L’étude cyto-chimique du liquide céphalo-rachidien

L’étude cyto-chimique du liquide céphalo-rachidien

L’INFECTION MATERNO-FOETALE :

L’infection bactérienne materno-foetale (IMF) est une infection bactérienne du nouveauné, résultant d’une transmission verticale materno-foetale qui se produit en période périnatale (un peu avant ou au moment de la naissance) et qui peut s’exprimer dès les premières minutes, dans les premiers jours, ou parfois même dans les premières semaines de la vie postnatale [7,8]. Contrairement aux publications anglo-saxonnes, qui restreignent l’IMF aux cas de sepsis documentés par la positivité d’un prélèvement central, hémoculture ou culture du liquide céphalorachidien (LCR), les auteurs Français incluent dans l’IMF des infections, symptomatiques ou non, seulement documentées par des anomalies biologiques, en attribuant une grande valeur aux tests inflammatoires et en particulier à l’heure actuelle au dosage de la protéine C réactive (CRP) [9]. Cette entité exclut les infections virales et parasitaires qui, même si elles partagent les mêmes mécanismes de contamination, demeurent des infections spécifiques.

Epidémiologie : L’incidence des infections néonatales bactériennes primitives varie de 0,4 à 1% des naissances. Elle est plus élevée chez le prématuré, atteignant 2,2 à 6 %, ainsi que chez les nouveau-nés de faible poids de naissance. Cette incidence est variable en fonction des pays et de la prise en compte ou non de l’infection probable, non confirmée par un prélèvement bactériologique [7,10]. D’après l’organisation mondiale de la santé (OMS), 5 millions d’enfants décèdent chaque année d’infection néonatale, 98 % de ces décès surviennent dans les pays en voie de développement [6]. L’incidence des infections materno-foetales est estimée de 0,6 à 1/mille naissances, ces infections sont responsables de 12% de la mortalité périnatale, de 9% de la mortalité néonatale précoce et de 12% de la mortalité néonatale tardive [7, 11,12].

Facteurs de risque : Le développement des défenses immunitaires chez le nouveau-né est marqué par une double immaturité, humorale et cellulaire : Les tests de la fonction lymphocytaire T au niveau du sang ombilical sont normaux. Par contre, la production de lymphotoxine, de facteurs inhibiteurs de migration (MIF), d’acide adénosine monophosphorique (AMP) cyclique ainsi que la phagocytose sont déficients. L’immunité humorale est dépendante de l’état immunitaire maternel. En effet, si le foetus est capable de produire des immunoglobulines (Ig) dés la 13ème semaine à des taux faibles, ses IgG présents à la naissance proviennent essentiellement de la mère, par voie transplacentaire. Cependant, les IgM et IgA ne traversent pas la barrière placentaire, ainsi leur présence témoigne d’une origine foetale. En fin, le taux du complément est bas ; 50% pour CH50 chez le nouveau né à terme [7]. L’absence d’anticorps spécifique chez la mère, donc chez le nouveau né, contre un germe pathogène, en particulier le streptocoque B, favorise la survenue d’une infection chez le nouveau né colonisé. Ces anticorps spécifiques sont capable d’induire une immunité passive chez le foetus, à partir d’un certains taux protecteur variable en fonction des sérotypes. L’immunité cellulaire du nouveau né, quant à elle, ne possède pas encore de mémoire de réponse aux stimuli antigéniques bactériens [7,13].

Le Streptocoque du groupe B :

En Europe comme en Amérique du Nord, l’infection à streptocoque B reste la principale cause d’infection bactérienne du nouveau-né. La fréquence rapportée par différents auteurs se situe entre 3 et 5 % des naissances vivantes [15]. Globalement, toutes localisations confondues, l’infection à streptocoque B représente 30 à 40 % des infections bactériennes néonatales. Si la prédominance du streptocoque B fait l’unanimité des travaux occidentaux, elle n’est pas rapportée par les auteurs maghrébins et d’Amérique Latine dont les études rapportent la prédominance des bacilles Gram négatif (BGN) et la relative rareté du streptocoque B dans les infections néonatales bactériennes dans leurs milieux [16]. Au Maroc, selon une étude rétrospective menée en 1996 à l’hôpital d’enfant de Casablanca, les germes de l’infection bactérienne néonatale sont dominée par les bacilles Gram négatifs, le streptocoque B ne représente que 6,9% seulement des confirmations bactériologique [16]. Il existe plusieurs sérotypes dont les plus fréquents sont I, II et III ; les sérotypes IV et V sont rares. Certains streptocoques demeurent non groupables. Le portage chronique asymptomatique est le principal réservoir. Le site primaire des germes est digestif avec propagation secondaire vers le vagin. La bactérie est retrouvée dans 10% à 30% des prélèvements génitaux chez la femme [17].

Escherichia coli [7, 8, 26,27] : L’incidence des infections néonatale à Escerichia coli est de 0,6% des naissances, cette incidence semble en augmentation selon plusieurs études récentes. Parmi de nombreux sérotype capsulaires, le sérotype K1 est le plus redoutable, il est responsable de 60 à 85% des méningites néonatales et septicémies à Escherichia coli. Ce germes est normalement présent dans le tube digestif, la transmission verticale est habituelle, en raison d’un portage vaginal maternelle élevé au troisième trimestre [26], le rapport colonisation/infection est semblable à celui du streptocoque B : 1/40, la colonisation est secondaire à une contamination du liquide amniotique, les germes traversent les membranes sans les rompre. La colonisation hématogène est exceptionnelle, elle survient au décours d’une bactériémie compliquant une pyélonéphrite maternelle.

Les signes cliniques ne sont pas spécifiques mais l’atteinte respiratoire est fréquente, ce germe est responsable de 65% des méningites tardives et 90% de infections urinaires observées dans les 3ème et 4ème semaines de vie. La résistance de ce germe à l’ampicilline est variable selon les pays et les régions, ce qui implique l’utilisation d’une céphalosporine lors du traitement. Dans l’étude de Schuchat portant sur 52 406 naissances entre 1995 et 1996 [27], l’ Escherichia coli est résistant à l’ampicilline dans 69 % des cas, dans l’étude tourangelle portant sur 19 mois (1985-1987) et 2 622 naissances vivantes, seulement trois infections à Escherichia coli sont dénombrées [28], ce taux faible peut-être expliqué par l’application d’un traitement prophylactique des nouveau-nés prématurés colonisés à Escherichia coli K1. Cependant certaines études récentes, impliquent la prophylaxie per-partum par l’ampicilline comme facteur de risque pour l’émergence de souche résistante à l’ampicilline en particulier chez le prématuré [29].

Listeria monocytogenes:

La listériose est fréquente en Europe et en Amérique du Nord, elle arrive au 3ème rang (7%) des infections néonatales après le streptocoque B et l’Escherichia coli [30]. Au Maghreb, son incidence réelle est très faible ; seuls cinq enfants atteints de listériose néonatale documentée ont été hospitalisés au service des soins intensifs pédiatriques et de néonatologie de I ‘hôpital d’enfants de Casablanca entre janvier 1990 et décembre l998 [31]. Il s’agit d’un bacille Gram positif ubiquitaire dont les sérotypes Ia et IVb sont les plus fréquents, l’alimentation est le facteur majeure de contamination, la plus part des cas décrits, sont associés à une consommation de lait, pâtes et fromages. Le mode de contamination est habituellement hématogène à la suite d’une bactériémie chez la mère, avec colonisation du placenta et formation de multiple abcès [8]. Les signes cliniques, chez la mère, sont souvent inapparents, un tableau pseudo-grippal avec fièvre, frisson, myalgies et céphalées peuvent précédés l’accouchement de 2 à 14 jours ou plus, une rechute fébrile avec bactériémie est souvent observée au cours de l’accouchement. La transmission matero-foetale est souvent hématogène, plus rarement amniotique. Le taux de transmission est de 54% ; beaucoup plus élevé que celui du streptocoque B, estimé entre 20 et 25% [32]. Dans les formes précoces, le germe est toujours isolé dans le liquide gastrique, le méconium et sur la peau, l’examen bactériologique du placenta est performant. Le traitement repose sur l’association ampicilline et aminoside, les céphalosporines sont inefficaces, la ponction lombaire est indispensable. La prévention de la Listériose chez les femmes enceinte est un élément déterminant de la prévention des infections néonatales.

Validité de ces critères [54] : Selon l’étude prospective de Blond M et coll réalisée à Tours, en 1992, dans le but d’étudier la validité des critères anamnestiques d’IMF, qui correspondent à la liste du tableau V, en dehors du portage vaginal du SGB qui n’était alors pas systématiquement dépisté, Ces critères permettent de reconnaître un risque infectieux lors de l’accouchement ; ils sont considérés globalement comme un test de dépistage. Les résultats globaux indiquent une sensibilité de 79,5 % et une valeur prédictive négative de 97,6 %. Dans notre série, les signes anamnestiques retrouvés sont : l’infection uro-génitale maternelle probable dans 144 cas (72%), la rupture prématuré des membrane (RPM) dans 44 cas (22%), le travail prolongé dans 18 cas (9%), le liquide amniotique (LA) fétide dans 10 cas (5%) et la fièvre non chiffrée lors de l’accouchement dans 8 cas (4%). Ces éléments appartiennent aux critères majeurs, sauf pour le liquide amniotique fétide. Dans une série Marocaine rétrospective de Casablanca [16], l’infection uro-génitale maternelle est présente chez 44,7% des malades, le travail prolongé dans 44,5% et la rupture prématuré des membranes dans 29,6%. Dans une autre série prospective casablancaise [5], l’infection uro-génitale est retrouvée dans 51%, la rupture prématurée des membranes dans 34%, la fièvre maternelle dans 11% des cas et le liquide amniotique fétide dans 32%. Dans une étude prospective Françaises [53], le liquide amniotique teinté ou méconial est retrouvé dans 71% des cas et le portage maternelle du streptocoque B dans 64%, ce dernier n’est pas recherché dans notre série ainsi que les autres séries nationales.

Les anomalie de l’hémogramme [56] :

La séquence chronologique classique de la réponse leucocytaire à l’infection est la suivante : neutropénie, myélémie, polynucléose neutrophile. La neutropénie est un phénomène assez précoce de durée généralement courte, elle est liée au trapping des polynucléaires neutrophiles sur le lieu de l’infection. L’apparition de formes jeunes de leucocytes dans la circulation sanguine traduit la forte stimulation médullaire, elle précède et accompagne l’hyperleucocytose. Ainsi, la constatation d’une neutropénie ou d’une hyperleucocytose et/ou d’une myélémie sont des marqueurs d’infection qui ont été étudiés au cours de la période néonatale au début des années 1970. Cependant, ces marqueurs ont une fiabilité très limitée pour différentes raisons ; I1 existe une évolutivité physiologique du nombre des polynucléaires neutrophiles et plus généralement des leucocytes au cours des premiers jours de vie, ainsi qu’une variabilité liée à l’âge gestationnel, Ainsi, les taux de leucocytes du nouveau-né doivent être interprétés en fonction de l’âge gestationnel et de l’âge postnatal, selon des normes qui ont été établies [56].

Cette variabilité physiologique associée à la variabilité liée au stade évolutif de l’infection rend difficile l’interprétation des chiffres des polynucléaires neutrophiles à cet âge de la vie et ce, d’autant plus que l’hémolyse, une toxémie maternelle, une fièvre maternelle, une souffrance foetale aigue peuvent modifier le taux de leucocytes circulant. La myélémie, présence de formes jeunes de la lignée blanche (myélocytes, promyélocytes, métamyélocytes, « bands cells ») dans la circulation sanguine, existe normalement chez le nouveau-né. La valeur seuil de normalité se situe entre 5 et 10 % du taux des leucocytes circulants, selon que l’on souhaite une meilleure sensibilité ou spécificité [56,57]. Certains auteurs [56,57] se sont intéressés au rapport neutrophile immatures/neutrophiles totaux avec une valeur seuil de 20 %. Quoi qu’il en soit, la myélémie est un phénomène fugace que l’on peut ne pas mettre en évidence si le prélèvement sanguin est fait trop tôt ou trop tard par rapport au moment du début du phénomène infectieux.

Dans notre série, l’hémogramme est réalisé chez tous les malades de l’étude, des anomalies sont retrouvées chez 51,5% des malades ; une hyperleucocytose est retrouvée chez 18,5% des malades, la thrombopénie chez 10%, la leucopénie chez 9,5%, l’anémie est présente dans 8 % des cas. A noter que la myélémie n’a pas été recherchée dans notre étude. Magny et coll [56], ont analysé les résultats de 1683 hémogrammes de nouveau-nés suspect d’infection néonatale ; des anomalies sont répertoriées dans 53,1% des cas, la myélémie est retrouvées chez 21,7 des malades. Benomar et coll [16], rapportent des anomalies de l’hémogramme chez 58% de la population de l’étude ; la leucopénie est retrouvée chez 27% des malades, la thrombopénie chez 6,8% et l’anémie chez 31% des nouveau-nés.

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Table des matières

INTRODUCTION
PATIENTS ET METHODES
RESULTATS
I- Epidémiologie
1- répartition selon le sexe
2- répartition selon l’âge d’admission
3- répartition selon le suivi des grossesses et le lieu d’accouchement
4- répartition selon le mois d’hospitalisation
5-répartition selon le terme et le poids de naissance
6-répartition selon le mode de l’accouchement
7-répartition selon le délai d’admission
8-anamnèse infectieuse
II- Présentation clinique
1- signes respiratoires
2- signes neurologique
3- signes cutanés
4- autres signes
III- Bilan para-clinique
1- chimie et cytologie
1.1- L’hémogramme
1.2- Le dosage de la protéine C-réactive
1.3- L’étude cyto-chimique du liquide céphalo-rachidien
2- bactériologie
2.1- l’hémoculture
2.2- l’étude bactériologique du liquide céphalo-rachidien
2.3- les prélèvements périphériques
2.4- antibiogramme
IV- Diagnostic
V- Prise en charge
1- Antibiothérapie
2- thérapeutiques associées
VI- Evolution
1- favorable
2- complications
3- mortalité
DISCUSSION
Chapitre 1 : Généralités sur l’infection néonatale
I- l’infection materno-fotale
1-Définition
2- Epidémiologie
3- Physiopathologie
3.1- facteurs de risque
3.2- les modes de contamination
3.3- bactéries de l’infection néonatale
a- le streptocoque B
b- autres streptocoque
c- Escherichia coli
d- Listeria monocytogenes
e- les Haemophilus
f- les Staphylocoques
g- les anaérobies
3.4- pronostic
II- l’infection post-natale
1- les infections nosocomiales
1.1- définition et généralités
1.2- physiopathologie
1.3- épidémiologie des infections nosocomiales
1.4- facteurs de risque
1.5- conséquences des infections nosocomiales
2- les infections primitives tardives
2.1- infection localisée à germe « materno-foetale
2.2- infection tardive d’acquisition par-natale
2.3- infection tardive à germe exogène
Chapitre 2 : diagnostic des infections néonatales
I- Données anamnestiques
II- Les signes cliniques
III- Les signes biologiques
1- les anomalies de l’hémogramme
2- le dosage de la protéine C-réactive
3- le fibrinogène
4- l’orosomucoide
5- la pro calcitonine
6- Les cytokines
7-autres marqueurs biologiques
IV- Le diagnostic bactériologique
1- Les prélèvements périphériques
2- L’hémoculture
3- Examen bactériologique du LCR
4- Frottis placentaire et culture du placenta
5- Analyse bactériologique des urines
6- Antigènes solubles bactériens et ADN universel
V- Le bilan radiologique
Chapitre 3 : traitement et évolution des infections néonatale
I- Traitement des infections néonatales
1- Antibiothérapie
1-1- Antibiothérapie de l’infection materno-foetale
1-2- Principaux antibiotiques de l’infection materno-foetale
1-3- Antibiothérapie de l’infection néonatale tardive
1-4- Antibiothérapie de l’infection nosocomiale
1-5 – Adaptation et efficacité de l’antibiothérapie
2- Le traitement symptomatique
3- Prévention de l’infection néonatale
II- Evolution et mortalité
Conclusion
Annexe
Résumés
Bibliographie

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