L’ETUDE DE L’ENONCIATION ET DE LA MODALISATION Dans JOHNNY CHIEN MECHANT

Enonciation

1) Action d’énoncer ; terme qu’on emploie pour énoncer quelque chose.
2) Manière de s’énoncer, quant à l’expression et quant au ton de la voix.
3) C’est l’acte individuel de production, d’utilisation de la langue dans un contexte déterminé, ayant pour résultat l’énoncé.
Selon le Dictionnaire de Linguistique de Jean DUBOIS : L’énonciation est l’acte individuel de production, dans son contexte déterminé, ayant pour résultat un énoncé ; les deux termes s’opposent comme la fabrication s’oppose à l’objet fabriqué. L’énonciation est l’acte individuel d’utilisation de la langue, alors que l’énoncé est le résultat de cet acte, c’est l’acte de création du sujet parlant devenu alors égal au sujet d’énonciation. Il s’agit essentiellement, pour les initiateurs de ce concept (R. JAKOBSON, E. BENVENISTE, J.L. AUSTIN, S.R. SEARLE), de dégager les éléments que, dans les énoncés, peuvent être considérés comme les traits ou les empreintes des procès d’énonciation qui les ont produits, puis de dégager leur fonctionnement, leur organisation, leur interaction. C’est le cas principalement de nombreuses unités qui, tout en appartenant à la langue, ne prennent leur sens qu’à l’occasion d’un acte d’énonciation particulier et qu’on a appelées embrayeur (je, ici, maintenant) qui s’articulent autour du lieu et du moment de l’énonciation. Ainsi, l’énonciation est constituée par l’ensemble des facteurs et des actes qui provoquent la production d’un énoncé. On peut aussi opposer des positions respectives du locuteur et de l’allocutaire (par exemple, par la différence entre la demande et l’offre), du degré d’engagement pris (la différence entre la simple expression d’intention et la promesse), la différence dans le contenu proportionnel ( la différence entre les prédictions et les constats , de la manière dont la proposition se relie aux intérêts du locuteur et de l’allocutaire (la différence entre crier et gémir, entre mettre en garde et informer), des états psychologiques exprimés, des différentes manières par lesquelles un énoncé se relie au reste de la conversation ( la différence entre la simple réponse à la réplique précédente et l’objection à ce qui vient d’être dit).

Modalisation

Selon le dictionnaire de linguistique de Jean DUBOIS :
– Dans la problématique de l’énonciation (acte de production de texte par le sujet parlant), la modalisation définit la marque donnée par le sujet à son énoncé, c’est la composante du procès d’énonciation permettant d’estimer le degré d’adhésion du locuteur à son énoncé. L’évocation des différents concepts utilisés dans l’analyse de l’énonciation permet de mieux comprendre la notion de modalisation.
– Le concept de distance envisage le rapport entre sujet et monde par l’intermédiaire de l’énoncé : dans le cas de distance maximale, le sujet considère son énoncé comme partie intégrante d’un monde distinct de lui-même ; la distance minimale est le fait de l’énoncé totalement assumé par le locuteur.
– Le concept de transparence étudie la présence ou l’effacement du sujet d’énonciation : le discours pédagogique (livre scolaire) aura une transparence maximale, la poésie lyrique une opacité maximale.
– le concept de tension enregistre les rapports entre locuteur et interlocuteur par le moyen du texte : être et avoir marqueront la tension maximale, les auxiliaires vouloir, pouvoir, etc. Le concept de modalisation sert à l’analyse des moyens utilisés pour traduire le procès d’énonciation. L’adhésion du locuteur à son discours est ressentie par l’interlocuteur tantôt comme souligné, tantôt comme allant de soi, tantôt en baisse ; la tension rend compte de l’opposition entre l’orateur qui agit sur son public et celui qui « ignore son public ». La modalisation permet de rendre compte de la perception par l’interlocuteur du fait que l’orateur croit, tient à ce qu’il dit. La modalisation de l’énoncé est donc du domaine du contenu : une ou plusieurs phrases, un « état » du discours sont ressentis comme comportant un certain degré d’adhésion du sujet à son discours. Le paradoxe de l’énonciation reste que les degrés continus de la modalisation se réalisent dans le discours par des éléments discrets. U. WEINREICH exploite ainsi les travaux de R. JAKOBSON sur les embrayeurs ; toutefois, le recours au modèle génératif lui permet d’inclure dans les considérations des structures profondes : les transformations peuvent être modalisatrices. Ainsi, à côté d’adverbes modalisateurs (peut-être, bien sûr, etc.), du jeu des niveaux de langue (présence inattendue d’un mot argotique dans un discours soutenu), certaines transformations comme l’emphase, certaines constructions comme l’insertion de l’énoncé rapporté constituent aussi des marques de modalisation.

Présentation de l’œuvre

   L’histoire se passe en 2002 au Congo. Emmanuel DONGALA met en scène deux adolescents à l’enfance abrégée : JOHNNY et LAOKOLE qui vivent dans le chaos de la guerre. Ils sont tous congolais et pourtant tous les opposent. JOHNNY est un enfant-soldat orphelin de seize ans habité par le chien méchant qu’il veut devenir. Il est cruel et cynique, un dévot à la gâchette facile. Il viole, vole, pille, assassine tout ce qui croise sa route. Il appartient à une milice nommée les mata-mata (donne la mort), menée par le général Giap, formée par les Dogo-Mayi et qui combattent les tchétchènes (milice des Mayi-Dogo) qui sont au pouvoir. Il sème la mort et la désolation. Il voit la guerre comme un jeu. Face à lui, il y a LAOKOLE, une adolescente de seize ans qui vit avec sa mère et son frère, FOFO. Elle est brillante, courageuse et amoureuse de la vie. Elle rêve de devenir un jour ingénieur ou astronaute. Mais elle voit son avenir personnel brisé et sa famille détruite. Poussant sa mère aux jambes fracturées dans une brouette branlante, elle s’efforce de fuir sa ville livrée aux milices pour rejoindre les ambassades et les O.N.G afin de s’inventer l’avenir radieux que sa scolarité lui promettait grâce à ses bons résultats en cours. Le premier est funeste, symbole d’une Afrique psychologiquement déséquilibrée et violente, déchirée par les luttes des factions pour le pouvoir tandis que la seconde incarne l’espoir d’un monde meilleur. De chapitre en chapitre se déroulent successivement les aventures des deux adolescents victimes ou faiseurs de guerre. Chacun raconte son histoire. Parfois ils se croisent et racontent les mêmes faits, par exemple le meurtre d’un enfant, d’un homme fuyant avec un cochon sur le porte bagage de sa bicyclette, mais avec une vérité différente. Le ton de JOHNNY est naïf, pourtant il se pense être un intellectuel : « mais comme j’étais intellectuel je savais ce qu’étais l’O.N. U, ouais j’avais entendu parler de cette organisation et de ses soldats. Ces derniers étaient neutres ; ils ne faisaient pas la guerre ; mais ils fuyaient et vous laisser tout seuls dans votre merde. » (P193) « J’avais atteint le CM1 tout de même ! Alors mon intelligence a tout de suite rencontré l’intelligence de ce docteur en quelques chose (…) » (P134) Mais le personnage, parfois, dit juste. Il est drôle et attachant même s’il est tueur. Il comprend les choses à sa manière et cela est parfois en décalage avec la réalité. Quant à LAOKOLE, elle est très attachante, intelligente, beaucoup d’émotions se dégagent de ce personnage. « L’humanité était tombée bien bas. De toute façon, il fallait être bien naïve pour croire que le monde était bon, que le monde était beau. » (P237) Elle est gentille. Elle s’est portée volontaire pour sauver un enfant anonyme des mains de JOHNNY, qu’elle baptisera plus tard, KIESSE. C’est un roman à deux voix dans les dérives des folies inhumaines, des silences et des intérêts complices avec ça et là quelques lueurs d’espoir. Dans ce roman, DONGALA raconte la guerre civile qui a secoué le Congo à la suite de la proclamation des résultats des élections qui opposaient le M.L.D.P (mouvement populaire pour la libération démocratique) qui représente le parti de l’opposition c’est-à-dire celui des Dogo-Mayi au M.P.L.T.P (mouvement populaire pour la libération totale du peuple) qui représente le parti des Mayi-Dogo qui sont au pouvoir. Les « deux leaders politiques se battaient pour le pouvoir après des élections que l’un disait truquées et que l’autre disait démocratiques et transparentes. » (P 127) Sous les fenêtres des ambassades, des O.N.G, du H.C.R et sous les yeux des télévisions occidentales, des adolescents abreuvés d’images hollywoodiennes et d’informations travesties jouent à la guerre. Les chefs de guerre très à cheval sur leur code d’honneur, se font appeler RAMBO ou GIAP et s’entretuent pour une poste radio, une corbeille de fruits ou une parole de travers. Les saigneurs de guerre ou les coupeurs de route utilisent les enfants-soldats le plus souvent masculin mais parfois féminin comme des auxiliaires ou des boys à tout faire. L’auteur nous montre avec force la barbarie humaine dont le peuple congolais est victime.

Le sujet de l’énonciation ou l’énonciateur

   Distinguer locuteur et énonciateur se heurte à de nombreuses difficultés. Le fondateur de l’approche de l’énonciation utilise le terme de locuteur davantage que celui d’énonciateur lequel, lorsqu’il est employé, renvoie à une activité de locution. De plus, cette disjonction n’est pas présente dans nombreux travaux de premier plan, à l’instar de ceux d’Authier REVUZ (1995), qui utilise le terme énonciateur. Enfin, quand la distinction existe, elle ne fait pas consensus chez les énonciativistes, par exemple chez DESCLES (1976) et DUCROT (1980, 1984). Aussi ne fait-elle guère sens pour les linguistes étrangers (aux problématiques énonciatives). Comme CULIOLI, DESCLES distingue locuteur et énonciateur. Il le fait dès 1976, soit un peu avant DUCROT (1980, 1984), et en un sens opposé, marqué par la réflexion sur les performatifs (Ross, Banfield). « Derrière tout énonciateur, il y a toujours un énonciateur et des Coénonciateurs. Le locuteur est toujours sous la dépendance d’un énonciateur qui le met en scène comme auteur d’une énonciation rapportée. Dans une énonciation directe, énonciateur et locuteur coïncident, mais de nombreux discours sont construits sur des relations complexes entre énonciateur, locuteur et Colocuteur. » (DESCLES, GUENTCHEVA, 2000 : 79). L’énonciateur est celui qui est responsable du discours tenu. Certains linguistes préfèrent réserver le terme énonciateur à celui qui produit l’énoncé et appeler asserteur, celui qui prend en charge l’énoncé. Olivier SOUTET définit l’énonciateur comme « celui qui assume la responsabilité. Dans le cas du message assertif, cette responsabilité consiste à garantir la conformité du message et la réalité qu’il vise à décrire ». « Le locuteur, quant à lui, est celui qui, matériellement, émet le message : le mot locuteur convient particulièrement bien dans le cas du message oral, en cas de message écrit, on peut parler de scripteur ». Le locuteur est celui qui produit l’énoncé. Le locuteur est l’instance première qui produit matériellement les énoncés. C’est pourquoi la notion de locuteur peut être rapprochée de celle de voix. Elle est proférée (ou écrite) par un locuteur (ou scripteur), dotée d’une matérialité, subordonnée à l’expérience sensorielle. L’énonciateur est l’instance qui se positionne par rapport aux objets du discours auxquels il réfère, et, ce faisant, qui les prend en charge. La notion d’énonciateur correspond à une position (énonciative) qu’adopte le locuteur, dans son discours, pour envisager les faits, les notions, sous tel ou tel point de vue pour son compte ou pour le compte des autres. De la sorte, l’énonciateur est défini comme l’instance aux points de vue. La disjonction locuteur/énonciateur rend compte des possibilités que le locuteur se donne, en tant qu’énonciateur, pour tourner autour des objets du discours, pour envisager les faits, les mots et les discours, les notions, les situations, les évènements, les phénomènes de tel ou tel point de vue, dans le présent, le passé ou le futur, par rapport à soi ou par rapport au point de vue d’autrui.

Les modalités d’énonciation

   Elles renvoient au sujet de l’énonciation en marquant l’attitude énonciative de celui-ci dans sa relation avec son allocutaire. Autrement dit, c’est l’attitude du sujet parlant vis-à-vis de son allocutaire ; sa manière de parler. Partant de cette approche qui prend en compte la subjectivité du locuteur, on peut distinguer diverses modalités formulées au moyen de types de phrases différents, suivant que le locuteur manifeste une attitude d’assertion, d’interrogation, d’injonction (ordre), exprime un sentiment vif (exclamation), etc. Ces modalités peuvent porter sur un même fait : un même contenu (par exemple le fait que l’interlocuteur écoute) peut être affirmé (tu écoutes), nié (tu n’écoutes pas), ordonné (écoutes !), mis en question (est-ce que tu écoutes ?), etc. ; le contenu prépositionnel est le même, alors que la modalité varie. Les modalités d’énonciation sont attachées aux marqueurs syntaxiques, typographiques et prosodiques nécessaires à la réalisation des types de phrases assertive, interrogative et injonctive. Chaque acte d’énonciation implique obligatoirement la sélection de l’une d’elles à l’exclusion des autres. On peut donc les qualifier d’obligatoires et d’exclusives. Le linguiste Émile Benveniste précise leur rôle : « ces trois modalités ne font que refléter les trois comportements fondamentaux de l’homme parlant et agissant par le discours sur son interlocuteur : il veut lui transmettre un élément de connaissance, ou obtenir de lui une information, ou lui intimer un ordre ». La notion de type de phrase, qui a été polarisée en grammaire générative, se situe à la rencontre entre l’analyse syntaxique de la phrase et l’approche énonciative des énoncés. L’approche énonciative repose sur la notion d’actes de langage établie par AUSTIN. On distingue au moins trois types d’actes de langage fondamentaux reliés à des phrases : asserter (ou constater), questionner et ordonner. Chaque acte est associé par convention à une structure de phrase déterminée, au moyen de laquelle il est directement effectué, ce qui isole trois types de phrases fondamentaux : assertif, interrogatif et impératif. L’approche syntaxique, développée par la grammaire générative et transformationnelle de CHMOSKY, apporte une caractérisation morphologique et syntaxique des types de phrases, répartis en deux niveaux hiérarchisés :
-les types obligatoires, sont des types fondamentaux : assertif (ou déclaratif), interrogatif, impératif, mais aussi exclamatif.
-les types facultatifs : passif, négatif, emphatique impersonnel.
Cette distinction générative n’est pas totalement satisfaisante. Pour dépasser la simple distinction entre types obligatoires et types facultatifs, on adoptera un classement plus adéquat :
 Les types énonciatifs regroupent les types obligatoires de base, associés aux trois actes de langage fondamentaux : assertif, interrogatif, impératif.
 Le type logique négatif/positif se fonde sur une valeur sémantique reconnue par la logique classique et impliquée par les trois types énonciatifs.
 Les types de réarrangement commutatif : passif, emphase et impersonnel, qui opposent des formes marquées à des formes neutres, constituent réagencement de la structure syntaxique à des fins commutatives (thématisation, focalisation, etc.)
 Le type exclamatif ne manifeste que la subjectivité du locuteur et réalise la fonction expressive du langage.

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE I : CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIE
I-1 Problématique
I-1-1 Contexte et justification
I-1-2 Questions de recherche
I-1-3 Objectifs
I-1-4 Hypothèses
I-2 Revue de la littérature
I-3 Cadre théorique et conceptuel
I-3-1 Cadre théorique
I-3-2 Clarification des concepts clés
I-4 Constitution du corpus
I-4-1 Présentation de l’auteur
I-4-2 Présentation de l’œuvre
I-4-3 Collecte des données
CHAPITRE II : LES MARQUES DE L’ENONCIATION
II-1 Etude de quelques notions liées à l’énonciation
II-1-1 Discours et Récit
II-1-2 Les facteurs de la communication
II-1-3 Les fonctions du langage
II-2 Précisions terminologiques
II-2-1 Le sujet de l’énonciation ou l’énonciateur
II-2-2 Le destinataire et l’allocutaire
II-3 Les types d’énonciation
II-3-1 Les énoncés embrayés
II-3-1-1 Les embrayeurs et les déictiques
II-3-1-1-1 Les embrayeurs subjectifs
II-3-1-1-1-1 Les pronoms personnels et les possessifs
II-3-1-1-1-1-1 Les pronoms personnels
II-3-1-1-1-1-2 Les possessifs
II-3-1-1-1-1-3 Les termes affectifs
II-3-1-1-2 Les embrayeurs temporels
II-3-1-1-2-1 Les temps verbaux
II-3-1-1-2-2 Les circonstants temporels
II-3-1-1-3 Les embrayeurs spatiaux
II-3-1-1-4 Les adverbes d’énonciation
II-3-2 Les énoncés non embrayés
CHAPITRE III : LA TYPOLOGIE DES MODALITES
III-1 Les modalités d’énonciation
III-2 La modalité d’énoncé
III-3 Les différents types de modalités (BALLY et CHARAUDEAU)
III-3-1 La modalité allocutive
III-3-1-1 Définition
III-3-1-2 Les sous-modalités
III-3-2 La modalité élocutive
III-3-2-1 Définition
III-3-2-2 Les sous modalités
III-3-3 La modalité délocutive
III-4 Les différentes valeurs modales
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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