L’étrangeté de l’environnement et de l’entourage des protagonistes

Le conte initiatique comme vecteur de la représentation de l’enfant

L’adaptation au cinéma des trois œuvres originales de ce corpus implique des modifications au niveau de l’histoire, en ajoutant ou en enlevant des personnages, mais aussi en ajustant les procédés narratifs mis en œuvre. Henry Selick construit trois histoires en les adaptant de sorte que l’animation en stop motion trouve son utilité mais soit aussi porteuse de sens. De ce fait, Coraline et James et la pêche géante sont les deux films qui sont les plus particulièrement concernés en raison de la particularité de la 3D dans le premier cas, et de la combinaison de la prise de vues réelles avec l’animation dans le second cas. L’adaptation du poème de Tim Burton relève d’un travail collaboratif entre l’auteur, le réalisateur, le compositeur et les équipes techniques, ce qui explique que ce film se prête moins facilement à l’analyse de l’imaginaire enfantin du fait d’une adaptation plus logique et avec moins de contraintes. Les modifications apportées aux diégèses et à leur représentation transforment l’aventure imaginaire de Coraline et James, ce qui va créer une disparité avec le voyage formateur de l’œuvre originale. Henry Selick développe l’image d’un imaginaire décrit par un autre auteur, et y instille sa propre vision de l’enfance. Pour ce faire, le réalisateur met en scène la perception étrange et décalée de cet autre monde par le biais d’éléments techniques, numériques et visuels. En ce sens, son travail apporte une nouvelle manière de voir l’univers imaginaire de James et Coraline par rapport aux œuvres littéraires dont ils proviennent.
Afin de retranscrire le plus fidèlement le sentiment de malaise des deux protagonistes, Henry Selick adapte les interactions, les décors et la manière dont ils sont perçus en fonction du médium qu’il utilise. En l’occurrence, dans le cas de Coraline, l’auteur initial établit un lien entre les pensées de la jeune fille et son lecteur, par le biais d’une description très précise de ce qu’elle voit, mais aussi de ce qu’elle ressent grâce à une voix intérieure. Or, afin d’éviter de représenter de très longs monologues conduits par Coraline, Henry Selick construit le personnage de Wybie, ou Patbie, en français pour verbaliser l’étrangeté de l’environnement que la jeune fille découvre :
Pour Coraline, [Neil Gaiman] avait une confiance aveugle en Henry Selick : “Quand j’ai lu sa première version du scénario, je lui ai dit qu’il était encore trop près du roman, qu’il pouvait prendre plus de liberté avec mon texte. ”Ainsi est apparu Wybie […] “Dans le livre, Coraline est toujours seule et on pénètre dans ses pensées. Pour rendre ça au cinéma, il aurait fallu qu’elle se parle à elle-même ou qu’on utilise une narration. Il était plus efficace de lui donner un interlocuteur.
De ce fait, Patbie devient le miroir de la pensée de Coraline, il est le vecteur de ses interrogations vis-à-vis de ce qui l’entoure ou l’inquiète notamment dans l’autre monde. Quelques jours avant l’interview de Neil Gaiman, Henry Selick était interrogé sur le déroulé de leur collaboration. Sa perception rejoint celle de l’auteur original, puisqu’il évoque une liberté sans faille pour construire son histoire : « Mais globalement il [Neil Gaiman] partait du principe que “J’ai mon livre, tu as ton film. Voyons voir ce que tu peux faire ”». De cette collaboration fructueuse est né un univers coloré, dans lequel les personnages secondaires représentent la première liberté narrative prise par le réalisateur. Ainsi, les personnages de Gaiman sont introvertis, portent des vêtements sombres, gardent leurs vies personnelles secrètes et ne parlent que pour exprimer leurs pensées à voix haute. Pour démontrer les modifications apportées par Henry Selick sur les textes originaux, il est important de noter qu’il entre en opposition avec la caractérisation sombre voire dangereuse portée par les personnages secondaires de Gaiman. En effet, le réalisateur joue sur les sensations, les ressentis et non sur des représentations plus fines des personnages. C’est pourquoi les personnages secondaires de Gaiman et de Selick sont mis en parallèle afin de mettre en lumière le fait que le réalisateur ne joue pas sur la peur qu’ils suscitent mais plutôt sur l’inquiétude qu’ils génèrent, à l’appui de détails insolites qui les caractérisent. Àl’inverse de Gaiman, les personnages d’Henry Selick sont extravagants et expressifs, renforçant l’étrangeté de ces personnages symbolisée, par exemple, par les parents de Coraline, qui sont nettement plus sobres en comparaison. Continuellement en mouvement, Monsieur Bobinsky ne cesse de démontrer ses capacités physiques en quittant et en entrant dans le cadre de manière aléatoire. Ses figures de gymnastique sont d’autant plus impressionnantes que les proportions de son corps ne sont pas en adéquation avec son agilité puisque ses très longues et fines jambes supportent un buste proéminent. De leur côté, les sœurs Spink et Forcible sont disproportionnées puisqu’elles sont engoncées dans des corsets censés mettre en valeur des poitrines généreuses. Le fait de créer des personnages à l’allure insolite permet à Henry Selick de faciliter l’entrée dans la diégèse décalée de Coraline par rapport au monde réel. Ce décalage est également présent dans la figure du Chat, qui est un référentiel de sagesse dans les deux versions de l’histoire. Toutefois, dans le livre, l’animal s’adonne joyeusement à ses instincts de chasse alors que le personnage de cinéma s’y résout uniquement pour aider la jeune fille dans sa quête. Cette idée de présenter un film avec une histoire plus douce et moins effrayante permet à Henry Selick de construire un imaginaire coloré, dans lequel les décors d’animation déclenchent l’étrangeté de l’histoire. Ainsi, l’utilisation de l’animation en stop motion trouve son sens dans la formulation d’un univers idéalisé selon Coraline, d’un monde dans lequel elle retourne à un âge où elle est accompagnée et tutorée. Toutefois, ce sont ces mêmes conditions qui vont l’amener à reconsidérer l’image du monde réel dont elle provient puisqu’ayant grandi, elle ne supporte plus l’infantilisation et souhaite retrouver les libertés qui lui ont été progressivement accordées au cours de son évolution et de son développement.

Une boucle labyrinthique des trois âges de l’enfance

D’un point de vue chronologique, ce corpus commence avec L’Étrange Noël de monsieur Jack dans lequel un adulte se comporte de manière égoïste, tel un enfant. C’est pourquoi ce chapitre associe les idées de cycle et de boucle, puisque les comportements des trois protagonistes de ce corpus se rejoignent dans leur manière de voir le monde malgré le fait qu’ils n’aient pas le même âge. Toutefois, cette progression d’âge n’est pas en corrélation avec les dates de production de ces trois films. D’un point de vue physiologique, l’enfance commence avec James, se prolonge dans l’adolescence avec Coraline et se termine avec le retour en enfance et le comportement d’enfant-roi de Jack Skellington. Avant d’entamer l’analyse de l’introspection de ces personnages, il est important de noter que ces trois films s’inscrivent dans une vision de l’enfance récente, tant en ce qui concerne l’aspect mental des personnages que leur perception du monde. Ainsi, Daniel Dagenais, professeur de sociologie explique dans sa théorie des transformations familiales modernes que l’enfant n’est plus considéré comme un enfant dès qu’il peut s’occuper par lui-même : « De la même manière, l’éducation impose aux enfants de finir par ne plus se comporter comme des enfants ». Dans ces trois films, Henry Selick démontre le cycle de construction identitaire qui fait passer de l’enfance à l’âge adulte avec la nostalgie du passé. C’est ainsi que James prend conscience de son existence d’enfant, Coraline dissocie le monde de l’enfance et le monde des adultes, enfin Jack retourne en enfance pour le plaisir de revivre les sensations de liberté et l’insouciance d’une vie sans responsabilité. Par quels procédés narratifs Henry Selick démontre-t-il l’évolution des protagonistes entre le début et la fin de chacun des films ?

La place de l’imagination dans la construction de l’enfant

L’âge de James Trotter n’est pas défini précisément au début de James et la pêche géante. Néanmoins, le jeune garçon doit être âgé de quatre ou cinq ans puisque son souvenir le plus cher est associé à son quatrième anniversaire. Àcet âge, l’enfant construit à la fois son rapport aux autres, avec de nombreux nouveaux contacts sociaux, à l’entrée dans le système scolaire, mais aussi la définition de sa propre personnalité résultant de ces différentes interactions. Corinne Dudoit, psychologue clinicienne, dépeint ces deux éléments en les raccordant à la théorie du développement de son confrère, Henri Wallon :
En psychologie du développement, Wallon, psychologue, situe entre trois et six ans le stade du personnalisme. Ce stade se situe à la charnière de deux phases importantes de la construction de la personnalité : entre la construction et l’achèvement de la personne. Il marque l’avènement de la conscience de soi à travers la conscience personnelle et la conscience sociale. Durant ce stade, trois périodes vont se succéder : la période d’opposition, la période de séduction et la période d’imitation.
Au cours de son aventure, James va s’opposer à ses tantes, avant de séduire les insectes, par ses initiatives, et terminer par imiter sa réalité initiale avant d’en créer une nouvelle version dans le monde fantastique. Andrée Archambault et Michel Venet rappellent que les simulacres de réalité mis en scène par les enfants dans leurs aventures imaginaires ne sont que des imitations de la réalité, à l’exception près qu’elles ne sont pas soumises aux règles habituelles de la société.
À partir de ce moment, l’intérêt de Coraline ne porte plus du tout sur son environnement et les éventuelles explorations qui peuvent être réalisées, mais plutôt sur les nouvelles aventures qu’elle va pouvoir vivre dans l’autre monde. Toutefois, lorsqu’elle y retourne, les activités proposées par l’Autre Mère ne suffisent pas pour l’inciter à rester dans cet univers. Les spectacles ne l’attirent plus, et elle souhaite même quitter cet univers à tout prix en s’endormant pour se réveiller comme la première fois, dans son monde d’origine. Le fait que tous les éléments de cet autre monde se transforment en lieux abandonnés comme le théâtre des deux sœurs ou encore le grenier de monsieur Bobinsky, qui sont devenus, eux aussi, des personnages vieillissants, comme dépourvus de vie, s’assimile à la vétusté d’un parc d’attraction désaffecté. C’est dans ce lieu inhospitalier que Coraline franchit une étape de sa transition entre l’adolescence et l’âge adulte. En commençant le film, la jeune fille était animée par la nostalgie de l’attention qui lui était accordée durant son enfance. Toutefois, en parcourant l’autre monde dans lequel elle est étouffée par le maternage de l’Autre Mère, cela déclenche chez elle une volonté d’autonomie, notamment en détruisant le charme dont était pourvu cet univers enfantin. Par cette transformation de la perception de l’autre monde, Coraline découvre le monde des adultes sous un jour plus attirant, notamment lorsque ses parents sont libérés des griffes de l’Autre Mère. Au moment de se coucher, et pour la première fois du film, ses parents l’accompagnent pour la border et lui souhaiter une bonne nuit. À cette occasion, il est possible d’apercevoir une peluche représentant une pieuvre, dotée d’un bouton à la place de l’œil, comme une subtile référence au monde de l’enfance qui continue d’exister au cours de sa construction identitaire. Au moment de quitter la pièce, la mère de Coraline lui glisse un paquet contenant les gants colorés qu’elle demandait au début de l’histoire. Ces deux derniers éléments semblent constituer la démarche d’évolution et de construction de la jeune fille. Pour grandir, elle ne doit plus vivre dans la nostalgie de l’enfance, mais ne doit pas non plus éradiquer des éléments caractérisant l’immaturité. Tout est une question d’équilibre, afin notamment de ne pas s’enfermer dans un extrême tel que l’autre monde pour l’enfance et le monde originel de Coraline au début du film pour le monde des adultes. L’évolution de la perception du monde de Jack est également marquée par cette idée d’équilibrer la maturité et l’immaturité inhérente aux comportements égoïstes qu’il adopte en kidnappant le Père Noël pour prendre sa place.

L’« enfant-roi » ou l’incarnation de l’adulte immature

Contrairement à James et Coraline, Jack est adulte, bien qu’il se comporte comme un enfant capricieux. Emmanuel De Becker et Isabelle Lescalier-Grosjean, psychologues pédiatriques, théorisent cette idée « d’enfant-roi » comme un positionnement développemental complexe : « Mais cette métaphore pointe malgré tout un paradoxe dans son essence. Autant un enfant renvoie à la vulnérabilité et au cheminement développemental étape par étape, stade après stade, autant un roi incarne la force et, d’une certaine façon, la consécration d’un aboutissement à un sommet … ». Toutefois, en incarnant l’expression « enfant-roi », le protagoniste porte la double casquette d’un enfant mécontent de sa situation, assoiffé de découvertes, tandis qu’il dispose des capacités humaines et logistiques d’accomplir tous les projets qu’il désire réaliser. Quels sont les éléments qui amorcent la transition du statut d’enfant capricieux à celui d’un personnage plus responsable, à l’image du comportement qu’il adoptait au début du film ?
Avant le kidnapping du Père Noël et l’organisation de la fausse fête de Noël, Jack Skellington était déjà adulé par les habitants de sa ville et reconnu pour son travail rigoureux.
En effet, conforté dans sa position de roi d’Halloween, Jack n’a plus goût à son quotidien, délaissant par la même occasion ses prérogatives auprès de ses concitoyens. De Becker et Lescalier-Grosjean confirment l’idée qu’une position royale n’est pas seulement attribuée en référence aux compétences du personnage mais aussi au regard de l’implication de l’entourage du protagoniste : « Affirmer qu’un individu est roi, c’est ipso facto lui attribuer, certes une valeur exceptionnelle, mais aussi une place particulière dans un système relationnel. Si l’enfant est un jour roi, cela n’est réalisable qu’avec l’implication de son entourage et surtout l’image que lui renvoie celui-ci ». Du fait que Jack ne perçoit qu’une image très positive de ses capacités, il ne rencontre pas d’obstacles quand il décide de s’approprier les codes de Noël pour réaliser sa propre fête, créant ainsi un rebond de curiosité et de création dans son quotidien. De plus, cette décision n’est pas uniquement motivée par l’excitation que la fête de Noël suscite chez lui, mais également par la volonté de prendre la place du Père Noël. Pour la sociologue Marie-José Chombart de Lauwe, l’identification à autrui est une manière de ressentir les émotions et la perception du monde de quelqu’un d’autre. Ainsi en prenant la place du Père Noël, Jack imite le comportement d’un personnage qui apporte de la joie aux enfants, processus contraire à son travail habituel : « S’identifier, c’est se penser, se vouloir comme identique et dans ce but, essayer de se pénétrer des sentiments du modèle, d’adopter les mêmes comportements, voire les mêmes attributs.
L’identification peut être assez diffuse et consister seulement en une imitation de certains des comportements du héros ». En embrassant les missions du Père Noël, le personnage de Jack s’inscrit véritablement dans un monde de l’enfance, dans lequel l’amusement, l’émerveillement et la joie sont les maîtres. Sa volonté d’identification est poussée au point où il se déguise comme le Père Noël, à l’image d’un enfant durant un bal costumé. C’est finalement l’ambition de Jack, qu’il n’affirme pas du tout la volonté de prendre la place du Père Noël pour toujours, mais uniquement pour cette soirée-ci, notamment dans le but de mettre à l’épreuve ses capacités. En ce sens, la fête de Noël qu’il prépare est une échappatoire temporaire à son quotidien, au cours de laquelle ses habitudes prennent le pas sur ses ambitions positives. Comme l’évoque Patrick Brion, historien du cinéma, Jack Skellington se transforme en une version maléfique du Père Noël : « Jack Skellington offre des cadeaux monstrueux et apparaît ainsi comme le versant maléfique et négatif de l’inévitable Père Noël ». Dans une volonté d’insouciance éternelle, le comportement de Jack s’inscrit dans une image de l’enfance qui n’est pas soumise au temps. Ainsi, sa puérilité fait de lui un personnage en pleine transition, qui ne s’inscrit ni véritablement dans l’enfance puisque c’est un adulte, ni vraiment comme un adulte puisqu’il agit égoïstement. Fabien Lacouture, historien de l’art et chercheur, décrit la problématique d’une aventure entre l’âge adulte et l’enfance, puisque l’un des deux finit par prendre le pas sur l’autre.
En l’occurrence, l’âge adulte triomphe dans l’histoire de L’Étrange Noël de monsieur Jack puisque le protagoniste est déchu de sa position d’imitation du Père Noël par les obus des humains.
Pour construire sa version de Noël, Jack laisse libre court à sa créativité pour reproduire les sensations d’émerveillement et de joie qu’il a pu exprimer dans la ville de Noël.
Ainsi, les cadeaux que Jack et les habitants conçoivent ne correspondent pas aux présents classiques du Père Noël, inscrivant la fête de Jack dans une version alternative de la réalité : « Les fantaisies de l’enfant ne sont pas le résultat d’une activité mentale supérieure, mais le fait d’une non-conformité à la réalité ». C’est d’ailleurs cette non-conformité à la réalité de la tournée de Noël qui amène les humains à chasser et détruire le traîneau de Jack, pour mettre fin au règne de la terreur qu’il a, inconsciemment, entamé durant sa tournée. Lorsqu’il se fait toucher par l’un des obus, Jack n’est pas énervé, il semble même triste d’être arrêté dans sa lancée. Dans l’explosion de son traîneau, il souhaite un « joyeux Noël et une bonne nuit à vous tous ». Cette phrase trahit l’innocence du comportement du squelette, qui ne perçoit pas, ou du moins n’exprime pas de malveillance envers les humains à ce stade de la narration.
De plus, il finit par s’incriminer dans le désastre de cette fête : « « Tout est ma faute, Quelle folie m’aveuglait ? ». Allongé de tout son long sur une bible de pierre tenue par un ange dans le cimetière des humains, Jack agit de manière théâtrale au sein des lambeaux de son costume de Noël. Ses orbites sont repliées vers le centre, et sa bouche grande ouverte avec les commissures légèrement tombantes, accentuant de fait le sentiment de peine évoqué dans sa chanson. Le piano est lent, les paroles sont étirées comme pour appuyer son sentiment de détresse. La séquence prend doucement de la vitesse avec la suite de la chanson puisque le corps de Jack n’est plus seulement allongé, son buste reprend forme et revient à la verticale, ses bras et ses pieds s’écartent de son corps comme pour tenter de garder sa présence à l’écran. Le dernier retournement de situation de la séquence, et plus généralement du film, se situe à la moitié de la chanson : « Quand je pense que je voulais en fait, leur offrir la plus belle fête, voilà à quoi j’ai droit pour toute récompense ». Les plans jusqu’ici assez lents, suivant les mouvements de Jack, sont plus larges, mouvants, pour garder les déplacements de Jack dans le cadre. Ce qui était jusqu’à présent une remise en question se transforme en un discours de fierté. Même si ses actions n’ont pas eu les effets escomptés, les enfants n’ayant pas eu des étoiles dans les yeux en voyant leurs cadeaux mais bien l’inverse, Jack est heureux de ce qu’il a créé et de l’excitation que cela lui a suscité. Comme un enfant, il déclame sa joie d’avoir accompli ses désirs, en sautant des pierres tombales au banc du cimetière. De nombreux plans de cette séquence font écho à « La complainte de Jack » gardant la lune en arrière-plan, qui est ici voilée par des nuages noirs, une évolution du décor par rapport à l’immense pleine lune omniprésente au début du film. A l’inverse de la première complainte dans laquelle il exprimait le malheur de son quotidien et la nostalgie d’une autre époque, il est ici très vigoureux, arborant le même visage carnassier ponctué dans ce cas d’un sourire, satisfait du chemin qu’il a parcouru. Malgré la violence de sa chute et l’arrêt brutal de sa fête de Noël, Jack ne regrette toujours pas le mal qu’il a causé aux enfants et aux familles qu’il a visités. Comme déconnecté de la réalité, Jack s’inscrit dans un comportement enfantin, fier d’avoir réalisé son envie, sans pour autant mettre en perspective ses actes et les conséquences sur autrui qui en découlent. Jack est également cadré en contre-plongée lorsqu’il arrache son costume de Noël, laissant ainsi le personnage du roi d’Halloween reprendre possession à la fois du cadre, mais aussi de son rôle de protagoniste de l’histoire.

L’étrangeté de l’environnement et de l’entourage des protagonistes

Pour continuer la caractérisation des personnages principaux, il est important de présenter les qualités des personnages qui les entourent. Ainsi, chaque protagoniste de ce corpus est accompagné par une figure spirituelle, incarnée par des animaux pour James et Coraline et par des objets animés pour Jack. L’enjeu de ce chapitre est de définir la perception du monde à travers l’analyse des personnages secondaires et de l’impact de leur présence sur l’aventure des héros, mais aussi d’analyser en quoi le décor renforce cette idée d’étrangeté de l’univers filmique. La manière dont le spectateur est introduit dans la diégèse selon trois paliers, la colorimétrie des mondes, comme l’obsolescence de l’univers imaginaire, participent à créer un décalage entre la perception du spectateur et la représentation des protagonistes.

Les personnages secondaires comme guides spirituels

L’apparence physique et les comportements des personnages sont des éléments primordiaux à la compréhension des enjeux de l’histoire de chacun des trois films du corpus.
De plus, les interactions des protagonistes avec les autres personnages sont également très importantes pour comprendre la place attribuée à chacun dans l’espace diégétique. Pour ce faire, Henry Selick construit l’image de l’enfant, et par extension son imaginaire, ces éléments habiteront ses personnages. C’est ainsi que James est aiguillé et rassuré par les insectes, tandis que Coraline est conseillée par un personnage à l’apparence de chat, alors que Jack est encadré par la sagesse protectrice de Sally, opposée à la malveillance d’Oogie Boogie. Tous ces personnages secondaires apportent de la consistance à l’aventure des protagonistes en leur fournissant des informations ou, au contraire, en générant des obstacles sur leur chemin.
Ainsi, par ces figures de sagesse, ou de déraison dans le cas de Jack, ils se positionnent en « garde-fou » de l’imaginaire enfantin illustré par Henry Selick. En quoi ces personnages secondaires contribuent-ils à l’évolution de la perception du monde des trois figures enfantines de ce corpus ?

La famille inter-espèces de James et des insectes

Dès le début et jusqu’à la fin du film, James fréquente successivement trois foyers différents. En premier lieu, entouré de ses parents aimants au sein d’une famille équilibrée,puis, isolé dans la maison de ses tantes qui lui sont hostiles et, enfin, en compagnie de ses camarades insectes au sein du noyau de la pêche géante. Dans chaque environnement, James vit des moments de stabilité tantôt heureux, tantôt tristes mais tous sont importants dans son évolution. Ainsi, lorsqu’il rencontre des personnages d’insectes anthropomorphiques, cette transformation de figures adultes en personnages fantastiques à l’échelle de James facilite l’entrée en contact avec cette communauté mais aussi l’identification des jeunes spectateurs à ce monde imaginaire. Par le biais de ces compagnons étranges, Henry Selick ancre la narration de James et la pêche géante dans un environnement décalé, hors de la réalité. Ainsi, en déployant tous les éléments propres à un foyer sain, Henry Selick dépeint de nombreuses figures d’insectes, ayant chacune sa propre histoire et symbolique. De la Coccinelle synonyme de chance, à la Sauterelle représentant la réincarnation en passant par l’Araignée caractérisant la patience, le réalisateur mélange des insectes prédateurs et des proies, créant ainsi un écosystème au sein de la pêche. En quoi les caractéristiques de ces personnages secondaires participent-elles à l’évolution et l’affirmation de James au fil de l’histoire ?

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Table des matières
Remerciements
Résumé
Introduction
PARTIE 1 : La représentation mentale et physique de l’enfant chez Selick
Chapitre 1 : La définition de la figure enfantine selon Henry Selick
a. La nature changeante des figures enfantines selickiennes
b. La part du monstre dans la caractérisation des figures enfantines selickiennes
c. Le conte initiatique comme vecteur de la représentation de l’enfant
Chapitre 2 : Une boucle labyrinthique des trois âges de l’enfance
a. La place de l’imagination dans la construction de l’enfant
b. La crise d’adolescence de Coraline
c. L’« enfant-roi » ou l’incarnation de l’adulte immature
PARTIE 2 : L’étrangeté de l’environnement et de l’entourage des protagonistes
Chapitre 3 : Les personnages secondaires comme guides spirituels
a. La famille inter-espèces de James et des insectes
b. Le Chat comme passeur et les quatre figures maternelles
c. Sally et Oogie Boogie comme piliers de l’évolution de Jack Skellington
Chapitre 4 : La relation de l’enfant aux deux mondes, originel et fantasmé
a. L’espace exogène comme entrée dans la fiction primaire et secondaire
b. Deux mondes complémentaires ? Une approche colorimétrique de la mise en scène d’Henry Selick
c. L’imaginaire, support d’évasion, d’expérimentation et de reconstruction
Chapitre 5 : Figurer la psychologie enfantine par l’animation : un travail référencé
a. La féérie disneyenne opposée à la monstruosité selickienne
b. Selick : héritier de Jan Svankmajer ?
c. L’importance de Lewis Carroll dans la figuration de l’imaginaire enfantin
Chapitre 6 : L’animation comme représentation psychologique de l’enfance
a. L’imaginaire musical enfantin, étrange, décalé et hors du temps
b. Le joujou du riche ?
c. De la figurine animée au jouet d’enfant
Conclusion
Bibliographie

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