LEUCEMIES AIGUES LYMPHOBLASTIQUES B
Définition
Les leucémies aiguës (LA) de l’enfant représentent un groupe très hétérogène d’hémopathies malignes aiguës dues à la transformation oncogénique de cellules souches hématopoïétiques (CSH). Elle est caractérisée par une expansion clonale de précurseurs hématopoïétiques immatures. Selon l’origine du précurseur impliqué, précurseur de la lignée myéloïde ou lymphoïde (lignée B ou T), on distingue les leucémies aiguës myéloblastiques (LAM) et les leucémies aiguës lymphoblastiques (LAL) .
Dans les LAL, le précurseur hématopoïétique lymphoïde appelé lymphoblaste perd sa capacité de maturation et de différenciation et reste bloqué à un stade immature. D’autre part la cellule acquiert une capacité de prolifération exacerbée ce qui va inhiber l’hématopoïèse normale et aboutir à une insuffisance médullaire. Cette expansion clonale est secondaire à l’accumulation de diverses mutations somatiques pouvant survenir sur plusieurs gènes impliqués notamment dans la prolifération, la différenciation et la survie cellulaire. Cette prolifération de lymphoblastes peut se poursuivre dans les organes lymphoïdes secondaires (rate, ganglions) et infiltrer des organes extra-hématopoïétique (foie, testicules, système nerveux central…).
Epidémiologie
Les leucémies aiguës sont la première cause de cancer pédiatrique, elles représentent environ 31 % des cancers diagnostiqués avant l’âge de 15 ans . La LAL représente 80 % des leucémies chez l’enfant (9) et parmi ces dernières, 80% sont des LAL B dites communes. L’incidence standardisée sur la population mondiale est de 1,9 pour 100 000 personnesannées chez l’homme et de 1,2 chez la femme, soit un sexe ratio à 1,6. Le taux d’incidence spécifique par âge est de 3,8 pour 100 000 personnes-années chez le garçon de moins de 15 ans et 2,5 chez la fille de même âge .
La distribution des LAL B décrit un pic maximum vers l’âge de 2-3 ans, plus marqué chez les garçons que chez les filles, et encore nettement visible un peu après 6 ans.
Le pronostic est meilleur chez l’enfant avec une survie à 5 ans de 90 % chez l’enfant alors qu’elle n’est que de 35 à 40 % chez l’adulte. On note une amélioration régulière de cette survie partout dans les pays occidentaux où les LAL B sont plus fréquentes et de meilleur pronostic que les LAL T(12). Dans les LAL on observe une rémission complète dans plus de 95% des cas chez l’enfant, et entre 70 et 80% des cas chez l’adulte. Cependant, seuls 30 à 40 % des adultes et 80% des enfants présentent une survie à 5 ans sans rechute et sont considérés comme guéris(12). En dépit de nombreuses améliorations en termes de prise en charge thérapeutique, la LAL reste une cause majeure de mortalité due aux cancers chez l’enfant. Elle représente en effet la deuxième cause de décès par maladie chez les enfants de 1 à 15 ans.
Facteurs de risques
Facteurs de risques établis
Facteurs de risques génétiques
Certaines anomalies chromosomiques constitutionnelles sont clairement associées à un risque accru de leucémie. Ainsi, avant l’âge de 5 ans, les enfants porteurs d’une trisomie 21 ont un risque environ 50 fois supérieur de développer une leucémie par rapport aux enfants de la population générale. Entre 2 et 3% des enfants atteints de leucémie sont porteurs d’une trisomie 21. De plus, certaines maladies génétiques rares sont associées à un risque élevé de LA telle que: l’ataxie-télangiectasie, la maladie de Fanconi (LAM), l’anémie de Diamond-Blackfan (LAM) .
Facteurs de risque iatrogènes
Le rôle des radiations ionisantes à forte dose est établi pour la plupart des cancers de l’enfant. L’exposition aux rayonnements ionisants est classée « cancérigène certain » par le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC).
Facteurs de risques suspectés
Facteurs de risque infectieux
L’hypothèse d’une infection pouvant être associée à ce processus oncogène chez l’homme a été avancée compte tenu de l’origine virale des leucémies chez certaines espèces animales, de l’implication du virus d’Epstein-Barr dans la genèse du lymphome de Burkitt mais également le rôle de l’HTLV1 dans une forme rare de LAL-T (Japon et Caraïbes principalement). Cependant, aucun virus spécifique n’a jamais été mis en cause dans les leucémies de l’enfant .
Expositions à des toxiques
De nombreux autres facteurs de risques sont également suspectés dans la genèse des leucémies aiguës mais sans être pour autant établis formellement, c’est le cas des expositions au benzène, aux pesticides, au tabac.
Diagnostic clinique
La symptomatologie peut apparaître de manière insidieuse ou brutale et résulte de l’envahissement blastique. Au moment du diagnostic, la moelle est généralement envahie par plus de 90 % de blastes. Cet envahissement peut être à l’origine d’une insuffisance médullaire se traduisant par l’atteinte d’une ou plusieurs lignées hématopoïétique (hématies, leucocytes et plaquettes). Différents syndromes cliniques seront associés aux cytopénies :
♦ Syndrome anémique : pâleur cutanéo-muqueuse, asthénie, dyspnée à l’effort
♦ Syndrome infectieux surtout si la neutropénie est profonde (<0.5G/L) : état fébrile avec classiquement des foyers pulmonaires ou des angines ulcéro-nécrotiques
♦ Syndrome hémorragique : purpura pétéchial et ecchymotique, hémorragies .
Dans la majorité des cas, un syndrome tumoral lié à l’envahissement blastique extramédullaire sera mis en évidence. On peut retrouver des adénopathies superficielles ou profondes, une splénomégalie, une hépatomégalie, une atteinte méningée. Cette atteinte neuro-méningée est retrouvé dans 5 à 10% des LAL et constitue un facteur de mauvais pronostic. On peut également observer une infiltration testiculaire.
L’infiltration du système nerveux central bien que relativement rare, peut être à l’origine de signes neurologiques diffus ou focaux ; augmentation de la pression intracranienne (léthargie, vomissements, maux de tête), rigidité de la nuque .
Le syndrome tumoral peut se manifester par une masse médiastinale antérieur pouvant être à l’origine d’une détresse respiratoire sévère (concernant le plus souvent les LAL T) (14). Enfin on observe plus fréquemment chez les enfants des douleurs osseuses et articulaires.
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Table des matières
I. INTRODUCTION
II. ONTOGENESE
1. Hématopoïèse
2. Lymphopoïèse B
2.1. Structure générale du BCR
2.2. Différenciation lymphocytaire B indépendante de l’antigène
2.3. Différenciation lymphocytaire B dépendante de l’antigène
III. LEUCEMIES AIGUES LYMPHOBLASTIQUES B
1. Définition
2. Epidémiologie
3. Facteurs de risques
3.1. Facteurs de risques établis
3.2. Facteurs de risques suspectés
4. Diagnostic clinique
5. Diagnostic biologique
6. Classification
6.1. Cytologique
6.2. Immunologique
6.3. Classification OMS
7. Pronostic
7.1. Facteurs liés à la maladie
7.2. Facteurs liés au traitement
IV. La maladie résiduelle
1. Définition et concept
2. Intérêt clinique
3. Méthode de détection de la MRD
3.1. La cytométrie en flux
3.2. La biologie moléculaire
4. Points de suivi de la MRD
4.1. Protocole FRALLE
4.2. Protocole CAALL
V. OBJECTIFS DE L’ETUDE
VI. MATERIEL ET METHODES
1. Population étudiée
2. Prélèvements
3. Méthode en cytométrie en Flux
3.1. Cytométre
3.2. Panels d’anticorps
3.3. Préparation des échantillons
3.4. Stratégie d’analyse
4. Analyses statistiques
VII. RESULTATS
1. Caractéristiques de la population
1.1. Données démographiques
1.2. Données biologiques
1.3. Classification immunophénotypique
1.4. Anomalies cytogénétiques et moléculaires
1.5. Protocoles thérapeutiques
2. Comparaison des résultats de MRD
2.1. Echantillons analysés
2.2. Performance de la méthode CMF
2.3. Concordance et corrélation entre les 2 méthodes
2.4. Analyses des discordances
VIII. DISCUSSION
1. Corrélation des résultats
1.1. Discordance CMF négative/ BM positive
1.2. Discordance CMF positive / BM négative
2. Avantages et inconvénients des deux techniques
2.1. Rapidité d’analyse
2.2. Faisabilité de la technique
2.3. Sensibilité
2.4. Spécificité
IX. PERSPECTIVES
1. Axes d’amélioration de la technique
1.1. Standardisation
1.2. Apport de nouveaux marqueurs
1.3. Fonctionnalités des logiciels de traitement de données
2. Apport du Next generation sequencing (NGS)
X. CONCLUSION
Annexe 1 Recueil des données clinico-biologiques de l’étude (simplifié)
BIBLIOGRAPHIE