L’évaluation des compétences cliniques en soins infirmiers
L’effectif enseignant
Pour devenir enseignante en soins infirmiers au Cégep de Trois-Rivières, les préalables demandés sont de détenir une expérience professionnelle pertinente et un baccalauréat en sciences infirmières ou en voie d’obtention (Cégep Trois-Rivières, 201 2). Les conditions d’embauche sont comparables dans les différents cégeps. Aucune formation en pédagogie n’est requise (Boutin, 2007; Gagnon, 2007). Le nombre d’enseignantes en soins infirmiers détenant un emploi permanent au Cégep de Trois-Rivières est de 26 ce qui correspond à environ 50 % des enseignantes de ce département (Cégep de Trois-Rivières, 2006 à 2012). Il est donc possible d’affirmer que l’ autre 50 % du personnel enseignant en soins infirmiers au Cégep de Trois-Rivières occupe un emploi précaire. En octobre 2012, les enseignantes possédant moins de cinq ans d’ancienneté dans ce département représentaient 41 % de l’effectif professoral (Cégep Trois-Rivières, 2006 à 2012). De plus, parmi les enseignantes, 35 % comptent moins de trois années d’ancienneté en enseignement des soins infirmiers. Malgré le peu de départs chez les enseignantes plus anciennes, le nombre d’embauche reste important à chaque année.
Le Tableau 1 montre le nombre de départs d’ enseignantes au département des SOInS infirmiers. Entre 2006 et 2011, 30 enseignantes ayant moins de cinq ans d’ancienneté ont quitté (9,25 %), comparativement à dix (3,05 %) pour celles détenant plus de cinq ans, ce qui représente trois fois plus de départs chez les nouvelles enseignantes que chez les plus anciennes. Le roulement de personnel touche davantage les jeunes enseignantes. Sur les dix départs d’enseignantes ayant plus de cinq ans d’ancienneté, six ont pris leur retraite et quatre autres ont quitté pour d’autres motifs. Durant la même période, 30 enseignantes (9,25 %) nouvellement engagées ont quitté pour différents motifs. Il n’a pas été possible de connaitre les raisons de leur départ. Toutefois, il semble possible de faire le constat que le roulement des nouvelles enseignantes semble très important (Cégep de TroisRivières, 2006 à 2012). Les enseignantes qui possèdent plusieurs années d’ancienneté quittent en moins grand nombre l’enseignement comparativement aux plus jeunes. Cela pourrait s’expliquer par la difficulté et la complexité de la tâche d’enseignement et le manque de soutien dans les premières années.
Le marché du travail
La jeune infirmière qui termine ses études collégiales, lorsqu’elle choisit d’exercer en milieu hospitalier, est appelée à travailler dans plusieurs départements et sur différents quarts de travail. Ses conditions de travail sont souvent difficiles puisqu’elle doit conjuguer avec des horaires de soir, de nuit et de fin de semaine. L’obligation du temps supplémentaire ainsi qu’une charge de travail qui est de plus en plus lourde font aussi partie de la réalité de travail (FIQ, 2008; Santé Canada, 2005). L’infirmière doit de plus, concilier le travail et la famille. Les emplois qu’offrent les maisons d’enseignement peuvent alors devenir attrayants. Lorsque la jeune infirmière arrive dans l’enseignement, elle s’attend à un emploi qui lui offre de meilleures conditions de travail qu’elle connait dans les établissements de santé (Boutin, 2007). Selon les statistiques de l’OIIQ (2012c), 2 200 infirmières font partie de l’effectif enseignant.
En 2010-2011, 100 infirmières ont rejoint l’enseignement (OIIQ, 2012b). L’arrivée du programme DEC-BAC a pennis de faire augmenter le nombre d’infinnières bachelières au Québec. Selon les statistiques de l’OIIQ (2011), avant l’arrivée du DEC-BAC en 2004, 22 % des infIrmières ayant tenniné leur fonnation collégiale obtenaient un baccalauréat comparativement à 37 % pour la première cohorte du DEC-BAC. Un plus grand nombre de jeunes infmnières possèdent maintenant une fonnation universitaire et répondent beaucoup plus tôt aux conditions demandées par les collèges pour l’enseignement. Il semble difficile de savoir s’il s’agit d’un choix de carrière pour toutes les nouvelles enseignantes ou d’une façon d’améliorer leur condition d’emploi. Aucune recherche ne semble avoir été faite sur ce sujet ce qui ne pennet pas de connaitre leurs motifs pour débuter une carrière en enseignement des soins infmniers.
Le portrait des nouvelles enseignantes
L’arrivée dans un nouveau milieu de travail est souvent diffIcile quelque soit le lieu (Boutin, 2007; Martineau, 2006; Raymond, 2001). Cette réalité est aussi vraie lorsque qu’une infinnière devient enseignante. Comme le montre les statistiques du Cégep de Trois-Rivières, plusieurs nouvelles enseignantes quittent durant les cmq premières années (Cégep de Trois-Rivières, 2006 à 2012). À son arrivée dans l’enseignement, l’infmnière s’attend à donner des cours théoriques et accompagner les étudiantes dans les milieux de stage. Toutefois, l’enseignement comprend beaucoup d’autres fonctions tant pédagogiques qu’administratives. De plus, la supervision des groupes d’étudiantes est une partie importante de la tâche (Phaneuf, 2012; Pharand, 1999). La correction des travaux, l’évaluation fonnative ainsi que sommative font aussi partie de la tâche de supervision. Finalement, la participation à la vie départementale représente une autre obligation de l’enseignante (Boutin, 2007 ; Gagnon, 2007).
Plusieurs auteurs soulignent que la nouvelle enseignante est peu encadrée lorsqu’elle arrive dans l’enseignement, et ce, dans tous les domaines et à tous les niveaux de formation (Brunet, 2009; Krautscheid, Kaakinen, & Warner, 2008; Lë:fi:nark, Morberg, Ohlund, & Ilicki, 2008; Martineau, 2006; Martineau, Presseau, & Portelance, 2005; Raymond, 2001). Elle reçoit de nombreuses informations sur les procédures de la tâche d’enseignement par exemple, les plans-cadres de compétence, les plans de cours, les évaluations formatives et sommatives, le nombre de cours théorique à donner et le nombre de jours de stage à effectuer. Plusieurs auteurs soulignent qu’il n’est pas rare que la nouvelle enseignante se sente dépassée par les évènements et par tout ce qu’elle doit apprendre au niveau administratif, départemental en plus de son rôle d’enseignement (Boutin, 2007; Brunet, 2009; Gagnon, 2007).
La réalité des nouvelles enseignantes au collégial peut se comparer à celles des préceptrices cliniques. Ces dernières font majoritairement de l’encadrement et de la supervision d’étudiantes selon un ratio 1: 1 (Lë:fi:nark, Morberg, Ohlund, & Ilicki, 2008; OIIQ, 2009a; St-Pierre, 2007). Selon certaines études qui ont porté sur le vécu des nouvelles préceptrices, la motivation de vouloir transmettre leurs connaissances est importante, toutefois, elles se disent souvent frustrées par le manque d’encadrement pour faire du préceptorat (Boutin, 2007; Lëfmark, Morberg, Ohlund, & Ilicki, 2008). Selon ces études, les nouvelles enseignantes qui débutent en encadrement de stage, ne se sentent pas soutenues et mentionnent le besoin de formation pour la supervision des stages (Boutin, 2007; Lofmark, Morberg, Ohlund, & Ilicki 2008). Des chercheurs ont fait ressortir l’importance d’accompagner les nouvelles enseignantes dans les premières années lorsqu’elles arrivent dans un nouveau milieu de travail qui s’accompagne de tâches souvent très différentes de ce qu’elles accomplissaient auparavant (Brunet, 2009; Dubé, 2009; Lofmark, Morberg, Ohlund, & Ilicki, 2008; Martineau, Presseau, & Portelance, 2005).
En réalité, la nouvelle enseignante arrive avec son bagage de connaissances en lien avec son milieu clinique infirmier. La tâche d’enseignante peut donc représenter tout un défi pour elle. Elle possède peu de ressources pédagogiques et de soutien pour faire face à un groupe d’étudiantes et doit composer avec une tâche qui n’est pas toujours en lien avec ses compétences cliniques (Boutin, 2007; Martineau, 2006). La pédagogie et les soins infirmiers sont deux disciplines distinctes (Brunet, 2009).
La tâche d’enseignement en soins infirmiers La tâche d’enseignement des soins infirmiers est principalement reliée à la supervision des stages. Selon Pharand (2007), les stages sont le coeur de la formation infmnière. Au Cégep de Trois-Rivières, l’attribution des tâches d’enseignement se fait en respectant l’ancienneté des enseignantes et non par domaine de compétence (Cégep de Trois-Rivières, 2006). Les enseignantes plus expérimentées choisissent leur tâche d’enseignement davantage en fonction de leur expertise clinique. Conséquemment, la nouvelle enseignante se retrouve avec une tâche qui ne tient pas compte de son domaine de compétence (Boutin, 2007; Cégep de Trois-Rivières, 2006). Si, par exemple, elle provient d’une unité mère-enfant, cette expertise n’est pas prise en compte pour l’attribution de sa tâche.
Elle se retrouve donc à enseigner des notions de psychiatrie et accompagner des étudiantes dans des milieux de soins de longue durée. Il se peut très bien qu’elle doive partager son temps entre des stages de première et de troisième année dans la même session de même que de se voir confier des stages dans différents milieux cliniques. L’enseignante a régulièrement une tâche divisée ce qui fait en sorte qu’elle n’a pas le temps de se familiariser ni avec l’ensemble de la tâche d’enseignement, ni avec les objectifs à atteindre pour les différents stages pour lesquels elle fait de la supervision. De plus, l’enseignante doit se familiariser avec les outils d’évaluation, les travaux et les objectifs de stage, et ce, pour chacune des sessions. La nouvelle enseignante se sent souvent démunie et a besoin d’être guidée sur la gestion d’un groupe de stage ou sur la façon de superviser une étudiante problématique (Boutin, 2007).
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Table des matières
Sommaire
Liste des tableaux
Liste des figures
Remerciements
Problématique
L’effectif infirmier
La formation collégiale
L’effectif enseignant
Le marché du travail
Le portrait des nouvelles enseignantes
La tâche d’enseignement au collégial
La tâche d’enseignement en soins infirmiers
La supervision de stage
L’ objectif
Recension des écrits
La formation infirmière collégiale au Québec
Les savoirs
L’approche par compétences en soins infirmiers
La mosaïque des compétences cliniques de l’ infirmière
Le Modèle de Benner
Le changement d’expertise
Les stages cliniques
Le rôle de l’enseignante durant les stages
L’encadrement des stages
La formation des enseignantes au collégial
Les premiers pas dans l’enseignement..
Le soutien à l’enseignante
L’évaluation des compétences cliniques en soins infirmiers
Cadre de référence
La compétence hulnaine
La compétence technique
La compétence professionnelle
La compétence organisationnelle
La compétence pédagogique
Méthodologie
L’aperçu de la méthodologie
Le déroulement de l’étude
Le milieu
La population cible et échantillon
Les critères d’ inclusion
Les critères d’exclusion
Le recrutement
La définition des termes
La démarche scientifique
La simulation
Les instruments de mesure
La vidéo de simulation
La construction des grilles d’observation
La formation sur l’évaluation des stages
Les guides d’évaluation des stages
Les certificats éthiques
Le contrôle des variables
Le déroulement des activités
Résultats
Les résultats des observations avant la formation
Le premier visionnement
La mise en situation
La performance de l’étudiante
La collecte des données
L’entrevue
La formation de sept heures
Le résultat des observations après la fomlation
Le deuxième visionnement
La performance de l’étudiante
La grille d’observation 2
L’ entrevue
Le modèle de Pharand
Discussion
Les résultats obtenus
Les retombés possibles
Les limites de la recherche
Conclusion
Références
Appendice A. Les 22 compétences de la formation spécifique du programme de soins infirmiers 180-AO
Appendice B. Grilles d’observation
Appendice C. Lettre d’information
Appendice D. Certificat du comité d’éthique du Cégep de Trois-Rivières
Appendice E. Certificat du comité d’éthique de l’Université du Québec à
Trois-Rivières
Appendice F. F onnulaire de consentement des participantes
Appendice G. Formulaire de consentement des vidéos de simulation
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