en français et en mathématiques est également organisée à l’échelle nationale. Toutes les données sont collectées sur support numérique en ligne. Les résultats de ces évaluations diagnostiques viennent compléter le livret scolaire unique numérique de l’élève, constitué pendant sa scolarité à l’école élémentaire et au collège, qui contient l’ensemble des éléments fondamentaux du parcours scolaire, du CP à la troisième.

Objets d’évaluation

a. Savoirs/ Connaissances déclaratives : Les savoirs et les connaissances sont les objets les plus « naturellement » évalués en éducation. Ces deux termes sont le plus souvent utilisés indifféremment. Bien qu’ils soient communément associés comme étant équivalents, ce sont des concepts différents comme le rappellent Jonnaert et Defise (2005). En effet, les savoirs décrits dans les programmes permettent la construction des connaissances par les élèves. Ces savoirs sont socialement admis et valorisés et répondent à la logique de la discipline à laquelle ils appartiennent ou aux pratiques sociales. Ils appartiennent au patrimoine culturel d’une communauté. Ils sont donc collectifs et stabilisés. Les connaissances sont quant à elles construites par les élèves, appartiennent à leur patrimoine cognitif et sont marquées par leurs expériences. Elles sont donc individuelles, dynamiques et réflexives. Pour Tardif (1992 :48), les « connaissances déclaratives correspondent essentiellement à des connaissances théoriques, aux connaissances qui, à une certaine période furent reconnues comme des savoirs ».
b. Savoir-faire/ Capacités/Connaissances procédurales : Cet objet ne peut être évalué que dans le cadre de la mise en œuvre de contenus précis comme l’affirme Roegiers (1999). Son évaluation est donc conditionnée à la mobilisation de connaissances. Selon Meirieu (1987 :181), la capacité est une « activité intellectuelle stabilisée et reproductible dans les champs divers de la connaissance […] aucune capacité n’existe à l’état pur et toute capacité ne se manifeste qu’à travers la mise en œuvre de contenus.». Cette définition de Meirieu confirme la complémentarité et l’indissociabilité entre contenus et capacité. Cette dernière se manifeste en s’appliquant sur des contenus. Elle met en jeu des procédures au cœur des connaissances procédurales définies par Tardif (1992) et qui à la différence des connaissances théoriques sont des connaissances d’action. Ainsi, la plupart des capacités sont transversales et sont par ailleurs évolutives. Le savoir-faire apparaît alors lui aussi comme une connaissance se construisant par l’expérience et supposant une automatisation.
c. Savoir-être/ Attitudes : Définir le savoir-être, souvent assimilé à l’attitude, est complexe. Selon Allport (1935) cité par Gérard (2011:146) « une attitude est un état mental et nerveux de préparation organisé à partir de l’expérience, exerçant une influence directive ou dynamique sur les réponses de l’individu à tous les objets ou situations auxquels il est confronté.». Pour Rosenberg et Hovland (1960), également cités par Gérard (2011:146), c’est «une construction hypothétique et non une donnée brute observable. C’est un instrument conceptuel intégratif, élaboré à titre d’hypothèse pour rendre compte d’une structure relativement stable chez un individu. ». Cette construction revêt une dimension cognitive et évaluative, une dimension affective et une dimension comportementale. Il est admis que le développement du savoir-être est en partie assuré par l’école dont c’est l’une des missions. Se pose alors la question complexe de son évaluation puisque toutes les dimensions de son expression dans une activité observée seraient à prendre en compte. Pour Gérard (2000:30), les savoir-être « manifestent ce qu’est fondamentalement la personne, dans toutes ses composantes, dans sa globalité ». Il distingue le savoir-reproduire du savoir-faire dont le développement progressif conduit au savoir-être. La mise en œuvre de l’évaluation du savoir-être est donc rendue complexe. En effet, le savoirêtre n’est observable que si on définit des indicateurs concrets. De plus, comme l’indique De Ketele (2010), il ne peut être évalué qu’en « situation non contrainte ». Il faudrait  donc multiplier les observations pour l’évaluer et se poserait le problème éthique de l’absence de la communication des critères d’évaluation aux élèves. Ainsi, le développement et l’évaluation des savoir-être ne sauraient être envisagés de manière isolée en dehors d’une situation construite en intégrant savoirs, savoir-faire et savoir-être. Quelles sont les intentions pédagogiques de l’évaluation ?

Des définitions multiples et évolutives pour caractériser la compétence

   Partant du constat que dans les pratiques chaque apprentissage prépare surtout aux apprentissages suivants dans le cursus scolaire, Perrenoud (1995) rappelle que chaque élève devrait pourtant être capable de mobiliser ces acquis scolaires en dehors de l’école dans diverses situations complexes et inédites. Cette réflexion le conduit à poser la problématique du transfert des connaissances et de la construction des compétences qui sous tendent que (Perrenoud, 1995:20) :
– pour être utiles, les savoirs scolaires doivent être transférables ;
– mais ce transfert exige plus que la maîtrise de savoirs, il passe par leur intégration à des compétences de réflexion, de décision et d’action à la mesure des situations complexes auxquelles l’individu doit faire face.
Ainsi pour lui (Perrenoud, 1999:16), une compétence est : Une capacité d’action efficace face à une famille de situations, qu’on arrive à maîtriser parce qu’on dispose à la fois de connaissances nécessaires et de la capacité de les mobiliser à bon escient, en temps opportun, pour identifier et résoudre de vrais problèmes. Il rejoint ainsi Gillet (1991:69) sur l’idée d’efficacité dans l’action quand ce dernier définit une compétence comme étant « un système de connaissances conceptuelles et procédurales, organisées en schèmes opératoires et qui permettent, à l’intention d’une famille de situations, l’identification d’une tâche-problème et sa résolution par une action efficace. » Cette notion de compétence qui s’est largement généralisée dans le champ de l’éducation fait l’objet de nombreuses incertitudes et d’évolutions quant à sa définition comme le rappelle Jonnaert (2017) en s’appuyant sur des écrits antérieurs et sur ses travaux. Selon lui, certaines définitions ne prennent pas en compte toutes les dimensions de la notion de compétence et restent partielles. Il indique par exemple, qu’elle se limite à la capacité de faire quelque chose pour l’OCDE (2000) ou à un rapport de la personne en situation pour Pastré et Samurçay (2001). D’autres définitions assimilent la compétence à la capacité, alors même que pour Jonnaert (2017), la compétence englobe la capacité. Il (Jonnaert & al., 2004:674-675) affirme en effet que : Ces deux concepts se situent à des niveaux sémantiques différents. La compétence englobe la capacité, mais l’inverse n’est pas vrai. Les capacités sont constitutives d’une compétence, mais l’inverse n’est pas vrai non plus. La capacité apparaît ainsi comme une des ressources mobilisée parmi d’autres dans une situation déterminée à traiter en mettant en œuvre une (ou des) compétence(s). D’autres auteurs mettent en opposition compétences et savoirs. C’est le cas de Baillargeon (2013) qui dénonce une minoration de la place accordée aux connaissances factuelles – que sont les savoirs – au profit des facultés intellectuelles de haut niveau – que sont les compétences – dans l’approche par compétences. Pour Boutin et Julien (2000), l’acquisition de compétences se fait au détriment de celle des savoirs. Certains auteurs assimilent la compétence à une somme de savoirs. Mais selon Jonnaert (2017) savoirs et compétences ne sont pas à comparer car: Une compétence ne peut être réduite, parfois même opposée aux savoirs, ni assimilée à des catégories de savoirs, elle est nécessairement plus globale. En effet, une compétence s’appuie sur des savoirs et ne s’y oppose pas et, corollairement, un savoir se construit parce qu’une personne l’utilise en traitant des situations et en développant des compétences. […]. Il s’agit bien plus de rechercher les complémentarités entre les deux, de déterminer les savoirs dont la personne a besoin pour développer telle ou telle compétence dans des situations et vice-versa de déterminer les savoirs sur lesquels les compétences se sont effectivement appuyées. Concernant les relations possibles entre compétences et savoirs, Rey (2014 :76) affirme qu’ « il n’y a aucune incompatibilité entre les deux réalités : savoirs et compétences sont intriqués les uns dans les autres […] ». Il explique que toute compétence intègre des savoirs informatifs, des savoirs textuels et des savoirs pratiques. Ainsi, savoirs et capacités sont des ressources nécessaires à la mise ne œuvre des compétences, mais ne sont pas la compétence. Cela confirme la vision d’Allal (2002:81), qui évoque un « faisceau opératoire de ressources » constitué de plusieurs capacités coordonnées à plusieurs ressources pour le traitement d’une situation. Pour elle (Allal, 2002:80), une compétence est un : Réseau intégré et fonctionnel constitué des composantes cognitives, affectives, sociales, sensorimotrices, susceptibles d’être mobilisé en actions finalisées face à une famille de situations et fondé sur l’appropriation de modes d’interactions et d’outils socioculturels. Considérant la compétence comme inscrite dans un processus de construction continue et dépassant le cadre scolaire, Bissonnette et Richard (2001:74) définissent la compétence comme : Un savoir-agir résultant d’une compréhension adéquate des savoirs, savoir-faire et savoir-être intégrés et accessibles en mémoire, mobilisables de façon efficiente parce qu’ils ont été utilisés régulièrement et avec succès dans une grande variété de contextes et de disciplines, et ce, autant à l’école que dans la vie quotidienne. Par ailleurs, Jonnaert (2002:41) ajoute l’idée qu’« une compétence suppose, au-delà du traitement efficace, que ce même sujet pose un regard critique sur les résultats de ce traitement qui doit être socialement acceptable. ». C’est du regard critique que l’élève doit poser sur son activité qu’il est question ici. Il doit à la fois mobiliser différentes ressources mais aussi les sélectionner et les coordonner. Face à cette pluralité des définitions, Rey et al. (2003:14) pour qui « une compétence est le fait de savoir accomplir efficacement une tâche, c’est-à-dire une action ayant un but. », relèvent le caractère dynamique et évolutif de ce concept pour les processus d’apprentissage en introduisant des niveaux mettant en exergue des compétences standardisées dont la mise en œuvre est automatisée et des compétences complexes dont la mise en œuvre exige une forte initiative du sujet devant agir dans une situation inédite: certaines sont dites de premier degré ou compétence élémentaire (procédures automatisées), d’autres de deuxième degré ou compétences élémentaires avec cadrage où il s’agit de posséder des procédures de base et de savoir les sélectionner avec cadrage dans une situation inédite donnée (interprétation de la situation nécessaire), le troisième type, compétence de troisième degré ou compétence complexe, consiste à combiner plusieurs procédures de base face à une situation nouvelle et complexe. Cette définition montre la progressivité de l’acquisition d’une compétence et l’augmentation progressive du nombre de ressources convoquées, emboîtées et mobilisées pour mettre en œuvre une compétence nécessaire pour accomplir une tâche. Dans cette optique, une des ressources mobilisées pourrait à elle-seule constituer une compétence selon le stade d’acquisition considéré. Cette idée de complexité croissante est admise par Hadji (2015) qui classe quatre grands types d’objets à construire (et à évaluer) : les savoirs déclaratifs, les savoir faire, les stratégies et les compétences. Dans cette classification, les compétences apparaissent comme l’objet le plus complexe. Tardif (2006:22), considère qu’une compétence est « savoir–agir complexe prenant appui sur la mobilisation et la combinaison efficaces d’une variété de ressources internes et externes à l’intérieur d’une famille de situations». Parmi ces ressources, il ajoute les connaissances « conditionnelles » qui concernent les conditions d’utilisations des autres connaissances (déclaratives et procédurales). Dans un sens similaire, Allal (2002) parle de connaissances « contextuelles ». Plus récemment, s’inscrivant dans une perspective située de l’apprentissage, Mottier-Lopez (2016), intègre également le contexte circonstanciel et culturel indissociable de l’apprentissage comme ressource constitutive d’une compétence. Face à cette multiplicité des éléments définitoires de la compétence, nous pouvons mettre en exergue quelques invariants pouvant faire consensus pour définir la compétence et la rendre opérationnelle en éducation en dépit de sa complexité.

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Table des matières

INTRODUCTION
I. CADRE THEORIQUE ET CONCEPTUEL
1. L’évaluation dans le champ de l’éducation
1.1. Places multiples de l’évaluation en contexte scolaire
1.1.1. A travers le temps : changement de paradigme
a. Apports des Jésuites au XVIème siècle
b. L’Ecole républicaine au XIXème siècle : enseignement de masse
c. Apports de la docimologie au XXème siècle
d. Emergence de l’évaluation formative
1.1.2. A différentes échelles
a. Des évaluations internationales
b. Des évaluations nationales diagnostiques
c. Des évaluations nationales certificatives
d. Des évaluations à l’échelle de la classe
1.1.3. A travers le regard de l’institution
1.2.L’évaluation en situation d’enseignement/apprentissage : les processus en jeu
1.2.1. Des définitions complémentaires
1.2.2. Objets d’évaluation
a. Savoirs/ Connaissances déclaratives
b. Savoir-faire/ Capacités/Connaissances procédurales
c. Savoir-être/ Attitudes
1.2.3. Fonctions pédagogiques de l’évaluation
a. Evaluation diagnostique
b. Evaluation formative
c. Evaluation sommative
d. Evaluation certificative
1.2.4. Enjeux de l’évaluation en situation d’enseignement/ apprentissage
a. Des limites moins marquées entre les différentes fonctions
b. Place centrale de l’évaluation formative
1.2.5. L’activité évaluative des enseignants
a. Elle fait l’objet d’une compétence professionnelle
b. Elle met en jeu un processus intégrant des invariants
c. Elle est soumise aux conceptions des enseignants qui adoptent des postures variées
2. La notion de compétence en milieu scolaire
2.1.La compétence : proposition de caractérisation en sciences de l’éducation
2.1.1. Des définitions multiples et évolutives pour caractériser la compétence
2.1.2. Un consensus pouvant la rendre opérationnelle
2.2.La compétence : aspects institutionnels
2.2.1. Définition au niveau international
2.2.2. Définition au niveau national
3. L’évaluation par compétences dans le champ scolaire
3.1. L’approche par compétences en milieu scolaire
3.1.1. Faire acquérir des compétences : comment ?
a.Construire des situations complexes
b.Prendre en compte la progressivité
c.Favoriser l’implication des élèves, dimension métacognitive
3.2. Evaluer des compétences : un défi ?
3.2.1. La question de la situation
3.2.2. La question de la collecte d’informations
3.2.3. La question du jugement
3.2.4. La question de la décision
II.CADRE DE L’ETUDE
1. Objet et contexte de l’étude
2. Problématique et hypothèses
3. Méthodologie de la recherche
3.1.Etude qualitative
3.1.1. Les participants
3.1.2. Le recueil de données
3.1.3. Démarche d’analyse des données
3.2. Etude quantitative
3.2.1. Les participants
3.2.2. Le recueil de données
3.2.3. Démarche d’analyse des données
III.ANALYSE DES RESULTATS ET INTERPRETATION
1. Etude qualitative
1.1.Analyses descriptives (individuelles)
1.1.1.Enseignant A
a. Son profil général
b. Sa conception de l’évaluation
c. Sa conception de la compétence
d. Sa perception de l’évaluation par compétences
e. Ses pratiques enseignantes
f. Ses pratiques d’évaluation
g. Communication/ retour sur l’évaluation avec les élèves
h. Implication des élèves
i. Synthèse concernant l’enseignant A
1.1.2. Enseignant B
a.Son profil général
b. Sa conception de l’évaluation
c. Sa conception de la compétence
d. Sa perception de l’évaluation par compétences
e. Ses pratiques enseignantes
f. Ses pratiques d’évaluation
g. Communication/ retour sur l’évaluation avec les élèves
h. Implication des élèves
i. Synthèse concernant l’enseignant B
1.1.3. Enseignante C
a.Son profil général
b. Sa conception de l’évaluation
c. Sa conception de la compétence
d. Sa perception de l’évaluation par compétences
e. Ses pratiques enseignantes
f. Ses pratiques d’évaluation
g. Communication/ retour sur l’évaluation avec les élèves
h. Implication des élèves
i. Synthèse concernant l’enseignante C
1.1.4. Enseignante D
a.Son profil général
b. Sa conception de l’évaluation
c. Sa conception de la compétence
d. Sa perception de l’évaluation par compétences
e. Ses pratiques enseignantes
f. Ses pratiques d’évaluation
g. Communication/ retour sur l’évaluation avec les élèves
h. Implication des élèves
i. Synthèse concernant l’enseignante D
1.2.Analyse interprétative (comparaison des pratiques déclarées)
1.2.1. Les pratiques enseignantes déclarées
1.2.2. Les pratiques d’évaluation déclarées
1.2.3. Les facteurs pouvant influencer les pratiques
2. Etude quantitative
2.1.Analyse descriptive (tris à plats)
2.1.1. Analyse des données relatives à l’hypothèse H1.1.
2.1.2. Analyse des données relatives à l’hypothèse H2.1.
2.1.3. Analyse des données relatives à l’hypothèse H2.2.
2.2.Analyse typologique et tris croisés
2.2.1. Analyse des données relatives à l’hypothèse H3.1.
2.2.2. Analyse des données relatives à l’hypothèse H3.2.
IV.DISCUSSION DES RESULTATS
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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