L’évaluation d’accomplissement du contrat psychologique
La définition du contrat psychologique
Le concept de « contrat psychologique » est un concept ancien dans l’étude organisationnelle des comportements humains. En 1960, Argyris (1960) évoquait déjà un CP pour rendre compte de l’entente tacite qui sous-tend la relation d’emploi. Cette notion, ces quinze dernières années, s’est affirmée sous un angle plus individuel et plus subjectif en se référant aux croyances individuelles concernant l’existence d’un accord d’échange entre les parties de la relation d’emploi. Nous présentons ses différentes conceptualisations, ses principes de réciprocité et de mutualité qui inscrivent le CP dans la théorie de l’échange social et soulignons sa double face « employé et employeur ».
Les premières définitions du contrat psychologique
Bien que le terme de « contrat psychologique » n’ait jamais été employé avant 1960, ses racines historiques remontent aux écrits de Barnard (1938), March et Simon (1958), Agyris (1960) et plus récemment Levinson, Munden, Mandl et Solley (1962) ou de Schein (1965, 1970, 1980). Le point de convergence de ces différents travaux tient à une perspective d’échange : Barnard (1938), en s’intéressant aux conditions dans lesquelles une organisation peut susciter la participation de ses membres ; March et Simon (1958), en rendant compte de la relation d’échange entre un employé et l’organisation à travers un modèle de récompenses/contributions. La conceptualisation du contrat psychologique a pris de la consistance à travers les travaux conduits par Argyris (1960) qui a utilisé le terme de « contrat de travail psychologique » pour décrire une entente tacite (qui n’est pas formellement exprimée, qui est sous-entendue, convenue entre plusieurs personnes) entre un groupe d’employés et leur contremaître.
En mettant l’accent sur l’échange au niveau du groupe, en considérant l’échange comme intégrant des aspects tangibles et en avançant l’existence d’un accord entre les parties concernant la nature de ce qui est échangé, Argyris (1960) a posé les caractéristiques d’une première conceptualisation. Peu après, Levinson (1962, p 21) a défini le contrat psychologique comme « une série d’attentes mutuelles dont les parties présentes dans la relation peuvent n’avoir que faiblement conscience mais qui régissent néanmoins leur rapport à l’autre ». Aussi, comme le notent Coyle-Shapiro et Kessler (2000), ces définitions posent d’emblée le caractère de « mutualité » entre les deux parties de l’échange en soulignant le rôle de la « réciprocité » et de l’effet d’une satisfaction anticipée des attentes. Selon Taylor et Tekleab (2004), les principales contributions des travaux de Levinson et al (1962) tiennent au fait que :
❖ Les deux parties engagées dans le contrat sont, d’une part, l’employé en tant qu’individu et, d’autre part, l’organisation représentée par ses managers ;
❖ Le contrat psychologique recouvre des questions complexes puisque certaines attentes sont largement partagées alors que d’autres sont plus individualisées ;
❖ Le contrat psychologique est sujet au changement étant donné que les parties en présence peuvent négocier des changements dans les attentes.
Pour Schein (1965, p 11), « la notion de contrat psychologique suppose que l’individu a une série d’attentes envers l’organisation et que l’organisation a une série d’attentes envers lui. Ces attentes ne sont pas seulement relatives à la quantité de travail qui doit être fournie par rapport au salaire octroyé, mais incluent également un ensemble de droits, de privilèges et d’obligations entre le travailleur et l’organisation. De telles attentes ne sont écrites dans aucun contrat formel entre l’employé et l’organisation, mais elles agissent pourtant comme de puissants déterminants du comportement ». Schein (1965) met donc l’accent sur l’importance d’une adéquation entre les attentes et contributions de chaque partie (l’expérience d’une faible adéquation peut avoir un effet néfaste sur la satisfaction des salariés, leur implication et leur performance au travail ) ou encore sur l’interaction entre les deux parties d’où l’importance de prendre en considération la perspective de chacune des parties. Comme celui-ci le soutenait plus tard, « nous ne pouvons pas comprendre la dynamique psychologique si nous nous intéressons uniquement aux motivations de l’individu ou aux conditions et pratiques organisationnelles. Les deux interagissent de façon complexe, ce qui requiert une approche systémique capable de traiter des phénomènes interdépendants » (Schein, 1980, p 99). Dans cette même optique d’adéquation entre attentes et contributions de chaque partie, Kotter (1973) indique que le CP est un « contrat implicite entre un individu et son organisation qui spécifie ce que chacun s’attend à donner et recevoir de l’autre dans la relation » (cité par Guest, 1998, p 651).
Aussi, bien qu’ils aient en commun de se focaliser sur la relation d’échange entre les employés et l’organisation, de réelles divergences apparaissent parmi les auteurs ayant contribué aux premiers développements conceptuels du CP. Pour Argyris (1960), celui-ci est avant tout un phénomène de niveau groupal d’entente implicite c’est-à-dire d’accord sur le contenu de l’échange entre les deux parties. Pour Levinson et al (1962) et Schein (1965), la nature de l’échange du CP inclut des avantages tangibles et intangibles et repose sur des attentes respectives des deux parties impliquées dans l’échange. Par conséquent, les développements conceptuels sur le CP sont :
➤ Le passage d’une vision de l’échange prenant en considération des avantages tangibles vers une perspective plus large incluant des ressources tangibles et intangibles ;
➤ L’évolution d’une définition d’un construit de niveau groupal vers une définition se centrant sur la relation individu/organisation
➤ Un accent plus important mis sur l’interaction entre les deux parties de l’échange et le contexte dans lequel elle s’opère.
Les principes de « réciprocité » et « mutualité » du contrat psychologique
Ces conceptualisations soulignent l’inscription du contrat psychologique dans la théorie de « l’échange social » que l’on doit aux travaux de Blau (1964). Il distingue deux types de relation :
➤ L’échange économique qui est défini comme un échange dont la nature est spécifiée et dans lequel c’est le contrat formel qui est utilisé pour s’assurer que chaque partie remplit ses obligations spécifiques.
➤ L’échange social qui inclut des obligations non spécifiées que Blau (1964, p 93) définit comme « des faveurs qui créent des obligations futures diffuses, non précisément spécifiées, et dont la nature de la contrepartie ne peut être négociée mais laissée à la discrétion de son auteur ».
La confiance joue donc un rôle important car, dès les étapes initiales de l’échange, chacune des parties a besoin d’avoir confiance en la réalisation des futures obligations de l’autre partie et que celle-ci fera preuve de « réciprocité ». Gouldner (1960) en distinguait deux types. La première, la réciprocité hétéromorphique, survient lorsque le contenu de l’échange entre les deux parties est différent mais perçu comme étant de valeur équivalente. La seconde, la réciprocité homéomorphique, survient, quant à elle, lorsque le contenu de l’échange ou les circonstances dans lesquelles des choses sont échangées sont identiques. Par la suite, Sahlins (1965, 1972) a étendu cette conception en fondant la réciprocité sur trois dimensions : l’immédiateté des retours d’investissement, l’équivalence des retours, l’intérêt personnel dans le processus d’échange.
A partir de ces trois dimensions, Sahlins (1972) met en évidence trois formes de réciprocité. La première, la réciprocité généralisée est envisagée comme un « courant unidirectionnel prolongé » c’est-à-dire dans un sens. La seconde, la réciprocité équilibrée, se caractérise par un échange donnant-donnant qualifié de parfait lorsque celui-ci s’effectue simultanément. Enfin, la troisième forme de réciprocité est dite négative et se caractérise par une orientation plus égoïste c’est-à-dire où chacune des parties défend ses intérêts propres. La norme de réciprocité joue donc un rôle important dans le développement de la relation d’échange en perpétuant le respect des obligations en cours et en renforçant le sentiment de « redevabilité ». C’est la dette créée par le fait d’avoir reçu des avantages qui maintient la relation d’échange social. Selon Greenberg (1980), cette intensité du devoir de réciprocité, ou dit autrement de « dette », est susceptible d’être influencée à la fois par les motivations du donneur, par l’ampleur des récompenses perçues par le bénéficiaire et les coûts encourus par le donneur suite à l’échange, par la nature de ce qui a causé l’action du donneur, et enfin, par les signaux émis à travers la comparaison à autrui. Les chercheurs ont ainsi généralement fait l’hypothèse que la réciprocité est un mécanisme sous-jacent permettant d’expliquer les conséquences de la manière dont un individu évalue son CP, sans toutefois tester empiriquement la valeur de cette explication.
Pourtant, les rares données empiriques suggèrent que l’acceptation de la norme de réciprocité et les dispositions personnelles de l’employé relatives à l’échange constituent des facteurs importants pour expliquer les réponses apportées par l’employé à son partenaire (c’est-à-dire l’employeur). Parzefall (2005), dans une étude tentant d’intégrer les formes de réciprocité, a souligné que la perception qu’un employeur remplit ses obligations peut être vue comme la confirmation de son inclinaison à respecter la norme et les standards de réciprocité. Elle serait un signe d’engagement et de confiance vis-à-vis du partenaire de l’échange, réduisant pour l’employé la nécessité de surveiller le degré d’équilibre de la relation, et aurait un effet majeur sur les attitudes et comportements. De plus, au cours de l’échange, c’est la satisfaction régulière de ces obligations qui entretiendra la confiance dans la relation. Par conséquent si le processus d’échange social débute par des investissements mineurs (des mises en jeu) pour lesquelles peu de confiance est requise, la réalisation de celles-ci démontrera de la part du destinataire son caractère « digne de confiance » et facilitera l’accroissement des avantages et acquittement d’obligations du processus. L’échange social se distingue donc de l’échange économique à la fois par l’orientation temporelle qui le caractérise (si l’échange économique se fonde sur une orientation limitée dans le temps, le caractère à long terme de l’échange social est indispensable au renforcement de la confiance) et à l’importance accordée à la confiance dans le fait que le partenaire fera preuve de réciprocité (sachant que l’investissement dans la relation comporte un risque d’absence de retour sur investissement consenti).
De manière complémentaire, la « mutualité » dans les échanges entre l’employé et l’employeur facilitera le maintien de la relation. Cependant, « mutualité » ne signifie pas nécessairement mutualité objective dans l’échange mais plutôt perception individuelle (par définition subjective) de mutualité dans l’échange : « la mutualité ne peut être présumée (ou décrétée), et l’accomplissement des deux faces du CP est un travail de progression dans la relation d’emploi au cours du temps » (Rousseau, 2004, p 60). Une caractéristique majeure du CP est qu’il est une croyance individuelle sur un accord mutuel, sur une compréhension commune qui lie les parties impliquées pour une ligne de conduite particulière. Le CP est donc avant tout un choix individuel d’engagement volontaire qui, comme le souligne Rousseau (2004), a des effets plus puissants sur le comportement si les engagements sont explicites (ex : « je suis d’accord pour rester un minimum d’une année ») plutôt qu’implicites (ex : « rester un temps »). Il reflète ainsi la compréhension subjective des engagements que l’individu a réalisés avec l’autre partie comme si celle-ci était mutuelle. Aussi, la création d’une mutualité, comme le souligne Rousseau (2004), est le « standard d’or » dans les relations d’emploi, c’est-à-dire le liant entre individu et organisation. Les attitudes des employés devraient ainsi être plus positives et leur performance meilleure quand les deux parties sont en accord (mutuel) sur ce que l’employeur a promis à l’employé.
La double face du contrat psychologique : employé vs employeur
Dès lors, quelle définition retenir ? Pour Rousseau (1989), dont les travaux vont marquer une véritable rupture avec les conceptualisations antérieures, le CP repose sur « la croyance d’un individu relative aux termes et aux conditions d’un accord d’échange réciproque entre cette personne cible et une autre partie. Les questions clés ont trait ici à la croyance qu’une promesse a été faite et une compensation offerte en échange, liant les parties à un ensemble d’obligations réciproques (…) Un contrat psychologique émerge quand une partie croit qu’une promesse de retours futurs a été faite, une contribution a été donnée et ainsi, une obligation a été créée pour fournir de futurs bénéfices » (Rousseau, 1989, p 123). Le CP est ainsi défini comme « un ensemble de croyances individuelles concernant des obligations réciproques entre l’employé et son organisation » (Rousseau, 1990, p 390). Par la suite l’auteur précisera que la réciprocité se fait entre l’individu et une autre partie, qu’il s’agisse d’un autre individu ou d’une entité telle que l’entreprise (Rousseau, 1989 ; Rousseau et McLean Parks, 1993 ; Rousseau et Tijoriwala, 1998). Le CP exprime donc l’équilibre entre les termes d’échange entre l’employé et l’organisation, aussi bien au niveau économique que social (Shore et Barksdale, 1998). L’accent presque exclusif mis sur la perspective de l’employé a détourné l’attention de la perspective de l’employeur et de l’intégration des deux parties impliquées dans l’échange (Taylor et Tekleab, 2004). De plus, elle réduit l’accent mis sur la notion d’accord et de reconnaissance de la perspective de l’organisation de Schein (1965) et Levinson et al. (1962) qui insistaient, quant à eux, sur le processus de contractualisation c’est-à-dire à un niveau relationnel.
Guest (1998), en rappelant que le CP se situe avant tout dans l’interaction plutôt que dans l’individu ou l’organisation, aura été l’un des premiers artisans de cette réconciliation des deux perspectives. L’existence du CP pour l’individu tient en sa perception de promesses explicites ou implicites faites par l’organisation et qu’il fait à l’organisation. De même, Tsui (1997, p 1091), en explorant ce qu’il a nommé la « stratégie de relation organisation/employé », a soutenu que ce qui est différent du CP est que celui-ci inclut « les attentes concernant la nature de l’échange tenu par l’employé et l’employeur » c’est-à-dire, comme le souligne Guest (1998), que le CP inclut deux parties. Herriot et Pemberton (1997, p 45) rappellent aussi que depuis les premiers développements du CP, c’est-à-dire « depuis Argyris (1960), le CP peut être défini comme ‘la perception des deux parties de la relation d’emploi, l’organisation et l’individu, des obligations sous entendues dans la relation’ (…). Cette définition est la définition classique de Argyris (1960) et Schein (1978) et diffère de celle épousée par Rousseau et Parks (1993) (pour qui) le contrat est seulement dans l’esprit de l’employé (…) (ces auteurs) ont ainsi peu dit sur le processus contractuel ».
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Table des matières
Introduction
Chapitre 1. Les perceptions de brèche et/ou de violation du contrat psychologique
1.1. L’évaluation d’accomplissement du contrat psychologique
1.1.1. La définition du contrat psychologique
1.1.2. Le contenu du contrat psychologique : termes et dimensions
1.1.3. Un « schéma mental » de la relation d’emploi
1.1.4. L’évolution du contrat psychologique : perception de brèche et/ou violation
1.2. Les facteurs de modération ou d’amplification des perceptions de brèche et/ou de violation
1.2.1. Le Support Organisationnel Perçu (SOP)
1.2.2. L’Echange Leader-Membre (ELM ou LMX)
1.2.3. La Justice Organisationnelle
1.3. Les conséquences attitudinales et comportementales des perceptions de brèche et/ou de violation
1.3.1. La confiance
1.3.2. La Satisfaction au travail
1.3.3. L’implication ou l’engagement au travail
1.3.4. Le Comportement de Citoyenneté Organisationnelle (OCB)
Conclusion
Chapitre 2. L’extension des processus de brèche et de violation par la théorie du deuil
2.1. La métapsychologie freudienne
2.1.1. La découverte freudienne
2.1.2. L’ambition scientifique de la psychanalyse
2.1.3. La « métapsychologie » comme noyau théorique
2.1.4. Quelques concepts fondamentaux
2.2. Légitimité de la psychanalyse dans les sciences de gestion ?
2.2.1. Une désirabilité d’intégration
2.2.2. Scientificité ou a-scientificité?
2.2.3. Des difficultés « d’assimilation »
2.2.4. Une combinaison des perspectives analytique et managériale
2.3. Une lecture analytique du modèle théorique
2.3.1. L’individu comme « sujet-salarié »
2.3.2. L’organisation comme « Autre organisationnel »
2.3.3. Le contrat psychologique comme « avant-scène » du désir
2.3.4. Les phénomènes de brèche et violation comme constituants du « travail de deuil »
Conclusion
Chapitre 3. Une méthodologie de recherche mixte et longitudinale
3.1. Le design de la recherche
3.1.1. Les stratégies d’accès au terrain de recherche
3.1.2. L’architecture et le protocole de recherche
3.1.3. La présentation du terrain de recherche
3.2. L’approche quantitative transversale
3.2.1. L’élaboration des « items » du questionnaire
3.2.2. Le recueil des données : modalités d’administration du questionnaire et échantillon
3.2.3. L’analyse des données : les méthodes et outils employés
3.3. L’approche qualitative longitudinale
3.3.1. L’intérêt d’une approche mixte
3.3.2. Les instruments qualitatifs de la recherche
3.3.3. Les positions occupées par le chercheur
Conclusion
Chapitre 4. Les résultats de la recherche
4.1. L’état des lieux des perceptions de brèche et de violation
4.1.1. Les termes et dimensions du contrat psychologique
4.1.2. Les perceptions de brèche et de violation
4.1.3. Les pratiques organisationnelles
4.1.4. Les attitudes et comportements
4.2. La typologie des perceptions de brèche et de violation
4.2.1. La description du plan factoriel (ACM)
4.2.2. La typologie des répondants
4.2.2. La typologie des répondants
4.2.3. La description des 4 classes de répondants
4.3. L’évolution des perceptions de brèche et de violation
4.3.1. L’affaiblissement de la brèche et/ou violation
4.3.1.1. Géraldine : le retour de l’ELM et du SOP
4.3.1.2. Magalie : la renégociation des termes du contrat psychologique
4.3.1.3. Pascal : l’accomplissement de son propre désir
4.3.2. La stabilisation de la brèche et/ou violation
4.3.2.1. Louise : la définition d’un nouveau contrat moral
4.3.2.2. Corine : une extension de mécanismes psychologiques plus profonds
4.3.2.3. Lionel : la conclusion d’un départ de l’entreprise
4.3.2.4. Mathilde : un « sur-accomplissement » du contrat psychologique
4.3.3. L’accroissement de la brèche et/ou violation
4.3.3.1. Delphine : une renégociation unilatérale du CP
4.3.3.2. Rébecca : la confirmation d’un projet personnel
4.3.3.3. Mathieu : la construction d’une « autre scène »
4.3.4. La détérioration de la brèche et/ou violation
4.3.4.1. Guillaume : un cas de résistance profonde à la très forte brèche et violation
4.3.4.2. Aurélie : une dégradation profonde et brutale du contrat psychologique
4.3.4.3. Béatrice : une redéfinition du périmètre d’investissements
Conclusion