LEUCEMIES AIGUËS DE L’ADULTE

HISTORIQUES

       La leucémie a été décrite pour la première fois par Craigie, Donné, Virchow et Bennet. Ce dernier dans une publication de 1845 rapporte un compte rendu d’autopsie, il suppose le terme de « leucytémie » à la différence de Virchow qui propose leucémie pour désigner une affection caractérisé par un rapport inversé des corpuscules non coloré et des cellules contenant des pigments de sang, mais distincte du pus. En 1869, Neumann fournit une description de la fonction hématopoïétique de la moelle osseuse permettant ainsi d’établir le concept de leucémie myélogène. La mise au point des colorations histologiques en 1880 par Paul Ehlrich a permis de faire la distinction des leucémies myéloïdes et lymphoïdes [18]. En 1889 Ebstein définit le cadre des leucémies aiguë, à distinguer des transformations des leucémies chroniques pouvant répondre à des étiologies différentes. Quelques années plus tard Naegli identifie les myéloblastes, précurseurs des myélocytes et décrit la leucémie myéloblastique. Les années qui précèdent la seconde guerre mondiales sont marquées par les progrès des techniques histologiques et de coloration permettant ainsi une meilleure compréhension de l’hématopoïèse et un affinement de la classification des leucémies. La première anomalie chromosomique au cours des leucémies, correspondant au chromosome de Philadelphie, fut découverte en 1960, fondant ainsi la conception clonale de l’origine des cancers. En 1975 Köhler et Milstein furent les premiers à décrire les anticorps monoclonaux, ce qui leur avait valu le prix Nobel de médecine en 1984. La généralisation de l’emploi de ces anticorps avait permis le rapprochement des concepts de l’hématopoïèse et de la leucémogenèse, ainsi que l’identification des différents sous-groupes de leucémies lymphoblastiques [83]. L’amélioration progressive des techniques de laboratoire et la description clinique de plus en plus précise et détaillée des leucémies, ont rendu nécessaire la mise en place d’un système de classification uniforme. Ce qui a amené un groupe de sept hématologistes français, américain et britannique à proposer en 1976 la classification FAB permettant un meilleur recueil des données et une meilleure définition des inclusions des protocoles thérapeutiques. Le récent développement des méthodes de cytogénétiques, d’immunophénotypage et de biologie moléculaire ont progressivement souligné le besoin d’une nouvelle approche nosologique, plus globale, prenant en compte l’ensemble des critères cliniques et biologiques maintenant disponibles, aboutissant ainsi en 2001 à une nouvelle classification de l’OMS. Cette classification de l’OMS a connu une révision en 2008 [79].

Les progéniteurs

       Le compartiment des progéniteurs regroupe une population hétérogène de cellules plus ou moins matures, présentant un pouvoir d’auto-renouvèlement diminué, des propriétés de différenciation variables et une prolifération importante. Parmi eux, les progéniteurs immatures possèdent une grande capacité de prolifération et sont multipotents, c’est-à-dire capables de générer plusieurs lignages. Les progéniteurs matures ont, quant à eux, un potentiel de prolifération plus réduit et une différenciation restreinte à un lignage. Ils ne sont pas identifiables morphologiquement et leur profil phénotypique porte à la fois des marqueurs de maturité (CD38, HLA-DR, CD71) et des marqueurs propres à chaque lignée (comme CD33, CD13 ou CD15 pour les lignées myéloïdes). Les cultures clonogéniques en milieu semi-solide consistent à cultiver des progéniteurs dans un milieu limitant la mobilité cellulaire (méthylcellulose). Chaque cellule progénitrice va donner naissance à une colonie morphologiquement reconnaissable (ColonyForming Unit : CFU) [14]. On distingue ainsi les progéniteurs des différents lignages myéloïdes :
− Les CFU-GM, progéniteurs granulo-monocytaires bipotents qui donnent naissance aux CFUG (CFU-Granulocyte) granulocytaires et CFU-M (CFU-Monocyte) monocytaires.
− Les CFU-Meg (CFU-Mégacaryocyte), progéniteurs de la lignée mégacaryocytaire
Les BFU-E (Burst Forming Unit-Erythroid) qui sont les progéniteurs érythroïdes immatures se différenciant en CFU-E (CFU-Erythrocyte). Et les progéniteurs mixtes (CFU-Mix) donnant naissance à des colonies de plusieurs lignées. Ces cellules se rapprochent des HPP-CFU (High Proliferation Potential-CFU) qui sont des progéniteurs plus primitifs et pluripotents. Les cellules souches totipotentes, sous l’influence d’un signal adapté, va entrer en division puis subir une première différenciation donnant ainsi deux types de progéniteurs Progéniteurs commun myéloïde : CFU-GEMM (Colony Forming UnitGranulocytaire, Erythrocytaire, mégacaryocytaire, monocytaire) ; Progéniteurs communs lymphoïdes : CFU-L (Colony Forming Unit-Lymphocytaire). Les CFU-GEMM vont donner les CFU-E (futurs érythroblastes), CFU-MK (futur mégacaryocytes), CFU-G (futurs cellules myéloïdes neutrophiles), CFU-M (futurs promyélocytes), CFU-Eo (futurs cellules myéloïdes éosinophiles), CFU-B (futurs cellules myéloïdes basophiles). Les CFU-L vont donner des progéniteurs T et des progéniteurs B. Les monocytes et polynucléaires neutrophiles ont le même progéniteur CFU-GM. Les progéniteurs perdent, au fur et à mesure qu’ils avancent dans leur différenciation, leur capacité d’autorenouvellement. Il existe également des progéniteurs plus immatures les LTC-IC (Long Term Culture-Initiating Cell), les ELTC-IC (Extended-LTC-IC) et les CAFC (Cobblestone Area Forming Cell). Les LTC-IC, CAFC et pré-CFU (des progéniteurs plus immatures que les CFU) sont trois types cellulaires que l’on peut situer au plan du degré de différenciation entre CSH proprement dites et progéniteurs.

LEUCEMOGENESE

        La leucémie est un ensemble de processus hématopoïétiques aberrants prenant origine dans des cellules souches leucémiques (CSL) rares ayant accumulé des mutations et/ou des changements épigénétiques. Ces altérations permettent à la cellule de maintenir ou de réacquérir la capacité d’autorenouvellement et de prolifération clonale indéfinie [64]. L’existence de CSLs a été mise en évidence dans les années 90, quand des études de transfection de cellules primaires de LMA dans des souris SCID ont montré que seule une sous-population rare de cellules, marquées CD34+CD38-, était capable d’initier et maintenir la prolifération du clone leucémique [49]. Des expériences de transfection en série de ces cellules rares ont montré qu’elles avaient un haut potentiel d’autorenouvellement [12]. Ainsi, comme les CSHPs normales, les CSLs sont capables d’initier la leucémie et de conduire à la différentiation d’une panoplie de cellules à fonction différentes. L’origine de la CSL est discutée dans la littérature. Une première hypothèse propose que la CSL soit une CSHP ayant accumulé des mutations lui conférant un caractère leucémique. En effet, les CSHPs possèdent déjà le caractère d’autorenouvellement, et ont une durée de vie qui permet l’accumulation de mutations. Dans ce sens, il a été démontré que dans tous les types de LAM hormis la leucémie promyélocytaire aiguë (LAP ou LAM), seules les cellules CD34+CD38- ont la capacité d’initier la leucémie dans les souris NOD/SCID. Des blastes plus différenciés n’ont pas cette capacité [49, 12]. Une deuxième hypothèse postule que la CSL dériverait de progéniteurs engagés ou même différenciés : elle accumulerait des mutations suite à la réacquisition de la capacité d’autorenouvellement. (Figure 2) Des évidences en faveur de cette hypothèse proviennent d’expériences de transfection dans lesquelles des gènes de fusion leucémiques, tels la fusion MLL-ENL de la translocation t (11;19) (q23;p13.3), provoqueraient la leucémie dans les CSHPs comme dans les PCMs [16]. Certains oncogènes auraient donc la capacité de conférer à la cellule mature un potentiel d’autorenouvellement. Comme pour la majorité des cancers, la leucémogénèse impliquerait une interaction entre les gènes et l’environnement. Les expositions à des substances toxiques ou carcinogènes durant la grossesse (exposition directe à des radiations ionisantes ou indirectes par le biais de l’ingestion maternelle) chez la femelle pourraient causer des dommages à l’ADN. Même si plusieurs facteurs, tels que certaines infections, la consommation de drogues et la déficience en folates, sont proposés comme carcinogènes in utero, il n’existe pas d’évidences concluantes au lien entre l’exposition pré-gestationnelle et le cancer [54]. Seules les expositions fœtales aux radiations ionisantes [78] et au diethylstilbestrol [34] ont été prouvées carcinogènes. Par ailleurs, suite à l’exposition à des inhibiteurs de topoisomérase II dans un cadre thérapeutique, les réarrangements de MLL sont les réarrangements les plus fréquents des leucémies secondaires [34].

Leucémie lymphoblastique aiguë de type T

      Selon la classification de l’OMS de 2008, les LAL T ne sont pas divisées selon les facteurs génétiques car ceux-ci ne sont pas clairement associés à des caractéristiques biologiques uniques des LAL T. L’immunophénotypage identifie et classe alors les blastes dans la lignée lymphocytaire T. Les anomalies les plus récurrentes dans ce groupe sont les translocations impliquant les locus α et δ des récepteurs des cellules T (TCR) en 14q11.2, le locus β en 7q35 et le locus γ en 7p14-15 avec une liste étendue de partenaires. Ces translocations entraînent la surexpression des gènes partenaires, majoritairement des facteurs de transcription. Cependant, dans les dernières années, la survie à 5 ans des patients atteints de LLA-T s’est considérablement améliorée grâce, en partie, à la mise en évidence d’anomalies chromosomiques impliquant des gènes de tyrosines kinases. Ces patients sont aujourd’hui traités avec des inhibiteurs de tyrosine kinases [17].

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
CHAPITRE II: GENERALITES SUR LES LEUCEMIES AIGUËS
I. HISTORIQUES
II. HEMATOPOEISE
II.1. Les compartiments de l’hématopoïèse
II.2. Le compartiment des cellules souches
II.3. Les progéniteurs
II.4. Les précurseurs et cellules matures
III. LEUCEMOGENESE
IV. EPIDEMIOLOGIE
V. LES LEUCEMIES AIGUË S MYELOÏDES
V.1. Définition
V.2. Etiologie
V.3. Clinique et circonstance de découverte
V.3.1. Syndrome d’insuffisance médullaire
V.3.2. Syndrome tumoral
V.3.3. Syndrome d’infiltration médullaire
V.4. Diagnostic biologique
V.4.1. L’hémogramme
V.4.2. Le myélogramme
V.5. Classification
V.5.1. Classification French American British
V.5.2. Classification de l’EGIL
V.5.3. Classification OMS
V.6. Pronostics et traitements
VI. LEUCEMIES AIGUË S LYMPHOBLASTIQUES
VI.1. Définition
VI.2. Physiopathologie
VI.3. Facteurs étiologiques
VI.4. Signes cliniques
VI.4.1. Syndrome d’insuffisance médullaire non spécifique
VI.4.2. Le syndrome tumoral
VI.4.3. Le syndrome de lyse cellulaire
VI.5. Classification
VI.5.1. Classification FAB
VI.5.2. Classification OMS
VI.5.2.1. Leucémie lymphoblastique aiguë de type B
VI.5.2.2. Leucémie lymphoblastique aiguë de type T
VI.6. Diagnostic biologique
VI.6.1. Arguments cytologiques
VI.6.2. Cytochimie
VI.6.3. Immunologie
VI.6.4. Cytogénétique
VI.6.5. Biologie moléculaire
VI.7. Pronostic
VI.7.1. Leucocytose
VI.7.2. Age
VI.7.3. Anomalies chromosomiques
VI.7.4. Phénotype immunologique
VI.7.5. Réponse initial au traitement
VI.8. Evolution et principe du traitement
CHAPITRE III : IMMUNOPHENOTYPAGE PAR LA CYTOMETRIE DE FLUX
I. Aspects technique de la cytométrie de flux
I.1. Principe de la cytométrie
I.2. Le cytomètre de flux
I.3. Les échantillons à analyser
I.4. La conservation des échantillons
I.5. Les fluorochromes
I.6. Les anticorps monoclonaux et marquage des antigènes
II. Application de la cytométrie de flux
DEUXIEME PARTIE : TRAVAIL PERSONNEL
I. OBJECTIFS
I.1. Objectif général
I.2. Objectifs spécifiques
II. METHODOLOGIE
II.1. Type d’étude
II.2. Cadres d’étude
II.3. Critères d’inclusion
II.4. Critères de non inclusion
II.5. Echantillonnage
II.6. Paramètres étudiés
II.7. Matériels et réactifs
II.7.1. Matériels
II.7.2. Réactifs
II.8. Recueil des données
II.9. Prélèvements
II.10. Méthodes d’analyse
II.10.1. Hémogramme
II.10.2. Médullogramme
II.10.3. Coloration à la myélopéroxydase
II.11. Immunophénotypage par cytométrie de flux
II.11.1. Principe
II.11.2. Choix des panels
II.11.3. Prélèvements et délai d’analyse
II.11.4. Marquage aux anticorps monoclonaux
II.11.5. Lecture au cytomètre
II.12. Saisie et analyse des donnés
III. RESULTATS
III.1. Caractéristiques de la population d’étude
III.1.1. Epidémiologie
III.1.2. Clinique
III.1.3. Facteurs étiologiques
III.1.4. Biologie : Profils cytologique et immunophénotypique des leucémies aiguë de l’adulte
III.1.4.1. Numération formule sanguine (NFS)
III.1.4.2. Médullogramme
IV. DISCUSSION
CONCLUSION
REFERENCES
ANNEXES

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