L’évaluation du risque chimique en établissement de santé

Le milieu de travail, environnement dans lequel l’adulte actif moyen passe une importante partie de son temps, peut constituer une nuisance pour son bien-être. Ce risque pourrait être accru dans des secteurs particuliers d’activité du fait de la nature des intrants. La diversité des produits chimiques utilisés au laboratoire expose les travailleurs et l’environnement à des risques. Ces risques sont bien souvent sous-estimés alors qu’il existe des évidences qui interpellent. L’Organisation Internationale du Travail (OIT) estime que 2 340 000 personnes meurent chaque année de maladies et d’accidents du travail. La majorité de ces décès, soit 2 020 000, correspond à des maladies professionnelles et liées au travail, le nombre total de cas de maladies non mortelles liées au travail chaque année est estimé à 160 millions dans le monde (OIT, 2014). Selon les données rassemblées par l’OMS et publiées dans la revue «Santé Environnementale», plus de 8% des décès survenus dans le monde résultent de l’exposition à des produits chimiques (OMS, 2018).

Il n’est pas toujours aisé de donner la définition précise d’un produit chimique ou d’une substance chimique. Toutefois, selon la convention (n° 170) de l’OIT sur la sécurité dans l’utilisation des produits chimiques au travail, le terme produit chimique s’applique aux éléments et composés chimiques, et à leurs mélanges, qu’ils soient naturels ou synthétiques, tels que ceux obtenus par des procédés de production (OIT, 2018). En 2016, plus de cent millions de substances ont été dénombrées (contre soixante-cinq millions en 2009 et dix-huit millions en 2002) classées par familles et/ou par usage ou propriétés (CAS, 2018). On estime qu’environ onze mille nouvelles substances ont été créées par jour de 2002 à 2009 et que sept nouvelles molécules sont introduites chaque jour dans le commerce (Eawag News, 2009). Si ces produits chimiques présentent des risques pour les travailleurs en milieu professionnel, la plupart de ces produits diffusent dans l’environnement où ils se dégradent et/ou circulent, via ses compartiments (eau, air, sols et sédiments). Cette diffusion s’accompagne bien souvent de préjudices à l’environnement.

Plusieurs outils et méthodes sont disponibles pour évaluer les risques chimiques en milieu professionnel. La méthode d’évaluation des risques chimiques en établissement de santé élaborée par cinq Centres Hospitaliers Universitaires en France nous paraît la plus indiquée pour le présent travail. Elle présente l’avantage d’une simplicité d’utilisation et permet une évaluation plus exhaustive de l’exposition aux très nombreux produits chimiques utilisés en milieu de santé. De plus, elle simplifie l’inventaire des agents chimiques dangereux à évaluation quantitative obligatoire qui peuvent exister dans un établissement en l’état ou au sein d’une préparation chimique. Elle a été validée notamment grâce à son utilisation simultanée dans les laboratoires d’hématologie hospitalière de ces cinq centres (CHU de Grenoble, 2007).

L’évaluation semi-quantitative du risque chimique en établissement de santé 

L’évaluation semi-quantitative du risque chimique est un processus d’analyse du danger chimique et de la situation de travail permettant d’estimer le risque et de le comparer à un critère d’aide à la décision (exemple : seuil au-dessus duquel le risque est très élevé, seuil en dessous duquel le risque peut être estimé faible). Elle repose sur une quantification mathématique du risque en faisant le produit du danger et de l’exposition. Ainsi :

?????? =??????×?????????n

Elle consiste à déterminer les produits chimiques utilisés et la nature de leurs dangers. Elle permet également de rechercher s’ils présentent le risque de l’une ou de plusieurs des éventualités suivantes :
● maladie aiguë ou chronique due à la pénétration dans l’organisme par inhalation, absorption percutanée ou ingestion ;
● lésion/maladie due au contact avec la peau, les voies respiratoires ou les yeux ;
● lésion due au feu, à une explosion ou à d’autres événements résultant de leurs propriétés physiques ou de leur réactivité chimique. Les étapes de cette évaluation incluent :

Repérage des produits et de leurs dangers 

Il consiste à faire un inventaire des agents chimique présents ou susceptibles d’être rencontrés sur les lieux de travail, tout en cherchant les informations disponibles sur les dangers des produits pour la santé humaine, la sécurité au travail (risques d’incendie ou d’explosion), la sécurité pour l’environnement.

Analyse des conditions d’exposition

Elle permet de qualifier l’exposition aux produits et procédés chimiques tout en répondant aux questions suivantes :
● au cours de quelles activités les produits chimiques sont-ils émis ?
● sous quelle forme et en quelle quantité ainsi qu’à quelle fréquence ?
● qui est en contact avec les produits chimiques ?
● quels sont les modes d’exposition possibles ?
● Existe-t-il des risques d’exposition accidentelle ?

Hiérarchisation des risques 

Elle permet de cibler les risques qu’il faut pour traiter en priorité ceux dont les conséquences sont les plus graves et les plus fréquentes, ceux qui concernent le plus de salariés, ceux pour lesquels des mesures simples existent.

DISCUSSION 

Notre étude nous a permis d’évaluer les risques sanitaires liés à la manipulation des produits chimiques les plus utilisés au LNCQ. Nos résultats mettent en évidence une toxicité locale élevée pour onze des produits chimiques. Ce sont : les acides acétique glacial, nitrique, perchlorique, phosphorique, sulfurique, l’hydroxyde de sodium, l’éthanol, le propanol, la diéthylamine et la triéthylamine. La toxicité locale de ces substances a été décrite dans plusieurs études. Selon les résultats d’expertise toxicologique de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail, l’acide acétique glacial présente des dangers de toxicité lors des expositions par inhalation, contacts oculaire et cutanée (CSST, 2019). L’acide nitrique est un acide fort corrosif ou irritant selon sa concentration ; après exposition directe à une concentration suffisamment élevée, il induit des effets locaux sur la peau, les yeux, le tractus respiratoire et le tractus gastro-intestinal (NIOSH, 1976). L’acide perchlorique est un caustique puissant responsable de lésions sévères des tissus avec lesquels il entre en contact (BGIA-Gestis, 2019). L’acide sulfurique est toxique pour l’animal, surtout par inhalation de l’aérosol. Il est fortement irritant ou corrosif pour le tractus respiratoire et le tractus gastro-intestinal; pur, il est corrosif pour la peau et l’œil (OCDE, 2001) (CDC, 1998). L’hydroxyde de sodium et ses solutions aqueuses sont caustiques pour la peau ou toute muqueuse avec laquelle ils entrent en contact. La gravité des lésions dépend de la quantité appliquée, de la concentration de la solution et du temps de contact (OCDE, 2002) (CDC, 2011) (CSST, 2019).

Selon le Règlement Commission Européenne (CE) N°1907/2006, le violet cristallisé n’est pas classé corrosif ou irritant pour la peau mais provoque de grave lésion oculaire (Carlroth, 2006). Nos résultats ont mis en évidence un fort niveau de toxicité systémique non CMR respiratoire, et cutanée du méthanol et de l’acétonitrile. En cas d’exposition répétée au méthanol, des céphalées et des troubles visuels ont été décrits (INRS, 2010) (Nelson et coll., 1985). L’exposition à certains agents chimiques dangereux peut nuire à la fonction de reproduction, au développement de l’embryon, du fœtus ou de l’enfant allaité. Si de tels agents chimiques dangereux sont utilisés ou émis à leur poste de travail, les salariés doivent en être instruits, et informés des risques et formés à la prévention de l’exposition à ces produits. Il convient en particulier de sensibiliser les femmes à l’intérêt de déclarer leur grossesse précocement afin d’être soustraites aux risques d’exposition à ces agents. Dans le cas précis du LNCQ, la phénolphtaléine et le n-hexane présentent un risque élevé pour la reproduction.

Quatre produits chimiques présentent un risque mutagène et cancérogène. Il s’agit de l’éthanol, du dichlorométhane, de la phénolphtaléine et du violet cristallisé. Selon l’évaluation du Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) en 2007, il existe des preuves suffisantes de la cancérogénicité de l’éthanol chez l’animal. Chez l’homme, l’éthanol dans les boissons alcoolisées, donc par voie orale, est classé dans le groupe 1 des agents cancérogènes. Il n’y a pas de donnée concernant les risques cancérogènes liés à l’inhalation répétée d’éthanol. Certains des effets constatés surviennent pour des doses faibles et il convient d’y prêter attention en cas d’exposition importante possible (CICR, 2019) (CICR, 2010). Le dichlorométhane est classé dans le groupe 2A des cancérogènes chez l’homme. Il est associé aux cancers du tractus biliaire et aux lymphomes nonHodgkiniens (CICR, 2018). La phénolphtaléine est classé dans le groupe 2B des cancérogènes chez l’homme (CICR, 1999). Le violet cristallisé est considéré comme cancérigène suspecté sans preuves suffisantes (Carlroth, 2019).

L’usage des moyens de protection collective et les équipements de protection individuelle (appareils de protection respiratoire, gants, lunettes, vêtements de protection…) adaptés aux risques est une obligation pour tout manipulateur de produit chimique. Il est tenu également d’en assurer l’entretien et de les remplacer si besoin. Ces équipements doivent être notamment certifiés et adaptés à la tâche à effectuer. L’usage inapproprié de ces moyens de protection peut entrainer des dommages sanitaires. Durant notre étude, nous avons notés uniquement l’usage correct des moyens de protection cutanée. Même là, le problème de la contamination par pénétration cutanée à travers les gants est posé : plusieurs études ont montré la limite de la protection assurée par les gants. De plus, l’utilisation d’alcool et d’hydroxyde de sodium pour nettoyer les surfaces serait susceptible d’altérer leur perméabilité. L’utilité des dosages atmosphériques et biométrologiques pour assurer la surveillance des salariés exposés paraît incontestable aux auteurs.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
1. Rappels bibliographiques
1.1 Quelques définitions
1.2 L’évaluation du risque chimique en établissement de santé
1.3 Méthode d’évaluation ru risque chimique
2. Méthodologie
2.1 Cadre d’étude
2.2 Type et période d’étude
2.3 Population d’étude
2.4 Collecte des données
2.5 Technique de collecte des données
2.6 Saisie et traitement des données
2.7 Chronogramme d’étude
3. Résultats
3.1 Caractérisation et hiérarchisation des dangers
3.2 Evaluation de l’exposition des individus
3.3 Hiérarchisation du risque chimique
3.4 Conditions de stockage et d’élimination
4. Discussion
Conclusion
Bibliographie

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *