Des formes et structures sédimentaires sont observables dans le lit des systèmes fluviatiles. Ces formes se créent par le transit des grains qui constituent la charge de fond. On distingue trois types de corps sédimentaires : les microformes de petite taille qui regroupent principalement les rides et méga-rides ; les méso-formes dont la longueur d’onde est du même ordre de grandeur que la profondeur d’eau, qui regroupent les dunes ; et les macro-formes dont les longueurs d’ondes sont du même ordre que la largeur du chenal, regroupant les barres sédimentaires (Jackson, 1975). Une ambiguïté de grandeur peut apparaître entre des grandes dunes et des barres. Les dunes ont une taille qui est fonction de la couche limite turbulente, approximé par la hauteur du cours d’eau, les barres sont quant à elles proportionnelles à la largeur du cours d’eau (Jackson, 1975). En effet les critères de classification selon Jackson (1975) s’appuient principalement sur le régime hydrologique et les conditions au niveau de la couche limite turbulente. A la différence, les critères de classification de Ashley (1990) s’appuientsur la structure des formes et leurs tailles, sur la présence ou non de superposition (si les formes sont simples ou composées), sur la taille des sédiments et enfin sur le comportement de la structure et des caractéristiques d’écoulements.
Ces structures sédimentaires sont des corps dynamiques qui s’adaptent continuellement, de façon plus ou moins rapide, aux variations des conditions hydro sédimentaires (Reesink et al., 2018) Généralement les barres sédimentaires servent de substrat pour la migration des formes superposées (Ashley, 1990). De nombreuses études ont montré que les superpositions des formes du lit sont présentes dans la grande majorité des rivières et fleuves indépendamment des variables hydrauliques (Roden, 1998 ; Harbor,1998 ; Parsons et al., 2005). D’autre part il apparaît que les dunes sont des formes de lit omniprésentes dans les chenaux fluviaux (Best, 2005). Leur présence influence considérablement la nature et l’activité de l’écoulement ainsi que la turbulence et exerce en conséquence un fort contrôle sur l’entrainement, le transport et le dépôt des sédiments (Parson, et al., 2005). Les formes du lit et les superpositions sont une source de rugosité et entraînent une résistance à l’écoulement (Van Rijn, 1994). Par conséquent ces différentes formes interagissent entre elles, et l’évolution des formes et structures sédimentaires sont influencées par celles présentes en amont. Il y a une controverse concernant les raisons de l’apparition des superpositions des dunes sédimentaires. Il se pourrait que ce soit le résultat d’un retard dans la migration de certaines dunes ou encore un état d’équilibre des dunes (Gabel, 1993).
L’ETUDE DES INTERACTIONS EN FONCTION DU DOMAINE D’ETUDE
En domaine fluvial
Sédimentologie
Le domaine de la sédimentologie fluviale regroupe l’étude de l’ensemble des processus d’érosion, de transport, et de dépôt qui interviennent sur les formations sédimentaires (récentes ou passées) au sein des cours d’eau. C’est un domaine qui est de manière homogène à la fois étudié en modélisation physique mais aussi en études sur le terrain. Les auteurs étudient la formation des formes en fonction des apports sédimentaires, ou de la granulométrie ainsi que la structure des formes. Plusieurs techniques sont mises en place comme par exemple le GPR (Ground Penetreting Radar) utilisé par Reesink & Bridge (2011) notamment. Ces écrits étudient la nature et l’influence des sédiments sur la formation des structures sédimentaires. Par exemple Reesink & Bridge (2007) ont montré que les formes de lit superposées les plus hautes présentent des inclusions de graviers dans la stratification, mais les formes de lit superposées les plus petites sont composées de gravier sablonneux. Selon eux, un tri granulométrique se produit lors de la formation des structures sédimentaires (Figure 1).
Dans un autre ouvrage, Reesink & Bridge (2009), se sont aussi intéressés au grano classement des strates. Ils ont déterminé principalement que les formes de lit superposées et l’instabilité à long terme du débit liquide et du transport sédimentaires entraînaient l’apparition de sédiments prétriés au point d’affleurement. (Figure 2). Le tri vertical des sédiments a aussi été étudié par Kleinhans (2004), ce tri est la cause de l’irrégularité des dunes. En effet il entraîne l’apparition de couches grossières résistantes à l’érosion qui diminuent ou inhibent l’affouillement des dunes. Dans d’autres cas des affouillements profonds apparaissent sur les dunes et une mobilité des sédiments est observée au niveau de ces creux.
Une autre approche de l’étude des superpositions des structures sédimentaires a été réalisée par Guy et al., 1966. L’objectif de cette étude était d’obtenir des valeurs moyennes de paramètres de résistance et de transport correspondant à des conditions retrouvées dans les cours d’eau naturels et artificiels. Ils ont observé l’apparition de formes superposées, et celles-ci indépendamment de la taille des grains ou de la largeur du modèle. De plus il semblerait qu’il y ait une érosion préférentielle et un transport des gros grains sur les faces aval des dunes. Ceci entraine une ségrégation granulométrique dans les barres transversales (des barres qui sont situées au bord du chenal, qui peuvent s’assimiler à des barres de méandre) sur lesquelles des dunes et des rides se superposent (McCabe & Colin , 1977) Enfin, d’après Reesink et al. (2014) la superposition des formes de lit se produit lorsque les formes de lit de l’hôte sont longues par rapport à la vitesse au-dessus de la crête.
Hydraulique
L’étude des interactions du point de vue des contraintes du milieu, plus précisément des conditions hydrauliques regroupe les données en lien avec les débits, les hauteurs d’eau et la dynamique des formes sédimentaires en fonctions des conditions hydrologiques Les formes sédimentaires jouent un rôle dans les écoulements d’un chenal. Par exemple les dunes sont des formes de lit omniprésentes dans les chenaux fluviaux et leur présence influence considérablement la nature de la structure d’écoulement moyenne et turbulente et exerce par conséquent un fort contrôle sur l’entraînement, le transport et le dépôt des sédiments (Parson, et al., 2005).
Best (2005)s’est intéressé aux écoulements à proximité des dunes et des rides. Il a observé des modifications des vitesses d’écoulement (accélération et décélération) au niveau des dunes. Une force s’applique sur la crête de la dune entrainant une traînée de forme qui s’ajoute à la rugosité des grains et à la morphologie de la dune ce qui entraine enfin une élévation de la résistance à l’écoulement. D’autre part la contrainte de Reynolds est maximale (ce qui implique un charriage plus important et des échanges entre la lame d’eau en aval) lorsqu’il y a superposition de formes sédimentaire (expérience B figure 3). Des observations similaires ont été réalisées par Reesink & Bridge (2007). Ils ont regardé l’effet de la variation de la vitesse sur la formation de petites dunes (ou rides) en aval d’une barre. Lors que les vitesses sont élevées sur les barres sédimentaires, les grains se déplacent plus aval de la barre que lorsque les vitesses sont plus faibles. Ainsi le dépôt de sédiments se faisant plus loin en aval des barres lors de vitesses importante il apparait que plus la vitesse augmente sur les barres plus les formes sédimentaires (rides et /ou dunes) se forment loin en aval de la barre.
Fourrière et al. (2010) ont étudié la topographie du fond pour visualiser les effets sur les écoulements. Ils ont observé que les méga-dunes se forment lorsque le fond du cours d’eau présente des hétérogénéités, caractérisé par une distribution granulométrique étendue. La formation de rides est contrôlée par la taille des grains du cours d’eau et la formation de dunes par la profondeur d’eau, elle est donc limitée par la surface libre. Fernandez et al. (2006) ont montré que la fusion des formes de lit qui a lieu lors de crue, induit un état de lit superposé. Ceci provoque une série de changements au niveau de l’écoulement, des contraintes de Reynolds plus élevées, traduisant des écoulements turbulents caractérisés par des échanges dans la lame d’eau de façon latérale, longitudinale et verticale. Ainsi la superposition d’une forme plus petite sur la face aval d’une forme plus grande modifie la structure de l’écoulement sur la face amont par l’interaction des deux couches limites associées à la séparation de l’écoulement .
Certains auteurs ont étudié les écoulements en lien avec la formation des structures sédimentaires et des superpositions (Venditti & Church, 2005 ; Wilbers & Ten Brinke, 2003 ; Ten Brinke et al., 1999). Il apparait que le contrôle de la migration des formes du lit est déterminé par la superposition de plus petites formes sur celles-ci (Venditti & Church, 2005). D’autre part la migration des dunes n’est pas uniquement influencée par les structures sédimentaires superposées sur celles-ci mais aussi par les phénomènes de crues. A la fin d’une crue, les conditions d’écoulement sur les dunes longues et de faibles hauteurs deviennent favorables pour les dunes plus courtes et plus raides superposées aux dunes longues. Les longues dunes primaires sont entièrement recouvertes de ces dunes secondaires plus petites. Une fois cela fait, les dunes secondaires en migration représentent toute l’activité de transport de la charge de fond et sont les seules formes qui influencent la rugosité hydraulique (Wilbers & Ten Brinke, 2003). Il semblerait ainsi que la crue soit un facteur influençant l’apparition de petites formes superposées. Cette idée est aussi développée chez Ten Brinke et al. (1999), en effet les variations de débit jouent un rôle dans les hauteurs des grandes et petites dunes. Une réponse s’établie entre le débit et la présence des dunes. Ainsi des structures se superposent lors des épisodes de crues et plus le phénomène de crue est important plus la taille des formes crées sera grande (Ten Brinke et al., 1999).
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Table des matières
I. Introduction
problématique
II. L’étude des interactions en fonction du domaine d’étude
II.1 En domaine fluvial
Sédimentologie
Hydraulique
Morphodynamique
II.2 En domaine marin
Zone de déferlement et de haut-fond
Etude dans une Baie
Zone deltaïque et estuariennes
III. Le protocole d’étude des interactions
III.1 Etude en modèle physique
III.2 Etude en modèle numérique
III.3 Observations de terrain
III.4 Etude théorique
IV. Les différents types d’interaction observées
IV.1 Interactions entre des structures sédimentaires d’échelle similaire
IV.2 Interactions entre des structures sédimentaires d’échelle différente
Rides – dunes et petites dunes – dunes
Interactions méga-rides – dunes et ride – méga-rides
Interactions avec les barres
V. Synthèse
VI. Conclusion
VII. Bibliographie
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